Histoire de Mayotte

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Icône de détail Article connexe : Histoire des Comores.

Sommaire

[modifier] Origine du peuplement

Comme pour les îles de l'archipel des Comores, les premières migrations débutent au VIIIe siècle (le site archéologique de Koungou, au nord de Mayotte a fourni des charbons datés par analyse C14 du VIIIe siècle). L'origine de ces premiers habitants est multiple, Africains bantous et Austronésiens (ou Protomalgaches) originaires de l'archipel indonésien (Kalimantan et Sulawezi). Si l'arrivée d'Austronésiens se comprend par leur volonté de commercer avec l'Afrique, la présence bantoue serait le résultat soit de migrations volontaires venues coloniser l'ensemble comoro malgache, soit les signes d'une traite ancienne du fait des Austronésiens. En effet, au Xe siècle, le persan Borzog ibn Shariyar rapporte la présence de Wac wac (Austronésiens) à la côte du pays des Zenj (Zanzibar) venu quérir des esclaves. En effet, dès le IXe siècle, le commerce entretenu par les Austronésiens entre Madagascar et la côte africaine où se développe les sociétés swahili est très intense et repose notamment sur l'exportation de fer produit à Mayotte (site de Dembeni IXe-XIIe siècle.) Dès cette époque, des marchands arabo persans font escale dans l'archipel (nécropole de Bagamoyo).

Ces activités déclinent à partir du XIIIe siècle, sans doute suite au déplacement des populations Austronésiennes vers Madagascar. Mayotte, comme le reste de l'archipel entre alors sous l'influence de la côte swahili, influence qui se traduit à Ngazidja et à Ndzuani par l'installation de clans shirazi et par une islamisation des élites comoriennes.

[modifier] établissement du sultanat

Les sources historiques plus nombreuses (sources épigraphiques, relations de voyage européennes, archéologie et traditions orales) permettent de mieux connaître l'histoire de l'archipel à partir du XVe siècle.


Jusqu'à la fin du XVe siècle, l'île de Mayotte est morcelée en territoires indépendants commandés par des chefs, "les Mafani". Ces derniers, hommes ou femmes (islamisés comme en témoignent les patronymes musulmans que la tradition leur attribue) constituent une aristocratie d'influence swahili et malgache héritière des siècles passés. Venu d'Anjouan où le clan shirazi est établi depuis plusieurs générations, Attoumani ben Mohamed, par mariage avec la fille du puissant fani de Mtsamboro (Mwalimu Poro) fonde la première dynastie princière de l'île. De ce mariage naquit Jumbe Amina qui épousa le sultan d'Anjouan, Mohamed ben Hassan. Par ce mariage, le sultanat d'Anjouan, dominant déjà Mohéli, étendait son influence à Mayotte. De ce mariage naquit Aïssa ben Mohamed. Celui-ci hérita, par sa mère Amina, du droit de régner sur le sultanat de Mayotte, qui dès lors affirma son indépendance vis à vis du sultanat d'Anjouan. La capitale fut alors transférée de Mtsamboro à Tsingoni (Chingoni) vers 1530. En 1538 était inaugurée la mosquée royale en partie conservée aujourd'hui. Le règne d'Aïssa (40 ans d'après certaines traditions) est une période de prospérité pendant laquelle le sultanat est consolidée (domination de tous les anciens Mafani qui conservent néanmoins une partie de leurs anciens pouvoirs en exerçant localement la fonction de vizir), affirme son indépendance vis à vis d'Anjouan (fortification de localités de la côte occidentale -face à Anjouan-), et s'encre dans la culture swahili (développement dans plusieurs localités de quartiers urbains en pierre, alliances matrimoniales avec les clans hadrami de l'archipel swahili de Pate, "plaque tournante" entretenant des réseaux commerciaux entre Madagascar, les Comores et la péninsule sudarabique (notamment pour la traite des esclaves malgaches). C'est en 1557, durant le règne d'Aïssa, qu'une flotte portugaise commandée par Baltazar Lobo da Susa explore l'île, seulement signalée par les Portugais en 1506.

[modifier] le temps des "Sultans batailleurs"

Bien que conservant le titre prestigieux de "shirazi", les successeurs d'Aïssa sont des princes swahili originaires de Paté ou d'Hadramaout. Ceux-ci vont abandonner les pratiques matrilinéaires de transmission du pouvoir pour la patrilinéarité. Le fin du règne du sultan Omar ben sultan Ali (1636-vers 1680) marque la fin de la prospérité du sultanat de Mayotte. Celui-ci est en effet affaibli par une série d'épisodes contribuant à la ruine et le dépeuplement de l'île: d'une part, les successeurs d'Omar ne vont cesser de se disputer le pouvoir, entraînant des "cascades de révolutions de palais", d'autre part, Mayotte est fréquentée entre 1680 et 1720 par des pirates européens refoulés des Caraïbes. Daniel Defoe attribue à l'un d'entre eux, Nathaniel North, le pillage de Tsingoni en 1701. Cet affaiblissement du sultanat de Mayotte ravive les prétentions du sultanat d'Anjouan à rétablir son hégémonie sur l'archipel. A partir des années 1740, des expéditions armées sont régulièrement dirigées depuis Anjouan sur Mayotte, causant la ruine de nombreuses localités. Enfin, à partir des années 1790, et ce, jusqu'en 1820, Mayotte, tout comme le reste de l'archipel, est pillée par les pirates Malgaches Betsimisaraka et Sakalava, en quête d'esclaves pour alimenter la traite en direction des plantations françaises de l'Ile de France (île Maurice) et de l'île Bourbon (la Réunion).

Après un siècle de troubles, Mayotte est totalement dépeuplée passant de 12 000 habitants au XVIe siècle à moins de 5000 lors des premiers recensements effectués après la prise de possession de l'île par les Français en 1843. De nombreuses localités pourtant jadis prospères sont abandonnées telle la capitale Tsingoni, délaissée vers 1795 pour le rocher fortifié de Dzaoudzi. La Grande Terre n'est alors réellement peuplée que sur la pointe Choa (Pointe Mahabou à Mamoudzou), tandis que de rares hameaux occupent le reste de l'île. MP

[modifier] Période coloniale

Pour la période de 1500 à 1843 voir la liste des sultans de Mayotte.

  • 1832 : conquise par Andriantsoly, roi de Iboina à Madagascar.
  • 1833 : conquise par Mohéli.
  • 19 novembre 1835 : conquise par Anjouan.
  • 1836 : indépendance.
  • 25 mars 1841 : établissement d'un protectorat français qui est ratifié le 13 juin 1843. Mayotte dépend administrativement du Gouverneur de la Réunion.
  • 9 décembre 1846 : ordonnance royale portant sur l’abolition de l'esclavage à Mayotte.
  • 1846-1886 : Mayotte, colonie sucrière. [1]
  • 1864 : première école publique à Dzaoudzi.
  • 30 mars 1896 : le protectorat s'étend sur l'ensemble de l'archipel, Mamoudzou en est la capitale.
  • 25 juillet 1912 : annexion par la France ; l'ensemble de l'archipel est sous dépendance administrative de Madagascar.
  • Décembre 1974 : Mayotte est la seule île de l'archipel à voter positivement aux référendums pour conserver ses liens avec la France. Les autres îles déclarent leur indépendance. Le vote est de 63,8% en faveur de la conservation de ce lien, alors qu'il n'est que de 0,6% dans les autres îles (soit 99,4% contre). La société mahoraise, plus encore que celles des autres îles des Comores, est alors très peu influencée par le mode de vie occidentale et vit au rythme de la vie musulmane traditionnelle.
  • 24 décembre 1976 : Mayotte confirme son premier vote et devient une collectivité territoriale. L'assemblée générale des Nations unies et l'Union africaine condamnent. Si le droit français s'applique, le droit traditionnel musulman peut également y être appliqué au gré des justiciables par les tribunaux locaux présidés par les cadis (de l'arabe قاد signifiant juge).

[modifier] Mayotte, collectivité française

Depuis 1975, l'île de Mayotte est toujours revendiquée par l'Union des Comores et l'Union africaine reconnaît ce territoire comme occupé par une puissance étrangère. En 1976, La RFI des Comores a saisi le Conseil de sécurité des Nations unies qui rejette la demande de reconnaissance de la souveraineté de la RFI des Comores sur Mayotte par 11 voix pour et une voix contre (« véto français »)[2]. Durant ce temps, les élus de Mayotte, fortement poussés par la population, tentent d'obtenir de la France le statut de département français afin d'assurer un ancrage définitif de l'île au sein de la République Française.

À partir des années 1990, on note un fort investissement économique français et un profond changement de la société mahoraise.

En 1995 : face à la croissance de l'immigration en provenance des autres îles commoriennes, le gouvernement Balladur abolit la libre circulation entre Mayotte et le reste des Comores. Les Comoriens sont dès lors soumis au régime des visas. Le 27 janvier 2000, les principaux partis politiques de Mayotte signent « l’accord sur l’avenir de Mayotte » et sur son édification en collectivité départementale.

Le 11 juillet 2001, une nouvelle consultation électorale approuve à 73% la modification du statut de l'île qui change pour un statut assez proche de celui des départements d'outre-mer : une collectivité départementale d'outre-mer. Le 28 mars 2003, la constitution française est modifiée et le nom de Mayotte est énuméré dans l'article 72 concernant l'outre-mer.

Du côté des Comores, la question de Mayotte perd peu à peu son importance. Ainsi, depuis 1995, la question de Mayotte n'a plus été inscrite à l'ordre du jour de l’Assemblée générale de l'ONU. En 2005, le colonel Azali Assoumani, président des Comores depuis 1999, a déclaré qu'« il ne sert plus à rien de rester figé dans nos positions antagonistes d’antan, consistant à clamer que Mayotte est comorienne, pendant que les Mahorais eux se disent Français ». Il autorisera donc Mayotte à se présenter aux jeux des îles de l'océan Indien sous sa propre bannière.

Depuis le rattachement à la France, l'immigration clandestine venant essentiellement d'Anjouan (l'île la plus proche) n'a fait que s'accentuer. En 2005, près de la moitié des reconduites à la frontière effectuées en France l'ont été à Mayotte.

Cette question de l'immigration crée aujourd'hui des tensions locales. Jusqu'à présent, les immigrés clandestins comoriens, venus chercher l'Eldorado, servaient souvent de main d'œuvre bon marché, dans des conditions de travail proches de la condition d'esclave, pratique courante depuis des années et exercée en toute impunité par certains entrepreneurs mahorais. Aujourd'hui, alors que la politique intérieure de la France s'est resserrée et que la démographie locale ne fait qu'augmenter, le désir de refouler ces clandestins vers les Comores se fait de plus en plus sentir. Aucune structure n'existe pour aider ces clandestins, aucun service social hormis la DDASS, et la coopération entre la France et les Comores reste embryonnaire sur la question de la santé, malgré la présence de coopérants français médicaux à Anjouan.

Dzaoudzi-Labattoir a été le chef-lieu transitoire de Mayotte. Mamoudzou en est devenu le chef-lieu par arrêté ministériel.

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. http://www.insee.fr/fr/insee_regions/reunion/zoom/mayotte/ile/presentation.htm [INSEE Mayotte]
  2. Pour : Bénin, Guyana, Libye, Panama, Tanzanie, Chine, Japon, Pakistan, Suède, Roumanie, URSS ; Contre : France ; Abstention : États-Unis, Italie, Royaume-Uni
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