Registres de langue en français

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Un registre de langue (on dit aussi niveau de langue, ou encore, style) est un mode d’expression adapté à une situation d’énonciation particulière, qui détermine notamment, certains choix lexicaux et syntaxiques ainsi qu'un certain ton.

Il existe en français plusieurs registre de langue dont : le registre courant, le registre soutenu et le registre familier.

Sommaire

[modifier] Registre courant

Le registre courant correspond à un langage correct, tant du point de vue lexical que syntaxique : les phrases sont quelquefois complexes, les principales règles de syntaxe sont respectées, avec quelques tolérances (quelques ellipses et quelques abréviations lexicalisées). C’est le style attendu dans les échanges de type professionnel ou officiel, lorsque la communication est impersonnelle et implique une distance entre les interlocuteurs: c'est le langage du professeur à ses élèves, de l’homme politique en train de faire un discours, du présentateur de télévision, du journaliste faisant un reportage. Le registre courant est celui qu'on emploie aussi dans des situations d'interviews ou dans la communication orale avec des services commerciaux ou administratifs. Les formes et le vocabulaire du registre courant oral sont généralement admises à l'écrit.

  • Le registre courant nous servira de repère afin d’évaluer le niveau soutenu et le niveau familier.
Remarquons que le terme jargon ne désigne pas un registre particulier, mais plutôt le vocabulaire particulier attaché à une communauté particulière, un milieu professionnel, politique, sportif, etc. (jargon médical, jargon informatique, jargon de Wikipédia…).

[modifier] Registre soutenu

Le registre soutenu (ou soigné) est non seulement correct, mais il bénéficie d’une surveillance extrême.

Employé surtout dans la littérature et la rhétorique, ce registre utilise principalement :

  • Des phrases pouvant être longues (alors appelées périodes), avec une syntaxe souvent complexe :
Je me suis tellement accoutumé ces jours passés à détacher mon esprit des sens, et j’ai si exactement remarqué qu’il y a fort peu de choses que l’on connaisse avec certitude touchant les choses corporelles, qu’il y en a beaucoup plus qui nous sont connues touchant l’esprit humain, et beaucoup plus encore de Dieu même, qu’il me sera maintenant aisé de détourner ma pensée de la considération des choses sensibles ou imaginables, pour la porter à celles qui, étant dégagées de toute matière, sont purement intelligibles. (Descartes - Méditation quatrième)
  • Un vocabulaire rare :
Le firmament / les cieux / l’azur…
Pour : « Le ciel… »
  • Des figures de style recherchées :
Déjà la nuit en son parc amassait
Un grand troupeau d’étoiles vagabondes.
(du Bellay)
Pour : « Déjà la nuit tombait et on apercevait les premières étoiles. » (métaphore filée)
  • L’imparfait et le plus-que-parfait du subjonctif (à l’oral comme à l’écrit) :
Il fallait qu’il vînt.
Pour : « Il fallait qu’il vienne. »
  • Le passé simple et le passé antérieur de l’indicatif (à l’oral) :
Je le vis quand je revins.
Pour : « Je l’ai vu quand je suis revenu. »
  • La forme interrogative directe inversée :
D’où m’appelles-tu ?
Pour : « D’où est-ce que tu m’appelles ? »
  • L’inversion du sujet après certains adverbes de liaison (tels que : aussi, ainsi, peut-être, etc.) :
Ainsi, ai-je dû écourter mes vacances.
Pour : « Ainsi, j’ai dû écourter mes vacances. »
  • etc.

Il existe un degré supérieur au niveau soutenu, principalement utilisé dans la poésie et la tragédie, et qui use d’un vocabulaire spécifique, de constructions archaïques ou sophistiquées, etc. C’est le registre sublime (ou encore, littéraire, noble ou relevé).

Dans certaines situations d’énonciation, le choix du registre soutenu peut apparaître comme déplacé. Dans ce cas, il sera ressenti comme incongru, abusif, précieux, maniéré ou comique.

[modifier] Registre familier

Le registre familier n’est pas totalement correct, mais il demeure admis sous certaines conditions. Il correspond au langage courant mais avec un grand nombre de libertés. Comme son nom l’indique, ce registre est surtout employé entre proches, entre personnes appartenant à une même communauté sociale dans laquelle tout formalisme peut être atténué, et il suppose, en principe, l’absence de tout lien hiérarchique rigide entre les interlocuteurs (membres de la famille, amis, camarades de classe, collègues de travail…).

Ce registre utilise :

(1)Au bureau, un de mes collègues, sa femme, elle a eu un bébé.

Pour : « La femme d’un collègue du bureau a eu un bébé. »

(2)T’es là ? / phone / p’tit dèje / une deuch’…

Pour : « Tu es là ? / téléphone / petit déjeuner / une deux chevaux… »
  • La forme interrogative directe (par changement intonatif, sans inversion ni mot interrogatif) :

(3)Tu m’appelles d’où ?

Pour : « D’où est-ce que tu m’appelles ? »
  • La forme interrogative avec est-ce que au lieu de l’inversion :

(4)Est-ce qu’il est là ?

Pour : « Est-il là ? »
  • Un vocabulaire familier, parfois chargé de nuances affectives ou sociales diverses:

(5)Les guibolles / la frimousse / les quenottes…

Pour : « Les jambes / le visage / les dents… »

(6)J’ai pas bien dormi cette nuit.

Pour : « Je n’ai pas bien dormi cette nuit. »
  • Le pronom sujet on à la place de nous :

(7)Nous, on viendra.

Pour : « Nous, nous viendrons. »
  • L’utilisation du présent de l’indicatif à valeur de passé :

(8)S’il fait un pas de plus, le train l’écrase.

Pour : « S’il avait fait un pas de plus, le train l’aurait écrasé. »

(9) [/pːa | kɛzvu'fʁe sta'pʁɛm | silkat'kat idemaʁ'pa || ʃːɛ'pa | dmɑ̃da'mːɑ̃] (notation en API pour P’a, qu’est-ce vous f’rez ç’t aprèm si l’quat’-quat’ i’ démarre pas ? ─ Ch’sais pas, d’mande à M’man.)

Pour : [pa'pa | kɛs(kə)vufə'ʁe sɛta'pʁɛm(i'di) siləkatʁ'katʁ ildemaʁ'pa || jəsɛ'pa | də'mɑ̃d ama'mɑ̃] (« Papa, qu’est-ce (que) vous ferez cet après-m(idi) si le quatre-quatre il démarre pas ? Je sais pas, demande à Maman »), énoncé syntaxiquement familier pour « Papa, que ferez-vous cet après-midi si le quatre-quatre ne démarre pas ? ─ Je ne sais pas, demande à Maman. »
  • Faible fréquence de liaisons facultatives: ce registre observe les liaisons obligatoires et interdites, mais pratique beaucoup plus rarement les liaisons facultatives:

(10) On_est..ensemble / i_(z)ont...attendu / J'les_ai pas vus arriver

Pour: On_est_ensemble / ils_ont_attendu / Je n'les_ai pas vus arriver

[modifier] Registres populaire, argotique et vulgaire

Le registre populaire emploie des formes et un vocabulaire connotant certains groupes sociaux (par exemple, les étudiants, les adolescents) ou les milieux socialement dévalués:

- Ça boume ? / - Ch’ais pas trop…
Pour : « - Ça va ? / - Je (ne) sais pas trop… »

Lorsque le registre populaire se charge d'expressions venues du milieu de la délinquance, on parle alors de registre argotique. Le verlan en est une variété :

Les nougats / les biftons / mézigue…
Pour : « Les orteils / les billets de banque / moi… »

Enfin, le registre populaire (ou argotique) peut devenir à son tour vulgaire ou trivial, par l’emploi de mots ou d’expressions condamnés par la bienséance :

Tu me casses les couilles ! / Enculé ! / Il s’est encore fait baiser…
Pour : « Tu m’embêtes ! / Zut ! / Il s’est encore fait avoir… »