Vénus paléolithique

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Les Vénus paléolithiques sont des statuettes féminines caractéristiques du Paléolithique supérieur eurasiatique, réalisées en ivoire, en pierre tendre (stéatite, calcite, calcaire) ou en terre cuite. Il en a été découvert plus d'une centaine d'exemplaires, toujours de dimensions relativement modestes, comprises entre environ 4 et 25 centimètres.

Sommaire

[modifier] Historique des découvertes

La première statuette féminine découverte fut la Dame de Brassempouy, mise au jour par Édouard Piette en 1894. Quatre années plus tard, les statuettes de stéatite des grottes des Balzi Rossi étaient publiées par Salomon Reinach. La très célèbre Vénus de Willendorf fut exhumée en 1908 d’un niveau de lœss de la vallée du Danube, en Autriche. Depuis, des centaines de sculptures féminines analogues ont été découvertes, des Pyrénées aux plaines sibériennes du Lac Baïkal. Elles furent surnommées « Vénus » par analogie avec la déesse de la beauté de la mythologie romaine et parce que les préhistoriens du début du XXe siècle estimaient qu’elles correspondaient à un idéal de beauté préhistorique.

[modifier] Description

La plupart des Vénus paléolithiques semblent être des représentations féminines conformes à un certain nombre de conventions figuratives, voire à une stylisation ou à une schématisation. La plupart s’inscrivent dans un losange, avec deux extrémités effilées symétriques autour d’un élargissement correspondant au ventre. Chez certaines, plusieurs parties de l’anatomie sont exagérément développées : abdomen, hanches, seins, fesses, vulve. En revanche, d’autres parties anatomiques ne sont souvent qu’ébauchées ou absentes : c’est le cas des bras et des pieds. La tête est souvent réduite et dépourvues de détails anatomiques.

La question de la stéatopygie de certaines Vénus a fait l’objet de nombreuses controverses : le premier à aborder le thème fut Édouard Piette, inventeur de la Dame de Brassempouy et d’autres statuettes pyrénéennes. Certains auteurs y ont vu un trait physique que l’on retrouve chez les San d’Afrique australe tandis que d’autres l’ont interprété comme un symbole de fertilité et d’abondance. Par la suite, il fut noté que toutes les figurines n’étaient pas obèses et ne présentaient pas des attributs féminins exagérés. De même, toutes n’étaient pas dépourvues de détails faciaux.

La Vénus de Willendorf et la Vénus de Laussel portent en outre des traces d’ocre rouge.

[modifier] Répartition

Différentes tentatives de classifications furent proposées, dont celle de Henri Delporte, simplement basée sur la provenance géographique [1]. L’auteur distingue :

D’après André Leroi-Gourhan, il existe un certaine relation culturelle entre tous ces gisements. Certains détails anatomiques suggéreraient une origine commune orientale, suivie d’une diffusion vers l’ouest [2].

L’absence de Vénus paléolithique dans la péninsule Ibérique est curieuse. Seuls des exemples douteux ont été rapportés, notamment à El Pendo ou La Pileta. La dite « Vénus de las Caldas », du nom d’une grotte proche d’Oviedo, est un objet sculpté magdalénien en bois de cervidé. Alors que certains ont cru y voir un corps féminin stylisé avec une tête d’animal, il s’agit probablement d’un propulseur décoré.

[modifier] Datation

Récemment, deux objets de pierre très anciens (de 200 à 300 000 ans) ont été interprétés comme des tentatives de représentation féminine. L’une a été découverte sur le plateau du Golan (« Vénus de Berekhat Ram ») et l’autre au Maroc (« Vénus de Tan-Tan »). Toutefois, ces pièces sont au mieux très sommairement et très marginalement modifiées, au pire entièrement naturelles et fortuitement anthropomorphes.

Les seules statuettes féminines paléolithiques incontestables datent du Paléolithique supérieur. Anciennement considérées comme aurignaciennes, elles sont aujourd’hui pour la plupart associées au Gravettien et au Solutréen. Les formes obèses sont alors prédominantes. Au Magdalénien, les formes s’affinent et deviennent plus détaillées et stylisées.

[modifier] Interprétation

Les interprétations des Vénus paléolithiques sont nombreuses et parfois fantasques. Les théories concernant un éventuel culte de la fécondité ou de la Déesse-Mère sont purement spéculatives et ne peuvent être évaluées scientifiquement.

Les figurations féminines de l’art mobilier du Paléolithique supérieur n’avaient aucune utilité pratique dans le cadre des activités de subsistance. Elles ont le plus souvent été découvertes dans le cadre d’habitat, en plein air comme en grotte, plutôt que dans des sépultures. À Gagarino en Russie, sept Vénus ont été découvertes à l’intérieur d’une cabane ovale de plus de 5 m de large : elles ont été interprétées comme des amulettes apotropaïques correspondant aux occupants du lieu. À Mal’ta, près du lac Baïkal, les figurines n’étaient présentes que du côté gauche de la hutte.

Les Vénus n’étaient donc probablement pas des amulettes cachées ou secrètes, mais plutôt exposées à la vue de tous (ce qui expliquerait leur grande diffusion géographique).

[modifier] Références

  1. H. Delporte : L’image de la femme dans l’art préhistorique, Éd. Picard (1993) ISBN 2-7084-0440-7
  2. Leroi-Gourhan, A., Cronología del arte paleolítico, 1966, Actas de VI Congreso internacional de Ciencias prehistóricas y protohistóricas, Roma.
  • C. Cohen : La femme des origines - images de la femme dans la préhistoire occidentale, Belin - Herscher (2003) ISBN 2-7335-0336-7

[modifier] Lien externe