Ligne Berck-Plage - Paris-Plage

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La ligne Berck-Plage - Paris-Plage (aujourd'hui Le Touquet) est une voie ferrée d'intérêt local à écartement métrique qui relia au début du XXe siècle les deux stations banéaires de la côte d'Opale sur le littoral de la Manche dans le département du Pas-de-Calais. Ouverte par étapes entre 1909 et 1912, l'itinéraire ferma précocement en 1929.

De courte longueur (17 kilomètres), propriété d'une compagnie indépendante des réseaux voisins qui desservaient Berck-Plage et Le Touquet - Paris-Plage, victime d'une irrégularité de son trafic de nature saisonnier, la ligne connut rapidement des difficultés et montra une inexpérience en matière d'exploitation ferroviaire. Cette voie ferrée est toutefois représentative des modes de communication destinés, entre la fin du XIXe siècle et la Seconde Guerre mondiale, à desservir les lieux de villégiature établis le long des côtes septentrionales de la France.

Sommaire

[modifier] La mise en place de la ligne

Long convoi en gare de Merlimont-Plage.
Long convoi en gare de Merlimont-Plage.

A la fin du XIXe siècle, le long des côtes de la Manche et de la mer du Nord, furent développées ou établies, pour faire face à la mode des bains de mer et à la croissance du tourisme estival et/ou dominical, de nombreuses stations banéaires[1]. Entre les estuaires de l'Authie et de la Canche, au sud de la côte d'Opale, s'étend un littoral sablonneux le long duquel s'égrènent des lieux de villégiature d'importance inégale, à savoir du sud au nord : Berck-Plage, Merlimont, Stella-Plage, Paris-Plage. C'est dans ce contexte qu'en 1891, M. Lambert, entrepreneur et fondateur de la Société des Dunes constituée pour mettre en valeur cette partie du littoral, sollicita la concession d'une ligne de chemin de fer reliant Berck-Plage à Paris-Plage et passant au plus près de la côte[2]. Cet itinéraire devait se raccorder, à ses extrémités, à la ligne Aire-sur-la-Lys - Berck-Plage au sud et au tramway d'Étaples à Paris-Plage au nord, chemins de fer dont l'établissement était prévu à plus ou moins court terme[3]. La demande fut repoussée, toutefois la société obtint l'autorisation d'établir un court chemin de fer à voie métrique entre Berck-Plage et la plage des dunes pour y acheminer les matériaux de construction nécessaires aux aménagements immobiliers en cours de réalisation[2]. Cette ligne, longue de 2,15 kilomètres, fut rapidement achevée et sans doute mise en service dès 1893[4], elle ne fonctionna que pour le transport des marchandises sans que l'on dispose d'informations précises sur son exploitation.

Une nouvelle demande intervint au début du XXe siècle émanant de MM. Berger et Roy qui constituèrent la Société du Chemin de Fer de Berck-Plage à Paris-Plage (B.P)[5]. La déclaration d'utilité publique fut signée le 27 avril 1906 et les travaux purent commencer. La ligne déjà établie fut renforcée, puis le reste du parcours ouvert par tronçons successifs[6] :

  • de Berck-Plage (gare commune et correspondance avec la Compagnie des Chemins de Fer d'Aire à Fruges et de Riùeux-Gournay à Berck ou A.F.R.B.) qui exploitait la ligne d'Aire-sur-le Lys - Berck- Plage) à Merlimont, le 7 août 1909 ;
  • de Merlimont à Daloz (à l'entrée de Paris-Plage), le 19 juin 1910 ;
  • de Daloz à Paris-Plage (gare commune et correspondance avec la Société du Tramway d'Étaples à Paris-Plage ou E.P.), le 28 juillet 1912.

[modifier] Tracé et caractéristiques techniques

D'une longueur totale de 17,2 kilomètres, la ligne prenait son origine à Berck-Plage partageant les installations de la ligne d'Aire-sur-la-Lys à Berck, puis s'orientait vers le nord, direction qu'elle ne quittait guère jusqu'à son extrémité. Le tracé se n'éloignait guère du littoral pour parvenir à Merlimont après avoir traversé les dunes qui bordent la Manche. Quittant cette gare, elle s'éloignait quelque peu de la côte, évitant Stella-Plage, desservant Cucq, puis parvenait à Paris-Plage après avoir contourné le Golf. Au-delà des installations destinées aux marchandises et du terminus provisoire de Daloz, la voie ferrée parvenait à son terme rue de Paris où elle partageait les infrastructures du tramway d'Étaples à Paris-Plage[7]. La topographie étant peu accentuée, la voie ferrée offrait des déclivités faibles (au maximum 16‰). La voie à écartement métrique était presque entièrement établie en site propre et était équipée en rail du type « Vignole » de 20 kg/m sauf lors de l'arrivée à Paris-Plage où elle était noyée dans la chaussée, bénéficiant de rails plus lourds de 25 à 30 kg/m ; les courbes ne descendaient jamais en-deçà de 100 mètres de rayon[2].

A l'exception des deux gares terminus partagées avec les autres réseaux, une seule station intermédiaire jalonnait le parcours, celle de Merlimont-Plage. Cette dernière offrait des caractéristiques peu communes sur les voies ferrées d'intérêt local, par ses dimensions comme par le soin apporté à son esthétique (les installations communes étaient tout aussi soignées). La bâtiment-voyageurs était séparé de la halle à marchandises (située en face de celui-ci) et présentait l'aspect d'un édifice en briques agrémentées de chaînages de couleurs différentes et offrant des figures géométriques[2]. Les autres bâtiments se résumaient à un dépôt-atelier sis à Bellevue-les-Dunes, à quelques centaines de mètres au nord de Berck et d'une halle à marchandises située peu avant la gare de Paris-Plage. Les arrêts (du sud au nord : Bellevue-les-Dunes, Merlimont-Village, Cucq, Golf, Daloz, Sémaphore[8]) comportaient seulement un quai et étaient matérialisés par un poteau sur lequel une pancarte indiquait l'horaire des trains[9].

[modifier] Une courte existence

Lorsque le chemin de fer entra en exploitation, en 1909, sur le seul tronçon Berck-Plage - Merlimont-Plage, le service était assuré par sept navettes les jours de semaine et onze les dimanches et fêtes (fréquence largement supérieure à celle en vigueur sur la plupart des voies ferrées d'intérêt local). À compter de 1910 et de l'ouverture du prolongement jusqu' à Paris-Plage (terminus de Daloz), le nombre de circulations quotidiennes diminua étant ramené à huit allers et retours l'été, quatre l'automne et une seule durant l'hiver[10]. Un convoi mixte (inclus dans les circulations précitées) assurait l'acheminement des wagons de marchandises. Le nombre de navettes avait fortement diminué en raison de l'insuffisance du parc de traction qui conduisait à des difficultés récurrentes[6]. Les années précédant la Première Guerre mondiale furent marquées par une augmentation régulière du nombre de voyageurs transportés, en revanche, le trafic des marchandises n'atteignait pas les tonnages escomptés en dépit de l'établissement d'installations dédiées non loin du terminus de Paris-Plage[9]. Le temps de parcours, entre les deux gares d'extrémité (après l'achèvement de la ligne en 1912, s'avérait long en raison du nombre important d'arrêts intermédiaires. Les trains ne mettaient pas moins d'une heure et dix minutes pour parcourir les 17,2 kilomètres de la ligne, soit une moyenne inférieure à 15 km/h). Le couû du trajet s'élevait, en 1914, à 1fr80 en 1re classe, 1fr35 en 2e classe et à 1fr en 3e classe[8].

Comme sur les autres lignes de chemin de fer, la circulation fut interrompue le 3 août 1914 avec le début de la guerre mais elle ne reprit pas quelques mois après celui-ci. En effet, l'armée procéda au démontage de la voie qui servit à l'établissement de lignes militaires assurant le ravitaillement du front de la Somme[9]. La voie fut remontée en 1919 et la circulation des voyageurs put reprendre le 25 juillet de la même année[11]. Désormais le service était limité à hauteur de deux ou trois allers et retours quotidiens sur la totalité du parcours auxquels venait s'ajouter une navette entre Berck-Plage et Merlimont-Plage et n'était rendu que durant la saison estivale du 1er juillet au 30 septembre[10]. Le temps de parcours fut accéléré avec la suppression de nombreux arrêts intermédiaires (les trains ne desservaient plus que Bellevue-les-Dunes et Merlimont-Plage) et réduit à une heure[12]. A le demande des autorités départementales, un service destiné aux marchandises fut rétabli le 1er août 1925 mais cela s'avèra un échec total, le chemin de fer ne séduisant aucun client[11].

À partir du milieu des années 1920 furent mis en service des lignes d'autocars assurant la desserte des stations de Merlimont-Plage et de Stella-Plage à partir des gares de la Compagnie des chemins de fer du Nord situées sur la ligne Amiens - Calais qui privèrent la voie ferrée d'intérêt local d'une partie de sa clientèle[13]. Cette désaffection des voyageurs préférant un mode de transport plus direct et plus rapide, conjuguée à un ensablement progressive de la ligne, conduisit à l'arrêt de l'exploitation, le 30 septembre 1927[14]. Par convention du 26 décembre 1928, la voie ferrée fut rachetée par le département. Cette dernière fut encore utilisée deux mois au cours du printemps 1929 pour le transport de matériaux destinés à l'aménagement d'un terrain de golf entre Stella-Plage et Paris-Plage, puis abandonnée définitivement[2]. Son déclassement fut prononcé par décret le 25 décembre 1929 avant que sa voie ne soit déposée dans les mois qui suivirent[11].

[modifier] Annexes

[modifier] Bibliographie

 : source utilisée pour la rédaction de cet article

  • Henri Domengie, José Banaudo, Les petits trains de jadis - Nord de la France, Éditions du Cabri, Breil-sur-Roya, 1995 (ISBN 2-908816-29-6)
  • Encyclopédie générale des transports - Chemins de fer, tome 9, Éditions de l'Ormet, Valignat, 1994 (ISBN 2-906575-13-5)
  • Sucellus, Dossiers archéologiques, historiques et culturels du Nord-Pas-de-Calais, Tome 1, 1995, n°40.

[modifier] Notes et références

  1. Bernard Toulier, Les réseaux de la villégiature en France, In Situ, Revue des patrimoines, n°4, mars 2004 Lire en ligne. Consulté le 16 juin 2008.
  2. abcde Henri Domengie, José Banaudo, Les petits trains de jadis - Nord de la France, p. 160.
  3. La première ligne fut ouverte jusqu'à Berck-Ville le 6 août 1893 et prolongée jusqu'à Berck-Plage, le 1er septembre 1899 ; le tramway fut mis en exploitation à compter du 10 juillet 1900. Encyclopédie générale des transports - Chemins de fer, 62.5 et 62.9.
  4. Sucellus, p. 35. La date n'est avancée que dans cette source et reste donc sujette à caution.
  5. La ligne Berck-Plage - Paris-Plage sur le site de la Fédération des amis des chemins secondaires (F.A.C.S.). Consulté le 17 juin 2008.
  6. ab Encyclopédie générale des transports - Chemins de fer, 62.5.
  7. Sucellus, p. 36-37.
  8. ab Indicateur Chaix, horaires de mai 1914.
  9. abc Sucellus, p. 37.
  10. ab Henri Domengie, José Banaudo, Les petits trains de jadis - Nord de la France, p. 161.
  11. abc Encyclopédie générale des transports - Chemins de fer, 62.6.
  12. Indicateur Chaix, horaires de juin 1921.
  13. Sucellus, p. 38.
  14. La fermeture au trafic des voyageurs sur cosili.isuisse.com. Consulté le 17 juin 2008.