Ethno-différencialisme

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L'ethno-différencialisme est un concept théorisé par la Nouvelle droite et ses adversaires (afin de désigner les positions de celle-ci relativement à la différence). Antithèse de l'universalisme, il prône la reconnaissance d'un héritage culturel propre à chaque peuple (ethnie) qui mérite d'être reconnu et préservé par les institutions politiques.

Sommaire

[modifier] Définition

Il a pour but de rendre systématique « le droit à la différence » ainsi que le « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ». Il se fonde sur l'existence de différences suffisamment fondamentales entre les hommes du point de vue de leur histoire, de leurs traditions, de leurs modes de vie et de leurs religions pour montrer qu'une vie commune n'est possible ou souhaitable qu'à la condition d'une reconnaissance mutuelle des différences. L'histoire du monde nous enseigne que les civilisations mondiales se sont formées dans une extraordinaire diversité de cultures et de races qui n’a pu se développer - souvent jusqu’à l’ultime et particulière perfection - que par une nécessaire ségrégation de fait, d'ordre souvent géographique.

Le but ultime de cette théorie est d'identifier chaque ethnie, dans son territoire géographique historique, à un peuple qui, bien entendu, ne serait pas « ethniquement pur », mais dont la continuité ethnique serait préservée. Il s'agirait par exemple de reconnaître trois Europe : une « Europe du Nord » principalement germanique et protestante, une « Europe du Sud » principalement gréco-latine et catholique, et une « Europe de l'Est » principalement slave et orthodoxe. Certains (Pierre-André Taguieff) pensent que ce concept conduit au repli des communautés ethniques et religieuses sur elles-mêmes sous prétexte de préserver leur langue, leurs traditions, leurs normes éthiques et juridiques : pour le chercheur, si l'exigence d'universalité n'est pas posée comme préalable au droit à la différence, celui-ci peut conduire à une sacralisation de la différence interdisant tout mélange (« néo-racisme différentialiste »). D'autres (Alain de Benoist, Benjamin Vautier) estiment au contraire que la reconnaissance des différences incite au respect de l'autre en tant qu'autre (participant à l'universel en tant que tel), sans le contraindre à l'assimilation, à la fusion de son identité collective au sein d'une culture qui lui est étrangère (contrainte dictée par l'ethnocentrisme).

Dans cette optique, la défense des différences collectives peut difficilement être assimilée au racisme, encore moins au racialisme ou à la xénophobie, car elle n'accorde guère d'importance à la couleur de peau et ne prône aucune hiérarchie entre les groupes ethniques.

L'ethno-différencialisme n'est pas l'antithèse du pluralisme, qui suppose la cohabitation des différences au sein d'une même entité politique, bien qu'il insiste sur la reconnaissance politique des différences, étant en cela proche du communautarisme et de l'autonomisme tel qu'il s'exprime en Corse ou au Québec.

Il faut toutefois noter que les penseurs de la Nouvelle droite parlent aujourd'hui plus volontiers d'« ethno-pluralisme » et disent vouloir défendre la pluralité des identités et modes de vie populaires pour encourager le dialogue entre les cultures. Ainsi, Alain de Benoist, le chef de file du Groupement de recherche et d'études pour la civilisation européenne (GRECE) écrit :

« Dans "ethnopluralisme", le mot important est "pluralisme". Ce que je n'ai cessé de combattre tout au long de ma vie se résume dans ce que j'ai appelé l'idéologie du Même, en l'occurrence toutes les formes de pensées, religieuses ou laïques, qui ont eu pour visée, ou pour effet, d'effacer les différences, c'est-à-dire de ramener l'humanité à l'Unique. Dans cette définition, c'est évidemment l'universalisme qui est visé, universalisme dont je me suis efforcé demontrer qu'il est toujours un ethnocentrisme masqué.[1] »

[modifier] L'ethno-différencialisme étudié par ses adversaires

Le politologue et historien des idées Pierre-André Taguieff est l'un des premiers à avoir proposé une réflexion critique sur le différencialisme dans son ouvrage de référence La Force du préjugé ainsi que dans plusieurs articles. Le spécialiste de l'extrême droite Jean-Yves Camus a également consacré plusieurs études à ce sujet qui a fait l'objet récemment d'une entrée dans Le Dictionnaire de l'extrême droite (dirigé par Erwan Lecoeur, Paris, Larousse, « À présent », 2007, p. 120-121).

[modifier] Bibliographie

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. Voir l'entretien d'Alain de Benoist accordé au magazine allemand Zinnober, 2004[1].

[modifier] Citation

Guy Sorman interroge Claude Lévi-Strauss, Le Figaro-Magazine, 3 septembre 1988 (extrait) : « [...]En 1971, Claude Lévi-Strauss prononça une conférence intitulée Race et culture devant l'Unesco à Paris. Elle causa un énorme scandale. J'essaie, dix-sept ans après, de comprendre pourquoi. J'avais, me répond Lévi-Strauss, transgressé trois interdits. Tout d'abord, j'avais observé que la génétique moderne permettait désormais de parler de races en termes scientifiques et de comprendre sur quelles données objectives reposaient les distinctions. J'avais dit ensuite que les bons sentiments ne servent en rien à lutter contre le racisme, puisque le racisme repose sur des faits objectifs : il est, par exemple, établi que des populations différentes mises en contact sur des territoires contigus ou qui se chevauchent génèrent des réactions d'agressivité. Les "primitifs" savent cela très bien. Enfin -troisième transgression- j'estimais que les cultures sont créatives lorsqu'elles ne s'isolent pas trop, mais il faut qu'elles s'isolent quand même un peu. Dans chaque civilisation, il existe des optimums d'ouverture et de fermeture, entre isolement et communication, qui correspondent aux périodes les plus fécondes de leur histoire. Si les cultures ne communiquent pas elles sont sclérosées, mais il ne faut pas qu'elles communiquent trop vite pour se donner le temps d'assimiler ce qu'elles empruntent au dehors. Aujourd'hui, me dit Lévi-Strauss , le Japon me paraît le seul pays à atteindre cet optimum : il absorbe beaucoup de l'extérieur et refuse beaucoup. »

[modifier] Voir aussi