Discuter:Chômage/Travail

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Sommaire

[modifier] Définitions du chômage

En France, le chômage connaît deux grandes définitions, l’une proposée par le Bureau International du Travail (BIT), l’autre donnée par l’Agence Nationale pour l’Emploi (ANPE).

[modifier] Définition du Bureau international du travail

Selon le BIT, est chômeur toute personne qui rempli les critères suivants :

  • « être sans travail », c’est-à-dire n’avoir même pas d’activité minimale, même de période très courte ;
  • « être disponible pour travailler », le chômeur doit être en mesure d’accepter toute opportunité d’emploi qu’on lui présente, il ne doit pas avoir d’autres obligations ;
  • « rechercher un emploi ». L’INSEE qui mesure le chômage au sens du BIT demande la nature de l’emploi recherché et les démarches entreprises pour le trouver.

[modifier] Définition de l’Agence nationale pour l’emploi

L’indicateur de l’ANPE fournit le chiffre des demandes d’emplois en fin de mois (DEFM). Il s’agit des « personnes sans emploi immédiatement disponibles, tenues d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi , à la recherche d’un emploi à durée immédiate et à temps plein.

[modifier] Différences entre les deux approches

Les deux définitions différentes impliquent que les mesures du chômage varie d’une statistique à l’autre. Ainsi, les personnes au chômage non inscrites à l’ANPE seront recensés par le BIT. Inversement, les demandeurs d’emplois exerçant une activité inférieure à 78 heures par mois peuvent être comptabilisés par l’ANPE s’ils remplissent les autres critères.

Sont ignorés des deux définitions les personnes chômeuse découragées qui ont renoncé à rechercher activement un emploi. Beaucoup d’entre elles sont toutefois inscrites à l’ANPE, et donc comptabilisées en fin de mois. Celle non inscrites peuvent se signaler à l’occasion des recensements de la population en se déclarant chômeur.

[modifier] Le chômage : approche descriptive

[modifier] Historique

Migrant mother, Dorothea Lange, États-Unis, 1936
Migrant mother, Dorothea Lange, États-Unis, 1936

Le chômage, défini comme une inactivité subie, existe déjà dans les sociétés traditionnelles, mais son inexistence statistique – en France, la première statistique date du recensement de 1896 - le rend difficilement quantifiable avant le XXe siècle. On peut toutefois avancer le chiffre probable de 6% à 8% de chômeurs dans la première moitié de XIXe siècle, ce qui permet à Karl Marx de décrire une « armée industrielle de réserve » dans Le Capital (1867).

Après avoir décrue à la Belle Époque, le chômage réapparaît après la seconde guerre mondiale suite aux crises de reconversion et malgré la forte croissance des années 20. Il atteint de taux aux alentour de 10% au Royaume-Uni et en Allemagne. Une hausse spectaculaire suit la crise économique de 1929, le chômage atteignant des pics de 25% aux États-Unis et de 33% en Allemagne. Seule l’Allemagne réussit à résoudre réellement le problème dans un contexte politique particulier, le nazisme qui s’installe grâce au désastre économique.

Les Trente Glorieuses qui suivent la Seconde Guerre mondiale sont marquées par un chômage très faible avoisinant les 2% en Europe occidentale, vacillant entre 4 et 5% en Amérique du Nord et gravitant autour de 1% au Japon.

Le chômage commence à croître dès la fin des années 1960, mais connaît une hausse significative suite au choc pétrolier de 1973. Dix ans plus tard, il touche 8.3% de la population des pays de l’OCDE. La révolution conservatrice au Royaume-Uni et aux États-Unis avec les élections de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan conduisent à une baisse timide du chômage dans ces pays, une baisse importante du chômage est aussi constatée en Allemagne fédérale jusqu’à la réunification.

En 1994, le chômage touche 7.8% de la population active dans les pays de l'OCDE. Depuis, il a connu une baisse importante aux États-Unis, au Royaume-Uni et dans d’autres pays d’Europe comme l’Irlande ou l’Espagne. Il reste endémique en France, ainsi qu’en Allemagne depuis le rattachement des Länder de l’Est.

[modifier] Comparaisons entre pays

Taux de chômage en France, aux États-Unis, en Allemagne et dans l'OCDE depuis 1994
Taux de chômage en France, aux États-Unis, en Allemagne et dans l'OCDE depuis 1994[1]

Aux États-Unis, la logique marchande de la flexibilité domine le marché du travail. Les salariés sont payés selon leur efficacité supposée, et les emplois précaires se multiplient autant dans le secteur industriel et que dans le tertiaire, permettant aux travailleurs non qualifiés de rester compétitifs. D’après Philippe d’Iribarne[2], les emplois précaires sont plus facilement acceptés car la hiérarchie sociale et l’honorabilité sont moins problématiques. Le pays est donc marqué par un chômage frictionnel important mais relativement stable. La part du chômage de longue durée, c’est-à-dire supérieur à un an, est de 6.1% en 2001[3].

Des pays scandinaves comme la Suède sont marqués par une très forte solidarité entre citoyens et des aides très importantes aux travailleurs les moins employables. En revanche, les chômeurs sont tenus d’accepter les emplois qui leur sont proposés.

Dans la plupart des pays européens, le haut niveau de protection social vient répondre à l’importante identification des individus à leur emploi et à leur poste dans la hiérarchie professionnelle. La logique du marché est réfuté parce qu’elle conduit au déclassement social des individus. Le chômage est haut, et la part du chômage de longue durée importante : 43.7% dans l’Europe des 15 et de 37.7% en France[4]. Selon Philippe d’Iribarne[5], c’est cette logique sociale qui explique la différence d’attitude entre les pays industrialisés.

[modifier] Le halo du chômage

Le « halo du chômage », d'aprés J. Freyssinet. Quelques exemples de situations intermédiaires
Le « halo du chômage », d'aprés J. Freyssinet[6]. Quelques exemples de situations intermédiaires

D’après les définitions statistiques, chaque individu peut rentrer dans trois catégories. Chômeur s’il remplit les critères de la définition, actif occupé s’il travaille effectivement, inactif s’il ne travaille pas et ne remplit pas les critères de définition du chômage (exemple : les retraités, les enfants …).

La crise économique entamée dans les pays occidentaux à partir des années 1970 a contribué à créé de nouvelles situations rendant cette catégorisation parfois incertaine.

On remarque d’abord qu’un certain nombre de personnes se trouvent entre une situation d’inactivité et de chômage (cf. zone 3). Parmi elle, beaucoup désirent travailler mais ne sont pas comptabilisées parce qu’elles ont trop peu de chance de retrouver un emploi (et sont donc dispensées de recherche d’emploi), parce qu’elles ont renoncé, par découragement, à rechercher un emploi. Dans ce dernier cas il peu s’agir de chômeurs de longues durée subissant des cas d’extrême exclusion sociale, de mères au foyer désirant travailler mais n’entamant pas de démarche à l’ANPE, ou encore d’étudiant choisissant de poursuivre leur études à défaut d’avoir pu se faire embaucher.

La zone floue entre l’emploi et le chômage (cf. zone 2) s’accroît avec la multiplication des formes atypiques d’emplois. Les travailleurs subissant un temps partiel non voulu, les personnes inscrites à l’ANPE ayant travaillé plus de 78 heures par mois, et les personnes possédant un emploi précaire.

De même, on trouve des situations intermédiaires entre l’emploi et l’inactivité (cf. zone 1), situation occupé par les individus faisant le choix de travailler moins. Enfin, les travailleurs clandestins et les employés « au noir » ne sont catégorisables dans aucun des trois groupes (cf. zone 4).


Le sous-emploi en France en 1996, d'aprés Jacques Freyssinet[7]
Chômeurs au sens du BIT Chômage « déguisés » Absence de recherche d'emploi Temps réduit subi Précarité subie (intérim, CDD... subis) Total du sous-emploi
demandeurs d'emploi en formation cessation anticipées d'activité chômeurs « découragés » incapable de chercher un emploi
353 467 242 321
3082 820 563 1572 663 6700

[modifier] Sociologie du chômage

[modifier] Sélectivité du chômage

Certaines populations sont plus susceptibles de subir le chômage, soit parce qu’elles ont une infériorité économique, soit qu’elles ont une faible volonté de travailler ou encore qu’elle subisse un phénomène de discrimination. Ces causes de chômage peuvent se combiner.

L'infériorité économique est liée tout à la fois aux compétences de l’individu qu’aux pratiques des employeurs. Le rôle du stéréotype revêt au final une importance semblable aux qualités intrinsèque d’un individu donné. Parmi les facteurs qui fondent la compétitivité d’un individu sur le marché du travail, on trouve autant les capacités physique et intellectuelle, que le milieu social d’origine, l’ethnie, la zone géographique d’habitation. L’une des variables les plus discriminantes est l’absence de qualifications[8] (voir tableau).

Taux de chômage selon le diplôme en 1999[9]
Sans diplôme ou CEP BEPC, CAP ou BEP Baccalauréat Bac +2 Diplôme supérieur
17.9 11.1 10.7 7.1 6.3

La volonté de travail se manifeste par la capacité de l’individu à accepter des postes peu désirés à de faibles salaires et à se résoudre à compenser les obstacles économiques à son emploi en acceptant certaines contraintes comme la mobilité en cas de problème géographique[8].

[modifier] Des expériences différentes

Parmi les catégories sociales modestes, le travail est un facteur important d’honneur et d’estime personnel et les esprits font plus rapidement une opposition entre travailleurs et fainéants. Le chômage est donc vécu comme une perte d’identité et de dignité qui s’aggravent à l’occasion de chaque échec pour recouvrer un emploi ou lorsque le chômeur doit entamer les démarches administrative qui parachèvent sa catégorisation de chômeur. L’ennui est de plus bien plus profond dans ces milieux où les opportunités de s’adonner à des activités alternatives (culturelles, associative, sportives …) sont plus rares que dans les milieux aisés[8].

Longtemps les femmes sans emploi ne se considéraient pas comme chômeuse mais simplement « non payés ». Aujourd’hui, leur réaction est relativement semblable à celle des hommes. Elles refusent souvent le statut de « femme au foyer » et la perte des liens sociaux qui dépendaient de l’exercice de leur profession. Avec l’apparition des familles mono-parentales, elles peuvent vivre des situations de désastre économique et de culpabilité vis à vis du foyer dont elles ont la charge. Quelques femmes ayant des enfants en bas-âge parviennent à se justifier leur chômage subi par les avantages familiaux qu’il procure[8].

Les cadres au chômage vivent le plus souvent une expérience différente de celle des catégories professionnelles plus modestes. Pour le cadre, il s’agit de rejeter le statut de chômeur en profitant du temps libre dans une optique professionnelle. Ils consacrent un temps important pour retrouver un emploi d’un certain niveau. Ils profitent aussi de leur inactivité temporaire pour suivre des formation ou se consacrer à la lecture d’ouvrage professionnel lié à leur domaine de compétence. Toutefois le chômage remet en cause leur plan de carrière, un des points les plus fondamentaux de leur identité sociale. Comme les chômeurs plus modestes, ils subissent progressivement une dégradation de leurs liens sociaux, mais bien moins rapidement[8].

[modifier] Les conséquences sociales

[modifier] Théorie économique

[modifier] Typologie du chômage

La science économique distingue plusieurs types de chômages selon leur cause.

  • Le chômage structurel découle de l’inadéquation qualitative entre l’offre et la demande de travail. Il est le plus souvent lié à l’inadaptation des qualification, qui découle elle même des évolutions historiques (déclin des industries historiques) ou de la mauvaise orientation des systèmes de formation. Le chômage structurel comprend lui même plusieurs types de chômages.
  • A l’inverse, le chômage conjoncturel est lié à l’évolution négative de l’économie, au ralentissement de l’activité.
  • Le chômage frictionnel découle du temps que prend un travailleurs pour trouver l’emploi répondant le mieux à ses talents, à ses aspirations ou encore à ses ambitions en terme de salaire.

Note : les chômages structurels et frictionnels forment ce que les néoclassiques appellent le chômage naturel (cf. infra)

  • Le chômage saisonnier, lié aux variations d’activité au cours de l’année dans certains secteurs économiques (exemple : le tourisme).
  • Le chômage technique est subi par des travailleurs dont les moyens de production sont devenus inutilisables.

Les principaux débats théoriques sur le chômage opposent les économistes néo-classiques aux économistes keynésiens. Pour les premiers, les entreprises investissent et n’embauchent que lorsque le salaire est inférieur à la productivité. On parle alors de chômage classique.

Les keynésiens estiment quant à eux que l’investissement et l’embauche des entreprises répond à la demande des ménages et des autres entreprises, c’est-à-dire de la consommation. Dans cette optique le chômage est essentiellement conjoncturel. On parle de chômage keynésien.

[modifier] L'approche marxiste

D'après Karl Marx, le chômage est inhérent au fonctionnement instable du système capitaliste, le chômage de masse étant une constante des périodes régulières de crise du capitalisme. Le prolétariat est alors divisé entre ceux qui sont en situation de sur-travail (salariés) et de sous-travail (chômeurs). Ces derniers constituent une « armée industrielle de réserve » qui permet aux capitalistes de faire pression à la baisse sur les salaires.

Au niveau du capitalisme global, le chômage est à première vue un manque à gagner, puisque aucun profit n'est réalisé sur le dos des chômeurs. Le chômage n'est rentable pour le capitalisme global que s'il permet de baisser les salaires d'un pourcentage plus important que le taux de chômage.

Selon l'auteur du Capital, le seul moyen de supprimer définitivement le chômage serait d'abolir le système du salariat en passant à un mode de régulation socialiste ou communiste de l'économie.

[modifier] Le chômage « classique »

Dans le modèle néoclassique d’une économie concurrentielle, le chômage est décrit comme « volontaire » ou frictionnel. On dit qu’il est volontaire lorsqu’un individu refuse un emploi qu’il juge insuffisamment payé alors que le surplus de production qu’il apporte à l’entreprise ne peut permettre de lui accorder une rémunération supérieure. Dans l’optique néoclassique, le chômeur fait alors un arbitrage entre les avantages du travail (le salaire) et les désavantages (le renoncement au loisir) et décide alors volontairement de rester sans emploi.

Le jeu de la concurrence est sensé faire varier les salaires à la hausse ou à la baisse de sorte que tout individu offrant du travail (demandant un emploi) doit finir par trouver une entreprise pour l’embaucher à une juste rémunération, c’est à dire selon la richesse qu’il produit.

Face à la Grande dépression, les néoclassiques ont renforcé leurs positions en posant le chômage de masse constaté comme la preuve de leurs théories. Des économistes comme Arthur Cecil Pigou[10] ou Jacques Rueff ont tenté de montrer que le chômage découlait essentiellement des entraves à la concurrence imposées par certains institutions monopoleuses comme les syndicats, et parfois l’Etat.

Pour comprendre l’analyse néoclassique du chômage, plaçons-nous dans une première situation où le volume de l’emploi est L1 et le salaire réel wr1. Pour une raison exogène, une innovation technologique par exemple, la demande de travail des entreprises diminue (cf. courbe « Demande de travail »), tandis que l’offre de travail reste constante.

Cette évolution induit un nouveau point d’équilibre entre l’offre et la demande, et donc nécessairement un nouveau salaire, noté wr2. Le passage du salaire wr1 au salaire wr2 provoque une hausse du chômage « volontaire » car certains demandeurs d’emplois, prêt à travailler pour la rémunération wr1, préfèrent rester oisifs si le salaire est wr2. Le volume de l’emploi est L2. Il correspond au taux de chômage naturel de l’économie.

Toutefois, il est possible que, pour des raisons diverses (réglementation, salaire minimum, pression des syndicats), le salaire ne soit pas flexible à la baisse et demeure, malgré la baisse de la demande de travail, au niveau wr1. Le volume de l’emploi est alors défini par le nombre de travailleurs que les entreprises veulent embaucher à ce salaire, c’est-à-dire L3. Dans cette situation, le taux de chômage est supérieur au taux naturel, du fait du manque de flexibilité[11].

Ainsi ce sont les syndicats ou les réglementations étatiques qui en empêchant les prix et les salaires de jouer leur rôle de variable d’ajustement qui provoquent l’augmentation massive du chômage. Jacques Rueff explique :

« assurément, en immobilisant les salaires, on peut maintenir aux ouvriers qui travaillent une rémunération quelque peu supérieure à celle qu’ils recevraient en régime de libre concurrence ; mais on en condamne d’autres au chômage et on expose ceux-ci à des maux que l’assurance chômage n’atténue que bien faiblement. »
    — Jacques Rueff, « L’assurance chômage, cause du chômage permanent. », Revue d'économie politique, 1934 [12]

[modifier] L'équilibre de sous-emploi de Keynes

Icône de détail Article détaillé : équilibre de sous-emploi.
Représentation graphique d'un équilibre de sous emploi

Pour Keynes, les entreprises embauchent conséquemment à leurs anticipations de débouchés. C'est donc la demande effective qui détermine le niveau de la production. Ce même niveau de production fixe le niveau de l'emploi. Au final, c'est donc la seule demande effective qui détermine le volume de la production et le volume de l'emploi.

Pour représenter graphiquement l'équilibre économique obtenu on détermine d'abord la fonction de demande globale (DG1) en fonction du revenu réel (Y). On trace par ailleurs la première bissectrice (DG=Y) qui décrit tout les points d'équilibre possibles, c'est à dire les points où la demande et l'offre s'égalisent. L'intersection de DG1 et de la bissectrice permet de définir l'équilibre effectif. Or, rien n'assure que la production définie par cet équilibre (Y1) soit la production qui permette le plein-emploi (Ype). Si ce n'est pas le cas, l'équilibre effectif n'est pas égal à l'équilibre de plein-emploi (Epe) et il existe donc un chômage involontaire.[13]

[modifier] L'arbitrage entre inflation et chômage

Icône de détail Article détaillé : courbe de Phillips.

En 1958, Alban William Phillips publie une étude empirique sur la Grande-Bretagne qui l’amène a établir une relation décroissante entre le chômage et la variation des salaires[14].

Remplaçant les salaires nominaux par l’inflation, Paul Samuelson et Robert Solow dessinent une nouvelle courbe, celle communément appelé la courbe de Phillips. Elle met en évidence qu’à partir d’un certain seuil, lorsque le chômage diminue, l’inflation s’accélère et inversement. Ce point critique où l’autorité politique doit faire un arbitrage entre l’inflation et le chômage est baptisé NAIRU (non accelerating rate of unemployment).

« La société est mise en demeure de choisir entre un niveau d’emploi raisonnablement élevé, associé à une croissance maximale et à une hausse modérée mais continue d’une part, et d’autre part une stabilité raisonnable des prix, mais associée à un degré de chômage élevé »
    — Paul Samuelson[15]

Milton Friedman et les monétaristes ont cherché à montrer l’inexistence d’un tel arbitrage à long terme. Pour Friedman, les individus finissent par adapter leur réactions aux manœuvres du gouvernement. Si celui-ci décide par exemple de baisser les taux d’intérêt pour relancer l’activité, il provoque des nouvelles embauches sur le court terme, ainsi qu’une accélération de l’inflation. Au début, les travailleurs sont dupes de l’illusion monétaire, mais à court terme ils constatent que leur pouvoir d’achat a baisser et exige donc des hausses de salaires, provoquant le retour du chômage à son niveau initial[16].

Les nouveaux classiques ont prolongé cette analyse en postulant que les agents économiques étaient désormais capables d’anticiper directement l’effet des politiques de relances sur l’inflation, exigeant alors immédiatement des hausses de salaires et rendant donc ces politiques inefficaces dès le court terme.

[modifier] Quelques débats sur le chômage

[modifier] Le progrès technique détruit-il des emplois ?

Cette idée communément admise suscite la controverse depuis plusieurs décennie. Elle est largement ébranlée par le classique d’Alfred Sauvy, La Machine et le Chômage, en 1980. Après avoir rappelé que durant les deux siècles précédant le progrès technique a bouleversé les modes de production et décuplé la productivité sans susciter l’augmentation durable du chômage, il insiste sur les effets indirects du progrès technique : « le travail consacré à la production de la machine ; l’accroissement de la vente des produits bénéficiant du progrès, grâce à la baisse de leur prix et la production de masse ; l’apparition de consommations nouvelles ou l’augmentation de consommations anciennes ». Ce dernier point est appelé « déversement ». Il explique comment la société agricole est devenue industrielle, avant d’être dominée par le secteur tertiaire et postule que l'humanité s'inventera toujours de nouveaux désirs que le progrès technique comblera.

En 1995, Jeremy Rifkin a contesté, dans son livre La Fin du Travail, l’argument du déversement dans le contexte d’une troisième révolution industrielle dont l’automatisation et l’informatisation pousse progressivement à la disparition du travail, même dans le secteur tertiaire. Cette thèse futuriste n’est pourtant pas sans similitudes avec les inquiètes infondées des ouvriers du XVIIIe siècle.

[modifier] La mondialisation, source de chômage dans les pays riches?

Icône de détail Article détaillé : Dumping social.

Selon l’INSEE,[17], le commerce international aurait provoqué la perte de 13 500 emplois par an entre 1995 et 2001, dont la moitié seulement au profit de pays en voix de développement, chiffre relativement faible au vu du chômage en France.

Selon la théorie du commerce international, les pays se spécialiseraient dans les activités qui requièrent abondamment le facteur de production dont elles sont le mieux dotées. Celle de main-d'oeuvre pour les pays pauvres, celle de capitaux et de savoir-faire dans les pays riches. Selon Walter Stolper et Paul Samuelson le résultat de cette évolution est d’égaliser le salaire tiré d’un même travail à travers le monde. Ceci pourrait expliquer la chute des salaires dans l’industrie manufacturière aux États-Unis et le chômage dans les pays où les salaires sont rigides à la baisse (en France par exemple).

Toutefois si quelques économistes soulignent le lien entre ouverture commerciale et montée des inégalités, nombreux sont ceux qui proposent une contre-analyse. Selon Paul Krugman, l’idée que la hausse du chômage serait liée à une concurrence déloyale des pays à bas salaires relève d'une « théorie pop[ulaire] du commerce international »[18]. Il explique que l’intérêt des politiques à prêter leur voix à de telles théories n’est qu’électoral. Il précise que la plupart des ouvrages traitant de ce sujet ou de la « guerre économique » sont l’œuvre d’essayistes et non d’économistes et sont vendus grâce à leurs thèses faciles qui alimentent l’imaginaire populaire. C’est la théorie « pop » qui néglige toutes les causes possibles du chômage (cf. supra).

« Selon cette idée reçue, la concurrence étrangère a érodé la base manufacturière américaine et détruit les emplois bien rémunérés […] Un faisceau croissant de preuves vient contredire cette idée courante […] Le ralentissement de la croissance du revenu réel est presque entièrement imputable à des causes internes »
    — Paul Krugman[19]


[modifier] Lutter contre le chômage

[modifier] Les politiques passives

[modifier] Les politiques actives

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

[modifier] Bibliographie

[modifier] Références et notes

  1. Perspectives de l'emploi de l'OCDE 2006 - Stimuler l'emploi et les revenus - Annexe statistique[1]
  2. Philippe d’Iribarne, Le Chômage paradoxal, 1990, puf
  3. Source : OCDE, cité par Emmanuel Combe, Précis d’économie, 8e édition, Collection Major, puf. P.125
  4. Source : OCDE, cité par Emmanuel Combe, Précis d’économie, 8e édition, Collection Major, puf. P.125
  5. Philippe d’Iribarne, Le Chômage paradoxal, 1990, puf
  6. J. Freyssinet, Le Chômage, La Découverte, 1988
  7. Jacques Freyssinet, Le Chômage, La Découverte, 1998
  8. abcde « Chômage », Encyclopædia Universalis, 2005
  9. Données sociales 1999, INSEE, 1999
  10. Arthur Cecil Pigou, Théorie du chômage, 1931
  11. Jacques Généreux, Économie politique : 3. Macroéconomie, 4e édition, HACHETTE Supérieur. p.14
  12. cité par Emmanuel Combe, Précis d’économie, 8e édition, Collection Major, puf. 2004 p.130
  13. Jacques Généreux, Économie politique : 3. Macroéconomie, 4e édition, HACHETTE Supérieur. p.44
  14. Alban William Phillips, « The relatation between unemployment and the rate of change of money wage rates in the United Kingdom 1861-1957, » Econometrica, 1958
  15. cité par Emmanuel Combe, Précis d’économie, 8e édition, Collection Major, puf, 2004 p. 184
  16. Milton Friedman, « The role of monetary policy », American Economic Review, 1968
  17. « Délocalisations et réductions d'effectifs dans l'industrie française », in L'économie française, 2005-2006, INSEE 2006 [2]
  18. « pop internationalism » en anglais
  19. Paul Krugman, La Mondialisation n’est pas coupable, La Découverte/Poche, Essais, p. 48