Anselme de Cantorbéry

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Anselme de Cantorbéry
Anselme de Cantorbéry

Anselme de Cantorbéry ou saint Anselme est né à Aoste en 1033 (ou 1034 selon les sources) et mort le 21 avril 1109. Il est aussi parfois nommé Anselme d'Aoste, ou Anselme du Bec, selon qu'on veut insister sur son origine piémontaise ou sur sa longue présence en France. De fait, Aoste faisait partie intégrante du domaine de la Maison de Savoie constitué en 1032.

Il fut un des plus grands écrivains mystiques de l'Occident médiéval. Il fut canonisé en 1496 et proclamé Docteur de l'Église en 1720.

Sommaire

[modifier] Biographie

Il appartenait à la noblesse piémontaise et aurait été parent de la comtesse Mathilde de Toscane. Jeune, il connut une crise spirituelle assez aiguë et partit étudier la théologie en Normandie à l'Abbaye Notre-Dame du Bec, monastère bénédictin du Bec-Hellouin, dont il devint tout d'abord l'abbé en 1078, où il eut pour élève Anselme de Laon.

[modifier] Concile de Rockingham

Il devint archevêque de Cantorbéry en 1093. En février 1095, Anselme fut accusé par Guillaume de Saint-Calais d'avoir violé son vœu de fidélité au roi au Concile de Rockingham. Ce Concile fut appelé par le roi Guillaume II le Roux après qu'une dispute l'opposa à l'archevêque, le roi, voulait soumettre l'Église à son autorité, or Anselme voulait aller à Rome recevoir son pallium du pape Urbain II. Ce dernier était opposé à l'antipape Clément III, et le roi n'avait reconnu aucun des deux. Guillaume II le Roux accusa donc l'archevêque de vouloir s'emparer d'une prérogative royale, qui était de reconnaître un pape ou non. Anselme répliqua qu'il n'avait aucunement l'intention de renoncer à son allégeance à Urbain II. Le roi furieux protesta qu'Anselme plaçait sa loyauté au pape au-dessus de sa loyauté à son souverain. Anselme demanda donc un concile réunissant les évêques et abbés du royaume afin de décider s'il était possible pour lui de concilier allégeance au pape et au roi. En cas d'impossibilité, il quitterait le royaume jusqu'à ce que le roi reconnaisse Urbain II, car il n'était pas question pour lui de renoncer à son allégeance au vicaire de Rome[1]. Il fut forcé à l'exil par le roi.

Coloman Viola[2] note qu'il "refuse" d'envoyer des hommes du royaume d'Angleterre en Terre Sainte, tout en conseillant par ailleurs à son beau-frère et à ses neveux de participer à ce que l'on appellera plus tard la « croisade ».

Il composa un grand nombre d'ouvrages sur la théologie et la métaphysique, et eut une large influence sur la théologie et la philosophie de son époque. Son œuvre théologique (essentiellement le Proslogion et le Monologion) cherche à fonder rationnellement la foi chrétienne. Sa preuve ontologique la plus célèbre de l'existence de Dieu est : « Nous avons l'idée de l'Être parfait ; la perfection comporte l'existence ; donc l'Être parfait existe ». Il est l'auteur de plusieurs autres preuves de l'existence de Dieu, dont deux autres basées sur un fondement cosmologique et téléologique.

Il est fêté le 21 avril.

[modifier] Preuve ontologique de l'existence de Dieu

Dans le Proslogion, Anselme s'exprime ainsi :

«  Nous croyons que tu es quelque chose de tel que rien de plus grand ne puisse être pensé. Est ce qu'une telle nature n'existe pas, parce que l'insensé a dit en son cœur : Dieu n'existe pas? Mais du moins cet insensé, en entendant ce que je dis : quelque chose de tel que rien de plus grand ne puisse être pensé, comprend ce qu'il entend ; et ce qu'il comprend est dans son intelligence, même s'il ne comprend pas que cette chose existe. Autre chose est d'être dans l'intelligence, autre chose exister. [...] Et certes l'Être qui est tel que rien de plus grand ne puisse être pensé, ne peut être dans la seule intelligence ; même, en effet, s'il est dans la seule intelligence, on peut imaginer un être comme lui qui existe aussi dans la réalité et qui est donc plus grand que lui. Si donc il était dans la seule intelligence, l'être qui est tel que rien de plus grand ne puisse être pensé serait tel que quelque chose de plus grand pût être pensé »[3]

Cet argument consiste à considérer que l'existence est une grandeur : Dieu l'être qu'on peut concevoir de plus grand. Si un tel être n'existe que dans l'esprit de celui qui le pense, alors on peut toujours concevoir un être similaire qui aurait de surcroît la propriété d'exister. Un tel être serait donc « plus grand » que celui qui n'existe pas et est seulement imaginé. Dire que Dieu n'existe pas met donc la pensée en contradiction avec elle-même: s'il n'existe pas, ce qui est « tel que rien de plus grand ne puisse être pensé » est tel que quelque chose de plus grand peut être pensé.

Ce type d'argument qui consiste à considérer l'existence comme une propriété des objets sera par la suite très critiqué dans la philosophie contemporaine (Kant, Frege).

L'objectif d'une preuve rationnelle de l'existence de Dieu était notamment pour Anselme de réfuter le moine Gaunilon, qui considérait que l'existence de Dieu était indémontrable, ainsi que les incroyants (comme le montre la mention de « l'insensé » qui nie l'existence de Dieu). Si on suit la démarche anselmienne, il est en effet irrationnel de nier l'existence de Dieu, puisque ce serait soutenir une contradiction logique.

[modifier] Œuvres

  • De grammatica, un dialogue d'une grande rigueur logique.
  • Monologion de Divinitatis, un monologue sur l'eionssence de la divinité.
  • Proslogion seu Alloquium de Dei existentia (Discours sur l'existence de Dieu)
  • Apologétique, contre un détracteur de son argument ontologique en faveur de l'existence de Dieu.

[modifier] Citation

  • « Je ne cherche pas à comprendre afin de croire, mais je crois afin de comprendre. Car je crois ceci — à moins que je ne croie, je ne comprendrai pas. »

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes

  1. G. Bosanquet, voir section Sources.
  2. Saint Anselme, ses historiens et les théologiens ; critique de quelques vues récentes, à propos de Les Mutations socio-culturelles au tournant des xie-xiie siècles / Études anselmiennes, contenant les actes du colloque du Bec-Hellouin, 11-16 juillet 1982 ; sous la dir. de Raymonde Foreville page internet consultée le 27 avril 2005
  3. cité dans Émile Bréhier, Histoire de la philosophie, p. 507

[modifier] Sources

  • G. Bosanquet, Eadmer's History of Recent Events in England, Éd. Cresset Press, Londres, 1964, p. 53-77. [(en) lire extraits en ligne]

[modifier] Liens externes

[modifier] Bibliographie

  • Adolphe-André Porée, Saint Anselme à l'abbaye du Bec : 1060-1092, Bernay : imprimerie Vve. Alfred Lefèvre, 1880 en mode image sur Gallica
  • Jori, Alberto, Die Paradoxien des menschlichen Selbstbewusstseins und die notwendige Existenz Gottes - Zu 'Cogitatio' und 'Intellectus' im Streit zwischen Anselm und Gaunilo, in: C. Viola and J. Kormos (ed.), Rationality from Saint Augustine to Saint Anselm. Proceedings of the International Anselm Conference - Piliscsaba (Hungary) 20-23 June 2002 (Piliscsaba 2005), 197-210.
  • Proslogion



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