Sakyapa

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Drogön Chögyal Phagpa‎, l’un des cinq fondateurs de sakyapa, premier lama vice-roi du Tibet
Drogön Chögyal Phagpa‎, l’un des cinq fondateurs de sakyapa, premier lama vice-roi du Tibet

L'école Sakyapa ou Sakya (tib: sa skya) est l'une des quatre lignées contemporaines du bouddhisme tibétain. Elle a été fondée en 1073 (XIe siècle) par Khön Köntchok Gyalpo (1034-1102) disciple de Drokmi Sakya Yéshé (992-1072) qui reçu en Inde, l'enseignement du yogi indien Virupa. Khön Köntchok Gyalpo transmis l'autorité sur l'école Sakyapa et à son fils Sachen Kunga Nyingpo[1]. C’est l’un des trois courants sarmapa (kagyupa, sakyapa, gelugpa) issus d’une nouvelle vague de traductions de sanscrit en tibétain venus concurrencer le bouddhisme ancien nyingmapa.

Le courant tire son nom, « terre pâle », de l’aspect des collines de Ponpori près de Shigatse dans le Tibet central (Tsang) où Khön Konchog Gyalpo (1034-1102) fonda en 1073 le monastère de Sakya, berceau de la tradition. Le courant sakya a conservé le principe de la transmission héréditaire : Sakya Trizin (trizi : titulaire du trône), hiérarque principal du courant, est toujours un descendant du clan Khön. Bien que l’école se soit rapidement dirigée vers la tradition monastique, les chefs de lignée sont typiquement des yogis mariés et pères de famille. Dans la mesure où le chef d’un grand monastère a fait vœu de célibat, sa succession est assurée par un neveu du côté paternel.

La lignée sakyapa actuelle comprend trois branches principales (sa ngor tsar gsum) dirigées chacune par un monastère-mère :

Sommaire

[modifier] Histoire

Les fondateurs du courant Sakyapa sont au nombre de cinq : Sachen Kunga Nyingpo (1092-1158), fils de Khön Konchog Gyalpo, disciple de Drokmi Lotsawa (992-1074) et fondateur du monastère de Sakya ; Sonam Tsemo (1142-1182), 2e fils du précédent ; Drakpa Gyaltsen (1147-1216), 3e fils ; Sakya Pandita (1182–1251), neveu du précédent ; Drogön Chögyal Phagpa‎ (1235-1280), neveu de Sakya Pandita.

Ils sont issus du clan Khön qui se disait né d’un ancêtre descendu du « Domaine des cieux clairs » Rupadhatu. La famille détenait le poste de vice-roi de Tsang (Tibet central) à l’époque où Padmasambhava vint répandre le bouddhisme. Khön est la contraction de khon gyi dung, « clan des conquérants », nom qu’ils auraient acquis grâce à leur victoire sur les démons rashkas représentant l’ignorance.

La réputation de Sakya Pandita, grand érudit, lui valu d’être invité en 1244 par le prince mongol Köden. Kubilai Khan invita à son tour en 1253 Drogön Chögyal Phagpa à sa cour et lui demanda d’inventer une écriture (écriture phagpa) pour remplacer les caractères chinois. Il l'investit en 1264 de la suprématie administrative sur les trois provinces du Tibet, en faisant le premier chef religieux à détenir le poste de vice-roi de l’ensemble du pays. Les lamas sakya conservèrent cette position jusqu’au milieu du XIVe siècle malgré une révolte des Kagyupas Drikung vers 1290. Ce dernier évènement se solda par l'incendie du monastère de Drikung par les Sakyapas. Cela marqua une page importante de l'histoire du Tibet, mais plus encore pour l'histoire du monde, car cela marqua la rupture entre les empires bouddhistes de Chine de Khubhilai Khan, le protecteur des Sakyapas, à l'Est, et ceux des Chagatai au centre et ceux ces Ilkhans en Perse qui furent les protecteurs des Drikungs. Le vaste empire perse des mongols perdit donc son potentiel bouddhiste par l'ascendant des armes de Khubhilai, mais aussi spirituel, avec la chute de Drikung sous les coups Sakyapas de l'intérieur au Tibet. Ces évènements sont généralement occultés ou omis dans les histoires, alors que le grand impact international sont cependant majeurs, quant à la direction spirituelle prise par des régions aussi vastes que les empires des enfants et petits enfants de Genghis Khan dans le monde qui formaient le plus grand empire que le monde ne connut ni ne connaitra jamais. Ceci s'explique par la terreur des mongols dans laquelle vivaient leurs administrés pendant des siècles et qui préféraient ne pas évoquer ces évènements de peur de raviver les conflits anciens. Cet épisode est omise effectivement dans son "Histoire du Bouddhisme en Inde et au Tibet", écrit au début du XIVe siècle par le célèbre érudit Sakyapa Buton Rinchen Drup. La peur des mongols et la discrétion des rapports historiques est aussi expliqué par le fait que le protecteur mongol Ilkhan des Drikungs, nommé Houlagou Khan fut responsable de la pire tuerie de l'histoire du monde, le Sac de Baghdad [1] à cette époque (1258), dont les chiffres, mises à jour, seraient de plusieurs millions. Buton est également l'auteur principal des textes actuels du Kalachakra, et ce silence sur les évènements dans son livre d'histoire sont aussi reflétées dans les omissions et erreurs, intentionnelles ou pas, dans la lignée Kalachakra, qui est donc entouré de secret, comme cela est souligné dans l'article anglais qui cite Helmut Hoffmann à son sujet.

A la fin du XIIIe siècle, Tishri Kunglo (1299-1327), aîné des quinze petits-neveux de Sakya Pandita, institua quatre palais (phodrang) ou sous-lignées : Zhithog, Rinchen Gang, Lhakhang and Ducho ; seules les deux dernières ont survécu. Au XVe siècle, Ducho se divisa elle-même en deux branches, Dolma et Phuntsok. Le titre de Sakya Trizin est détenu en alternance par les grands maîtres de ces deux lignées.

Par ailleurs, deux sous-courants se sont détachés de l'ensemble sakya :

  • Ngor, fondée par Ngorchen Kunga Zangpo (1382-1457), illustré par Könchok Lhundrup, Thartse Namkha Pelsang et Drubkhang Pelden Dhondup. Ce courant, qui met l’emphase sur la tradition monastique et la discipline, est dirigé à tour de rôle par les Maisons Phende, Thartse, Khangsar et Luding. Phendé Rinpoché, chef de la Maison Phende, est établi en France. Cette école représente 85 % de l'école Sakyapa, et actuellement en Inde les monastères Sakyapas sont tous, quasiment, Ngorpas. Ainsi, un des seuls monastères Sakyapas non-Ngorpa, est celui de Sakya Trizin.
  • Tsar, fondée par Tsarchen Losal Gyamtso (1496-1560), tradition « chuchotée » basée sur l’enseignement des Treize textes d’or, de la tradition ésotérique du grand et petit Mahakala, du Vajrayogini et du Jambhala.

Avec la branche d’origine, elles constituent les Trois écoles (sa ngor tsar gsum).

Au XIXe siècle, un grand maître et tertön sakya, Jamyang Khyentse Wangpo, fut l’un des fondateurs du mouvement non-sectaire rimé visant à réunir toutes les traditions du bouddhisme tibétain. Les deux autres fondateurs étaient Jamgon Kongtrul Lodrö Taye (kagyupa) et Chogyur Lingpa (nyingmapa).

Le Sakya Trizin actuel est le grand maître du palais de Dolma, Ngawang Kunga [Tegchen Palbar Samphel Wanggi Gyalpo]. Né à Tsedong en 1945, il est le 41e de la lignée, considéré comme une émanation de Manjushri et de Padmasambhava. Jeune, il fut compagnon d’études de Sogyal Rinpoché, lama nyingmapa fondateur du centre Rigpa. Il réside à Dehradun (Inde) et Rajpur. Il a épousé en 1974 Dakmo Tashi Lhakyi, fille d’une famille noble de Dege (région du Tibet oriental, le Kham) et a deux fils, Ratna Vajra Rinpoche (n. 1974) et Jnana Vajra Rinpoche (n. 1979). Dagchen Rinpoche (n. 1929), fondateur de Sakya Thegchen Choling (USA), est le grand maître de la branche Phuntsok.

Au temps de l'éxil, après l'invasion du Tibet par les chinois, les grands maîtres partirent avec le plus de personnes possible vers l'Inde. Ainsi, S.E. Phendé Khenchen, le chef de l'école Ngorpa, rencontra par hazard Sakya Trizin sur le chemin de la fuite à travers l'Himalaya.

Actuellement, les grands maîtres sont tous en éxil, ce qui rend le Bouddhisme très difficile à pratiquer au Tibet.

[modifier] Enseignement

Hevajra ou Kye Dorje, forme de Heruka, déité courroucée en union avec sa parèdre Vajrayogini
Hevajra ou Kye Dorje, forme de Heruka, déité courroucée en union avec sa parèdre Vajrayogini

Sachen, premier fondateur, hérita de nombreuses traductions du sanscrit faites par les lotsawas (traducteurs) qui s’étaient rendus en Inde, particulièrement Drokmi Lotsawa (992-1074), Bari Lotsawa et Mal Lotsawa. Drokmi, disciple de Gayadhara (994-1043), dépositaire de l’enseignement du mahasiddha Virupa (IXe siècle), rapporta d’Inde le kalachakra et le Lamdre (voie incluant son fruit) basé sur le Hevajra Tantra. Khon Könchok Gyelpo fut son disciple. Bari Lotsawa introduisit au Tibet de nombreuses pratiques tantriques, dont les Cent mille sadhanas. À Mal Lotsawa on doit la tradition Naro Khachoma du Vajrayogini. Les cycles de Vajrakilaya, Mahakala et Guhyasamaja pénétrèrent également à cette époque.

[modifier] Lamdre

Le Lamdre (Lam-'bras), « Voie incluant son fruit », est un enseignement comprenant des éléments exotériques et ésotériques et basé sur le principe de la non-dualité nirvana / samsara, qui vise à amener le pratiquant dans l’état d’ Hevajra. Il aurait été transmis par les maîtres Virupa, Avadhuti, Gayadhara et Shakyamitra, disciple de Nagarjuna. À l’époque de Muchen Sempa Chenpo Könchok Gyeltsen, disciple de Ngorchen Kunga Zangpo (1382-1457), deux types d’enseignement apparurent, correspondant à deux catégories de public, disciples avancés (sLob-bshad) et public général (Tshog-bshad).

[modifier] Grands Maîtres de la lignée Sakyapa

Parmi les grands maîtres de l’enseignement sakyapa, on peut citer le 4e fondateur Sakya Pandita et les Six ornements du Tibet : Yaktuk Sangyey Pal et Rongton Mawe Sengey, spécialistes des sutras ; Ngorchen Kunga Zangpo et Zongpa Kunga Namgyel, spécialistes des tantras ; Goram Sonam Senge et Shakya Chogden, spécialistes des sutras et tantras.

Gorampa Sonam Senge, en particulier, introduisit l’étude de la logique. Ses textes ont une place importante dans les centres d’études des monastères sakya, ainsi que les deux ouvrages principaux de Sakya pandita, Discrimination des trois vœux (sDom-gsum rab-dbye) et Trésor de la logique (Tsod-ma rigs-gter)

De nombreux maîtres des autres courants ont reçu des enseignements tantriques additionnels de lamas sakya. Les principales pratiques tantriques sont les tantras de Hevajra, de Chakrasambhara (Heruka) et de Mahakala.

Comme la majorité des grands maîtres du bouddhisme tibétain, les hiérarques sakya sont des tulkus et des émanations de déités, particulièrement Manjusri (sagesse), Avalokiteshvara (compassion) et Vajrapani (puissance), dont les trois couleurs ornent les murs du monastère de Sakya.

[modifier] Monastères

En plus des trois monastères-mères (monastère de Sakya, Ngor Ewam Tcheu Den et Phenyul Nalanda), les autres principaux établissements sakyapa au Tibet sont :

  • Phenpo Nalanda (Phenpo) fondé par Rongton Sheja Kunrig,
  • Tsedong Sisum Namgyel, foundé par Namkha Tashi Gyeltsen,
  • Dhöndup Ling, fondé par Dagchen Sherab Gyeltsen,
  • Lhundup Teng (Dege), fondé par Thangtong Gyalpo,
  • Dzongsar, siège des Dzongsar Khyentse Rinpoché, (Dege).
  • Deur Chode, fondé par Chödrak Sangpo (Amdo).

Le premier monastère fondé en exil en 1964 par l’actuel Sakya Trizin fut Tsechen Tenpai Gatsal à Rajpur, Uttar Pradesh, Inde. D’autres suivirent : Ngor E-Vam Shedrup Dhargye Ling (Bir, Himachal Pradesh), Tsechen Dhongag Chöling (Mundgod, Karnataka, Inde), Ngor E-Vam Chöden (Dehradun, Uttar Pradesh) et Tashi Rabten Ling (Lumbini, Népal)

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. Sakya

[modifier] Liens externes


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