Alain Badiou

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Alain Badiou
Alain Badiou

Alain Badiou est un philosophe contemporain né à Rabat en 1937.

Sommaire

[modifier] Biographie

Son père, Raymond Badiou, résistant SFIO, fut maire de Toulouse de 1944 à 1958. Ancien élève de l'École normale supérieure, major de l'agrégation de philosophie en 1960, il enseigne d'abord en lycée (tout en collaborant ponctuellement avec l'ENS), puis au Centre universitaire expérimental de Vincennes dès sa création (année 1968-1969). Il contribue au développement de cette Université (désormais Paris VIII, déplacée de Vincennes à Saint Denis) durant une trentaine d'années, avant de devenir professeur à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm.

Il a également été directeur de programme au Collège international de philosophie.

Il a été très influencé par Louis Althusser dans ses premiers travaux épistémologiques, et fait appel à la mathématique, seule capable, selon lui, de déployer l'ontologie.

Outre son activité de philosophe, Alain Badiou est romancier et dramaturge, ce qui l'a amené à travailler avec des metteurs en scène comme Antoine Vitez ou Christian Schiaretti. Il est aussi un militant politique, et assure le secrétariat de l'Organisation politique (fondée en 1985) avec Sylvain Lazarus et Natacha Michel. Et enfin, il effectue un travail d'éditeur, auquel l'a initié son ami François Wahl : il a longtemps codirigé avec Barbara Cassin la collection « L'ordre philosophique » aux Éditions du Seuil. Après avoir quitté Le Seuil suite à un conflit de politique éditoriale, Cassin et Badiou poursuivent leur collection philosophique, désormais intitulée « Ouvertures », chez Fayard[1].

Parmi ses autres responsabilités, il faut noter qu'Alain Badiou anime Les Conférences du Perroquet, est Membre perpétuel de l'Académie de philosophie du Brésil.

On peut diviser sa vie et son œuvre en deux parties. Cependant, Alain Badiou lui-même récuse totalement cette dichotomie[2].

[modifier] Philosophie

D'une part, ses travaux de philosophie à proprement parler, dont les plus importants sont L'être et l'événement (1988), suivi en 2006 de Logique des mondes.L'être et l'événement 2. Ouvrages exigeants, on abordera plus aisément les principaux concepts "badiousiens" en lisant d'abord le recueil Conditions préfacé par François Wahl, ou les trois courts volumes Abrégé de métapolitique, Petit manuel d'inesthétique et Court traité d'ontologie transitoire parus en 1998.

De manière synthétique, disons que pour Badiou la philosophie doit, à la suite de Platon, dire en concept la possibilité de la vérité, qu'il y a, en exception du régime ordinaire d'un monde, une césure possible, laquelle atteste une vérité. Par conséquent la philosophie, bien que singulière dans l'ordre des discours, demeure en quelque sorte à la lisière des mondes particuliers, tout en étant par nature incapable de produire une forme discursive adéquate à l'Être (ontologie du multiple pur). Cette tâche est spécialement dévolue aux mathématiques qui, elles, formalisent adéquatement le multiple indépendamment de tout monde existant.

Philosopher c'est tenir contre toute sophistique à la vérité et repérer dans la variété des mondes, des discours, où sont les indices qu'une vérité a eu lieu. Car de la vérité ne subsiste jamais que le lieu de son lieu, elle-même étant par nature toujours soustraite à l'inscription mondaine, seule une trace matérialise qu'une recomposition véritable d'un monde a eu lieu, qu'un événement a eu lieu.

La philosophie tombe donc sous la condition des procédures de vérités en même temps qu'elle discerne le vrai du faux. Ces procédures déclare Badiou sont de type artistique, scientifique, politique ou amoureux et ce n'est que dans la guise d'une fidélité événementielle qu'un trajet subjectif s'accomplit, qu'un sujet fidèle se constitue.

[modifier] Politique

Mais Badiou est aussi un militant. Militant politique : il a été l'un des dirigeants du maoïsme français (militant à l'UCFML) comme d'autres normaliens célèbres (Benny Lévy, le linguiste Jean-Claude Milner, les lacaniens Jacques-Alain Miller et le psychanalyste et chroniqueur de télévision Gérard Miller, qui, eux, militaient à la Gauche prolétarienne, etc.). À soixante-dix ans, il ne renie rien ou presque de cet héritage. Ce militantisme s'inscrit dans sa philosophie, comme on peut le lire dans plusieurs de ses ouvrages récents : L'éthique, la série des Circonstances (I, II, III et IV)[3], qui parlent du terrorisme ou de l'élection française de 2002, dernièrement Le Siècle et, comme suite de L'être et l'événement, Logiques des mondes le 9 mars 2006.

Badiou montre des qualités de synthèse et d'originalité dans ses analyses qui épousent une certaine force de conviction. C'est un historien des idées, capable de résumer l'esprit d'une époque par quelques thèses ou concepts (à supposer que l'esprit d'une époque soit autre chose qu'un cliché de notre époque); par ailleurs, Badiou est convaincu que la philosophie doit parler de son temps et, comme la plupart des penseurs continentaux de sa génération, il combat l'idée selon laquelle les problèmes philosophiques sont des questions éternelles, posées par tout le monde d'une manière analogue. Enfin, septuagénaire, il est un des seuls à soutenir et à argumenter des thèses aujourd'hui iconoclastes : refus de l'humanisme et de l'idée que l'homme a comme tel une valeur absolue  ; critique de la démocratie parlementaire au nom d'une démocratie véritable ; défense du communisme en tant qu'idée clivant la politique de ce qu'elle n'est pas contre les désastres des communismes dogmatiques, etc[4].

[modifier] Renommée

En ce sens, il est une figure de la vie intellectuelle française, comme semble le confirmer le succès de son dernier livre, Le Siècle et, depuis la mort de Derrida, il est incontestablement l'un des philosophes français les plus connus à l'étranger (notamment en Amérique latine, aux États-Unis, où il participe sans doute de la mode française en général, et en Asie), en particulier parce qu'il perpétue une tradition sartrienne pour laquelle philosophie et engagement politique sont indissociables.

[modifier] Œuvre

[modifier] Philosophie

  • Le Concept de modèle, éditions François Maspero, Paris, 1969.
  • Théorie de la contradiction, éditions François Maspero, Paris, 1975.
  • Théorie du sujet, Seuil, 1982.
  • Peut-on penser la politique ?, Seuil, 1985.
  • L'Être et l'Événement, Seuil, 1988.
  • Manifeste pour la philosophie, Seuil, 1989
  • Le Nombre et les Nombres, Seuil, 1990
  • Conditions, Seuil, 1992.
  • Saint Paul. La fondation de l’universalisme, PUF, Paris, 1997.
  • L'Éthique, essai sur la conscience du mal, Hatier, Paris, 1993 (réédition Nous, Caen, 2003)
  • Deleuze, Hachette, 1997
  • Abrégé de métapolitique, Seuil, 1998
  • Court Traité d'ontologie provisoire, Seuil, 1998
  • Petit Manuel d'inesthétique, Seuil, 1998
  • Le Siècle, Seuil, Paris, 2005
  • Logiques des mondes. L'être et l'événement, 2, Seuil, Paris, 2006.
  • Le Concept de modèle. Introduction à une épistémologie matérialiste des mathématiques, Fayard, Paris, 2007 ( réédition, augmentée d'une longue préface, du livre publié en 1969 et devenu introuvable depuis trente ans)
  • Petit Panthéon portatif, La Fabrique, Paris, 2008 (extrait : [1])

[modifier] Essais politiques

  • D'un désastre obscur, éditions de l'Aube, 1991
  • Circonstances, 1. Kosovo, 11 Septembre, Chirac/Le Pen, Lignes & Manifeste, 2003
  • Circonstances, 2. Irak, foulard, Allemagne/France, Lignes & Manifeste, 2004
  • Circonstances, 3. Portées du mot « juif », Lignes & Manifeste, 2005
  • Circonstances, 4. De quoi Sarkozy est-il le nom ? , Nouvelles Éditions Lignes, 2007

[modifier] Œuvres romanesques

  • Almagestes. Trajectoire inverse I, Le Seuil, 1964.
  • Portulans. Trajectoire inverse II, Le Seuil, 1967.

Le troisième tome de Trajectoire inverse, annoncé sous le titre Bestiaires, n'a jamais été publié. Les trois genres livresques qui servent de titres (almagestes, portulans, bestiaires) sont repris à Exil de Saint-John Perse (cf. l'exergue de la trilogie inachevée).

  • Calme bloc ici-bas, P.O.L., 1997.

[modifier] Œuvres dramatiques

  • L'Écharpe rouge (romanopéra), Maspero, 1979.
  • Ahmed le subtil, Actes-Sud, 1984.
  • Ahmed Philosophe, suivi de Ahmed se fâche, Actes-Sud, 1995.
  • Les Citrouilles (comédie), Actes-Sud, 1996.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

[modifier] Liens externes

[modifier] Essais

[modifier] Audio

[modifier] Vidéo

[modifier] Notes et références

  1. Alain Beuve-Méry et Jean Birnbaum, « Divorce philosophique », Le Monde des livres, 04/10/2007. Le détail de l'affaire est résumé ici même, s.v. François Wahl.
  2. (fr) Logique des mondes. L'être et l'événement. T.2, p. 544., Alain Badiou, Éditions du Seuil, 2006 (ISBN 2020843242)
  3. Voir sur ce sujet les articles de Roger-Pol Droit (Le Monde des livres du 25 novembre 2005), de Frédéric Nef (Le Monde des livres du 23 décembre) et de Daniel Bensaid (Le Monde des Livres du 26 janvier 2006), de Claude Lanzmann, de Jean-Claude Milner et d’Éric Marty (Les Temps modernes, novembre-décembre 2005/janvier 2006) et les réponses d’Alain Badiou et de Cécile Winter suivies des contre-réponses de Claude Lanzmann et d’Éric Marty (Les Temps modernes, mars-juin 2006). Pour une présentation critique des thèses d’Alain Badiou sur les Juifs, voir L’Arche n° 574, février 2006 : Alain Badiou et les Juifs : Une violence insoutenable. Les critiques d'Éric Marty à Alain Badiou ont été rassemblées dans un livre, Une querelle avec Alain Badiou, philosophe (Ed. NRF/Gallimard, avril 2007). Lire aussi la critique de cet ouvrage d’Aude Lancelin Le Nouvel Observateur - 2220 - 24/05/2007. Voir aussi la note de lecture sur Circonstances IV. De quoi Sarkozy est-il le nom ? de Florent Schoumacher sur le site de la revue Dissidences des Éditions le Bord de l'eau (www.dissidences.net).
  4. "Mao en chaire" Par Éric Aeschimann, Libération, mercredi 10 janvier 2007.