Illuminisme

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L'illuminisme désigne un courant à la fois philosophique et religieux qui eut son apogée avec les théosophes du XVIIIe siècle.

Sommaire

[modifier] Origines historiques

Le courant philosophique et religieux de l'Illuminisme a pour enseignement fondamental l'idée d'une inspiration directement insufflée par Dieu, selon une vision spiritualiste de l'Homme et de l'Univers. Il trouve ses sources parmi les théosophes les plus divers : Plotin et les néoplatoniciens, les gnostiques, les kabbalistes juifs et chrétiens, et certains penseurs de la Renaissance, tels Paracelse (1493-1541), médecin, naturaliste, théologien, Valentin Weigel, fondateur d'une secte mystique allemande, Maître Eckhart, Tauler et Nicolas de Cues; mais enfin, les Illuministes se réclament surtout de Jakob Böhme (1575-1624), auteur du Mysterium Magnum, dont les thèmes seront exploités par les Illuministes qui presque tous se réclament de son parrainage, et aussi des révélations reçues par Swedenborg (1688-1772), naturaliste, philosophe et théosophe suédois qui proposa un système religieux fondé sur une interprétation allégorique des Écritures (chrétiennes), selon des instructions qu'il aurait reçues de Dieu.

[modifier] Principes de l'Illuminisme

L'originalité de l'Illuminisme réside dans la façon dont il considère le problème de Dieu et celui de ses rapports avec l'Homme. Elle apparaît encore plus manifestement dans l'importance donnée à la dimension intérieure, au souci de se dégager de l'histoire, du temps et de l'espace. Ainsi, l'Illuminisme s'oppose fondamentalement aux méthodes d'autorité de la scolastique : chaque personne en effet est appelée à tenir le rôle que lui dicte sa vocation singulière. Chaque être possède sa propre lumière et ses propres ténèbres. Si la vérité est une, elle ne peut cependant être reçue que selon la capacité de chacun.

Les Illuministes s'intéressent volontiers aux sciences métapsychiques et à l'occultisme. Si les uns demeurent fidèles à l'enseignement des Églises officielles alors que d'autres s'en détachent de manière hétérodoxe, considérant les dogmes comme de simples revêtements de la vérité profonde impossible à exprimer, ils se rattachent le plus souvent à la Franc-Maçonnerie et à la Théosophie, et se situent dans la perspective eschatologique de la préparation du retour du Christ.

Affirmant la primauté de l'esprit sur la lettre comme sur la matière, manifestation corrompue de la "pure lumière invisible", l'Illuminisme souligne la nécessité d'une conversion intérieure, qui rétablira l'Homme dans sa dignité première, son origine divine. C'est seulement alors qu'il pourra assumer sa véritable vocation dans un monde dont, en vertu de l'équivalence du microcosme et du macrocosme, il est personnellement responsable; il le rendra à sa splendeur première, éclipsée par la chute de l'Homme dans la matière.

[modifier] Deux théoriciens du XVIIIème siècle : Don Martinès de Pasqually et Louis-Claude de Saint-Martin

L'illuminisme, qui a longtemps cheminé en marge des Églises officielles, va connaître à la fin du XVIIIe siècle un véritable âge d'or. Il sera représenté notamment par Don Martinès de Pasqually et Louis-Claude de Saint-Martin.

[modifier] La réintégration selon Pasqually

Don Martinès de Pasqually, né à Grenoble vers 1710 de parents juifs espagnols convertis, fut théosophe et fondateur de la secte maçonnique des chevaliers Elus-Coëns de l'Univers, lesquels prétendaient entrer en communication directe avec des esprits angéliques. Martinès de Pasqually, qui signait également J. de Latour de La Case Martinès de Pasqually, passa sa vie à enseigner dans les Loges, sous forme de rites maçonniques supérieurs, un système religieux auquel il donnait le nom de Rite des Élus Coëns, c'est-à-dire des "Prêtres-Élus" (Coën, en hébreu, signifie "prêtre"). Seuls les maçons possédant le grade d'Élus pouvaient entrer dans ce rite. Pasqualis parcourut dans le secret une partie de la France, le sud-est et le Midi principalement. En 1770, le Rite des Elus-Coëns avait des Temples à Bordeaux, Montpellier, Avignon, Foix, Libourne, La Rochelle, Versailles, Metz et Paris. Un autre allait s'ouvrir à Lyon, grâce à l'activité de Jean-Baptiste Willermoz, qui devait être le centre le plus actif du rite de Pasqually : l'École de Lyon.

Pasqually rédigea un traité réservé aux Elus-Coëns, qu'il n'acheva pas : un Traité de la Réintégration des êtres. Dans ce manuscrit, Pasqually propose une interprétation kabbalistique de la Bible, ainsi aux Philosophes il oppose l'idéalisation de la vie, et une transformation morale et spirituelle de l'homme. Il existe dans tout être humain une "part divine" qu'il faut réveiller. Dans cet état retrouvé l'homme réconcilié peut "entrer en relation avec les êtres invisibles, ceux que les Églises appellent les anges et de parvenir ainsi, non seulement à la réintégration personnelle de l'opérateur, mais encore à celle de tous les disciples de bonne volonté". Il s'agit là d'une métamorphose de l'homme pour le régénérer, le réintégrer peu à peu dans son état primitif d'avant la chute. Il y avait cependant nécessité d'une découverte progressive de cette perfection, une nécessité d'étudier les secrets de la nature, l'harmonie spirituelle du cosmos, la haute chimie, la magie, la Kabbale, la Gnose.

[modifier] Un continuateur inspiré, Saint-Martin

Né à Amboise en 1743, issu de la petite noblesse, Louis-Claude de Saint-Martin était sous-lieutenant à Bordeaux quand il rencontra Martinez Pasqualis. Admis dans le groupe des Elus-Coëns, Saint-Martin était par ailleurs très influencé par les idées de Swedenborg. Ayant publié en 1775 son premier livre, Des erreurs et de la vérité, il vint à Paris, où il fit figure de philosophe inconnu, égaré dans le grand monde mais choyé par lui. Après plusieurs voyages en France, en Angleterre et en Italie, Saint-Martin s'établit à Strasbourg, où il découvrit l'œuvre de Jakob Böhme, qui influa sur son évolution et qu'il traduisit en partie. Il traversa indemne la période révolutionnaire, voyant en elle le "châtiment nécessaire", infligé par la Providence à la monarchie et au christianisme déchus, d'où devait naître la véritable "théologie divine, naturelle et spirituelle". Saint-Martin mourut en 1803 à Aulnay-sous-Bois, près de Paris.

Son œuvre est jalonnée par trois ouvrages essentiels : Des erreurs et de la vérité, ou les Hommes "rappelés" au principe universel de la science (1775), L'homme de désir (1790) et Le ministère de l'homme-esprit (1802), sorte de testament spirituel. Partant de la constatation de la misère de la créature séparée de Dieu, Saint-Martin affirme que, même déchu, l'homme n'a pu tout à fait oublié sa dignité première en tant que clef de voûte de la Création et responsable de l'harmonie universelle. Il doit donc viser à sa propre régénération par lui-même, avec l'aide du Christ à la fois homme et Dieu; elle entraînera celle des autres hommes, et également celle du monde tout entier. En effet, pour Saint-Martin, l'homme joue un rôle essentiel dans le plan divin. Il est par lui-même capable de collaborer avec le Créateur, et de transfigurer sa propre nature. Les martinistes admettaient donc la chute des anges, le péché originel, le Verbe réparateur, tout en restant plus ou moins proche des dogmes de l'Église. Et, au centre de la pensée de Saint-Martin, une idée fondamentale : la créature est au Verbe, le Verbe est à Dieu, tout est image. La vérité, qui est spiritualisme pur, tend à retrouver l'unité, le Verbe, dont l'homme, quoiqu'il soit déchu, a une connaissance intime.

[modifier] Bibliographie

  • Les Sources Occultes Du Romantisme ; Illuminisme Theosophie 1770-1820, Auguste Viatte, Albin Michel, Collection : Bibliotheque L'Evolution De L'Humanite, parution : 16/05/2001, ISBN : 222612571X
  • Le Bernois Friedrich Herbort et l'ésotérisme chrétien en Suisse romantique, Jacques Fabry, Ed. Peter Lang, 1983
  • Le théosophe de Francfort Johann Friedrich von Meyer (1772-1849) et l'ésotérisme en Allemagne au XIXe siècle, Jacques Fabry, Ed. Peter Lang, 1989
  • Johann Heinrich Jung-Stilling (1740-1817), Esotérisme chrétien et prophétisme apocalyptique, de Jacques Fabry, Ed. Peter Lang, 207 p., 2003, Etude sur l'une des figures les plus importantes de l'illuminisme en Allemagne.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

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