Manao Tupapau

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Manao Tupapau ( L'esprit des morts veille )
Paul Gauguin, 1892
huile sur toile
45 × 38 cm
Musée d’Orsay, Paris

Manao Tupapau est un des tableaux que Paul Gauguin a peint lors de son premier voyage à Tahiti en 1892.

[modifier] Description

Il y représente au premier plan sa compagne polynésienne Téha'amana nue et allongée. Elle est couchée à plat ventre, sur des draps blanc cassé recouvrant eux-même un paréo bleu aux motifs floraux jaunes. Au second plan, nous apercevons un étrange personnage habillé de noir : le tupapau. Il est de profil et semble entrer dans cette chambre. Le fond du tableau est composé de diverses taches aux coloris violacés : il semble se tramer quelque chose de mystérieux.

[modifier] Analyse

La jeune Tahitienne joue un rôle-double dans la scène. Nue, c'est le côté érotique qui ressort. Il rappelle à Gauguin l'Ève primitive qu'il tente de découvrir. Le peintre met en valeur le corps de ces femmes tahitiennes très différent de celui des occidentales.Tout comme dans sa façon de peindre, il souhaite s'éloigner du classicisme, et par là, des canons de beauté grecs. Elle est nue mais ne nous dévoile pas tout son corps. Inspirés de La Vénus d'Urbino de Titien et de l' Olympia d' Édouard Manet, ( mais à l'inverse de ses prédecesseurs) les symboles de la féminité que sont les seins et le pubis ne nous sont pourtant pas montrés : là commence le mystère. Le mystère de la femme...

C'est donc également une atmosphère magique qui se propage dans cette chambre. Le peintre fait allusion à la croyance māori concernant les esprits mystérieux ou « tupapau » qui hantent l'obscurité. Pour les faire partir, les Tahitiens ont gardé la coutume de toujours s'endormir avec une lampe allumée.

Entre le premier plan bien distinct et le second plan flou et ancré dans l'imaginaire, Gauguin nous fait voir le point de rencontre entre ces deux mondes, qui ici, se confondent. Le titre du tableau Manao Tupapau, écrit en tahitien, peut être traduit d'ailleurs par « Elle pense au revenant » ou par « Le revenant pense à elle » : une ambigüité qui démontre ce point de tension. On est dans un monde mais en même temps dans un autre. La femme renvoit au symbole de fertilité, de naissance. Gauguin reprend le thème qu'a précédemment abordé Gustave Courbet : celui de L'Origine du monde. Le personnage mystérieux dans le fond du tableau représente lui, la mort qui vient reprendre cette Ève. Gauguin nous transcrit une métaphore du cycle de la vie. Il poursuivra cette idée dans "D'où venons-nous? Qui sommes-nous? Où allons-nous?" qu'il peindra en 1898 vers la fin de sa vie.

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