Tuerie d'Auriol

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Le 18 juillet 1981, Jacques Massié, chef du SAC de Marseille, est assassiné avec toute sa famille par ses hommes qui le soupçonnent de vouloir les trahir au profit de la Gauche, dans un contexte d'extrême paranoïa anticommuniste[1]. Le meurtre a lieu dans la bastide familiale, près d'Auriol.

Sommaire

[modifier] Les faits

Massié, chef local du SAC marseillais, est un simple brigadier de police qui avait, grâce aux réseaux gaullistes, décroché une place à l'école des inspecteurs à Cannes-Écluse (Seine-et-Marne). Ses absences répétées avaient laissé libre cours aux accusations de son adjoint, Jean-Joseph Maria, avec qui il était en conflit, et qui finit par le soupçonner de trahison et de malversations.

En avril 1981, Massié prévient la police que Maria et l'un de ses fidèles, Lionel Collard, un ancien parachutiste, sont probablement derrière les coups de feu tirés quelques jours auparavant sur sa voiture. L'épouse du brigadier avait demandé à l'école de son fils de redoubler de vigilance.

Au mois de juillet, une équipe recrutée par Maria et Collard prévoit de kidnapper Massié puis de le tuer, et aussi de récupérer des documents à son domicile, une bastide près d'Auriol, dans la campagne marseillaise.

Les repérages sont effectués par un curieux attelage. Jean-Bruno Finochietti est un instituteur aimé de ses élèves, dont les qualités pédagogiques seront encore louées par les parents et ses collègues après son inculpation. Didier Campana, un motard ayant fait quelques études de psychologie, Jean-François Massoni et Ange Poletti, aux personnalités sans relief, sont trois postiers syndiqués à la CGT. Jean-Joseph Maria prétend avoir été « colonel de paras ». En réalité, il n'a jamais été que simple soldat dans des bureaux à Nancy et n'est que le très ordinaire directeur d'une entreprise familiale de peinture, en mal de reconnaissance.

Le 18 juillet, à 15 heures, l'assaut est lancé : le calvaire va durer trois heures. Marie-Dominique Massié, l'épouse, son fils, Alexandre, âgé de 7 ans, sa mère, son père et le beau-frère sont rassemblés et ligotés au premier étage. Ils sont gardés par Finochietti, qui racontera qu'Alexandre s'est endormi avant que sa mère ne le supplie: "Ils nous tuent, sauve au moins l'enfant." Il ne fera rien, malgré la proximité d'une porte-fenêtre qui aurait permis de le laisser filer.

Vers 18 heures, le seul vrai para de la bande, Lionel Collard, tranche : "Il faut les descendre." Au bas de l'escalier, ils sont étranglés un par un par Collard, à l'aide d'une cordelette. Alexandre est le dernier. C'est Finochietti, l'instituteur modèle et père de deux enfants, qui le prend dans ses bras. Poletti le frappe à coups de tisonnier. N'en pouvant plus d'entendre ses râles, Finochietti l'achève d'un coup de couteau.

Les corps sont transportés par Collard et Massoni au fond d'une mine désaffectée. Finochietti, Poletti et Campana attendent le retour de Massié et le tuent vers 3 heures du matin à coups de poignard alors qu'il tentait de s'enfuir.

[modifier] L'enquête

Les déclarations de Marina Massié, la sœur de la principale victime, et l'empreinte de Finochietti retrouvée sur une bouteille dans la maison permettent de remonter la piste et de retrouver les corps. Finochietti craque le premier et avoue le crime. Campana indiquera : "On nous a dit qu'il s'agissait de l'exécution d'un ordre venu d'un niveau supérieur."

[modifier] Conséquences

Par le déchaînement de violence et par les implications politiques de ces assassinats, l'affaire a eu un grand retentissement dans la presse française au début des années 1980. Elle a généralement mis en lumière la persistance de diverses organisations para-militaires d'obédience extrémiste et la négligence bienveillante de l'appareil d'état à leur égard pendant deux décennies.

L'affaire entraînera la dissolution du SAC le 3 août 1982. Une commission d'enquête parlementaire (uniquement composée de membres de la majorité de gauche, la droite ayant refusé d'y siéger) avait été constituée immédiatement après les faits mais décida de ne pas demander la dissolution du SAC. Cette question fut cependant abordée par le Parlement, qui vota la dissolution.

Les assises des Bouches-du-Rhône ont jugé, en mai 1985, Finochietti, Campana, Poletti, Massoni, qui ont plaidé coupable. Maria et Collard ont au contraire démenti toute participation.

Jean-Joseph Maria, Lionel Collard et Ange Poletti ont été condamnés à la réclusion à perpétuité, Jean-Bruno Finochietti et Didier Campana à vingt ans de prison, et Jean-François Massoni à quinze ans. Tous ont, aujourd'hui, retrouvé la liberté. Pierre Debizet, inculpé et renvoyé, dans un premier temps, devant les assises, a bénéficié, après cassation, d'un non-lieu rendu par la Chambre d'accusation de Paris. Il est décédé en mai 1996.

[modifier] Notes et références

  1. Le gouvernement socialiste dirigé par Pierre Mauroy en juin 1981 comprenait quatre ministres du PCF, un choix jugé grave par certains partis français dans le contexte de guerre froide.

[modifier] Sources

  • Le Monde, 1er août 2006, p. 15
  • Alex Panzani, La tuerie d'Auriol (2001), éd. J'ai lu, Crimes et enquêtes. (ISBN 2-27707-078-5)