Hubert Lyautey

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Hubert Lyautey
Naissance : 17 novembre 1854
Nancy, France
Décès : 27 juillet 1934 79 ans)
Thorey, France
Origine : France France
Grade : général de division
Service : 1873 - 1925
Conflits : Guerres coloniales
Première Guerre mondiale
Distinctions : Maréchal de France
Grand officier de la Légion d'honneur
Médaille militaire
Hommage : Inhumé aux Invalides depuis 1961.
Autres fonctions : Ministre de la guerre
Elu à l'Académie française (fauteuil 14)

Louis Hubert Gonzalve Lyautey (17 novembre 1854 à Nancy - 27 juillet 1934 à Thorey) est un militaire français, officier pendant les guerres coloniales, ministre de la guerre lors de la Première Guerre mondiale, puis maréchal de France. Il était académicien. Sa devise était "La joie de l'âme est dans l'action".

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Une éducation militaire

Issu d'une famille de militaires franc-comtois (commune de Vellefaux), il eut son enfance marquée par une chute à l'âge de deux ans du balcon du premier étage de l'hotel de la reine, place Stanislas, où habitait sa famille. Il fut alors soigné par le chirurgien Velpeau[1] mais dut porter un corset pendant dix ans l'obligeant à rester alité longtemps. Il lut beaucoup. Il entra à Saint-Cyr en 1873 puis fut envoyé en Algérie pendant deux ans en tant qu'officier de cavalerie de 1880 à 1882 où il découvrit la société musulmane. Il ne fit jamais mystère de ses opinions royalistes.

Il servit en Indochine de 1894 à 1897, d'abord à l'état-major du corps d'occupation à Hanoï (Tonkin), puis en qualité de chef du bureau militaire du gouverneur général Armand Rousseau. Ce fut au Tonkin qu'il rencontra Gallieni qu'il devait rejoindre à Madagascar où il servit de 1897 à 1902. En 1895, il exprime ses doutes sur l'affaire Dreyfus :

« Ce qui ajoute à notre scepticisme, c'est qu'il nous semble discerner là une pression de la soi-disant opinion ou plutôt de la rue, de la tourbe [...] Elle hurle à la mort contre ce Juif, parce qu'il est Juif et qu'aujourd'hui, l'antisémitisme tient la corde.[2] »

Il fut nommé colonel en 1900, général de brigade en 1903, général de division en 1907.

[modifier] Maroc

Au Maroc, il fut chargé en mars 1907 d'occuper Oujda, en représailles de l'assassinat à Casablanca du docteur Mauchamps ; il réprima ensuite le soulèvement dans la région des Béni-Snassen en novembre 1907, et fut nommé haut-commissaire du gouvernement pour la zone marocaine occupée dans la région d'Oujda.

En mars 1912, la convention de Fès établit le protectorat français sur le Maroc, dont Lyautey fut le premier commissaire-résident général. Il entreprit la « pacification » du Maroc, malgré le début de la Première Guerre mondiale.

C'est en tant que résident général qu'il laissera une trace profonde dans la société et l'urbanisme marocain. Attaché à la culture locale comme sa collaboratrice Isabelle Eberhardt, il édicta plusieurs lois visant notamment à protéger les centres anciens des grandes villes (les villes coloniales seront construites à la périphérie des médinas) ou à établir des règles strictes laissant aux Marocains des espaces de liberté (interdiction pour les non-musulmans de pénétrer dans les mosquées).

Pendant la Première Guerre mondiale, Lyautey fut ministre de la Guerre dans le gouvernement d'Aristide Briand, entre décembre 1916 et mars 1917.

Il retourna ensuite au Maroc, et fut fait maréchal de France en 1921. Mais, sous le gouvernement de Paul Painlevé, il se vit retirer le commandement des troupes engagées contre la rébellion d’Abd-el-Krim qui fut confié à Philippe Pétain. Lyautey démissionna et rentra définitivement en France en 1925.

Il fut chargé d'organiser l’Exposition coloniale de 1931. Il mourut le 27 juillet 1934 dans son château de Thorey. Il fut inhumé à Rabat mais ses cendres furent rapatriées en France pour être déposées aux Invalides en 1961.

Lors de son passage au Maroc, il avait affirmé que « la France se doit d'être une grande puissance musulmane ». Il avait également averti, dans la préface à la traduction française du Mein Kampf de Hitler : « Tout Français doit lire ce livre ». Il ne s'agissait nullement d'une approbation, bien sûr, puisque la traduction avait paru contre la volonté d'Hitler qui n'avait aucune envie que les Français fussent informés de ce qui les attendait.

Actuellement, le Lycée Lyautey de Casablanca est l'un des plus grands lycées français hors de France. Le portrait de Lyautey ornant l'établissement a été réalisé dans les années 1990, sur une proposition de la direction, ce qui a soulevé un débat parmi les élèves quant au regard à porter sur l'œuvre et les responsabilités du maréchal Lyautey. À la même période, un drapeau français, accroché par la direction sans le drapeau marocain, a été retiré par des élèves. Le lycée Lyautey est ouvert aux filles à partir de l'indépendance du pays.

Il jugeait ainsi son œuvre au Maroc :

« Au fond, si j'ai réussi au Maroc, dans la tâche que le gouvernement de la République m'avait confiée là-bas, c'est pour les raisons mêmes qui me rendaient inutilisable en France [...] J'ai réussi au Maroc parce que je suis monarchiste et que je m'y suis trouvé en pays monarchique. Il y avait le Sultan, dont je n'ai jamais cessé de respecter et de soutenir l'autorité [...] J'étais religieux, et le Maroc est un pays religieux [...] Je crois qu'il n'y a pas de vie nationale possible et prospère, et naturelle, qui ne fasse sa place au sentiment religieux, aux disciplines religieuses [...] Je crois à la bienfaisance, à la nécessité d'une vie sociale hiérarchisée. Je suis pour l'aristocratie, pour le gouvernement des meilleurs [...] J'ai vu qu'il y avait des écoles où allaient les enfants de telles classes, d'autres écoles où allaient des enfants d'autres milieux et qui ne se mélangeaient pas [...] J'ai respecté tout cela, à la fois parce que cette soumission au fait fortifiait ma propre politique et parce que mes propres convictions m'en montraient la légitimité et la noblesse [...] Mais tout cela m'eût été impossible en France [...] Et c'est pour cela que je n'aurais peut-être pas réussi à Strasbourg.[3] »

[modifier] Homosexualité

Georges Clemenceau avait dit de lui : « voilà un homme admirable, courageux, qui a toujours eu des couilles au cul... même quand ce n'étaient pas les siennes. » L'ironie de Clemenceau envers les catholiques pratiquants conduit certains de ses coreligionnaires à croire que cette phrase relève de la pure calomnie envers Lyautey, considérant l'opprobre traditionnellement attachée à l'homosexualité par le catholicisme. Il est certain, néanmoins, que Clemenceau ne se sert pas de façon tout à fait innocente d'un aspect notoirement connu et documenté de la vie de Lyautey pour en faire un sujet de plaisanterie.

Cette allusion plaisante à l'orientation sexuelle du maréchal est notamment reproduite par Christian Gury dans son livre Lyautey-Charlus[4], consacré aux rapports de Lyautey et de l'homosexualité. Gury montre notamment de quelle façon Lyautey aurait pu servir de modèle au baron de Charlus, le célèbre personnage de À la recherche du temps perdu de Marcel Proust.

Jean Cocteau raconte que Lyautey lui avait demandé un exemplaire de son Livre blanc, un livre semi-clandestin paru en 1928, sans nom d'auteur, avec des dessins homoérotiques dans le style aisément reconnaissable de Cocteau. Après l'avoir lu, Lyautey reçoit Cocteau pour le féliciter et lui dit ensuite : « Je vous laisse avec ce jeune lieutenant, vous lui expliquerez tout cela et vous lui direz qu'il ne doit pas se buter. »

[modifier] Son idée de la France

« Moi, je suis un homme du Nord, un Lorrain, un Normand, un Rhénan ; il y a de tous ces sangs-là dans mon sang ; mais rien qui vienne d'au-dessous de la Loire... Je n'ai jamais pu regarder un Toulousain comme un compatriote. »[5]

[modifier] Distinctions

Il est brillamment élu (avec 27 voix) à l'Académie française en 1912 au fauteuil 14, accueilli par l'historien moderniste Louis Duchesne qui écrivit son discours de réception.

Il est élevé à la dignité de maréchal de France le 19 février 1921. Le même jour, il reçoit du prétendant au trône de France, Philippe d'Orléans, la plaque de l'ordre du Saint-Esprit[6]. Il possède également la Médaille militaire reçue des mains du maréchal Canrobert et la Médaille de Sainte-Hélène qu'un vieux paysan lui avait donné parce que son fils à qui il l'aurait léguée était mort au Champ d'Honneur. Il est aussi élevé à la dignité de Grand-Croix de l'Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand (1930).

Membre du comité de patronage des éclaireuses éclaireurs de France aussitôt après leur fondation (1911), ainsi que de celui des Éclaireuses et Éclaireurs unionistes de France, il se voit offrir la présidence d'honneur des Scouts de France en 1929. Ni le général Guyot de Salins, ni le chanoine Cornette n'auraient accepté d'offir la présidence d'honneur d'un mouvement catholique à un homme qui aurait pu prêter le flanc à une critique même légère vis à vis des principes catholiques de l'époque[7].

Il est commissaire général de l'Exposition coloniale internationale de 1931 et, à ce titre, fait construire le Palais de la Porte Dorée qui abrite jusqu'à récemment le musée des arts africains et océaniens, et qui est aujourd'hui la Cité nationale de l'histoire de l'immigration. Le portrait de lui par Laszlo était accroché dans ce bâtiment.

[modifier] Bibliographie

  • Jacques Benoist-Méchin rédigea sa biographie dans sa fameuse série des Rêve le plus long de l'Histoire sous le titre de Lyautey l'Africain, ou Le rêve immolé, 1966).
  • André Maurois en 1931 aux Éditions Plon et Marie André en 1940 aux Éditions Alsatia avaient brillamment évoqué auparavant sa vie et son œuvre.
  • Arnaud Teyssier, Lyautey : Le ciel et les sables sont grands, Librairie Académique Perrin, 2004.

[modifier] Œuvres

  • Le rôle social de l'officier, 1891
  • Du rôle colonial de l'armée, 1900
  • Dans le Sud de Madagascar, pénétration militaire, situation politique et économique, 1903
  • Lettres du Tonkin et de Madagascar : 1894-1899, 1920
  • Paroles d'action : 1900-1926, 1927
  • Lettres de jeunesse : 1883-1893, 1931
  • Vers le Maroc : lettres du Sud-Oranais : 1903-1907, posthume, 1937
  • Notes de jeunesse : 1875-1877, dans Rayonnement de Lyautey, posthume, 1947

[modifier] Galerie

Information Cliquez sur une vignette pour l’agrandir.

[modifier] Notes et références

  1. Gyp, Souvenirs d'une petite fille, 1928
  2. in Dreyfusards, Coll. Archives, Gallimard, Paris, 1965
  3. Raymond Postal, Présence de Lyautey, Éditions Alsatia.
  4. Christian Gury, Lyautey-Charlus, Kimé, 1998, p. 86
  5. Raymond Postal, id.
  6. Aboli par Louis-Philippe en 1830 mais, par la suite, porté et conféré par divers prétendants au trône de France.
  7. cf. Réglement des Scouts de France 1920 et 1924, éd. SPES - Paul Coze, Pour entrer dans le Jeu, diverses éditions aux Éditions Scouts de France

[modifier] Liens externes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur le maréchal Lyautey.


Précédé par
Henry Houssaye
Fauteuil 14 de l’Académie française
1912-1934
Suivi par
Louis Franchet d'Esperey