Miles Davis

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Miles Davis
Miles Davis au festival au Paléo, Juillet 1990.

Nom Miles Dewey Davis III
Naissance 26 mai 1926
Pays d’origine États-Unis États-Unis - Illinois
Décès 28 septembre 1991(âge 65)
Californie, États-Unis
Profession(s) Trompettiste
Compositeur
Genre(s) Jazz
Bebop
Cool jazz
Jazz modal
Jazz fusion
Instrument(s) The Green Trumpet, faite sur mesure.
Années actives 1944 - 1991
Site internet Site officiel

Entourage Miles Davis Quintet

Miles Dewey Davis III (26 mai 1926, Alton, Illinois - 28 septembre 1991, Santa Monica, Californie) est un compositeur et trompettiste de jazz américain.

Sommaire

[modifier] Une figure centrale du jazz

Miles Davis fut à la pointe de beaucoup d'évolutions dans le jazz et s'est particulièrement distingué par sa capacité à découvrir et à s'entourer de nouveaux talents.

Son jeu se caractérise par une grande sensibilité musicale et par une fragilité qu'il arrive à donner au son. Il a marqué l'histoire du jazz et de la musique du XXe siècle. Presque tous les grands noms du jazz des années 1950 à 1980 ont travaillé avec lui.

Les différentes formations de Miles Davis étaient comme des laboratoires aux seins desquels se sont révélés les talents de nouvelles générations et les nouveaux horizons de la musique moderne ; on peut notamment citer Sonny Rollins, John Coltrane, Julian "Cannonball" Adderley et Bill Evans durant les années 1950. De 1960 aux années 1980 ses sidemen se nomment Herbie Hancock, Wayne Shorter, Chick Corea, John McLaughlin, Keith Jarrett, Tony Williams, Joe Zawinul, Dave Liebman et Kenny Garrett; c'est avec eux qu'il s'oriente vers la « fusion » du rock et du jazz, dont il reste l'un des pionniers. La découverte de la musique de Jimi Hendrix sera déterminante dans cette évolution. Nombre de musiciens qui passeront par ses formations de 1960 à 1968 formeront ensuite les groupes emblématiques du jazz-rock fusion : notamment Weather Report, animé par Wayne Shorter et Joe Zawinul, Mahavishnu Orchestra de John McLaughlin, Return to Forever de Chick Corea ainsi que les différents groupes de Herbie Hancock.

Miles Davis est un des rares jazzmen et l'un des premiers noirs à s'être fait connaitre et accepter par l'Amérique moyenne, remportant même le trophée de l'homme le mieux habillé de l'année du mensuel GQ pendant les années 1960. Comme Louis Armstrong, Miles Davis est ce phénomène curieux, une superstar du jazz. A la différence de son glorieux aîné qui avait recherché l'intégration à la culture grand public dominée par la population blanche, le parcours musical de Miles Davis s'accompagna d'une prise de position politique en faveur de la cause noire et d'une lutte permanente contre le racisme, menée avec la colère permanente d'un homme au caractère réputé ombrageux. En 1985, il participe à l'album Sun City contre l'Apartheid à l'initiative de Steven van Zandt.

En France, c'est l'enregistrement de la musique du film Ascenseur pour l'échafaud (1957) qui l'a rendu célèbre. Son dernier album, Doo-bop, paru en 1992, laisse éclater des influences rap.

Il meurt en 1991.

[modifier] Biographie

Jazz
Terminologie du jazz
Principaux courants

ragtime - Nouvelle-Orléans
swing - mainstream
bebop - cool jazz
hard bop - jazz modal
free jazz - soul jazz
jazz-rock fusion - acid jazz
jazz manouche - smooth jazz
latin jazz - nu jazz

Interprètes

A-B-C-D-E-F-G-H-I-J-K-L-M N-O-P-Q-R-S-T-U-V-W-X-Y-Z
par style - par instrument

Méta
Le portail du Jazz
Le projet Jazz
Le portail des musiques

[modifier] 1926-1944 : l'apprentissage

Le 25 mai 1926, Miles Dewey Davis marié à Cléotaramani Henry, qui joue du piano et du violon, donne naissance à Dewey Davis III, à Alton (Illinois), sur les bords du Mississippi, dans un milieu familial aisé et mélomane (sa grand-mère maternelle était professeur d'orgue dans l'Arkansas). Sa famille déménage pour s'installer à East Saint-Louis (Illinois), où son père a ouvert un cabinet de dentiste, et où un ami de son père lui offre une trompette pour laquelle il a un coup de foudre immédiat alors qu'il n'a que 9 ans.

Il se passionne pour le sport, baseball, football américain, basket-ball, natation, boxe. À l'âge de 10 ans il commence à jouer de la trompette et il suit avec grand intérêt l'émission radiophonique de jazz de Harlem Rhythms. En 1939, il prend des cours de trompette jazz avec Elwood Buchanan et joue dans l'orchestre de son école dont il est le plus jeune élément. En 1941, il devient pro en s'inscrivant dans un syndicat de musiciens. Il commence à avoir une petite réputation régionale tout en continuant d'aller au lycée. En 1942, il fait la connaissance, d'Irene Birth, sa première vraie petite amie qui le défie d'appeler Eddie Randle pour se faire engager dans son orchestre de rhythm'n'blues des Blue Devils. Il est engagé. L'orchestre joue entre East Saint-Louis et Saint Louis (Missouri) du Duke Ellington, Lionel Hampton ou Benny Goodman. Des musiciens célèbres viennent les écouter : Roy Eldridge, Kenny Dorham, Benny Carter et surtout Lester Young, idole des saxophonistes et modèle de Miles. Il a une fille, Cheryl, tout en continuant à aller au lycée. Ses parents divorcent et ses relations avec sa mère se dégradent.

[modifier] 1944-1955 : du bebop vers la naissance du cool

En juin 1944, à 18 ans, il obtient son diplôme de fin d'études et quitte les Blue Devils pour se faire engager par le groupe de la Nouvelle-Orléans des Six Brown Cats d'Adam Lambert puis par le big band de Billy Eckstine qui réunit les musiciens les plus modernes du moment dont le trompettiste bebop jazz Dizzy Gillespie et le saxophoniste Charlie Parker. Son père achète un ranch de cent vingt hectares dans l'Illinois et lui paye à la rentrée 1944 des études à la célèbre école de musique Juilliard de New York où il s'ennuie immédiatement. C'est à cette époque qu'il rencontre les trompettistes Freddie Webster et Fats Navarro. Il fréquente le Minton's dans la 118e rue de New York où les noirs inventent ce qui se joue dans les clubs de jazz de Manhattan. Il retrouve Gillespie et Parker dit Bird, qui seront ses véritables professeurs et qu'il ne quittera plus de l'année, à une jam session à Harlem. Bird le présente à Thelonious Monk.

Le 24 avril 1945, il enregistre en studio ses quatre premiers morceaux de musique sérieux avec un quintet accompagnant le chanteur Rubberlegs (« jambes de caoutchouc ») sous la direction du saxophoniste Herbie Fields. En octobre, il fait partie du quintet de Charlie Parker (en tant que remplaçant de Dizzy Gillespie) avec qui il enregistre le 26 novembre. Le 28 mars 1946, Miles enregistre une seconde fois avec Parker qui est au sommet de son succès, les classiques Moose The Mooche, Yardbird Suite, Ornithology, A Night In Tunisia puis il part en tournée avec Billy Eckstine. La sonorité douce et le calme de son jeu s'oppose à la véhémence de Charlie Parker. Le magazine Esquire le proclame « Nouvelle Star de la Trompette Jazz ». Le 8 mai, Miles compose et enregistre sa première composition personnelle, Donna Lee, qui attire l'attention du célèbre arrangeur Gil Evans. Deux mois plus tard, il enregistre pour la première fois en tant que leader de groupe. Il se trouve en même temps des nouveaux amis du monde des jazzman, l'alcool et la cocaïne, mais pas encore l'héroïne.

Le 18 septembre 1948, à la tête d'un nonet, il assure la première partie du spectacle de Count Basie au Royal Roost de New York. Miles se rapproche de plus en plus de Gil Evans à son club de la 55e rue de New York et de Gerry Mulligan, tandis qu'il s'éloigne de Charlie Parker. Ils créent tous les trois le Cool Jazz avec leur album séminal Birth of the cool et les titres Godchild, Move, Budo, Jeru, Boplicity et Israel. En 1949, il effectue son premier voyage à l'étranger, en France, à Paris, où il rencontre Jean-Paul Sartre, Boris Vian, Pablo Picasso, Juliette Gréco et où il participe le 8 mai au Festival International de Jazz à Paris, salle Pleyel, avec son orchestre qu'il co-dirige avec le pianiste Tadd Dameron. De retour à New York, il rencontre Walter Bishop Jr, Jackie McLean, Philly Joe Jones, Sonny Rollins. C'est à son retour à New York qu'il développe une addiction à l'héroïne.[1] En mai 1950, il enregistre avec Sarah Vaughan.

En 1952, à 26 ans, il joue avec Sonny Rollins et un autre jeune saxophoniste, John Coltrane, à l'Audubon Ballroom de Manhattan. En septembre il joue en Californie près de Los Angeles avec Max Roach et Charles Mingus où il rencontre Chet Baker.

En 1954, il enregistre Walkin', un album qui marque la réaction hard bop contre le cool jazz qu’il a lui-même lancé. En juin, il enregistre en compagnie de Sonny Rollins et d'Horace Silver les futurs classiques du Hard Bop composés par Rollins, Airegin, Oleo et Doxy. Le 24 décembre, il participe à une séance mémorable avec Thelonious Monk. Une brillante rencontre entre deux grands maîtres du "silence" en musique.

Au Newport Jazz Festival de 1955, l'interprétation de Miles Davis de 'Round About Midnight, un thème de Monk, est saluée par une standing ovation doublée d'un immense succès critique : la carrière du trompettiste est relancée.

[modifier] 1955-1964 : le premier grand quintet

En 1955, il forme son premier grand quintet, avec John Coltrane au saxophone ténor, Red Garland au piano, Paul Chambers à la contrebasse et Philly Joe Jones à la batterie .

« Il y avait donc à présent Trane au saxophone, Philly Joe à la batterie, Red Garland au piano, Paul Chambers à la basse, et moi à la trompette. Et plus vite que je n'aurais pu l'imaginer, la musique que nous faisions ensemble est devenue incroyable. C'était si bon que ça me donnait des frissons, comme au public. Merde, c'est très vite devenu effrayant, tellement que je me pinçais pour m'assurer que j'étais bien là. Peu après que Trane et moi nous soyons mis à jouer ensemble, le critique Whitney Balliett a écrit que Coltrane avait « un ton sec non dégauchi qui met en valeur Davis, comme une monture grossière pour une belle pierre ». Très rapidement, Trane est devenu bien plus que ça. Il s'est lui-même transformé en diamant. Je le savais, comme tous ceux qui l'entendaient. »
    — Miles Davis avec Quincy Troupe, L'autobiographie p. 209 (1989)

Pour beaucoup de critiques et d’amateurs, ce quintet fait partie des plus brillants groupes du mouvement hard bop. On surnomma à l’époque sa section rythmique "The" Rythm Section, ce qui évoque le degré d’excellence atteint par ce trio d’une cohésion exceptionnelle. Ils enregistrent le remarquable 'Round About Midnight (1955) pour Columbia Records.

Il enregistre coup sur coup quatre albums pour Prestige (pour honorer ses obligations contractuelles) : Cookin', Relaxin', Steamin' et Workin' (1956).

L'ambiance entre Miles et Coltrane est tendue, le saxophoniste le pressant de questions, le trompettiste ne répondant que par énigmes. En avril 1957 Miles Davis vire Coltrane pour toxicomanie à l'héroïne et à l'alcool. Coltrane rapidement libéré de son addiction grâce à une cure personnelle passera l'été dans la formation de Thelonious Monk puis retrouvera Miles Davis.[2]

En 1958, Miles Davis enregistre Milestones, son quintet devient alors sextet avec l'apparition de Cannonball Adderley au saxophone alto. Cet album introduit les premiers éléments de musique modale, en particulier dans le morceau éponyme. Quelques jours plus tard, il participe, sous la direction de Cannonball Adderley, au superbe album Somethin' Else : c'est une de ses rares séances en tant que sideman. L'album comprend notamment une splendide version d’Autumn Leaves (Les Feuilles mortes). Parallèlement, il poursuit sa collaboration avec Gil Evans et crée des albums orchestraux qui connaîtront un immense succès critique et commercial : Miles Ahead (1957), Porgy and Bess (1958) et Sketches of Spain (1959-1960).

En 1959, Miles Davis signe son chef-d’œuvre avec Kind of Blue, un album improvisé autour de trames qu'il a composées. On trouve des modifications de formations par rapport au sextette de Milestones. Le pianiste Bill Evans, plus apte à suivre les orientations modales du leader, remplace Red Garland et Jimmy Cobb prend le fauteuil de batteur à Philly Joe Jones. Le pianiste Wynton Kelly est invité sur le titre bluesy de l’album Freddie Freeloader, nouvelle preuve que rien n’a été laissé au hasard pour la réalisation de cet album. Ce dernier est considéré comme le chef-d’œuvre du jazz modal et l'un des meilleurs – et des plus populaires ! - disques de jazz jamais enregistrés. Jimmy Cobb disait que ce disque « avait dû être composé au paradis ».

En mars 1960, Miles tourne en Europe avec Coltrane, Wynton Kelly au piano, le fidèle Paul Chambers à la contrebasse et Jimmy Cobb à la batterie. Ils donnent notamment un concert mémorable à l'Olympia de Paris le 21 où Coltrane est hué par une bonne partie du public irrité (!) par ses explorations audacieuses. C'est à Baltimore, en avril, que Coltrane officie pour la dernière fois au sein du groupe de Miles Davis qu'il quitte définitivement. Miles retourne en Europe et à l’Olympia en octobre, en compagnie du saxophoniste parkérien Sonny Stitt. Le jeu de Miles se montre plus agressif et aussi plus proche d’un hard bop orthodoxe. Le mélodieux Hank Mobley tiendra le difficile rôle de remplaçant de Trane à partir de 1961 alors que Wynton Kelly est le pianiste du groupe. On peut l’entendre dans quelques titres de l’album Someday My Prince Will Come et dans les disques live Miles Davis In Person: Friday Night & Saturday Night at the Blackhawk.

C'est aussi à cette époque qu’apparaît le free jazz, genre musical que Miles, qui pour une fois n’a pas lancé le mouvement, s’ingénie à critiquer de manière particulièrement caustique et bruyante, tout en s’entourant petit à petit, de manière nettement plus discrète, de (parfois très) jeunes gens fortement influencés par ce courant musical. Si ce n’est pas le cas du saxophoniste George Coleman, il n'en va pas de même pour sa nouvelle rythmique composée par Herbie Hancock (piano), Ron Carter (contrebasse) et le très jeune, à peine 18 ans à l’époque, Tony Williams (batterie). Ces musiciens apparaissent pour la première fois aux côtés de Miles sur l’album Seven steps to heaven (1963).

Miles et son groupe partent de nouveau en tournée en Europe en juillet 1963, puis se produisent au Lincoln Center de New York le 12 février 1964. Un concert qui sera publié sous forme de deux disques Four & More et My Funny Valentine. En juillet, le saxophoniste Sam Rivers, très proche du free jazz, remplace George Coleman. Il va participer avec le groupe à une tournée au Japon.

[modifier] 1964-1968 : le second grand quintet

En septembre 1964, le saxophoniste, compositeur et arrangeur Wayne Shorter, qui avait déjà officié au sein des Jazz Messengers de Art Blakey, rejoint le groupe. Miles trouve enfin le saxophoniste qui va mener sa musique vers de nouveaux sommets. Il va plus tard déclarer, dans Miles : L’autobiographie, "Avoir Wayne me comblait parce que je savais qu’avec lui, on allait faire de la grande musique. C'est ce qui est arrivé, très vite.". Shorter prend ainsi rapidement le rôle principal dans l’élaboration de la musique du quintet. Herbie Hancock a expliqué cette transformation : "Dans le quintet, à partir du moment où Wayne Shorter est arrivé, on s’est consacré à un travail de couleurs, aux accords substitués, aux phrasés et surtout à l’utilisation de l’espace, c’est-à-dire au placement des notes que l’on jouait par rapport à ce que jouaient les autres musiciens du quintet." Miles éprouve quelques difficultés pour s’adapter à la vivacité de ces jeunes musiciens mais cette prise de risque n’est pas la première dans la carrière de Miles et montre sa capacité à réinventer sans cesse son style. Il raconte son expérience avec ce groupe :

« Si j’étais l’inspiration, représentais la sagesse et assurais l’homogénéité du groupe, Tony en était le feu, l’étincelle créatrice ; Wayne était l’homme des idées, le concepteur intellectuel ; Ron et Herbie en étaient les ancrages. Je n’étais que le leader qui avait rassemblé tout le monde. Ils étaient jeunes mais, même si je leur apprenais certaines choses, ils m’en apprenaient d’autres, sur la new thing, sur le free (…) J' apprenais quelque chose chaque soir avec cette formation, d' abord parce que Tony Williams était un batteur progressiste. Le seul membre d’un de mes orchestres qui m’ait dit un jour : « Bon Dieu, Miles, pourquoi ne travailles-tu pas [ton instrument] ? » Il faut dire qu’en essayant de tenir la dragée haute à ce jeunot, je ratais des notes. Il m’a donc poussé à retravailler mon instrument, puisque je m’étais dispensé de cette discipline sans même m’en rendre compte (…) Chaque nuit, Herbie, Tony et Ron rentraient dans leur chambre et discutaient jusqu'au petit matin de ce qu’ils venaient de jouer. Le lendemain, ils remontaient sur scène et jouaient différemment. Et moi, soir après soir, il fallait que je m'adapte… »
    — Miles Davis avec Quincy Troupe, L'autobiographie (1989)

Peu après sa création, le quintet part en tournée en Europe. Il enregistre son premier disque studio ESP en janvier 1965. En décembre, le passage au club de Chicago le "Plugged Nickel" est enregistré. Alors que les albums studios sont constitués uniquement de compositions originales, le groupe reprend les standards du répertoire de Miles Davis (All of You, My Funny Valentine…) en concert. Lors de ces concerts, on entend le groupe à son meilleur. Shorter y montre toutes ses qualités de soliste et la section rythmique brille par sa cohésion et son inventivité prodigieuses.

En octobre 1966, le groupe enregistre, ce que beaucoup considèrent comme son chef-d’œuvre, l’album Miles Smiles. Suivent en 1967, les albums Sorcerer et Nefertiti et en 1968, Miles In The Sky et Filles de Kilimanjaro.

[modifier] 1968-1975 : la révolution électrique

Alors que le rock et le funk se développent, Miles Davis va initier l'essor d'un jazz de style nouveau, fusionnant le son électrique de la fin des années 1960 avec le jazz. Ce nouveau style, déjà ébauché sur les derniers albums du quintet, s’affirme de manière fracassante avec les albums In a Silent Way (1969) et surtout Bitches Brew (1970). Miles s'entoure de jeunes musiciens qui seront bientôt les chefs de file du jazz fusion tels le guitariste britannique John McLaughlin et le claviériste d’origine autrichienne Joe Zawinul. L'apport de l’électricité s'accompagne par une approche encore plus ouverte de l'improvisation. Donnant aux musiciens de simples esquisses de thèmes, il leur offre une plus grande liberté dans l'improvisation. Ces deux albums voient aussi le producteur Teo Macero prendre une place centrale dans le processus de création. Les morceaux ne sont plus enregistrés d'un seul tenant, l'album devient le résultat d'un collage d'extraits des prises de studio. Avec ces deux albums, Miles Davis provoque une vraie révolution dans le monde du jazz et rencontre un vrai succès populaire. Bitches Brew se vend à plus de 500 000 exemplaires.

À la suite des séances de Bitches Brew, Miles ajoute à son groupe des sitars et des tablas. Les titres issus de ces séances (Great Expectations, Orange Lady, Lonely Fire) ne seront publiés qu'en 1974 dans l’album Big Fun. À partir de 1970, la musique de Miles est de plus en plus marquée par le funk. Pour Miles Davis, le funk, porté par James Brown et Sly & The Family Stone, est la nouvelle musique du peuple noir au contraire du Blues qu’il déclare "vendu aux blancs". Le virage électrique est motivé à la fois par des raisons artistiques et commerciales[3].

Pour l'enregistrement de A Tribute to Jack Johnson, Miles pense à Buddy Miles, le batteur du Band Of Gypsys de Jimi Hendrix[4], mais ce dernier ne vient pas à la séance. Il est remplacé par Billy Cobham, qui forme avec Michael Henderson la section rythmique du groupe dont le son est dominé par la guitare de John McLaughlin. Malgré une promotion désastreuse de Columbia, le disque (sorti le 24 février 1971) est pourtant devenu un classique du jazz rock. John Scofield dira par la suite de cet album qu'il « avait sans aucun doute un feeling rock, même si c'était aussi du jazz du plus haut niveau. »

Le 29 août 1970, il participe à l’historique Festival de l'île de Wight. Le groupe, un des meilleurs de toute sa période électrique, est constitué de Gary Bartz aux saxophones soprano et alto, Chick Corea et Keith Jarrett aux claviers, Dave Holland à la basse, Jack DeJohnette à la batterie et Airto Moreira aux percussions. Il joue en outre cette même année de nombreuses fois au Fillmore East de New York et au Fillmore West de San Francisco.

Du 16 au 19 décembre, Miles enregistre son groupe dans un club de Washington, le Cellar Door, avec Keith Jarrett, Jack DeJohnette, Airto Moreira, Gary Bartz et Michael Henderson. L'arrivée de ce dernier est déterminante. Ancien musicien de studio pour Motown et membre du groupe de Stevie Wonder, il n'est pas un jazzman de formation. Son style funky, basé sur des lignes de basse répétitives est déterminant dans l'évolution de la musique de Miles, avec lequel il restera jusqu'en 1975. Ces enregistrements constituront le coeur de l'album Live Evil, publié le 17 novembre 1971 (sur lequel est présent McLaughlin, qui avait rejoint le groupe à la demande de Miles le dernier soir). En octobre-novembre 1971, il effectue une tournée en Europe.

« C'est avec On the Corner et Big Fun que j'ai vraiment essayé d'intéresser les jeunes Noirs à ma musique. Ce sont eux qui achètent les disques et viennent aux concerts, et je songeais à me préparer un public pour l'avenir. Beaucoup de jeunes Blancs étaient déjà venus dans mes concerts après Bitches Brew. Je pensais qu'il serait bien de rassembler tous ces jeunes dans l'écoute de ma musique et de l'appréciation du groove. »
    — Miles Davis avec Quincy Troupe, Miles : L'autobiographie p. 345 (1989)

En 1972, paraît l’ambitieux On The Corner qui tente, selon la formule de Frédéric Goaty (dans Jazz Magazine), « de faire groover ensemble Sly Stone et Stockhausen » ! On The Corner et Big Fun eurent du mal à trouver leur public à l’époque. Rejetés par la plupart des critiques de jazz, ils ne parviennent pas non plus à séduire la jeunesse noire. Ils sont aujourd’hui considérés comme d’authentiques chefs-d’œuvre du jazz-funk. Durant cette période, Miles utilise la pédale wah-wah pour distordre le son de sa trompette. Son jeu est plus axé sur l’aspect rythmique. La période dite « électrique » de Miles fait exploser les codes classiques du jazz, à savoir « exposition du thème - soli - réexposition du thème ». Toutefois, il conserve une démarche jazz et ce à deux niveaux : la recherche constante d'une nouvelle approche de la musique (déstructuration - restructuration) et la part belle faite à l'improvisation.

Statue de l'artiste à Kielce, en Pologne
Statue de l'artiste à Kielce, en Pologne

En 1973, son groupe se stabilise autour de la formation suivante : Dave Liebman au saxophone et à la flûte, Reggie Lucas et Pete Cosey aux guitares, Michael Henderson à la basse, Al Foster à la batterie et James Mtume Foreman aux percussions. Reggie Lucas se charge des parties rythmiques alors que Pete Cosey[5], dont le jeu est très influencé par celui de Jimi Hendrix, joue la majorité des soli (il joue aussi des percussions). Le groupe se produit au Japon en juin, puis le 8 juillet 1973, il joue pour la première fois sur la scène du Montreux Jazz Festival. Miles Davis se rend ensuite en France, en Suède, en Allemagne et en Autriche. Les concerts des 20 juin (Tokyo), 8 juillet (Montreux), 27 octobre (Stockholm) et 3 novembre (Vienne) seront filmés professionnellement : ils constituent les derniers témoignages vidéo du groupe de Miles avant sa retraite.

Le 30 mars 1974, Miles joue sur la scène du Carnegie Hall de New York. Le surprenant guitariste hendrixien Dominique Gaumont et le saxophoniste Azar Lawrence sont invités lors de ce concert: l'album s'appelera Dark Magus.

« Ce qu'il fait, et souvent dans les grands concerts comme celui-là, c'est de changer la donne, en faisant quelque chose de totalement étrange. Totalement inattendu. Voici ce que j'entends par là : nous sommes un groupe en tournée depuis un an... Et puis, soudainement, en public, New York City, Carnegie Hall, l'animal pousse deux types qui ne sont même jamais vus. Vous vous dites : "Est-il fou ou bien... Il est fou, ou alors, extrêmement subtil". »
    — Dave Liebman, In Milestones: The Music and Times of Miles Davis de Jack Chambers

En 1974 paraissent les doubles albums studios Big Fun et Get Up With It regroupant différentes sessions du début des années 70.

Le 1er février 1975, Miles Davis donne deux concerts à Tôkyô au Japon qui paraîtront sous la forme de deux doubles albums : Agharta (concert de l'après-midi) et Pangaea (concert de la soirée). Sonny Fortune y remplace Dave Liebman. Ces disques sont la parfaite conclusion de cette période créatrice très riche. En 1975, Miles Davis quitte la scène pour des motifs de santé.

[modifier] 1981-1991 : le come-back : Miles superstar

Il refait surface en 1981 avec l’album The Man with the Horn. Au cours des années 1980, il enregistre des albums de jazz-rock fusion très funk avec des groupes qui, selon sa bonne habitude, sont formés de jeunes inconnus qui feront carrière (Marcus Miller, John Scofield, Mike Stern, Mino Cinelu, etc.). À partir de ce moment, Miles Davis sera aussi un « initiateur », un « passeur » qui permettra à de nombreux amateurs de musique plus « rock » de découvrir la beauté d'un silence, d'une respiration au sein d'une harmonie gorgée d'émotions et d'énergie. Grâce à lui, le jazz, terme qu'il trouvait de plus en plus restrictif, pouvait toucher un public plus large et continuer ainsi à se renouveler.

Le double album Live We Want Miles, publié en 1982, présente le nouveau groupe de scène de Miles Davis. Le premier titre, Jean Pierre deviendra un véritable classique au fil des ans. L'album Star People, publié l'année suivante, marque un retour du trompettiste au blues.

Miles Davis enregistre alors des albums très modernes, comme Decoy (1984) ou You're Under Arrest l'année suivante, sur lequel il s'attaque au répertoire de Michael Jackson (Human Nature) et Cindy Lauper (Time After Time).

En 1986, Miles Davis quitte Colombia Records pour la Warner et publie Tutu, un album qui rencontre un succès public important. Aucune composition du trompettiste ne figure pourtant sur le disque : n'ayant pas obtenu les droits de ses propres compositions avec ce nouveau contrat, Miles Davis refuse d'enregistrer son propre matériel et a recours notamment aux services de Marcus Miller, dont le style imprègne Tutu, mais aussi l'album suivant, Amandla, publié en 1989.

À la fin des années 1980, il collabore également avec Prince, mais à ce jour pratiquement aucun enregistrement studio n'a émergé de ces sessions. Lors de visites guidées des studios Paisley Park au début des années 2000, il était indiqué aux visiteurs que le coffre-fort des studios renferme « les légendaires sessions enregistrées avec Miles Davis ». Il existe toutefois un disque et une vidéo non autorisés qui témoignent du concert que Prince organisa le 31 décembre 1987 à Paisley Park où Miles fit une brève apparition. On peut regretter qu'à cette occasion Prince ne laissa pas plus de place à Miles pour s'exprimer pleinement.

Dans son dernier album, posthume, Doo-bop, sorti en 1992, il collabore avec des musiciens de hip-hop qui apportent la section rythmique et des chanteurs de rap.

Le génie de Miles Davis peut se résumer en trois points : un son, une capacité à s'entourer de musiciens dont il savait tirer le meilleur et une conception progressiste de la musique. Citons pour conclure la fin de l'éditorial de François-René Simon paru dans le hors série de Jazz Magazine d'octobre 1991 consacré à Miles Davis : « … « Jazzman de la fin qui approche » comme l'appelle Jacques Réda, maintenant qu'elle est là pour lui cette fin, soudain une angoisse : qui pour faire reculer la fin du jazz, désormais ? »

Le 28 septembre 1991, il meurt à l'âge de 65 ans à l'hôpital St John de Santa Monica près de Los Angeles ou il était entré pour un bilan médical complet suite à toutes sortes d'ennuis de santé. Dans un entrefilet du New Musical Express, on peut lire : "Miles Davis ... est en train de mener un combat perdu contre le sida dans un hôpital californien.". L'information concernant la nature de son mal n'a cependant jamais été confirmée. Il est enterré au cimetière de Woodlawn de New York.

[modifier] Citations et anecdotes

  • « Pourquoi jouer tant de notes alors qu'il suffit de jouer les plus belles ? »
  • « La véritable musique est le silence, les notes ne font qu'encadrer ce silence. »
  • Un soir, il s'est fait tabasser par un policier qui ne voulait pas voir traîner de Noirs devant la salle de concert ; il était programmé en tête d'affiche ce soir-là et le policier ne l'a pas cru.
  • Pannonica de Koenigswarter demanda à trois cents musiciens de Jazz quels étaient leurs trois voeux. Miles Davis n'en formule qu'un, glaçant, et qui disait tout de la condition des noirs : « Être blanc ».[6]
  • À John Coltrane qui lui confiait avant un concert avoir du mal à conclure ses chorus, Miles répondait : « C'est très simple, il te suffit de retirer ton bec de sax de ta bouche. »
  • Un photographe français est invité à prendre une série de clichés de Miles Davis à New York. Conscient du privilège qui lui est accordé, il saute dans le 1er avion. Arrivé quelques heures plus tard, il attend pendant trois heures dans le hall de l'hôtel puis est finalement invité à monter rejoindre le jazzman pour la séance. Miles lui dit : « Tu as 36 clichés et pas un de plus ». La séance commence puis à la 4e ou 5e photo il demande à Miles de se mettre de profil avec sa trompette à l'horizontale. Miles Davis lui répond : « Sors d'ici, je ne joue pas la trompette à l'horizontale, je ne joue pas sur les champs de courses. ». Le photographe repartait pour Paris dans l'heure.
  • Miles Davis avait l'habitude de jouer les yeux fermés et en tournant le dos au public. C'était selon lui pour mieux se concentrer en faisant abstraction de son environnement mais de nombreux spectateurs lui faisaient le reproche de ce qu'ils considéraient comme de l'impolitesse.

[modifier] Honneurs

[modifier] Discographie

[modifier] Albums studio

[modifier] Bandes originales de films

[modifier] Enregistrements en public

  • 1969 : Festival de Juan-les-Pins (sic) ;
  • 1970 : Live at the Fillmore East (March 7, 1970), It's About That Time , (sorti en 2001) ;
  • 1970 : Black Beauty: Live at the Fillmore West ;
  • 1971 : Live In Vienna ;
  • 1972 : In Concert: Live at Philharmonic Hall ;
  • 1973 : Olympia - Jul. 11th, 1973 ;
  • 1973 : Call It What It Is ;
  • 1974 : Dark Magus ;
  • 1975 : Agharta ;
  • 1975 : Pangaea ;
  • 1981 : Miles! Miles! Miles! Live in Japan '81 ;
  • 1982 : We Want Miles ;
  • 1982 : Spring, Live In Rome, April 26, 1982 ;
  • 1988 : Munich Concert , 3 cd ;
  • 1989 : Miles in Paris, November 3, in zenith the 10th Paris Jazz Festival ;
  • 1991 : Miles & Quincy Live At Montreux ;
  • 1991 : Jardin des Arènes de Cimiez, Nice, France le 17-07-1991. (Volume 20 de The Complete Miles Davis at Montreux);
  • 1973 à 1991 : Highlights from the Complete Miles Davis at Montreux .

[modifier] Anthologies

  • 1948-1950 : The Complete Birth of the Cool ;
  • 1951-1956 : Chronicle, The Complete Prestige Recordings ;
  • 1955-1956 : The Miles Davis Quintet, The Legendary Prestige Quintet Sessions, 4 cd, sorti en 2006, 10 titres inédits ;
  • 1955-1961 : The complete Columbia recordings, (avec John Coltrane), 6 cd, sorti en 2000 ;
  • 1955-1970 : Circle in the Round, 2 cd, sorti en 1979, inédits ;
  • 1960-1970 : Directions, 2 cd, sorti en 1981, inédits ;
  • 1967-1969 : Water Babies sorti en 1976, inédits ;
  • 1963-1964 : Seven Steps : The Complete Columbia Recordings of Miles Davis 1963-1964, 7 cd , sorti en 2004 ;
  • 1965 : The Complete Live at the Plugged Nickel 1965,7 cd , sorti en 1995 ;
  • 1968-1970 : The Complete Bitches Brew Sessions, 4cd, sorti en 1998 ;
  • 1969 : The Complete In A Silent Way, Sessions 1969, 3 cd, sorti en 2001  ;
  • 1970 : The Cellar Door Sessions, 6 cd, sorti en 2005 ;
  • 1971 : The Complete Jack Johnson Sessions, 5 cd, sorti en 2003 ;
  • 1972 : The Complete On The Corner Sessions, 6 cd, sorti en 2007 ;
  • 1973-1991 : The Complete Miles Davis at Montreux, 20 cd , sorti en 2002 ;
  • 1988-1990 : Live Around the World, 1 cd .

[modifier] Compilations

  • 1956 : My Funny Valentine (Prestige) ;
  • 1997 : Electric Miles (Sony 65449) ;
  • 2006 : Cool & Collected .

[modifier] Participations

[modifier] Filmographie

[modifier] Vidéographie

  • 1959 : The Sound of Miles Davis, TV Show, CBS (avec John Coltrane et Miles Davis) paru dans le DVD "The Greatest Jazz Films Ever", Idem, 2003 et sous le nom "The Cool Jazz Sound", Mvd Visual, 2005 ;
  • 1964 : Miles Davis Quintet : Milan 1964, Impro-Jazz, 2007.
  • 1970 : Miles Davis Electric : A different Kind of Blue (Live at the Isle of Wight Festival). Documentaire de Murray Lerner (USA, 2004) Eagle Vision. 87 min. ;
  • 1985 : Live in Montreal, Jazz Door, 2006 ;
  • 1988 : Live in Munich, Geneon, 2002 ;
  • 1989 : Live in Paris, Warner Bros, 2001.

[modifier] Bibliographie

  • Ian Carr, Miles Davis, William Morrow & Co, 1982 ;
  • Jack Chambers, Milestones: The Music and Times of Miles Davis, Quill, 1989 ;
  • Miles Davis avec Quincy Troupe, Miles : L'autobiographie, Presses de la Renaissance, 1989
    - Réédition revue et corrigée -, Infolio, 2007 ;
  • Laurent Cugny, Electrique Miles Davis 1968-1975, André Dimanche, 1993 ;
  • Richard Williams, Miles Davis : l'homme à la chemise verte, 1993 ;
  • Serge Loupien, Miles Davis, collection Librio n° 307, 1999 ;
  • Ashley Kahn, Kind of Blue: The Making of the Miles Davis Masterpiece, Da Capo Press, 2001 ;
  • Noël Balen, Miles Davis, l'ange noir, Editions mille et une nuits/Arte Editions, 2001 ;
  • Alain Gerber, Miles Davis et le Blues du blanc, Fayard, 2003 ;
  • Jean-Pierre Jackson, Miles Davis, Actes Sud, 2007.

[modifier] Autres sources

  • Jazz Magazine, n° 570 & 571, spécial Miles Davis ;
  • Stéphane Carini, Les singularités flottantes de Wayne Shorter, Rouge profond .

[modifier] Liens externes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Miles Davis.

[modifier] Notes et références

  1. Dans son autobiographie, il explique ses problèmes de drogues notamment par son éloignement géographique avec Juliette Gréco, dont il est tombé amoureux à Paris
  2. Jazzman, N°137 juillet 2007, p.19.
  3. Dans son livre Electrique Miles Davis 1968-1975, on notera toutefois que l'auteur défend la thèse selon laquelle seuls les motifs artistiques sont le moteur de l'évolution de Miles Davis alors
  4. Miles - l'autobiographie par Miles Davis avec Quincy Troupe p.335
  5. Il est aussi connu pour sa participation à l'album le plus controversé de toute la carrière du bluesman Muddy Waters, l'album Electric Mud
  6. Pannonica de Koenigswarter. Les musiciens de Jazz et leurs trois voeux. Ed. Buchet-Chastel. 2007