Violet Trefusis

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Violet Trefusis née Keppel (6 juin 1894 - 1er mars 1972) était un écrivain britannique, membre de la haute société anglaise. On la connaît surtout pour sa liaison saphique avec Vita Sackville-West, qui a été transposée dans Orlando : Une biographie, roman de Virginia Woolf.

Sommaire

[modifier] Jeunesse

Violet Trefusis était la fille de la demi-mondaine Alice Keppel, maîtresse du roi Édouard VII. Bien qu'elle portât ce nom de famille jusqu'à ce son mariage, elle était peut-être la fille de William Beckett, banquier et député de Whitby, mais sa mère avait pris plusieurs amants à cette époque, et il y a plus d'une possibilité. Pendant toute son enfance Violet put être le témoin du grand nombre d'amoureux de sa mère, qui étaient tous des personnalités connues.

Elle passa sa première jeunesse à Londres, où sa famille avait une maison à Portman Square. Elle avait quatre ans quand sa mère devint l'une des maîtresses préférées d'Albert Édouard (Bertie), le prince de Galles, qui devint Édouard VII le 22 janvier 1901. Jusqu'à la fin de sa vie, en 1910, il se rendit régulièrement chez les Keppel l'après-midi à l'heure du thé, tandis que le mari, au courant de la situation, avait le bon goût de s'absenter. La discrétion était une caractéristique d'Alice Keppel.

En 1900 naquit Sonia, la sœur de Violet.

[modifier] Sa liaison avec Vita Sackville-West

Aujourd'hui on se rappelle surtout Violet Trefusis pour sa liaison amoureuse avec la riche Vita Sackville-West, celle que l'on retrouve dans le roman de Virginia Woolf, Orlando. Dans cette biographie romancée de Vita, Violet apparaît dans le personnage de la princesse slave Sacha.

Ce n'était pas la seule transposition romanesque de cette histoire d'amour, qui semble en réalité avoir été beaucoup plus compliquée que dans le récit enchanteur de Viginia Woolf : aussi bien dans des œuvres de fiction (Challenge de Sackville-West et Trefusis ; Broderie anglaise, un roman à clef écrit directement en français par Violet Trefusis) que dans des œuvres de non-fiction (Portrait d'un mariage, ouvrage de Nigel Nicolson, fils cadet de Vita Sackville-West, qui donne d'amples « éclaircissements » supplémentaires) ont été publiés de nouveaux détails de l'histoire.

Il subsiste aussi des lettres et des journaux intimes rédigés par les protagonistes de l'affaire et, indépendamment des deux principaux personnages, nous avons les souvenirs d'Alice Keppel, de Victoria Sackville-West, de Harold Nicolson, de Denys Trefusis et de Pat Dansey.

Dans Mrs Keppel and her Daughter de Diana Souhami, on pourra trouver une vue d'ensemble de l'histoire. En voici les grandes lignes :

  • C'est quand elle avait dix ans, que pour la première fois Violet rencontra Vita (qui avait deux ans de plus qu'elle). Par la suite elles fréquentèrent la même école pendant plusieurs années, et se rendirent compte de ce qui les unissait. Quand Violet eut 14 ans, elle avoua son amour à Vita et lui remit un anneau.
  • En 1910, après la mort d'Édouard VII, Mrs Keppel invita sa famille à observer un congé de « discrétion » de deux ans environ, avant de réapparaître dans la société britannique, et à ce moment-là les Keppel changèrent d'adresse et s'installèrent dans Grosvenor Street.
  • Au moment où Violet revint à Londres, Vita était sur le point de se fiancer avec Harold Nicolson, et elle avait également une liaison avec Rosalind Grosvenor. Violet fit comprendre qu'elle aimait toujours Vita, et se fiança elle aussi pour la rendre jalouse. Mais tout ce dont Violet voulait se débarrasser, c'était de l'hypocrisie, particulièrement de l'hypocrisie du mariage (et de tout ce qui l'accompagnait alors). Cela n'empêcha pas Vita d'épouser Harold (octobre 1913), à qui, de son côté, le mariage ne fit pas perdre le goût des aventures homosexuelles.
  • En avril 1918 Violet et Vita reprirent de plus belle leur liaison. Vita avait deux fils, Benedict et Nigel, mais elle abandonnait à d'autres le soin de s'occuper d'eux quand elle partait avec Violet en vacances en Cornouailles. Et pendant ce temps-là Mrs Keppel s'affairait à arranger un mariage entre Violet et Denys Trefusis. Quelques jours après l'armistice les deux femmes partirent en France pendant plusieurs mois. Comme son amie réclamait l'exclusivité, et qu'elle-même ne se sentait aucun goût pour le mariage, Violet fit promettre à Denys qu'il s'agirait d'un mariage blanc. Ils se marièrent donc en juin 1919. À la fin de la même année Vita et son amie firent en France un nouveau voyage de deux mois : sur l'ordre de sa belle-mère, Denys ramena sa femme du Sud de la France quand de nouveaux commérages concernant le comportement trop relâché des deux amies commencèrent à gagner Londres.
  • Leur fugue suivante, en février 1920, devait être l'enlèvement final. Il est possible que Vita ait eu quelques doutes, et elle espérait probablement que Harold s'en mêlerait. Harold arriva en effet avec Denys dans un avion biplace, et tout cela aboutit à des scènes de ménage et de faux ménage dans Amiens. Le sommet fut atteint quand Harold dit à Vita que Violet l'avait trompée (avec Denys !). Violet tenta de s'expliquer, jurant qu'elle était innocente (ce qui sans doute était vrai). Mais Vita était trop hors d'elle pour écouter et elle s'enfuit, disant qu'elle ne pourrait pas supporter de la voir pendant au moins deux mois, mais ce fut après six semaines qu'elle revint finalement en France pour rencontrer Violet.
  • Mme Keppel tâchait désespérément d'empêcher le scandale de se répandre à Londres où Sonia, la sœur de Violet, était sur le point se marier (préparant ainsi le chemin pour que Roland Cubitt et elle devinssent les grands-parents de Camilla Parker-Bowles). Violet passa donc beaucoup de temps à l'étranger en 1920, s'accrochant désespérément à Vita par des lettres qu'elle ne cessait de lui écrire.
  • En janvier 1921 Vita et Violet firent un dernier voyage en France, où elles passèrent ensemble six semaines. À ce moment Harold menaça de rompre son mariage si Vita continuait ses escapades. Quand l'épouse morigénée revint en Angleterre, en mars, c'était pratiquement la fin de la liaison. Violet fut envoyée en Italie, d'où elle écrivit ses dernières lettres désespérées à Pat Dansey, leur ami commun ; elle n'avait pas le droit d'écrire directement à Vita. À la fin de l'année Violet dut regarder la réalité en face, et commença à reconstruire sa vie.

Quelques années et quelques épilogues plus tard, il apparut de plus en plus clairement que le rêve de Violet d'un amour romantique pleinement vécu dans un contexte social d'acceptation ne devait pas se réaliser. Le système plus traditionnel du mariage de façade complété par des aventures extraconjugales dissimulées – ce que Mrs Keppel avait vécu, et que devaient continuer à vivre Vita et Harold Nicolson – devait se montrer plus puissant.

Les deux anciennes amoureuses se retrouvèrent en 1940 après que la guerre eut contraint Violet à revenir en Angleterre. Elles restèrent en contact et continuèrent à s'envoyer l'une à l'autre des lettres tendres.

[modifier] Une vie plus sage

À partir de 1923 Violet devint l'une des nombreuses liaisons amoureuses de Winnaretta Singer, héritière de la firme de machines à coudre Singer, fille d'Isaac Singer et épouse du prince Edmond de Polignac, lui-même homosexuel. Celle-ci la présenta au Tout-Paris du monde des arts et lui fit rencontrer notamment Francis Poulenc et Henri Sauguet. Violet ne cessa de faire des concessions au «socialement acceptable» représenté par sa mère, mais sans rien changer de sa vie privée.

Dans leur relation c'était Winnaretta qui dominait comme Vita auparavant, apparemment pour leur satisfaction mutuelle. Toutes deux restèrent ensemble pendant de longues années, et leur relation semble avoir été saine et heureuse. Alice Keppel, la mère de Violet, ne s'y opposait pas, sans doute en raison de la richesse et du niveau social de Winnaretta, et du fait que cette dernière menait les choses de façon beaucoup moins tapageuse. Violet préférait, semble-t-il, le rôle de dominée, ce qui convenait parfaitement à Winnaretta, qui dans ses liaisons avait l'habitude de se monter dominatrice. Ni l'une ni l'autre ne furent été entièrement fidèles au cours de leur longue relation, mais au contraire de ce qui s'était passé avec Vita, il semble que cela n'avait aucun effet négatif sur leur liaison.

En 1924, Mme Keppel acheta L'Ombrellino, une grande villa en Toscane avec vue sur Florence et où jadis aurait vécu Galilée. Par la suite, après la mort de ses parents en 1947, Violet devait devenir jusqu'à la fin de sa vie la châtelaine de L'Ombrellino.

En 1929, Denys Trefusis mourut, devenu étranger à sa femme qui manifestement n'en fut pas touchée. Après cette date, Violet publia plusieurs romans, soit en anglais, soit en français, qu'elle avait écrits dans sa « Tour » médiévale à Saint-Loup-de-Naud, en Seine-et-Marne, un manoir que Winnaretta lui avait offert. Elle collabora à la revue Horizon, dirigée par Cyril Connolly.

À Londres pendant la Seconde Guerre mondiale, Violet trefusis participa aux émissions de radio de la France Libre, ce qui lui valut la Légion d'honneur après la guerre.

À L'Ombrellino comme à Saint-Loup-de-Naud, Violet Trefusis recevait des personnalités du monde politique, littéraire ou artistique, comme la reine Marie de Roumanie, la princesse Marthe Bibesco, les Sitwell, Winston Churchill, Rebecca West ou encore François Mitterrand. Cependant, autant elle a véritablement rencontré un certain nombre de célébrités, autant son autobiographie comporte des invraisemblances et mentionne des événements qui ne peuvent avoir eu lieu. Nancy Mitford disait que cette autobiographie aurait dû s'appeler Les Mensonges de Violet Trefusis, et elle a en partie fondé sur elle le caractère de Lady Montdore dans L'Amour dans un climat froid.

[modifier] Source

  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Violet Trefusis ».

[modifier] Œuvres

  • (fr) Broderie anglaise (écrit en français)
  • (fr) Lettres à Vita, Les lettres de Violet Trefusis à Vita Sackville-West, 1910-1921, Stock, 1997

[modifier] Bibliographie

  • (en) Philippe Jullian, Violet Trefusis: A Biography, Including Correspondence with Vita Sackville-West, Harcourt, 1985
  • (en) Philippe Jullian et John Phillips, The Other Woman, A Life of Violet Trefusis
  • (en) Diana Souhami, Mrs Keppel and her Daughter
  • (fr) Cécile Wajsbrot, Violet Trefusis, préface de François Mitterrand, Mercure de France, 1989
  • (fr) Antoine d'Arjuzon : Violet Trefusis, une passion inachevée Perrin 2001 ISBN : 2-262-01611-9

[modifier] Voir aussi

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