Sire Gauvain et le chevalier vert

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Première page du manuscrit original de Sir Gawain and the Green Knight
Première page du manuscrit original de Sir Gawain and the Green Knight

Sire Gauvain et le chevalier vert (Sir Gawain and the Green Knight) est un roman en vers allitératifs datant de la fin du XIVe siècle. Il esquisse une aventure de Gauvain, l'un des chevaliers de la Table Ronde du roi Arthur. Il ne subsiste qu'un seul manuscrit du poème, le Cotton Nero A.x., qui inclut également trois poèmes fragmentaires à caractère religieux, tous écrits par un auteur anonyme, qui aurait également composé le poème Pearl. Les quatre poèmes narratifs sont écrits dans un dialecte du moyen anglais originaire du nord et de l'ouest des Midlands[1]. Le manuscrit se trouve actuellement à la British Library[2].

Dans l'histoire, Gauvain accepte un défi lancé par un mystérieux guerrier entièrement vert. Ce « Chevalier Vert » permet à tous de le frapper avec sa hache, mais en échange, celui qui l'aura frappé doit accepter de subir le même coup un an et un jour plus tard. Gauvain accepte et le décapite d'un seul coup, mais le Chevalier se relève, prend sa tête et rappelle à Gauvain sa promesse. Les aventures que vit Gauvain sur le chemin menant à ce rendez-vous permettent de classer cette œuvre dans les légendes arthuriennes impliquant chevalerie et loyauté.

Le principal intérêt du poème réside, outre son intrigue complexe et sa langue riche, dans les nombreux symboles et thèmes qu'il renferme : tout, du Chevalier vert au défi en passant par la ceinture donnée à Gauvain comme protection, est chargé de sens et prend racine dans les cultures et folklores celtique et germanique, entre autres. Les critiques comparent souvent Gauvain à des œuvres similaires plus anciennes, comme les contes irlandais sur Cúchulainn, afin de trouver des explications possibles aux symboles et thèmes du poèmes. Un poème plus tardif, The Greene Knight, relate en grande partie la même histoire que Gauvain, mais la relation qui les unit n'est pas claire.

Sommaire

[modifier] Résumé

Gauvain et le Chevalier vert (enluminure médiévale)
Gauvain et le Chevalier vert (enluminure médiévale)

Tout commence à la cour du roi Arthur, à Camelot, lors de festivités et échanges des cadeaux. Un chevalier vert gigantesque survient, armé d'une hache, et propose un jeu. Il demande à ce que quelqu'un prenne sa hache et lui en donne un seul coup, qui devra être rendu par le Chevalier vert un an et un jour plus tard. Gauvain se porte volontaire pour le relever. Il décapite le Chevalier vert, mais celui-ci se relève et va chercher sa tête tout en rappelant à Gauvain sa promesse. Il ne lui donne avant de s'en aller que le nom de Chapelle verte, où il recevra le coup fatal. L'année s'écoule alors jusqu'au jour de la Toussaint, et Gauvain se prépare à affronter les rigueurs de l'hiver à travers le pays. Il parcourt une longue route vers le Pays de Galles, et les conditions climatiques sont pour lui plus difficiles à supporter que les monstres qu'il doit souvent affronter.

La veille de Noël, alors qu'il erre dans une forêt, il prie la Vierge Marie de lui trouver un endroit pour entendre la messe le lendemain, et, comme par enchantement, un château apparait à la lisière de la forêt. Il se nomme le château de Hautdésert, et appartient au seigneur Bertilak qui accueille Gauvain avec chaleur et joie. Étant donnée la fatigue du chevalier, le seigneur lui propose de rester et de se reposer quelques jours avant de repartir. Gauvain décline l'offre, car il doit avant tout retrouver la Chapelle verte. Bertilak le rassure aussitôt et lui apprend qu'elle n'est située qu'à quelques milles de là. Gauvain accepte donc de rester durant trois jours. Ils s'en vont à la messe de Noël où Gauvain rencontre la femme du seigneur, jeune et d'une grande beauté, accompagnée d'une femme âgée et laide.

Du fait des festivités, Bertilak propose un jeu à Gauvain, connu sous le nom d'« échange des gains » : ce que, durant trois matins, Bertilak gagnera dans une chasse à coure, Gauvain l'aura en échange de ce que lui, resté à se reposer au château, aura gagné dans sa journée.

Le premier jour, alors que Gauvain dort encore, la femme du seigneur se glisse dans sa chambre et cherche à le séduire. Gauvain résiste, et réussit à contenir ses ardeurs en n'acceptant qu'un unique baiser. Le soir, Bertilak rentre de la chasse avec un magnifique cerf qu'il donne à Gauvain, avant de recevoir en contre-partie le baiser que Gauvain avait eu. Le deuxième jour, la jeune femme se glisse de nouveau dans la chambre de Gauvain, et réussit cette fois à lui voler deux baisers. Ces deux baisers seront donnés à Bertilak le soir même en échange d'un sanglier.

Le dernier jour, de plus en plus insistante, la jeune femme réussit à donner trois baisers à Gauvain. Mais elle ne s'arrête pas là, et veut lui offrir un gage de son amour. Après avoir refusé une bague, Gauvain se voit offrir une ceinture verte aux pouvoirs magiques importants, qui protège celui qui la porte de la mort. Après avoir considéré la terrible épreuve qui l'attend le lendemain, Gauvain accepte la ceinture, mais ayant promis à la belle dame de n'en toucher mot au seigneur, il ne donne à Bertilak que trois baisers, en échange de quoi il n'obtient qu'un renard.

Le lendemain, alors que Gauvain est conduit par un homme de Bertilak jusqu'à la Chapelle verte, ce dernier lui propose de garder la vie sauve et de s'enfuir, sans que personne ne s'en aperçoive. Gauvain refuse catégoriquement une telle issue, et s'approche peu à peu de la Chapelle verte. L'endroit ressemble davantage à un sanctuaire païen qu'à une chapelle, et Gauvain entend le bruit d'une faux que l'on aiguise. Le Chevalier vert apparaît enfin, et demande lui demande de se préparer à recevoir son châtiment.

Gauvain s'agenouille, mais, au premier coup de faux, se retire brusquement. Le Chevalier vert se moque de cet accès de peur, et s'apprête à lui donner le deuxième coup, qu'il arrête à quelques centimètres de sa peau. Enfin, le Chevalier vert lève une dernière fois sa faux, et l'abat à peine sur le cou de Gauvain où il ne laisse qu'une légère entaille.

À peine a-t-il reçu l'entaille que Gauvain bondit vers son adversaire, estimant avoir tenu sa promesse jusqu'au bout. C'est alors qu'il se retrouve face à son adversaire souriant, qui lui explique qu'il est l'un des meilleurs chevaliers sur cette terre, car son seul péché a été de vouloir rester en vie. Il lui avoue ensuite qu'il n'est autre que Bertilak, et la seule épreuve qu'a passé Gauvain se trouvait dans l'enceinte même du château, quand sa femme l'a tenté. Ayant par trois fois repoussé ses avances, il n'avait qu'accepté la ceinture verte, d'où l'entaille du dernier coup de hache. Bertilak explique alors que tout avait été manigancé par Morgane la Fée, la vieille dame que Gauvain avait vu en compagnie de la femme de Bertilak à la messe de Noël, pour effrayer la Reine Guenièvre et mettre Camelot à l'épreuve.

Mortifié, Gauvain repart pour Camelot, avec la ceinture comme souvenir de son cuisant échec. Alors que lui-même ne peut accepter son manque de courage, la cour, bien moins exigeante, rit à son aventure et tous décident de porter une ceinture verte pour la célébrer.

[modifier] L'auteur

Si le nom de l'auteur (ou des auteurs) de Sire Gauvain est inconnu, une lecture avertie de ses œuvres permet de déduire quelques éléments à son sujet. Le manuscrit est connu dans les milieux académiques sous la référence Cotton Nero A.x., d'après le système employé par un de ses possesseurs, Robert Cotton, un collectionneur de manuscrits anglais[2]. Avant d'entrer en sa possession, le manuscrit se trouvait dans la bibliothèque de Henry Saville, de Yank (Yorkshire)[3],[4]. On ne sait pas grand-chose du manuscrit, ou de son auteur, avant cela. Puisqu'il a été daté du XIVe siècle, son auteur était donc contemporain de Geoffrey Chaucer, quoique tout sépare les deux hommes hormis ce poème[5]. On considère souvent que les trois autres œuvres se trouvant avec le manuscrit de Sire Gauvain (Pearl, Patience et Cleanness) furent écrits par la même personne. Cependant, le manuscrit fut écrit par un copiste et non par le poète original[6]. Rien d'explicite ne permet donc d'affirmer que les quatre poèmes du manuscrit proviennent de la même plume. Cependant, une analyse comparative du dialecte, de la versification et de la diction tend à appuyer l'hypothèse d'un auteur commun[6].

Pour ce qui est de son identité, elle reste indéfinissable. Ce que l'on sait aujourd'hui de lui tient surtout du domaine des connaissances générales, comme l'écrit J. R. R. Tolkien en introduction à sa traduction :

« C'était un homme sérieux et dévot, quoique non dénué d'humour ; il s'intéressait à la théologie et s'y connaissait quelque peu, mais à la façon d'un amateur sans doute, plutôt que d'un professionnel ; il connaissait le latin et le français et avait lu de nombreux livres français, romans comme d'enseignement ; mais son foyer était les West Midlands d'Angleterre ; ce que montrent avec force sa langue, son mètre et ses décors. »[7]

Le candidat le plus fréquemment suggéré comme auteur est John Massey de Cotton (Cheshire)[8]. Un autre poème, St. Erkenwald, a parfois été attribué au même poète. Il apparaît dans un manuscrit séparé de celui de Sire Gauvain, qui a été daté par certains critiques d'une date extérieure à l'époque du poète. L'attribution de St. Erkenwald à l'auteur de Pearl est encore controversée et généralement rejetée[6].

[modifier] Forme des vers

Un exemple de « bob and wheel » dans Sire Gauvain

(bob)
ful clene
(wheel)
for wonder of his hwe men hade
set in his semblaunt sene
he ferde as freke were fade
and oueral enker grene

— SGGK, vers 146-150[9]

Sire Gauvain et le chevalier vert est rédigé dans un style représentatif de ce que les linguistes appellent la « renaissance allitérative » (Alliterative Revival) du XIVe siècle. La forme allitérative de cette période ne se focalise pas sur un compte métrique des syllabes et sur les rimes, mais se base sur l'accord entre une paire de syllabes accentuées au début du vers et une autre paire à la fin. Le vers est toujours marqué par une pause permettant de respirer, la césure, après les deux premiers accents, divisant le vers en deux parties[1].

S'il suit en grande partie le style de son époque, l'auteur de Sire Gauvain fait montre d'une plus grande liberté envers les conventions que ses prédécesseurs. Il divise ses vers en groupes de longueur variable, et termine ces « stances » par une section rythmique de cinq vers appelée bob and wheel : un vers à une seule accentuation de rime A (le « bob ») et quatre vers à trois accentuations de rimes BABA (le « wheel »), tous ces vers étant allitératifs[1]. Le poème entier se compose de 2530 vers, divisés en quatre parties et 101 stances[9].

[modifier] Récits similaires

Le retour de Gauvain tel que représenté dans le manuscrit original
Le retour de Gauvain tel que représenté dans le manuscrit original

Le plus ancien récit connu comprenant un jeu du décapité est le conte en moyen irlandais Bricriu's Feast, qui ressemble à Sire Gauvain en de nombreux points : par exemple, comme le Chevalier vert, l'adversaire de Cúchulainn feint de lui asséner trois coups avec sa hache avant de le laisser aller sain et sauf. Un tel échange apparaît également dans la Vie de Caradoc, un récit en moyen français imbriqué dans la Première Continuation de Perceval ou le Conte du Graal, de Chrétien de Troyes. Dans cette histoire, une différence notable tient à la personne de l'adversaire de Caradoc : c'est son propre père, venu éprouver son honneur. Lancelot du Lac est mis similairement à l'épreuve dans Perlesvaus, lorsqu'un chevalier lui demande de trancher sa tête, ou de mettre la sienne en danger. Lancelot la coupe à contrecœur, promettant de revenir dans un an pour mettre sa tête en péril. Lorsque Lancelot revient, les habitants de la ville l'acclamment et annoncent qu'ils ont enfin trouvé un véritable chevalier ; apparemment, beaucoup avaient été mis à l'épreuve et avaient échoué. La Fille à la mule et Hunbaut voient Gauvain dans des situations similaires. Hunbaut présente une variation intéressante : Gauvain tranche la tête de l'homme, puis lui retire le manteau magique qui le maintenait en vie avant qu'il ait pu replacer sa tête sur ses épaules, ce qui entraîne sa mort[10]. Il existe également plusieurs récits dans lesquels des chevaliers luttent pour repousser les avances de femmes voluptueuses, par exemple Yder, le Lancelot-Graal, Hunbaut et Le Chevalier à l'épée, ces deux derniers impliquant Gauvain. La tentatrice est souvent la fille ou la femme d'un seigneur auquel le chevalier doit un certain respect, et le chevalier est mis à l'épreuve pour savoir s'il restera chaste en des circonstances difficiles[10].

The Greene Knight est un poème qui racontre presque la même histoire que Sire Gauvain[11]. L'intrigue est simplifiée, les buts sont plus développés et certains noms sont différents. Un autre poème, The Turke and Gowin, commence avec un Turc entrant à la cour du roi Arthur[12]. À la fin de ce poème, le Turc demande à Gauvain de lui trancher la tête, ce que ce dernier fait. Le Turc loue alors Gauvain et le couvre de présents. On peut aussi comparer Sire Gauvain à The Carle off Carlile pour la scène où Carl, un seigneur, ordonne à Gauvain de le frapper avec sa lance avant de se courber pour recevoir le coup[13]. Gauvain obéit et attaque, mais le Carl se relève en riant, sans trace de blessure. À la différence de Sire Gauvain, aucun coup en retour n'est demandé ou donné[10]. De tous ces récits, seul Sire Gauvain implique un personnage entièrement vert, et il est également le seul à lier Morgane au défi[10][12].

[modifier] Thèmes

[modifier] Chasse et séduction

Les critiques ont fréquemment pointé du doigt les parallèles entre les trois scènes de chasse et les trois scènes de séduction de Sire Gauvain. Ils s'accordent généralement à penser que la scène de chasse au renard présente des similitudes claires avec la troisième scène de séduction, lorsque Gauvain accepte la ceinture que lui offre la femme de Bercilak. Gauvain, comme le renard, a peur pour sa vie et cherche un moyen de ne pas mourir sous la hache du Chevalier vert. Comme son alter ego, il s'en remet à la tromperie pour sauver sa peau. Le renard emploie des ruses si différentes des deux autres proies, et si inattendues, que Bercilak a beaucoup plus de mal à l'attraper. De la même façon, Gauvain trouve les avances de sa femme bien plus imprévisibles dans la troisième scène de séduction, et il a beaucoup plus de mal à lutter contre elles que les deux autres fois. Elle passe d'un style de langage évasif, typique de l'amour courtois, à une façon de parler plus assurée. Sa robe, relativement modeste jusqu'alors, devient soudain voluptueuse et révélatrice. Les critiques considèrent que tous ces éléments sont clairement liés[14].

Les scènes du cerf et du sanglier sont plus difficiles à lier. Les critiques ont tenté de rapprocher ces deux animaux des réactions de Gauvain dans les scènes de séduction parallèles. Les tentatives d'association de la chasse au cerf avec la première scène de séduction ont dessiné quelques parallèles. Comme la cour, la chasse au cerf devait se faire dans les règles. Les femmes offraient souvent des faveurs à leurs soupirants en fonction de comment ils chassaient et dépeçaient leur proie, allant jusqu'à regarder lorsqu'on dépeçait le cerf[14]. Les « hyndez » (biches) décrites tout d'abord sont probablement des cerfs élaphes, une espèce avec de grandes ramures, comme le wapiti, tandis que le « dos and of oþer dere » (biches et autres cerfs) qui suit fait vraisemblablement référence au daim, plus petit[15]. La séquence décrivant la chasse au cerf est relativement classique et dépourvue de violence, avec un air de relaxation et d'euphorie. La première scène de séduction est dans la même veine, sans avances physiques ouvertes ; tout l'échange est dépeint sous un éclairage humoristique. Il semble n'y avoir aucun danger[14].

La scène du sanglier est beaucoup plus détaillée. À l'époque, il était beaucoup plus difficile de chasser un sanglier qu'un cerf : s'y attaquer avec une simple épée revenait à défier un chevalier en combat singulier. Dans la scène de la chasse, le sanglier commence par fuir, mais finit par être acculé dans un ravin. Il se retourne pour faire face à Bercilak, prêt à combattre. Bercilak met pied à terre et parvient à tuer le sanglier dans la lutte qui s'ensuit. Il lui tranche la tête et la brandit. Dans la scène de séduction, la femme de Bercilak, comme le sanglier, s'avance un peu plus, déclarant qu'elle connaît la réputation romantique de Gauvain et qu'elle mérite d'y goûter. Gauvain parvient cependant à parer ses coups, affirmant qu'elle en sait certainement déjà plus que lui sur l'amour. Les deux scènes peuvent être vues comme la représentation d'une victoire morale[14].

[modifier] Nature contre chevalerie

William F. Woods soutient l'influence de la nature sur les événements et les personnages du poème. Woods présente la nature comme un thème majeur de Sire Gauvain, où elle représente une forme d'ordre chaotique implicite dans tout le poème. Le cavalier vert qui surgit dans la cour paisible d'Arthur peut être vu comme une icône représentant le désordre de la nature. Celle-ci est présentée dans le poème comme rude et indifférente, allant jusqu'à menacer l'ordre des hommes et la vie à la cour. Au fur et à mesure que le poème avance, on peut voir la nature envahir et déranger cet ordre dans les événements majeurs (symboliquement ou à travers la nature profonde de l'homme), tout d'abord avec l'irruption du Chevalier vert, puis lorsque Gauvain doit lutter contre la tentation que lui impose la femme de Bertilak, et enfin lorsque Gauvain brise le serment fait à Bertilak et au Chevalier vert en choisissant de garder la ceinture verte, faisant passer sa propre survie avant la vertu. La nature est une force sous-jascente ; elle semble être la partie de l'homme qui l'empêchera à jamais d'être parfait (dans le sens chevaleresque), ce que représente la ceinture[16].

Là où Woods affirme que la nature fournit un ordre fort au poème (une autre sorte de perfection), Richard Hamilton Green croit que le poète visait la quête de la perfection chevaleresque plutôt que la nature. D'après Green, Sire Gauvain « contient les idéaux chevaleresques de la classe gouvernante anglaise ». Green admet que la nature est une autre force du poème (le Chevalier vert représentant ce « monde de mystères »), mais plutôt que la présenter comme une dominatrice inévitable de l'homme, il affirme que l'auteur créée un « monde obscur d'échecs potentiels » et prévient contre « les pouvoirs maléfiques qui pourraient corrompre jusqu'aux hommes et aux institutions les plus vertueux ». Il y a une différence subtile entre les deux critiques : si Woods prétent que le poète ôte la responsabilité de ses actions à Gauvain à travers la nature, Green soutient que la chevalerie est l'ordre le plus grand et vertueux qui est présenté par le poète. Gauvain lui-même est censé représenter l'idéal héroïque, mais il n'est pas dénué de défauts : le poète ne « transforme pas le vice en vertu uniquement pour le confort général ». Gauvain est véritablement imparfait, et c'est par sa leçon d'humilité qu'il trouve la rédemption[17].

[modifier] Jeux

Le terme « gomen » (jeu) apparaît dix-huit fois dans Sire Gauvain. Sa ressemblance avec le terme « gome » (homme), qui apparaît vingt-et-une fois, a amené quelques critiques à envisager un lien dans la signification des deux, peut-être pour représenter la nature déchue (dans le sens chrétien) de l'homme[18]. À l'époque, le jeu peut avoir été considéré comme une épreuve de valeur, comme lorsque le Chevalier vert défie la valeur de la cour dans son « jeu de Noël »[18]. Le « jeu » consistant à échanger des dons était très courant dans les cultures germaniques. Si un homme recevait un cadeau, il devait offrir au donneur un cadeau encore meilleur, ou risquer de perdre tout honneur, presque comme un échange de coups dans un combat (ou dans un « jeu du décapité »)[19]. Le poème s'articule autour de ces deux jeux : tout d'abord un échange de décapitations, puis un échange de victoires. Ils peuvent sembler sans lien au premier abord. Cependant, on apprend par la suite que c'est l'honnêteté qui détermine la survie du héros au premier jeu, tandis que la seconde victoire dépend de sa pureté. Encore une fois, les deux éléments apparaissent dans d'autres histoires : comme déjà précisé, le jeu du décapité est apparu pour la première fois dans le récit en moyen irlandais Bricriu's Feast. Cependant, le lien entre les résultats est unique à Sire Gauvain[1],[7].

[modifier] Dates et saisons

Les critiques ont souvent noté les dates, saisons et cycles à l'intérieur de Sire Gauvain. Le récit commence le Jour de l'An avec une :tion, et culmine exactement un an plus tard, au Jour de l'An suivant. Gauvain quitte Camelot le jour de la Toussaint et arrive au château de Bercilak la veille de Noël. En outre, le Chevalier vert dit à Gauvain de le retrouver à la Chapelle verte dans « un an et un jour », un intervalle de temps fréquent dans la littérature médiévale. Certains critiques interprètent ces cycles temporels, qui commencent et s'achèvent en hiver, comme une tentative de la part du poète d'exprimer la chute inévitable de tout ce qui est bon et noble en ce monde. La sensation de chute inéluctable est renforcée par l'image de la chute de Troie. Le poème tout entier est borné par deux descriptions presque identiques de sa destruction, la première ligne étant « SIÞEN þe sege and þe assaut watz sesed at Troye » et la dernière (avant le « bob and wheel ») « After þe segge and þe asaute watz sesed at Troye »[20].

[modifier] Symbolisme

[modifier] Signification de la couleur verte

Dans ce Saint Wolfgang et le Diable (Michael Pacher), le Diable est vert. Des poètes contemporains, comme Chaucer, ont également associé le vert au diable, si bien que les critiques ont dressé des liens semblables dans leurs analyses du Chevalier vert.
Dans ce Saint Wolfgang et le Diable (Michael Pacher), le Diable est vert. Des poètes contemporains, comme Chaucer, ont également associé le vert au diable, si bien que les critiques ont dressé des liens semblables dans leurs analyses du Chevalier vert[21].

Connaissant les interprétations variées, voire contradictoires, de la couleur verte, son sens exact dans le poème reste ambigu. Dans la littérature et le folklore anglais, le vert est traditionnellement employé pour symboliser la nature et ses attributs, la fertilité et la renaissance. Des récits médiévaux lui font représenter l'amour[22] et les désirs basiques et naturels de l'homme[23]. Le vert représentait également la sorcellerie et les maléfices, étant associées aux fées et aux esprits du vieux folklore anglais. Il était aussi associé à la pourriture et à l'empoisonnement[24]. Lorsqu'il est combiné à l'or, comme dans le cas du Chevalier vert et de la ceinture, représente la disparition de la jeunesse[25]. Dans la tradition celte, on évitait de porter du vert pour son association avec la malchance et la mort. La ceinture verte, portée à la base comme protection, se transforme en symbole de honte et de lâcheté ; puis elle est finalement adoptée comme symbole d'honneur par les chevaliers de Camelot, impliquant une transformation du bien en mal, puis en bien de nouveau, et utilisant à la fois les connotations de pourriture et de régénération de la couleur verte[26],[21].

[modifier] Le Chevalier vert

Icône de détail Article détaillé : Chevalier Vert.

Le Chevalier vert apparaît dans deux autres textes déjà mentionnés, The Greene Knight et la ballade incomplète King Arthur and King Cornwall[27], dans lesquels il a pour nom « Bredbeddle ». The Greene Knight raconte peu ou prou la même histoire que Sire Gauvain, tandis que King Arthur and King Cornwall est un récit à part, dans lequel le Chevalier vert est l'un des champions d'Arthur.

D'autres textes présentent des personnages semblables au Chevalier vert. Par exemple, dans Le Morte d'Arthur de Thomas Malory, Gareth, frère de Gauvain, affronte « two brethren whych were called the Grene Knyght and the Rede Knyght » (« deux frères appelés le Chevalier vert et le Chevalier rouge »). On trouve également un « Chevalier vert » dans les histoires de Saladin : c'est un guerrier sicilien avec un écu de sinople et un heaume orné des bois d'un cerf. Saladin éprouvait du respect envers ce combattant honorable et tenta de l'inclure dans sa garde personnelle[28]. Dans le Coran, le personnage d'Al-Khidr est appelé l'« Homme vert » (الخضر en arabe). Il met par trois fois Moïse à l'épreuve en accomplissant des actes en apparence mauvais, mais qui se révèlent en fin de compte être de nobles gestes, destinés à empêcher de plus grands maux ou à révéler de grands bienfaits. Al-Khidr et le Chevalier vert servent tous deux d'enseignants à des hommes saints et droits (Gauvain, Moïse), qui voient leur foi et leur obéissance éprouvées par trois fois. Il a été suggéré que le personnage du Chevalier vert ait été un descendant littéraire d'Al-Khidr, ramené en Europe par les Croisés et mélangé à l'imagerie celtique et arthurienne[29].

Malgré ces ressemblances, le Chevalier vert est le premier de ces personnages à être vert[30]. À cause de son étrange couleur, de nombreux critiques voient en lui une manifestation de l'Homme vert, une figure courante de l'art médiéval. D'autres le considèrent comme une incarnation du Diable lui-même[26]. Une interprétation fait du Chevalier vert le « Seigneur d'Hadès », venu défier les chevaliers de Camelot. Gauvain, le plus courageux d'entre eux, se montre donc l'égal d'Hercule en affrontant le Chevalier, liant l'histoire à la mythologie grecque[24]. Une autre interprétation possible du Chevalier vert est d'en faire la fusion de ces deux divinités, représentant en même temps le bien et le mal, la vie et la mort, comme des cycles autonomes. Cette interprétation s'accorde avec les attributs positifs et négatifs de la couleur verte et correspond au thème énigmatique du poème[26].

[modifier] Le pentangle

Icône de détail Article détaillé : Pentagramme.
Un « pentangle » ou pentacle
Un « pentangle » ou pentacle

De nombreux critiques accordent une importance particulière au pentagramme sur l'écu de Gauvain. Le poème marque la première apparition connue du mot « pentangle » dans la langue anglaise, et c'est le seul endroit où il sert d'emblème à Gauvain : l'écu de celui-ci arbore le plus souvent un aigle[31]. Le poème décrit le pentagramme comme un signe issu de l'époque de Salomon, un symbole de fidélité, et un « nœud sans fin ». Plusieurs stances sont dédiées à la description des vertus de Gauvain, représentées par les cinq pointes du pentagramme. La façon dont le poète met l'emphase sur ce symbole a poussé certains critiques à croire qu'il s'agissait d'une allégorie ou d'une représentation du poème entier[31].

Les universitaires comparent le « pentangle » au traditionnel pentacle, dont on croyait qu'il possédait des propriétés magiques. On l'appelait Drudenfuss en Allemagne, où il était placé sur des objets domestiques pour empêcher le mal de pénétrer dans la maison[32]. Ce symbole était également associé aux charmes magiques qui, récités ou gravés sur une arme, permettaient d'appeler des forces magiques. Cependant, les preuves qui permettraient de relier le pentacle occulte au « pentangle » de Gauvain sont maigres[33],[32].

D'autres pointent du doigt la description du pentacle, au vers 625, comme « un signe de Salomon ». Salomon, troisième roi d'Israël au Xe siècle av. J.-C., est généralement réputé pour sa grande sagesse. Cependant, dans Sire Gauvain, le poète fait référence au sceau magique présent sur l'anneau du roi, marqué d'un pentacle, qu'il reçut de l'archange Michel. Ce sceau donnait à Salomon un pouvoir sur les démons[34].

[modifier] La ceinture

Une autre femme du cycle arthurien, la Dame de Shalott, portant une ceinture médiévale.
Une autre femme du cycle arthurien, la Dame de Shalott, portant une ceinture médiévale.

Les critiques débattent souvent de la possible signification sexuelle de la ceinture (girdle) que la femme de Bercilak offre à Gauvain. Les partisans de cette idée la comparent à des éléments d'autres histoires, comme le Chanson des Nibelungen. Dans ce récit, Brunhilde est convaincue d'avoir eu des rapports sexuels avec la mauvaise personne, sa ceinture volée servant de preuve[35]. Les interprétations féministes considèrent la ceinture (appelée love lace – « lacet d'amour » – à une reprise dans le texte) comme un symbole du pouvoir féminin. Elles s'appuient sur la définition qu'avait à l'époque lace, qui pouvait aussi signifier « toile », « nœud coulant » ou « piège »[36]. Les critiques qui considèrent le poème à travers le prisme chrétien estiment que la foi que place Gauvain dans la ceinture remplace sa foi en Dieu pour être sauvé du coup de hache[37]. Il ne faut pas pour autant confondre l'interprétation de la ceinture comme un « symbole sexuel » avec les considérations actuelles qui font de la ceinture un « sous-vêtement »[38],[35]. Au XIVe siècle, une ceinture se portait « autour de la taille, employée pour serrer des vêtements ou pour y suspendre une épée, une bourse, etc. ». Cette définition de la ceinture est proche de celle de l'époque de la rédaction de La Chanson des Nibelungen[39].

La ceinture donnée à Gauvain est « of a gay green silk, with gold overwrought »[40], sans doute pour rappeler les couleurs du Chevalier vert. Le renard que Bercilak attrape alors même que Gauvain accepte la ceinture reçoit le nom de « Sir Reynard the Red »[41] ; il est dépecé. On peut distinguer ici deux images importantes par rapport au chevalier soumis à la tentation : le choix des couleurs, et la peau du renard. Le rouge apparaît au moins sur l'écu de Gauvain[42], et le symbole de la fourrure est très tôt présenté comme une image d'une certaine nature humble propre à Gauvain[43].

[modifier] La blessure

La blessure au cou que reçoit Gauvain est un symbole important, qui représente de façon métaphorique son péché : ne pas avoir échangé tous ses gains avec Bercilak le fait souffrir de cette blessure. Lorsque Gauvain conserve la ceinture au lieu de la remettre à Bercilak, il montre un défaut humain : son « désir de préserver sa vie mortelle[44]. Ainsi, la blessure qui en résulte est son châtiment pour n'avoir pas tout donné de sa propre volonté. Finalement, lorsqu'elle guérit, elle devient un symbole des péchés pardonnés de Gauvain. Elle ne sert pas de souvenir douloureux, mais plutôt de souvenir positif. Puisque Gauvain réalise qu'il a péché et l'accepte, il est sauvé. Qui plus est, il se fait un devoir de se rappeler cette faiblesse. Cependant, Gauvain ne peut pas compter sur la seule blessure pour lui rappeler ses errements, puisqu'elle finit par guérir. À la place, il accepte et porte la ceinture comme un symbole, afin de lui rappeler son péché et la blessure qui s'est ensuivie. Gauvain porte la ceinture non pas simplement pour qu'elle lui rappelle son passé, mais afin d'être durablement libre de ses péchés. Mais comme Gauvain est mortel, il échoue. La tâche qui s'impose à lui n'est pas d'oublier ses erreurs, mais d'apprendre à partir d'elles[45]. La blessure cicatrisée et la ceinture verte servent tous deux de rappels constants à Gauvain pour le restant de ses jours.

[modifier] Interprétations

[modifier] Interprétations chrétiennes

Les critiques ont souligné les ressemblances entre la ceinture qu'offre la femme de Bercilak à Gauvain, et le fruit qu'offre Ève à Adam dans le jardin d'Éden.
Les critiques ont souligné les ressemblances entre la ceinture qu'offre la femme de Bercilak à Gauvain, et le fruit qu'offre Ève à Adam dans le jardin d'Éden.

Les interprétations chrétiennes du poème ont pris de nombreuses formes. L'écu au pentacle peut être vu comme un symbole de la foi de Gauvain en la protection de Dieu et du Christ[18]. Certains critiques comparent Sire Gauvain aux trois autres poèmes que contient son manuscrit. Chacun a un thème chrétien très fort, ce qui pousse les critiques à voir Sire Gauvain à travers un prisme similaire. En le comparant au poème Cleanliness (ou Purity), par exemple, ils le considèrent comme l'histoire de la chute apocalyptique d'une civilisation, Camelot dans le cas de Sire Gauvain. En suivant cette interprétations, Gauvain est comme Noé, à l'écart de sa société et averti par le Chevalier vert (considéré comme le représentant de Dieu) de la chute prochaine de Camelot[20]. Gauvain est jugé digne après son épreuve et se voit épargné le sort du reste de Camelot. Cependant, le roi Arthur et ses chevaliers jugent mal l'expérience de Gauvain et se mettent à porter eux-mêmes des ceintures. Dans Cleanliness, les hommes qui sont sauvés « ne peuvent éviter le châtiment divin à leurs sociétés respectives, et dans Sire Gauvain et le chevalier vert, Gauvain ne peut ralentir seul la chute de Camelot, bien que son aventure puisse servir à souligner le caractère inéluctable de l'effondrement de cette société à ceux qui peuvent l'interpréter correctement »[20]. L'un des points majeurs que cette ressemblance implique signifie que « la révélation et le salut accordés par Dieu ne peuvent être expérimentés que directement et individuellement, et il leur est donc impossible d'être retraduits dans le monde des condamnés »[20]. À travers cette description de Camelot, l'auteur révèle une inquiétude pour sa société, dont il croit la chute inévitable, qui entraînera la destruction finale voulue par Dieu[20]. Le poème a été écrit vers l'époque de la Peste noire et de la Révolte des paysans, deux événements qui amenèrent le peuple à croire que leur monde était véritablement sur le point de connaître une fin apocalyptique, et qui influencèrent la littérature et la culture[20]. D'autres critiques sont dubitatifs envers cette vision étant donné que le Chevalier vert est, en fin de compte, contrôlé par la fée Morgane, une figure fortement maléfique du cycle arthurien. Il est donc difficile de le voir comme un représentant de Dieu, de quelque façon que ce soit[18].

Si le personnage du Chevalier vert n'est généralement pas considéré comme une représentation du Christ, les critiques reconnaissent l'existence de ressemblances entre les deux. Lawrence Besserman explique que « le Chevalier vert n'est pas une représentation figurative du Christ ; mais l'idée de la nature divine/humaine du Christ fournit un cadre conceptuel médiéval qui soutient la description sérieuse/comique que fait le poète des qualités et faits surnaturels/humains du Chevalier vert »[26]. Ce parallèle dans la dualité est un exemple de l'influence et de l'importance de l'enseignement chrétien et de l'image du Christ à l'époque de l'auteur de Sire Gauvain.

Les critiques ont également noté l'influence chrétienne mise en parallèle dans la conclusion du poème. Après le retour de Gauvain à Camelot et le récit qu'il fait de l'acquisition de sa ceinture, le poème s'achève sur une brève prière et une référence au « Dieu couronné d'épines » (« the thorn-crowned God »)[46]. Besserman estime que « avec ces derniers mots, le poète redirige notre attention de la ceinture circulaire (une double image du "yntrawpe/renoun" de Gauvain) vers la Couronne d'Épines circulaire (une double image de l'humiliation/triomphe du Christ) »[26].

Tout au long du poème, Gauvain voit sa dévotion et sa foi éprouvées à plusieurs reprises. Lorsqu'il entreprend son voyage vers la Chapelle verte, sa détresse est telle qu'il n'y échappe qu'en priant la Vierge Marie. Comme il poursuit sa route, Gauvain est de nouveau en proie à l'angoisse en pensant à sa rencontre inéluctable avec le Chevalier vert. Mais au lieu de prier de nouveau Marie, Gauvain place sa foi dans la ceinture que lui a donnée la femme de Bertilak[47]. Dans une perspective chrétienne, ce comportement conduit à des conséquences désastreuses et embarrassantes pour Gauvain, comme celui-ci se voit forcé de réexaminer sa foi dans les principes chrétiens après que la ceinture s'avère n'être rien d'autre qu'une attrape[47].

En outre, certains voient une analogie entre l'épreuve de Gauvain et celle qu'Adam subit en Éden, telle que décrite dans la Bible. Adam a succombé à Ève, tout comme Gauvain a été vaincu par la femme de Bertilak en acceptant la ceinture[47]. Bien que Gauvain ait péché, à la fois en plaçant sa foi dans la ceinture et en ne se confessant pas après avoir été attrapé, le Chevalier vert lui pardonne et « permet à Gauvain de devenir un meilleur chrétien à travers ses erreurs mêmes »[48]. C'est à travers les différents jeux auxquels il a participé et les épreuves qu'il a endurées que Gauvain comprend et trouve sa place dans le monde chrétien.

[modifier] Interprétations féministes

Les critiques féministes estiment que le poème dépeint le pouvoir des femmes sur les hommes. Par exemple, la fée Morgane et l'épouse de Bertilak sont les personnages les plus puissants de l'œuvre, en particulier Morgane, puisqu'elle a enchanté le Chevalier vert et est à l'origine de toute l'histoire. La ceinture et la cicatrice de Gauvain peuvent être considérées comme des symboles du pouvoir des femmes, les deux diminuant la virilité de Gauvain. Le passage rhétorique anti-féministe de Gauvain[49] dans lequel il rend les femmes fautives de tous ses problèmes et évoque les hommes qui ont succombé à la ruse des femmes, appuie la thèse féministe selon laquelle le pouvoir ultime dans le poème est celui des femmes : Gauvain l'admet lui-même[36].

Le fait que Morgane soit à l'origine du jeu représente clairement une certaine quantité de pouvoir féminin ; cependant, l'histoire est centrée sur les hommes, et ce sont eux qui dictent le résultat final. La représentation de la Dame dans le poème suit le même schéma.

En surface, la femme de Bercilak semble être un personnage fort[50]. Le fait qu'elle adopte un rôle masculin (en particulier dans la scène de la chambre à coucher) semble lui conférer un pouvoir supplémentaire ; mais ce n'est pas tout à fait le cas. Si la Dame est mise en avant, ce sont les sentiments de Gauvain qui sont exprimés, et c'est lui qui a le plus à gagner (ou à perdre) en se liant à la Dame[51]. Le personnage sur qui repose cette situation, et même cette relation, c'est bien Gauvain. La Dame a fait le premier pas, mais c'est Gauvain qui décide de ce qui découlera de ces actions[51]. De ce point de vue, la Dame, autrement dit la femme, n'est pas le personnage le plus important.

Il est intéressant de noter que dans la scène de la chambre à coucher, les représentations positives et négatives de la Dame sont toutes deux motivées par son désir[52]. Ce sont ses désirs et sentiments qui la font sortir du rôle féminin usuel et entrer dans celui de l'homme, lui faisant ainsi gagner du pouvoir[53]. Ces mêmes actions laissent penser que la Dame trompe son mari, ce qui a poussé certains critiques à la comparer à l'Ève biblique[47]. Sans compter qu'en poussant Gauvain à accepter sa ceinture, autrement dit la pomme, le pacte passé avec Bertilak (et donc le Chevalier vert) est brisé[54]. Dans ce sens, et à en juger par les scènes dans la chambre à coucher, il est clair qu'entre les mains de la Dame, Gauvain est un « homme bon séduit »[54].

[modifier] Interprétation romantique

Sire Gauvain et le chevalier vert est avant tout une romance. Gauvain possède toutes les caractéristiques du chevalier arthurien idéal. « Il n'est assurément pas un homme moyen, pas plus que la contrepartie d'un chevalier ayant jamais existé ; au contraire, il est le meilleur des chevaliers, il rassemble en lui les meilleurs éléments de tous les chevaliers ayant jamais vécu ». Il est un instrument de « courage, humilité, courtoisie et loyauté » : sa morale est remarquable et ses manières infaillibles. Sa position de neveu d'Arthur reflète ses caractéristiques personnelles idéales. « Il est le chevalier féodal chrétien idéal, qui ne représente pas seulement le plus haut niveau atteint par le comportement humain, mais qui présente à notre évaluation ces qualités en un homme vivant à une époque qui les admirait entre toutes, comme l'époque féodale de façon générale »[55].

Le seul faux pas de Gauvain est d'accepter la ceinture de la dame. « Bien qu'il soit le plus grand des chevaliers, il reste un simple humain »[56]. Ce geste peut être considéré comme un acte de orgueil, et la blessure de Gauvain comme une punition pour cet orgueil. Et « [...] lorsque le cou de Gauvain est entaillé, celui de toute la cour l'est. Chacun reçoit la lame pour être libéré de cet orgueil. Gauvain est le cou de la cour et, avec Arthur, sa tête : il est le plus fidèle soutien d'Arthur, il est la meilleure source d'orgueil chevaleresque de la cour, et il est le meilleur chevalier en termes de prouesses et de courtoisie »[56]. Néanmoins, cette fautte souligne l'humanité de Gauvain. À la fin du poème, lorsque Gauvain découvre que le Chevalier vert avait connaissance de la ceinture, il est embarrassé[56]. Sire Gauvain soiligne le fait que nombreux ont été les grands hommes à avoir été tentés par des femmes. Mais il est rendu « d'autant plus humain par cette petite faute »[55]. Ce faux pas rend Gauvain plus réel et lui attire la sympathie du lecteur. Dans The Meaning of Sir Gawain and the Green Knight, Alan Markman affirme : « C'est la fonction du héros de romance, je crois, de se dresser comme champion de la race humaine et, en se soumettant à des épreuves étranges et sévères, de démontrer les capacités humaines à faire le bien ou le mal »[55].

Le lecteur s'attache à cette vision humaine de Gauvain au sein du romantisme du poème. Cette seule erreur montre l'humanité de Gauvain, mais elle n'altère pas toutes ses qualités chevaleresques. Gauvain « nous montre ce qu'est la conduite morale. Nous n'égalerons sans doute jamais son comportement, mais nous l'admirons pour nous avoir montré le chemin »[55].

[modifier] Sire Gauvain et le colonialisme

Durant les années 1350-1400, période dont daterait le poème, l'Angleterre était en guerre avec le Pays de Galles pour s'étendre territorialement, et on pense que l'auteur du poème employait un dialecte du nord-ouest de Midlands, courant sur la frontière anglo-galloise. Si l'idée de rattacher le poème à un contexte de luttes coloniales est attribuée à Patricia Clare Ingham, le degré d'influence des différences coloniales sur le poème est sujet à débat. La plupart des critiques s'accordent à penser que la différence homme/femme joue un rôle dans le poème, mais tous ne sont pas d'accord pour dire si cette différence soutient les idées coloniales ou les remplace[57].

Le paysage politique de l'époque est également source de controverse. Pour Rhonda Knight, Bertilak est l'exemple d'une culture anglo-galloise, présente à la frontière des deux pays, et de la même façon, Ingham considère le poème comme le reflet d'une culture hybride, issue des deux autres et différente d'elles. D'un autre côté, Arner affirme qu'historiquement, de nombreux Gallois tombèrent au combat durant le XIVe siècle, entraînant une situation bien moins amicale que l'hybridation suggérée par Knight et Ingham. Pour appuyer cet argument, Arner ajoute que le poème créée un scénario « eux contre nous », qui oppose l'Angleterre cultivée et civilisée aux frontières sauvages où vivent Bertilak et les autres monstres que rencontre Gauvain au cours de sa quête[57].

En contraste avec cette perception des terres coloniales, Bonnie Lander affirme que le pays de Hautdésert, le territoire de Bertilak, a été mal représenté, voire ignoré, par la critiques moderne, et indique qu'il s'agit d'un pays avec sa propre morale, qui joue un rôle central dans l'histoire. Lander déclare que les citoyens de Hautdésert sont « intelligemment immoraux », choisissant de suivre certains codes et d'en rejeter d'autres, une position qui engendre « une distinction [...] entre l'idée morale et la foi morale ». Lander estime que les habitants de la frontière sont plus sophistiqués parce qu'ils n'adhèrent pas sans réfléchir aux codes de la chevalerie, au contraire : ils les défient au sens philosophique et, dans le cas de l'apparition de Bertilak à la cour d'Arthur, au sens pratique. La supériorité des habitants de Hautdésert repose, selon Lander, sur l'absence de conscience de soi à Camelot, dont la population rejette indifféremment l'individualisme. La thèse de Lander forme un contrepoint à l'éloge d'Arthur et à la diabolisation de Bertilak et des terres coloniales présentes dans tout l'article d'Arner. De ce point de vue, les monstres ne sont pas Bertilak et ses gens, mais bien Arthur et sa cour[58].

[modifier] Le voyage de Gauvain

Plusieurs critiques ont tenté de reconstituer les éléments du poème concernant le voyage de Gauvain vers la Chapelle verte pour trouver leurs correspondants sur une carte du monde réel. Sont par exemple mentionnées les îles d'Anglesey, aujourd'hui une île unique au large du Pays de Galles[59]. Au vers 700, Gauvain est dit passer la « Holy Head », que la plupart des critiques identifient soit à Holywell, soit à l'abbaye cistercienne de Poulton, à Pulford. Holywell est associé à la décapitation de Sainte Winifride, dont l'histoire est la suivante : Winifred était une vierge de la région qui fut décapitée par un souverain local après qu'elle eût repoussé ses avance. Son oncle, un autre saint, remit sa tête en place et guérit la blessure, ne laissant qu'une cicatrice blanche. La ressemblance entre cette histoire et celle de Gauvain fait de cette région une localisation plausible pour le voyage[60].

Le voyage de Gauvain le conduit ensuite directement dans la région du dialecte de l'auteur, où se trouvent les localisations possibles du château de Hautdésert et de la Chapelle verte. On estime que Hautdésert se trouve dans la région de Swythamley, dans le nord-ouest de Midlands, qui correspond à la description du poème. On sait en outre que la région abritait au XIVe siècle tous les animaux chassés par Bertilak (cerf, sanglier et renard)[61]. La Chapelle verte serait soit à Ludchurch, soit à Wetton Mill, ces deux endroits correspondant aux descriptions données par l'auteur[62].

[modifier] Adaptations modernes

L'opéra Gauvain de Harrison Birtwistle, créé en 1991, est une adaptation de Sire Gauvain et le chevalier vert[63]. L'opéra de Lynne Plowman Gwyneth and the Green Knight, créé en 2002, emploie Sire Gauvain comme trame de fond : il relate l'histoire de l'écuyère de Gauvain, Gwyneth, qui essaie de devenir chevalier[64].

Le poème a été adapté au cinéma à deux reprises, tout d'abord avec Gawain and the Green Knight en 1973[65], puis en 1984 avec Sword of the Valiant: The Legend of Sir Gawain and the Green Knight, avec Miles O'Keefe dans le rôle de Gauvain et Sean Connery dans celui du Chevalier vert[66]. Il y a eu au moins deux adaptations télévisuelles : Gawain and the Green Knight en 1991[67] et le dessin animé Sir Gawain and the Green Knight, en 2002[68].

En 1925, J. R. R. Tolkien et E. V. Gordon ont publié une édition annotée du texte en moyen anglais de Sire Gauvain et le chevalier vert[69] ; une seconde édition de ce texte, préparée par Norman Davis, a été publiée en 1967. Cet ouvrage est souvent confondu avec la traduction en anglais moderne du texte sur laquelle Tolkien travailla par la suite et qui fut publiée en 1975, peu après sa mort, avec ses traductions de Pearl et de Sir Orfeo. De nombreuses éditions de cet ouvrage indiquent Tolkien comme auteur plutôt que comme traducteur[70], et on voit souvent Sire Gauvain indiqué comme un ouvrage de Tolkien lui-même[71]

[modifier] Références

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