Cloche

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Pour les articles homonymes, voir Cloche (homonymie).
Cloche d'une chapelle du Cantal
Cloche d'une chapelle du Cantal

Une cloche est un objet simple pour émettre du son. C'est un instrument de percussion et un idiophone. Sa forme est habituellement un tambour ouvert et évidé d'une seule pièce qui résonne après avoir été frappé. Un objet de cette forme est dit campaniforme. La partie qui frappe le corps de la cloche est soit un battant, sorte de langue suspendue dans la cloche, soit une petite sphère libre comprise dans le corps de la cloche, soit un maillet séparé qui frappe la cloche depuis l'extérieur. Les cloches sont surtout faites de métal, mais certaines petites cloches peuvent être en céramique ou en verre. Les cloches sont fondues (fabriquées) par le fondeur de cloches (ou encore « saintier »).

Sa forme la plus classique est la cloche d'église, qui est suspendue dans une tour (le clocher ou le beffroi) et sonnée en la faisant osciller au moyen d'une corde, le battant accroché à l'intérieur frappant le corps de la cloche. Cette pratique est connue comme « sonner la cloche », et cela produit un son à la fois grave et clair. Le métal traditionnel pour ces cloches est un alliage : le bronze (anciennement airain), comprenant environ 20 % d'étain. Connu comme du métal à cloche, cet alliage est aussi le même pour les cymbales.

Les cloches ont été utilisées dans les églises chrétiennes depuis le VIIe siècle. Mais ce ne fut qu’à partir du XIIIe siècle que les progrès en matière de conception et de technologie de la fonderie permirent la création de spécimens de grande taille, associés généralement aux cathédrales. Ces cloches furent créées en faisant couler du bronze, le seul alliage produisant des couleurs harmonieuses, dans un moule en briques couvert de cire.

Sommaire

[modifier] Bénédiction

Emmanuel, le bourdon de Notre-Dame de Paris
Emmanuel, le bourdon de Notre-Dame de Paris

Lors de l'inauguration d'une cloche d'église, l'usage veut qu'une cérémonie religieuse lui soit consacrée, appelée baptême, bénédiction ou consécration, durant laquelle un nom est attribué à la cloche. La tradition considère en effet la cloche comme une personne, et lui affecte un parrain et une marraine.

[modifier] Signal

Les cloches des églises pouvaient autrefois être utilisées comme système d'alerte pour des événements graves comme le feu ou les invasions (on sonnait alors le tocsin, ou à toute volée : à grande vitesse). Le type de sonnerie de cloches d'églises accompagnant les cérémonies funèbres s'appelle quant à lui le glas : c'est un son régulier au tempo très lent.

Dans certaines régions, comme en Lozère (France), certains clochers sont dénommés les « clochers de tourmente », ils servaient à guider les voyageurs ou les habitants par temps de neige.

Cependant, les cloches ont pour fonction normale de signaler le passage du temps. Dans ce cas, une séquence particulière de sons peut être produite par un groupe de cloches pour indiquer l'heure et ses subdivisions. L'une des plus connues et celle dite des quart de Westminster, une série de seize notes qui est émise par le carillon de l'horloge du palais de Westminster dont la grande cloche qui sonne l'heure même jouit du nom de Big Ben. La plupart du temps, seules les heures pleines sont sonnées (en général à raison d'un coup par heure, en allant de 1 à 12), parfois en deux séries de coups : le pic et le repic (ou rappel). Dans certains cas, on arrête le carillon durant la nuit pour préserver la quiétude des riverains.

On trouve des systèmes de production de son basés sur des cloches miniatures dans des alarmes, des sonneries de téléphone, de carillon de portes d'entrée ou de réveille-matin par exemple. Pour les sons se répétant rapidement produits par de tels systèmes, le terme est sonnette.

[modifier] Symbole

Les cloches symbolisent généralement le mariage.

Les catholiques racontent volontiers à leurs enfants que les cloches rapportent les œufs de Pâques lors de leur retour de Rome après la Semaine sainte. Cette tradition s'explique par le fait que pour marquer le deuil du Christ, on s'abstient de sonner les cloches le Vendredi et Samedi Saint. Des crécelles sont alors utilisées dans les communautés religieuses. Ce n'est qu'au Gloria[1] de la Messe de la Vigile Pascale que les cloches résonnent à nouveau.

[modifier] Instrument de musique

Les cloches peuvent être de toutes les dimensions : depuis des accessoires de robe minuscules (clochettes ou grelots) jusqu'à celles destinées aux églises, pesant plusieurs tonnes.

Les cloches sont utilisées comme des instruments de musique, organisées en carillon : un ensemble d'au moins 23 cloches couvrant tout ou partie de la gamme. Un tel ensemble peut être commandé, soit par un seul musicien par l'intermédiaire d'un clavier et d'un système de transmission, soit par un ensemble de joueurs de cloches, commandant chacun à la main une ou plusieurs cloches aux tons différents. Certains carillons sont composés de cloches dont le corps est constitué d'un simple tube métallique : ce sont des cloches tubulaires.

Dans la région du Valais en Suisse, il existe aussi un genre particulier de carillon. Celui-ci, dit carillon valaisan, est constitué d’un nombre de cloches variant entre trois et environ une dizaine. Il n’y a pas de clavier, le carillonneur, assis sur un banc parfois au milieu du beffroi, parfois à l’étage en dessous, actionne directement une mécanique très simple constituée de cordes et de chaînes reliées aux battants des cloches.

Des cloches sans battant en métal sont un composant important de la musique latino-américaine. Elles reprennent la forme des cloches de campagne utilisées pour les animaux, appelées aussi « cloches à vaches » (le terme en espagnol est d'ailleurs campana pour désigner une cloche). Elles sont frappées avec un bâton ou une baguette ; le son est modulé en touchant différentes parties et en l'assourdissant avec la main.

Dans divers endroits du monde (notamment en Afrique de l'ouest), des paires ou des trios de cloches sans battant sont jointes de manière qu'elles puissent être frappées séparément ou ensemble. La plus fréquente est l'agogô, aussi utilisé au Brésil.

[modifier] Sonnaille et clarine

Petite cloche à main
Petite cloche à main

Dans les zones où le cheptel bovin, ovin ou caprin est libre de stabulation, ou dans les transhumances, des clochettes appelées sonnailles peuvent être attachées à leur cou pour identifier les animaux appartenant à un troupeau particulier et pour aider à les trouver notamment lorsque l'on veut les rassembler. Ces cloches sont généralement fabriquées en tôle souvent rivetée, de forme trapézoïdale, cylindrique ou en forme de coupe. Il existe des concours de « musique pastorale » les utilisant. Le terme sonnaille s'applique aux cloches qui sont forgées ou formées à l'aide de plaques soudées. Les cloches de vaches en bronze fondue sont appelées clarines.

Dans la musique cubaine, une cloche appelée cencerro est utilisée comme instrument de percussion. Le même musicien jouant aussi les bongos, il est appelé bongocerro.

Il existe des collectionneurs de cloches appelés campanophiles. Ils recherchent autant des formes, des matières, des inscriptions, des sons différents.

[modifier] Expressions

  • Avoir la cloche fêlée. Être fou (cloche étant ici synonyme de tête).
  • Cloche à/de plongeur. Appareil en forme de cloche permettant de travailler sous l'eau.
  • Courbe en cloche. En mathématiques, désigne la représentation graphique de la loi normale (gaussienne), utilisée en probabilités.
  • Déménager/Partir à la cloche de bois. Partir sans se faire remarquer, et sans laisser d'adresse.
  • Se faire sonner les cloches. Se faire fortement réprimander.
  • Se taper la cloche. Consommer un bon repas.
  • Son de cloche. Opinion ou version particulières concernant une affaire ou un évènement.
  • Démarrer à la cloche. Attendre le dernier 400m pour accélérer en course à pied.
  • A cloche-pied. Se déplacer en sautillant sur un pied.
  • Etre une cloche. Etre un idiot, un imbécile (expression corse).

[modifier] Fabrication

Une cloche en coupe
Une cloche en coupe

La fonte d'une cloche[2] se fait à partir d'un moule dans lequel on versera un alliage appelé airain (78% de cuivre et 22% d'étain). Le moule lui-même comprend deux parties qui correspondent à la forme intérieure et extérieure de la future pièce.

La fabrication d'un noyau en briques réfractaires, sorte de cheminée à l'intérieur de laquelle on entretient un feu de charbon de bois (n° 1), constitue la première étape. Ce noyau est recouvert de plusieurs couches de « terre » – en réalité un mélange d'argile, de crottin de cheval et de poils de chèvre (n° 2) – lissées à l'aide d'un gabarit en laiton. Il existe deux formats de gabarits (n° 2), l'un définissant la forme intérieure de la cloche, l'autre la forme extérieure (n° 3). Malgré leur ressemblance, ils sont bien différents, ce que la coupe d'une cloche permet de visualiser ci-contre.

Une « fausse cloche », composée d'argile et de poils de chèvre, est construite à l'aide du gabarit extérieur. Une fois lissée avec du gras de bœuf, elle reçoit décors et inscriptions en cire, notamment son nom, la date et le nom du donateur. Ce travail très minutieux s'effectue élément par élément. Pour l'estampage des ornements, on utilisait autrefois des matrices en bois gravé (n° 4), une technique qui imposait un dessin préalable au miroir. Désormais de nouveaux matériaux permettent de concevoir le décor à l'endroit et sont également plus souples.

La « fausse cloche » – préfiguration de la pièce finale – est à son tour recouverte de terre. En séchant, cet enduit constitue une sorte de carapace, que l'on appelle la chape. Au bout de quelques jours, lorsque les moules sont bien secs, on les ouvre pour libérer la « fausse cloche ».

On enterre alors le noyau, la chape et le moule de la couronne dans une fosse remplie d'une terre soigneusement damée. Le métal porté à une température de 1180° dans un four y est déversé au moyen d'un canal en briques traversant la fosse. Les très grosses pièces, d'un poids supérieur à 500 kg, sont placées dans une fosse spéciale (n° 6). Le lendemain on dégage la terre et quelques jours plus tard on casse le moule, manuellement, avec des sortes de marteaux, pour retirer la cloche définitive (n° 8). Il reste à la nettoyer et à vérifier sa sonorité, que l'on rectifie au besoin en la polissant. On ajoute alors les accessoires de suspension et le battant.

Information Cliquez sur une vignette pour l’agrandir.


[modifier] Fonderies

  • La fonderie Paccard,a été crée en 1796 à Quintal, transférée en 1856 à Annecy-le-Vieux, puis plus récemment 1989 à Sévrier (74), est la plus grosse fonderie française de cloches. Un musée campanaire a été crée en 1984. Auteur de records tel que « la Savoyarde » (18,835 kilos) installée au Sacré-Cœur de Montmartre en 1892, et plus récemment de la cloche du Millénaire « Millenium Bell » (33 tonnes) à destination des États-Unis en 1999. C'est le spécialiste des carillons depuis 1937, Chambery 30 tonnes 70 cloches et bien d'autres
  • À Strasbourg, la fonderie Voegele créée en 1908 est au service du patrimoine campanaire.
  • À Labergement-Sainte-Marie, la fonderie Obertino est la plus ancienne entreprise de France à fondre des cloches en bronze pour le bétail. Cette famille originaire du Piémont italien - comme la plupart des familles de fondeurs suisses et français du XIXe et XXe siècles tel les Albertano, Barrinotto... -, s'est installée dans le Haut-Doubs en 1834. Une branche de la famille Obertino s'est installée à Morteau au début des années 1930, et produit aussi des cloches de vaches. À Labergement ainsi qu'à Morteau sont produites artisanalement des clarines, c'est-à-dire des cloches en bronze, pour l'usage agricole et actuellement aussi pour le tourisme et les cadeaux. Chaque cloche est unique, car lorsqu'elle est coulée, il faut briser le moule en sable pour effectuer les finitions et la mettre en vente.


[modifier] Notes et références

  1. Le Gloria (comme l'Alléluia) n'est pas chantés durant tout le Carême.
  2. Les explications qui suivent s'appuient sur la documentation et la visite guidée de la Fonderie Cornille-Havard à Villedieu-les-Poêles où ont également été prises les photos de la galerie.

[modifier] Voir aussi

Pages sur ce thème sur les projets Wikimedia :

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

  • (en) Thomas D. Rossing (dir.), Acoustics of Bells, R. Van Nostrand, 1984
  • (en) Edwards V. Williams, « The Bells of Russia. History and Technology », Revue de musicologie, T. 73, n° 1, 1987, p. 122-123
  • (de) Margarete Schilling, Glocken : Gestalt, Klang und Zier, VEB Verlag der Kunst, Dresde, 1988, 369 p.
  • (fr) Frédéric Baillot, Eric Brottier, Christine Laugie-Vanhoutte et Eric Sutter, Beffrois et carillons, Assecarm, 1988, 179 p. (ISBN 2-950266-00-2)
  • (fr) Joseph Berthelé, Enquêtes campanaires. Notes, études et documents sur les cloches et les fondeurs de cloches du VIIIe au XXe siècle, Montpellier, 1903, 758 p. 8º
  • (fr) Joseph Berthelé, Archives campanaires de Picardie, Abbeville et Montpellier, 1911, 491 p.
  • (fr) Collectif, Cloches et sonnailles. Mythologie, ethnologie et art campanaire, Edisud/ADEM, 1996, 176 p. (ISBN 2-85744-868-6)
  • (fr) Collectif, Cloches et carillons, CEFAL, Liège, 1998, 486 p.
  • (fr) Alain Corbin, Les cloches de la terre. Paysage sonore et culture sensible dans les campagnes au XIXe siècle, Albin Michel, 1994, 360 p. (ISBN 2226067523)
  • (fr) Jacqueline Goguet, Le carillon des origines à nos jours, Le Cerf-volant, 1958, 127 p.
  • (fr) Hervé Gouriou, L'Art campanaire en Occident. Histoire, facture et esthétique des cloches de volée – Le cas français, Editions du Cerf, 2006, 336 p. (ISBN 2-204-07612-0)
  • (fr) Alain Jouffray, Art campanaire, Centre-Musée européen de l'art campanaire, 1993, 170 p.
  • (fr) Gérard Lomenec’h, Cloches et carillons de Bretagne, Coop Breizh, 2000, 207 p. (ISBN 9782843460746)
  • (fr) J. Nicourt, « Fabrication des cloches fondues. Permanence des techniques », Ethnologie Française, t. 1, 1971, n° 3-4, p. 55-82
  • (fr) Jean-Pierre Rama, Cloches de France et d'ailleurs, Le Temps Apprivoisé, 1993, 240 p.
  • (fr) Lucie Rault-Leyrat et Alain Jouffray, La Voix du dragon : trésors archéologiques et art campanaire de la Chine ancienne, Cité de la musique, 2000
  • (fr) Arnaud Robinault-Jaulin, Cloches. Voix de Dieu, messagères des hommes, Desclée de Brouwer, 2003, 125 p. (ISBN 2904365389)
  • (fr) Eric Sutter, La grande aventure des cloches, Ed. Zélie, 1993, 280 p.
  • (fr) Eric Sutter, Ressources documentaires concernant les cloches, clochettes et carillons, SFC, 1996, 115 p.

[modifier] Presse spécialisée

  • (en) Bells and bellrining. A quarterly journal devoted to their history
  • (fr) L'Art campanaire
  • (fr) Patrimoine Campanaire

[modifier] Filmographie

  • (de) Wo Himmel und Erde sich berühren. Eine klangvolle Bilderreise durch die Welt der Glocken, Butzon & Bercker, Kevelaer, 2006
  • (fr) Au Fil des cloches de Didier et Jacques Lannoy, 1994
  • (fr) Sons de cloches d'Alain Leonard-Matta, 1996

[modifier] Liens externes