Histoire de la Jamaïque

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La Jamaïque, l'une des plus grandes îles de l'archipel caraïbes, fut primitivement habitée par le peuple Taíno (arawak). Christophe Colomb, à son arrivée dans l'île, en prit possession au nom de l'Espagne. Cependant à sa mort, l'île n'était pas encore réellement colonisée.

L'Espagne résista aux assauts des pirates dans la principale ville de l'île, connue aujourd'hui sous le nom de Spanish Town, jusqu'à ce que le Royaume d'Angleterre la conquiert par la force. Les Espagnols firent valoir prétentions sur ce territoire jusqu'en 1670. Mais les Britanniques ne perdirent jamais l'île dans quelque guerre que ce soit. L'île devint le cœur des opérations interlopes des boucaniers, et de l'un des plus fameux d'entre eux, le capitaine Henry Morgan. En retour, ces aventuriers protégèrent la Jamaïque des ambitions d'autres puissances coloniales. On y importa des esclaves ; la canne à sucre devint la principale denrée d'exportation.

La Jamaïque fut le théâtre d'un des plus importants soulèvements servile des Caraïbes. Une fois l'esclavage aboli par la Couronne britannique, les Jamaïcains commencèrent à travailler à leur indépendance. Depuis l'indépendance, le pays a connu des troubles politiques et économiques sous des leaders politiques puissants.

Sommaire

[modifier] Préhistoire et découverte de la Jamaïque

Le peuple taino s'est établi en Jamaïque vers l'an 1000 avant notre ère sur une territoire qu'il a appelé Xamayca, « la terre du bois et de l'eau ». Après l'arrivée de Christophe Colomb, en 1494, l'Espagne revendique la propriété de l'île et, dès 1509, l'occupe et lui donne le nom de Santiago (Saint-Jacques). Les Arawaks seront décimés par la maladie, l'esclavage et la guerre. Certains ne devaient trouver que dans le suicide, issue à leur condition servile. En 1517 que l'Espagne achemine en Jamaïque les premières soutes d'esclaves africains.

Un prêtre espagnol, Bartolomé de Las Casas, œuvre à la protection du peuple taino. C'est lui aussi qui suggère, ce qu'il devait regretter par la suite, d'avoir recours à des esclaves africains. Il écrit plusieurs livres dans lesquels il dénonce avec véhémence le mauvais traitement que les conquistadores infligent aux Indigènes. Il préconise que les Espagnols convertissent les Tainos au christianisme.

[modifier] Domination espagnole

On connaît peu de chose de la période d'occupation espagnole de l'île, du fait de l'absence d'archives. Le premier foyer de peuplement était situé à La Sevilla Nueva où Colomb avait été isolé pendant un certain temps. La Sevilla Nueva était facile à défendre, proche du site taino, mais également situé près d'un marécage, ce qui augmentait le risque d'épidémies.

Les colons migrèrent par la suite à Villa de la Vega, aujourd'hui Spanish Town, et en firent la capitale. Dans les années 1640, de nombreux colons furent attirés en Jamaïque, réputée alors pour sa très grande beauté. On sait également que des pirates désertèrent leurs bandes et s'installèrent dans l'île. Durant cent ans, entre 1555 et 1655, la Jamaïque fut sujette à de nombreuses attaques de pirates, la dernière laissant l'île aux mains du Royaume d'Angleterre. Les Anglais furent eux aussi confrontés aux incursions de pirates après leur installation dans l'île.

La Catholic Encyclopedia de 1907 souligne qu' « un regard sur la période d'occupation espagnole nous donne une bien piètre image de l'administration coloniale espagnole de l'époque, qui fut accusée d'avoir causé, par son attitude vis à vis des indigènes, l'extermination presque complète de ceux-ci. Cette grave accusation, si elle se révélait exacte, ne pourrait être absoute sous le prétexte que de telles conduites étaient courantes à cette époque, et qu'elles continuèrent d'être perpétrées pendant des années, de façon parfois plus résolue, par d'autres nations ». Ces allégations sont confirmées par l'histoire très détaillée de la Jamaïque espagnole que l'on doit à Francisco Morales Padrón.

[modifier] Régime anglais

En mai 1655, les forces britanniques, lors d'une expédition menée conjointement par l'amiral William Penn (père du fondateur de la Pennsylvanie) et le général Robert Venables, s'emparèrent de l'île. En 1657, le gouverneur invita les boucaniers à s'établir à Port Royal afin de dissuader les Espagnols d'attaquer. En 1657 et 1658, ces derniers, venant de Cuba, échouèrent dans leurs tentatives de reconquête de l'île lors de la Bataille de Ocho Rio et de celle de Rio Nuevo. En 1657, l'amiral Robert Blake vainquit la flotte espagnole des Indes Occidentales.

Les Britanniques entamèrent une véritable politique de colonisation en 1661 et se virent officiellement reconnaître la possession de l'île par le Traité de Madrid en 1670. Bien qu'une grande partie de la capitale espagnole, Villa de la Vega, ait brûlée pendant la conquête, les Britanniques s'y installèrent et la rebaptisèrent sous le nom de Spanish Town tout en lui conservant son statut de capitale politique[1]. L'île demeurait une importante base arrière pour la piraterie, plus particulièrement Port Royal, avant sa destruction par un séisme en 1692. Après le désastre, Kingston fut fondée en face de ce port, au bord d'un des plus grands havres naturels au monde, et s'imposa rapidement comme le principal centre de commerce de la Jamaïque.

La culture de la canne à sucre et du café par les esclaves africains fit de la Jamaïque une des possessions les plus prospères dans le monde pendant plus de cent cinquante ans. Les Anglais rebaptiseront les Noirs, sépareront les gens de même ethnie, leur imposeront la langue anglaise et le christianisme. Les esclaves, dont le nombre dépassait celui des maîtres blancs dans une proportion de 300 000 à 30 000 en 1800, conspirèrent et se révoltèrent plus d'une douzaine de fois entre 1673 et 1832. Les esclaves évadés, connus sous le nom de Marrons établirent des communautés indépendantes dans les terres montagneuses, d'où il était impossible pour les Anglais de les défaire, comme il fut démontré dans d'importantes tentatives des années 1730 et 1790. L'une des communautés marrons fut expulsée dans les années 1790 et forma par la suite une partie du noyau de la communauté créole du Sierra Leone. Le gouvernement colonial embaucha des Marrons pour capturer les esclaves évadés des plantations. Vers 1800, les Anglais se servirent également de 10 000 Jamaïcains libres de couleur pour maintenir sa main mise sur la population servile. Pendant les fêtes de Noël de 1831, une révolte d'esclaves de grande ampleur, connue sous le nom de Baptist War, éclata. 60 000 des 300 000 esclaves de l'île se soulevèrent. Il s'agissait à l'origine d'une grève pacifique menée par Samuel Sharp. La rébellion fut matée dix jours plus tard, au début de l'année 1832, par la milice des planteurs jamaïcains et les garnisons britanniques.

Suite aux pertes matérielles et humaines provoquées par cette dernière révolte, le Parlement britannique ouvrit deux enquêtes dont les conclusions allaient grandement contribuer à l'abolition de l'esclavage dans tout l'empire britannique, le 1er août 1834. Toutefois, les esclaves jamaïcains restèrent liés à leurs anciens propriétaires, mais avec une garantie des droits sous ce qui s'appelait Apprenticeship System. La population libérée dut pourtant toujours faire face à des conditions de vie très difficiles, ce qui provoqua la rébellion de Morant Bay en octobre 1865, menée par George William Gordon et Paul Bogle. Elle fut brutalement réprimée, à la suite de quoi l'Assemblée de l'île renonça à son autorité. Ainsi, la Jamaïque acquit-elle le statut de colonie de la Couronne. La production de sucre diminua en importance à la fin du XIXe siècle pour être concurrencer par celle de la banane. En 1872, la ville portuaire de Kingston étant bien plus grande et plus raffinée que Spanish Town située à l'intérieur des terres, accéda au statut de capitale.

L'établissement du statut de Colonie de la Couronne favorisa, pendant quelques décennies, le développement d'une classe moyenne comprenant des fonctionnaires subalternes et des officiers de police issus du peuple, dont la promotion sociale et politique avait été bloquée jusque là par les autorités coloniales. La grande dépression eut un impact significatif sur la classe moyenne émergente et sur la classe ouvrière des années 1930. Au printemps 1938, les travailleurs du sucre et ceux du port se révoltèrent dans toute l'île. Bien que réprimée, la révolte entraîna des changements significatifs, telle que l'émergence du syndicalisme et du pluralisme politique.

[modifier] L'Indépendance

La Jamaïque gagna son autonomie au milieu des années 1940. Le People's National Party (PNP) fut fondé en 1938 et son principal rival, le Jamaica Labour Party (JLP), cinq ans plus tard. Les premières élections au suffrage universel eurent lieu en 1944. La Jamaïque rejoignit en 1958 neuf autres territoires britanniques au sein de la Fédération des Indes occidentales, organisation dont elle se retira en 1961, les électeurs ayant choisi de renoncer à cette alliance. L'indépendance obtenue le 6 août 1962, la Jamaïque demeura membre du Commonwealth. Le premier Premier ministre de la Jamaïque indépendante fut le travailliste Alexander Bustamante.

Dans les années qui suivirent l'accession à l'Indépendance, le pouvoir changea régulièrement de main et alterna entre le Jamaica Labour Party et le People's National Party. Michael Manley, premier chef de l'État issu du PNP fut élu en 1972, mit en place un programme du type socialiste et renforça les relations avec Cuba. Sa réélection (deuxième mandat) marqua le début d'une flambée de violence politique. après que le PNP eut perdu le pouvoir, en 1980, Edward Seaga prit immédiatement le contre-pied de la politique de son prédécesseur en favorisant la privatisation et en cherchant à nouer des liens étroits avec les États-Unis. Le PNP et Manley revinrent au pouvoir en 1989 et poursuivirent une politique modérée. Manley démissionna pour des raisons de santé en 1992 et Percy Patterson lui succéda à la tête du PNP. Le PNP fut réélu en 1993 et en 1998.

La Jamaïque est un pays d'émigration massive. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, de nombreux Jamaïcains émigrèrent en Amérique centrale, à Cuba et en République dominicaine pour trouver du travail dans les plantations de bananes et de canne à sucre. Dans les années 1950 et 1960, le Royaume-Uni devint leur principale destination, jusqu'en 1962, date à laquelle il réduisit ses quotas. Les principaux flux se concentrent dès lors vers les États-Unis et le Canada. Environ 20 000 Jamaïcains émigrent chaque année aux États-Unis et 200 000 autres s'y rendent en visite. New York, Miami, Chicago et Hartford comptent parmi les villes américaines qui abritent une importante population jamaïcaine. Les envois de fonds des communautés d'émigrés jamaïcains aux États-Unis, au Royaume-Uni, et au Canada contribuent de façon croissante et significative à l'économie de l'île.

[modifier] Voir aussi

  • Barrett family

[modifier] Bibliographie

  • (en) Black, Clinton V. 1983. The Story of Jamaica. London: Collins Educational.
  • (en)Ledgister, F.S.J. 1998. Class Alliances and the Liberal-Authoritarian State: The Roots of Post-Colonial Democracy in Jamaica, Trinidad and Tobago, and Surinam. Trenton: Africa World Press.
  • (en)Morales Padrón, Francisco. 1953 2003. Spanish Jamaica. Kingston: Ian Randle Publishers.
  • (en) Williams, Eric. 1964. British Historians and the West Indies. P.N.M. Publishing Company, Port-of-Spain.
  • (en)Sawh, Gobin, Ed. 1992. The Canadian Caribbean Connection: Bridging North and South: History, Influences, Lifestyles. Carindo Cultural Assoc., Halifax.

[modifier] Lectures complémentaires

  • (en) Michener, James, A. 1989. Caribbean. Secker & Warburg. London. ISBN 0-436-27971-1 (Chap. XI. "Martial Law in Jamaica", pp. 403-442).
  • Jean-Pierre Moreau, Les Petites Antilles de Christophe Colomb à Richelieu, 1493-1635, éditions Karthala, 1992.