Ban de la Roche

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Ban-de-la-Roche est le nom de l'ancienne seigneurie dont le siège administratif était le château de la Roche. Le nom a été repris le 1er janvier 1974 par la fusion des communes de Belmont, Bellefosse et Waldersbach. Le 1er janvier 1975, la commune de Fouday fusionne à son tour. Le 1er janvier 1992, chacune des communes associées est rétablie.

Le Ban de la Roche est situé dans le département du Bas-Rhin, canton de Schirmeck, arrondissement de Molsheim, en région Alsace.


Sommaire

[modifier] Le cadre géographique

Vallée de la Rothaine : à Neuviller-la-Roche
Vallée de la Rothaine : à Neuviller-la-Roche
Vallée de la Chergoutte : près de Bellefosse
Vallée de la Chergoutte : près de Bellefosse

Le ban de la Roche est une région de la vallée de la Bruche d'une superficie d'environ 49 km² étalée sur le flanc ouest du massif du Champ du Feu (Hochfeld = Haut champ, en allemand) qui culmine à 1100 m. Ce territoire est constitué de deux vallées parallèles : la vallée de la Rothaine et la vallée de la Chergoutte, séparées par le Col de la Perheux (699 m).

Les pentes bénéficient d'un ensoleillement idéal et tardif en été bien que la belle saison soit relativement courte, elles sont exposées aux vents humides d'ouest et sont souvent couvertes d'un fort enneigement en altitude.

Les sols légèrement granuleux et argileux à humus doux conservent des qualités riches résultant de la décomposition des granites, et à certains autres endroits un sol plus siliceux, superficiel et de qualité médiocre. Traditionnellement réservées aux activités pastorales et à la culture de la pomme de terre essentiellement, les surfaces jadis exploitées sont en net recul par rapport à la forêt et les terres sont abandonnées à la friche.

Les contraintes climatiques et physiques favorisant traditionnellement des activités d'élevage ont profondément modelé le paysage par la création de larges espaces ouverts offrant encore de nos jours un panorama exceptionnel sur la vallée de la Bruche et la plaine d'Alsace.

[modifier] Étymologie

Le nom français de Ban de la Roche est de création récente (du XVIIIe siècle). Le terme officiel ancien était Steintal, ce qui peut se traduire par : la vallée au château (Stein = château et non pierre ou roche). Le Ban était synonyme de Burgbahn, la banlieue étant l’étendue territoriale formant la seigneurie administrée par le château de Stein.

[modifier] Historique

Carte muette du Ban de la Roche, gravée par le pasteur Oberlin en 1776
Carte muette du Ban de la Roche, gravée par le pasteur Oberlin en 1776[1]

Les Rathsamhausen zum Stein possédaient la seigneurie du Ban de la Roche sans doute dès la fin du XIIIe siècle mais résidaient de préférence en plaine à Baldenheim, aux châteaux d'Ottrott ou au château voisin de Guirbaden, plus vaste et plus proche de la plaine, abandonnant le château de la Roche peu confortable à un représentant. La famille achète en 1371 aux nobles d'Andlau un petit alleu contigüe formé de deux villages : Saint-Blaise-la-Roche et Blancherupt, qui resteront dans leur patrimoine malgré la vente de la seigneurie du Ban de la Roche en 1584.

Le château est assiégé et détruit en 1469 parce qu’il sert de base à un groupe de chevaliers brigands sans doute favorisé par le seigneur Jérothé de Rathsamhausen-le-Jeune.

Au début du XVIe siècle, un tribunal présidé par le meyger réunissait la justice villageoise à Waldersbach afin d’y juger les affaires litigieuses. Les éventuels criminels étaient remis au seigneur qui les enfermait au château de Guirbaden avant de les exécuter au lieu de justice sur le Col de la Perheux. La dernière exécution a eu lieue en 1786.

Vers 1570 est construit à Rothau une nouvelle résidence plus confortable, un schloss et non plus un burg, où résident le nouveau représentant du seigneur. Pourtant la seigneurie est vendue en 1584 à Georges-Jean de Veldenz, comte palatin du Rhin et seigneur de La Petite-Pierre (Lützelstein). Son intérêt pour la seigneurie était lié aux filons ferrifères qu’il y exploitait déjà depuis plus d’une décennie. Sous son influence et celle de son fils Georges Gustave, une période industrielle intense se développa avec une diversification métallurgique inédite pour la région (fabrication de pièces d’armure, élaboration de pièces coulées, de fil de fer, atelier monétaire). La Guerre de trente ans (1618-1646) ruina totalement dès 1633 les installations, les villages, les fermes et le château de Rothau.

À la mort de Louis Léopold de Veldenz en 1694, le Ban de la Roche, en sa qualité de terre impériale, était déjà passée sous le gouvernement militaire du roi de France. Il resta cependant dans le patrimoine familial jusqu’en 1723, date où il passa aux mains de l’intendant d’Alsace, Nicolas Prospert Bauyn d’Angervilliers, lequel restaure les forges. Armand Jean de Saint Simon, marquis de Ruffec, en devient à son tour propriétaire jusqu’en 1758 avant de passer à Antoine René de Voyer d’Argenson, marquis de Paulmy. C'est sans doute en raison de ses fonctions (il est membre de l'Académie française) que le Ban de la Roche est élevé au titre de comté en 1762. Ainsi que ses prédécesseurs, le nouveau maître, toujours absent, se fait représenter par son bailli, lequel était notoirement connu pour ses excès de pouvoir. À sa suite apparaît le baron Jean de Dietrich qui le possédera jusqu’à la Révolution française. Ce dernier, propriétaire des forges de Jägertahl dans le nord de l’Alsace et appartenant à l’exemple de Georges Jean de Veldenz à la famille des grands industriels de l’Est de la France, développe et améliore la production métallurgique de ses installations de Rothau.

La Révolution provoqua le rattachement volontaire de plusieurs communes nouvellement formées du Ban de la Roche au département des Vosges afin d’échapper – pensait-on – aux lourdes impositions militaires qui les frappaient.

Cette situation dura jusqu’à la Guerre de 1870, date à laquelle l’ensemble des communes constituant le Ban de la Roche fut intégré dans l’empire allemand.

[modifier] La religion

Bien que les nobles de Rathsamhausen fussent convertis à la religion évangélique luthérienne dès avant 1576, le protestantisme ne fut introduit qu’à partir de 1584 par Georges Jean de Veldenz. Les premiers pasteurs paraissent avoir été originaire d'Alsace du nord. L'un d'eux est mieux connu : il s'agit de Michel Sutter en 1593. Ils furent bientôt préférés par d'autres originaires du comté de Montbéliard pour une question linguistique évidente. D'expression romane et de religion luthérienne, ils étaient "allemand" par l'origine de leur seigneurs les ducs de Wurtemberg.

Des premiers pasteurs en charges des deux paroisses de Rothau et de Waldersbach se distingue Jean Nicolas Marmet né à Glay. Ce dernier traversa l’une des plus dure période de l’histoire du Ban de la Roche de 1611 à son décès en 1675 (guerres de Trente ans et de Hollande), mais aussi parce qu’il fut tenu de siéger auprès du tribunal qui jugea et condamna plus de cinquante personnes pour sorcellerie (Hexengericht) de 1620 à 1622. Après une période de développement du piétisme introduite par le pasteur Léopold Georges Pelletier de 1707 à 1712 apparaît le pasteur Jean Georges Stuber de Strasbourg dont la personnalité dynamique et persévérante prépara la venue de son successeur le jeune pasteur Jean Frédéric Oberlin en 1767, lequel marqua profondément l’esprit des Bandelarochois avant de s’éteindre en 1826.

[modifier] Le peuplement

Le peuplement de ce pays de montagnes et de vallées a subit dans son histoire de profondes fluctuations : alors que le peuplement paraît atteindre plus de 1200 habitants après 1600, les désordres de la Guerre de Trente Ans le réduit à deux cents personnes en 1655. Le dépeuplement favorisa l’implantation relative d’une population en provenance de Suisse bernoise, elle-même contrariée par les contres coups de la Guerre de Hollande (1672-1678) avec par exemple l’incendie de Belmont en 1675. Cette population d’expression alémanique s’installa de préférence dans les fermes seigneuriales du Ban de la Roche comme aussi dans celles des autres seigneuries du voisinage (Évêché de Strasbourg, principauté de Salm, baillage de Villé).

[modifier] Les migrations

Au début du XVIIIe siècle apparaissent les premiers représentants bernois anabaptistes-mennonites fuyant leur pays où leur religion n’est plus tolérée. De passage au Ban de la Roche (ferme du Sommerhof), ils s’établiront de préférence dans la principauté de Salm où ils se regrouperont (hameau de Salm et des Quelles) et dans le versant de la Bruche du baillage de Villé (clairière du Hang). Pourtant, ce sont les suisses réformés (dénommés dans les registres de catholicité par "calvinistes") qui furent les plus nombreux et qui s'intégrèrent mieux et plus vite au sein des communautés villageoises.

L'apparente richesse de la ville de Barr contribua dès le début du XVIIe siècle à l'installation de plusieurs familles dans ses murs alors que d'autres familles mais plus rarement quittèrent le Ban de la Roche pour d'autres localités catholiques de la vallée de la Bruche. Les migrations de bandelarochois accompagnés de nombreux immigrants suisse vers l'Amérique est déjà attestée en 1736 dans les listes des voyageurs du bateau Princess Augusta à Rotterdam. Ce phénomène ne fut cependant pas l’exclusivité du Ban de la Roche mais elles furent néanmoins très actives dès le début du XVIIIe siècle et aussi de presque toute l'Alsace et de nombreuses autres régions germaniques ponctuellement jusqu’au XXe siècle.

[modifier] Généalogie

Enclave protestante depuis l’introduction de la Réforme en 1584 dans une vallée de la Bruche restée catholique, le Ban de la Roche constituait une région possédant sa personnalité, son identité propre, une certaine forme d’endogamie (le territoire de cette ancienne seigneurie constituant une unité pertinente pour l'étude historique et généalogique de la population). L'on se reportera aux articles détaillés parus sur Geneawiki sur plusieurs des villages composant le Ban de la Roche, à savoir :

Les Américains d'origine bandelarochoise, en particulier ceux devant faire appel aux fonds d'archives moraves ou Amish, témoignent de leur difficulté à faire le lien entre leur origine partagée et cette petite région aujourd'hui en France et connue sous le nom allemand de Steintal. Le Ban-de-la-Roche s'est jumelé en 1984 avec la ville états-unienne de Woolstock, dans l'Iowa, où de nombreux Alsaciens de la région ont émigré au XIXe siècle

Aujourd’hui, le nom Ban de la Roche s’est pérennisé ; il est synonyme d’unité territoriale marqué par des seigneurs remarquables et surtout par le protestantisme, par des personnalités telles que Georges Jean de Veldenz, Jean de Dietrich, les pasteurs Jean Nicolas Marmet, Georges Stuber, Jean Frédéric Oberlin, pour les plus célèbres. Il garde les limites de l’ancien comté de ce nom telles qu’elles existaient à la fin de l’Ancien Régime et malgré la tentative de groupement des communes qui en avaient adopté le nom.

[modifier] Notes

  1. Le mot comté a été barré après la Révolution

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

  • (de) Karl Eduard Boch, Das Steintal im Elsass, Strassburg, 1914.
  • (fr) Jean-Frédéric Oberlin, Lettres aux enfants sur Oberlin et le Ban-de-la-Roche, Strasbourg, 1841, 67 p.
  • (fr) Hugo Haug, Bibliographie. Ouvrages et articles concernant Jean Frédéric Oberlin, Louise Scheppler, Stouber et le Ban-de-la-Roche, Strasbourg, 1910, 9 p.
  • (fr) Denis Leypold, Le Ban de la Roche au temps des seigneurs de Rathsamhausen et de Veldenz (1489-1630), Oberlin, Strasbourg, 1989, 119 p.
  • (fr) Denis Leypold, Solange Hisler, Pierre Moll, Eva Braun, Jean Frédéric Oberlin au Ban de la Roche, Association du Musée Oberlin, 1991, 89 p.
  • (fr) Denis Leypold, La métallurgie du fer dans le massif Vosgien, Société savante d'Alsace, 1996, 529 p.

[modifier] Liens externes