Loi française sur les signes religieux dans les écoles publiques

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La loi sur les signes religieux dans les écoles publiques (Loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics) est une loi française adoptée en première lecture, qui prévoit l'interdiction après un dialogue infructueux du port de signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires publics français. Cette loi est largement ressentie comme spécifiquement dirigée contre le hijab porté par certaines filles musulmanes, françaises ou non. Elle est une réponse à l'affaire dite du « voile » et le résultat des travaux de la Commission Stasi, groupe de réflexion « sur l'application du principe de laïcité dans la République » mis en place par le président Jacques Chirac.

La loi a fait l'objet d'âpres controverses, à gauche comme à droite, certains la présentant comme une défense de l'école républicaine et laïque, dans la lignée des lois Jules Ferry de 1881-82, ainsi que comme un moyen de lutte contre l'islamisme, d'autres au contraire affirmant que cette loi violerait la liberté de religion (Human Rights Watch [1]) ou serait un signe d'islamophobie voire de racisme (Houria Bouteldja du collectif des Indigènes de la République [2], etc.).

Sommaire

[modifier] Le rapport Stasi

En 2003, la commission Stasi de réflexion « sur l'application du principe de laïcité dans la République », mise en place par le président Jacques Chirac, a estimé que le port de signes religieux ostentatoires était en contradiction avec les règles laïques du système scolaire français. Une autre partie du rapport Stasi, écartée par Jacques Chirac et non reprise dans la loi, avait recommandé également que des fêtes religieuses non chrétiennes (Yom Kippour et l'Aïd el-Kebir) soient des jours de congé dans toutes les écoles.

[modifier] La mise en place de la loi

Cette loi interdit de porter les signes ostentatoires, visibles et portés dans l'intention d'être vus, c'est-à-dire manifestant non plus l'appartenance à une religion mais une volonté politique. Les articles interdits par cette loi incluraient le hijab musulman, la kippa juive, le turban Sikh ou de grandes croix chrétiennes, tandis que les symboles discrets tels que les petites croix, étoiles de David, ou mains de Fatima sont permis. Avant cette loi, un arrêt du Conseil d'État laissait aux chefs d'établissement la responsabilité de statuer sur la question.

En décembre 2003, le Président français Jacques Chirac a décidé d'agir suivant les recommandations de la commission Stasi, en faisant préparer une loi, en janvier ou février, qui puisse s'appliquer en septembre 2004, le début de l'année scolaire suivante. Le 10 février 2004 l'Assemblée nationale a voté à une large majorité (494 contre 36) l'appui de l'interdiction. Ce vote a été suivi d'un vote conforme du Sénat, puis des décrets d'application.

[modifier] Controverses

L'interdiction a été vue comme visant la population musulmane de France. Des organisations musulmanes ont exprimé leur opposition à cette loi, de même que certaines organisations juives, chrétiennes et laïques, dont des groupes féministes (par exemple Houria Bouteldja, porte-parole du collectif des Indigènes de la République) qui ont critiqué une instrumentalisation du féminisme par la droite et à des fins racistes et xénophobes [3],[4], [2],[5]. L'ONG Human Rights Watch a affirmé que la loi violait la liberté de religion [1].

Beaucoup de musulmans arguent du fait que le hijab est un vêtement culturel plutôt que religieux. Les rédacteurs de la loi ont admis qu'ils n'ont pas tenu compte de la petite population Sikh de France, à qui il peut également être interdit de porter leur turban.

[modifier] Les retombées

Quarante filles et quatre garçons ont été expulsés du fait de cette loi pendant le premier semestre 2004. Un an après l'introduction de cette loi, le nombre de cas a fortement diminué. Selon le Ministère de l'Éducation nationale, seulement trois cas contre des élèves persistent vers la fin septembre 2005, dont un sikh refusant d'enlever son turban à l'académie de Créteil[6].

[modifier] Notes et références

  1. ab Human Rights Watch, France : l’interdiction du port du foulard viole la liberté de religion, 27 février 2004 (fr)
  2. ab Houria Bouteldja, porte-parole des Indigènes de la République, De la cérémonie du dévoilement à Alger (1958) à Ni Putes Ni Soumises : l’instrumentalisation coloniale et néo-coloniale de la cause des femmes., Ni putes ni soumises, un appareil idéologique d’État, juin 2007
  3. Sylvie Tissot, Bilan d’un féminisme d’État, in Plein Droit n°75, décembre 2007 (sur le site du GISTI)
  4. Elsa Dorlin, maître de conférences en philosophie à Paris-I, « Pas en notre nom ! » - Contre la récupération raciste du féminisme par la droite française L'Autre Campagne
  5. Appel des Féministes Indigènes, Sous le Haut Marrainage de Solitude, héroïne de la révolte des esclaves guadeloupéens contre le rétablissement de l’esclavage par Napoléon
  6. Les signes religieux ostensibles ont pratiquement disparu des écoles, Le Monde, 30 septembre 2005

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes