Élections législatives françaises de 1919

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Troisième République

Armoiries officieuses qui furent créées pour la Troisième République
Cet article fait partie de la série sur la
politique de la France,
sous-série sur la Troisième République

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Sommaire

[modifier] Contexte

À la fin de la Première Guerre mondiale, la France est exsangue et la guerre et la grippe espagnole ont fait des ravages dont l'ampleur n'est pas évidente à chiffrer (certains pensent que la grippe espagnole a tué 20 millions de personnes sur Terre, d'autres 50 millions): 2 900 000 habitants de moins, 2 800 000 hommes blessés, 630 000 veuves et 750 000 orphelins. 20 000 usines et de nombreuses mines ont été détruites, la moitié du réseau routier est inutilisable, le réseau ferroviaire est désorganisé et de nombreux ponts ont été détruits. Un emprunt de guerre de 32 milliards de francs-or doit être remboursé.

L’adoption, en juillet 1919, d'un mode de scrutin mixte, associant représentation proportionnelle et scrutin majoritaire de liste dans le département, supplante le scrutin majoritaire à deux tours dans l’arrondissement, en vigueur depuis 1889, dans un soucis de mettre fin à la constitution de fiefs politiciens et de permettre la formation de majorités politiques claires à la Chambre des députés. La représentation proportionnelle est considérablement atténuée par un article permettant à une liste ayant rassemblé au moins 50 % des suffrages exprimés de remporter la totalité des sièges à pouvoir dans la circonscription, ainsi que par un autre attribuant les sièges non répartis au quotient à la liste arrivée en tête (au lieu de les répartir aux plus forts restes ou à la plus forte moyenne entre toutes les listes, par exemple).[1]

[modifier] Campagne

La constitution des listes devait dès lors tenir compte de trois facteurs : d’une part, la tendance de l’opinion à penser que l’Union Sacrée doit être prolongée dans la paix afin de résoudre les nouveaux problèmes de la France de l’après-guerre ; d’autre part, le refus de la SFIO, alors en crise, de prendre position sur la question du bolchevisme, qui a pourtant, semble-t-il, attiré de nombreux nouveaux adhérents durant la guerre. Pour préserver leur unité, les socialistes décident en avril 1919 de ne conclure aucun accord en vue des élections législatives de la fin de l’année. Cette décision isole de fait les radicaux, contraints de renoncer à une nouvelle alliance à gauche, et permet la mise en branle d’une agressive campagne de la droite et du centre dirigée contre la SFIO, accusée de cautionner le bolchevisme ; enfin, la persistance de divisions partisanes au sein de la droite. Les monarchistes de l’Action française sont isolés, mais les nationalistes, clairement antiparlementaristes, les catholiques, hostiles à la laïcité et les « progressistes » (qui sont en fait les républicains les plus modérés de l’avant-guerre) opèrent un rapprochement avec les républicains modérés du centre-droit, rassemblés en plusieurs petites organisations souvent membres de l’Alliance démocratique, mais rejettent toute éventualité d’accord de quelque sorte que ce soit avec les radicaux. Ces derniers se retrouvent par conséquent pris en étaux entre une SFIO qui hésite entre la radicalisation et le statu quo, et une droite plus que jamais anti-gauchistes.[2]

A la suite de complexes négociations, 324 listes se constituent. Les socialistes optent pour des listes homogènes, tandis que les radicaux se divisent entre alliés au centre-droit et listes isolées. Les listes du Bloc National regroupent, dans la plupart des cas, des membres de l’Alliance démocratique, des progressistes, des nationalistes et des catholiques. Les forces en présences sont hétéroclites et la campagne confuse ; les candidats du Bloc National s’accordent tout de même généralement à axer leurs revendications sur la plus stricte application des traités de guerre, la fin du dirigisme et la lutte sans conditions contre le bolchevisme. Alexandre Millerand, enfin, parvient à rassembler autour de lui une très large coalition dans son bastion du deuxième secteur de la Seine en prônant un renforcement des pouvoirs présidentiels.[3]

[modifier] Résultats

Les résultats sont, à l’exception de ceux de la SFIO, qui progresse, parvenant cette fois à présenter des candidats dans toutes les circonscriptions, assez confus. Les radicaux, particulièrement lorsqu’ils sont isolés, ont tendance à reculer, et la victoire du Bloc National est sans ambiguité : c’est un vague bleue qui déferle sur la Chambre basse, surnommée depuis lors « Chambre bleue horizon », en raison du très grand nombre d’anciens combattants qui y siègeront (44 % du total des députés). Cette victoire restera la plus grande de la droite et du centre-droit jusqu’aux législatives de 1968. On dénombre plus de 60 % de nouveaux élus dans cette nouvelle législature.[4],[5]

  • Inscrits : 11 604 322
  • Votants : 8 148 090 (74 %)
  • Abstentions : 26 %
  • Suffrages exprimés : 8 148 090
Résultats des élections à la chambre des députés[6]
Parti voix %
Bloc national 4 353 025 53,42 %
Union républicaine démocratique 1 819 691 22,33 %
Indépendants et conservateurs 1 139 794 13,99 %
Républicains de gauche 889 177 10,91 %
Radicaux indépendants 504 363 6,19 %
Autres :
Section française de l'Internationale ouvrière 1 728 663 21,22 %
Parti républicain, radical et radical-socialiste 1 420 381 17,43 %
Républicain-socialistes 283 001 3,47 %
Socialistes indépendants 147 053 1,80 %
Anciens combattants 128 004 1,57 %
Autres 87 963 1,08 %

Les résultats sont très confus et les groupes parlementaires formés après les élections, en particuliers ceux issus du Bloc national, sont issus de diverses tendances et partis politiques.

Députés de la douzième législature par groupe politique[7]
Affiliation Groupe politique Membres
Gauche Parti socialiste 68
Républicains socialistes 26
Centre gauche Radical et radical-socialiste 86
Centre droit Gauche républicaine démocratique 93
Action républicaine et sociale 46
Républicains de gauche 61
Droite Union républicaine démocratique 183
Indépendants 29
Députés n'appartenant à aucun groupe - 21

[modifier] Références

  1. Jean-François Sirinelli, La France de 1914 à nos jours, p.53
  2. Jean-François Sirinelli, La France de 1914 à nos jours, p.54
  3. Jean-François Sirinelli, La France de 1914 à nos jours, p.55
  4. Jean-François Sirinelli, La France de 1914 à nos jours, p.55
  5. Les résultats proviennent de l'Atlas électoral de la France 1848-2001, de Frédéric Salmon et de La France de 1914 à nos jours de Jean-François Sirinelli
  6. (fr) Résultats, sur le site France-politique.fr
  7. (fr) Groupes AN, sur le site France-politique.fr

[modifier] Liens internes

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