Abou Issa

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Abou Issa (également connu sous les noms d'Ovadia,Ishaq ibn Ya'qoub al-Isfahani ou Issac ibn Jacob al-Isfahani) était un prophète juif autoproclamé. Il vécut aux alentours du VIIIe siècle en Perse.

Il est l'initiateur de la première secte juive connue depuis la destruction du Second Temple de Jérusalem, meneur d'une révolte et premier d'une lignée de prétendants juifs à la messianité dans la Perse du VIIIe siècle.

Sommaire

[modifier] Problèmes de datation

La datation précise de la vie et des faits d'Abou Issa est sujet à débat. Les deux principales sources d'information sur lui sont Yaaqov Al-Qirqissani (Xe siècle), un historien karaïte, et Shahrastani (XIIe siècle), auteur d'un guide assez complet sur les sectes juives au cours des âges.

Qirqisani le situe au temps du calife omeyyade Abd al-Malik (685 - 705) tandis que selon Sharastani, il se serait rebellé au cours du règne de Marwan II (744 - 750).

Qirqissani a pour argument qu'afin d'apparaître comme le Messie, Abou Issa dut se soulever lors de grands troubles politiques pouvant évoquer la bataille de Gog et Magog, ce qui coïnciderait avec les affrontements des Omeyyades avec les Byzantins; d'autre part, il le place assez tôt pour influencer le karaïsme ou au moins l'ananisme. En effet, Anan ben David, fondateur du second mouvement et fédérateur du premier, aurait repris certaines de ses ordonnances.

Quant à Shahrastani, s'il le situe à la fin du règne des Omeyyades, c'est parce qu'il s'agit d'un moment crucial de l'histoire de l'islam[1][2].

Les deux hypothèses étant plausibles, et en l'absence de documentation issawite (ainsi qu'on appelait ses fidèles), la question n'est pas résolue.

Quoiqu'il en fût, Abou Issa ayant défié le calife, celui-ci dépêcha une armée. Lors de la bataille finale à Rai, Abou Issa fut tué (bien que l'un de ses disciples prétende qu'il se soit caché dans une grotte) et ses disciples furent défaits. À l'époque d'Al-Qirqissani (aux alentours de 930), la secte ne survivait qu'à Damas, ne comptant guère plus de 20 adeptes appelés Issuniens[3][4].

[modifier] Croyances et observances

D'après les deux sources citées plus haut, Abou Issa croyait qu'il était le dernier des cinq hérauts de Dieu annonçant l'arrivée imminente du messie afin de délivrer les Juifs des Gentils[4]. Il ne prétendit jamais lui-même être le Messie, mais ses fidèles étaient convaincus qu'il reviendrait après son trépas amenant la Fin des Temps. Il fit quelques altérations à l'ensemble des lois rabbiniques et ses fidèles devinrent ascétiques.

La croyance issawite la plus radicale était l'acceptation de Jésus et Mohammed comme véritables prophètes, mais seulement pour leurs propres peuples. Al-Qirqissani tend à penser qu'il ne s'agit que d'une manœuvre « diplomatique » : en effet, s'il n'affirmait pas croire aux prophètes post-bibliques, ses propres prétentions auraient été sans fondement[4]. Toutefois, Maqrizi, un historiographe égyptien du XIVe siècle, écrivait qu'Abou Issa les avait rencontrés au ciel.

Parmi les autres altérations rapportées par les sources :

  • il interdit la consommation de viande et de vin, moins en référence aux Rahabites qu'au Talmud (Baba Bathra 60b). Cette ordonnance se retrouve chez Anan ben David[4], sans qu'on sache ce qu'elle doit à Abou Issa ;
  • il introduisit 7 ou 10 prières par jour selon la source[5], sans doute en référence à Ps. 119:164[4] (en plus des 3 prières habituelles) ;
  • il interdit le divorce, même en cas d'adultère ;
  • il croyait que les rabbins étaient des prophètes.

[modifier] Relations avec les Rabbanites

Bien que ce groupe ait, selon Qirqissani, influencé le karaïsme, les rapports avec les Juifs que les karaïtes nommeraient rabbanites, c'est-à-dire attachés aux enseignements du Talmud, furent plutôt cordiaux[4].

En effet, malgré leurs pratiques et croyances divergentes, mais sûrement pas autant que ne le pensait Shahrastani, Abou Issa continuait à observer des ordonnances rabbiniques comme la Amida, la lecture du Shema et ses bénédictions. De plus, il suivait le même calendrier.

[modifier] Miracles

Abou Issa était crédité par ses disciples de deux grands miracles : le premier ressort de ses écrits (aujourd'hui perdus). En effet, il n'était connu de ses fidèles que comme un tailleur illettré avant d'être touché par la prophétie, suite à quoi il aurait selon eux produit des ouvrages reprenant les croyances précédemment évoquées et annoncé la venue des temps messianiques.

Le second miracle se serait produit au cours de la révolte même : alors qu'il défendait ses fidèles des assauts des troupes du calife derrière une ligne dessinée sur le sol avec une branche de myrte, il se serait élancé et aurait défait à lui seul le premier assaut des musulmans.

[modifier] Une connexion au chiisme ?

L'arrivée d'Abou Issa survient, quelle que soit la date, à un intéressant croisement de l'histoire des Juifs et des musulmans, lorsque des mouvements chiites radicaux se formèrent au sein de l'islam.

Le centre de ces mouvances étant l'Irak puis la Perse, il ne serait pas étonnant que d'autres ahl al-kitab (« Gens du Livre ») y vivant aient été influencés par ces mouvements.

Il y a d'une part une influence qui ne porte pas forcément sur la doctrine : certains Juifs virent en effet la montée des musulmans comme l'apocalypse préparant un nouvel âge, entrainant par la même l'éclosion de mouvements messianiques.

Mais on peut aussi noter des ressemblances entre l'enseignement d'Abou Issa (du moins tel qu'il est connu par ses commentateurs tardifs) et ceux du chiisme : l'idée du prophète illettré évoque celle de Mohammed qui reçut le Coran alors qu'il ne savait ni lire ni écrire, tandis que celle d'une « lignée de prophètes » annonçant le Messie présente de fortes similarités avec la lignée des Imams chiites et l'arrivée attendue du Mahdi.

Une dispute savante oppose les chercheurs quant à savoir si le chiisme influença Abou Issa ou si le chiisme, en se développant, aurait incorporé des éléments juifs[2][1].

[modifier] Références

  1. ab Israel Friedlaender Shiitic Elements in Jewish Sectarianism Jewish Quarterly Review Oct 1910
  2. ab Steven Wasserstrom Between Muslim and Jew Princeton University Press 1995
  3. Al-QIriqissani cité par Leon Nemoy, Karaite Anthology, ISBN 0-300-03929-8
  4. abcdef Abou Issa sur la Jewish Encyclopedia
  5. Israel Friedlaender Shiitic Elements in Jewish Sectarianism Jewish Quarterly Review Oct 1912

[modifier] Bibliographie de la Jewish Encyclopedia

  • Shahrastani, Kitab al-Milal, ed. Cureton, p. 168 (German transl. by Haarbrücker, i. 254);
  • Juda Hadassi, Eshkol ha-Kofer, § 97;
  • Maqrizi, in Sylvestre de Sacy, Chrestomathie Arabe, i. 307;
  • Qirqisani, in Harkavy, Le-Korot ha-Kittot be-Yisrael, in Graetz, Hist., Hebr. ed., iii. 501;
  • Harkavy, Likkoute Ḳadmoniyyot, ii. 193;
  • Bacher, in J. Q. R. vii. 700;
  • Weiss, Dor, iv. 62;
  • Pinsker, Likkoute Qadmoniyyot, i. 10, 16, 25, 26;
  • Grätz, Gesch. v. 156 et seq., 160, 403 et seq.

Cet article comprend du texte provenant de la Jewish Encyclopedia de 1901–1906, une publication tombée dans le domaine public.

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