Théodore Hersart de La Villemarqué

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Théodore Hersart, 1884, de Évariste Vital Luminais
Théodore Hersart, 1884, de Évariste Vital Luminais

Théodore Hersart, vicomte de La Villemarqué (7 juillet 1815 à Quimperlé - 8 décembre 1895 à Quimperlé) est un linguiste français spécialiste de la culture bretonne.

Sommaire

[modifier] Origine

Il passa son enfance au manoir du Plessis situé dans la paroisse de Nizon, aux alentours de Pont-Aven.

Sa mère, la comtesse Marie-Ursule Feydeau de Vaugien, semble avoir eu une connaissance du breton oral et écrit suffisante pour lui permettre de commencer à collecter des chants bretons. Étudiant au collège jésuite de Vannes et auditeur libre à l'École des chartes de Paris, il passe ses vacances au manoir à transcrire des chants en breton et leur musique sur des carnets de collecte, lesquels seront gardés par la famille puis confiés 150 ans plus tard au chercheur Donatien Laurent. Beaucoup des personnes qui chantent pour lui sont des familiers de sa famille, propriétaire de fermes : paysans, ouvriers agricoles, serviteurs et servantes, charbonniers, etc.

[modifier] Retour au Panceltisme

En 1838, il voyage au Pays de Galles et noue des contacts avec les lettrés galloisants. Il est intronisé comme « Barz Nizon » au sein du collège néo-druidique gallois, le « Gorsedd des Druides, Bardes et Ovates de Grande-Bretagne ». Il établit avec les Gallois les bases du Congrès Celtique International. Il avait créé une société de pensée tendant à constituer en Bretagne l’équivalent d’un Gorsedd, une Breuriez ar Varzed, à laquelle l’Archidruide de Galles avait donné son approbation. Mais l’association n’eut pas une vie très longue et la mort de La Villemarqué, en 1895, y mit fin.

[modifier] La Bretagne

En 1839, il publie le Barzaz Breiz, chants populaires de la Bretagne qui lui donne à 24 ans un extraordinaire succès mondain et littéraire. George Sand dit alors son admiration pour « les diamants du Barzaz Breiz » et invente à ce propos le concept de littérature orale. Les mélodies, qu'il a pris la peine de collecter, sont rassemblées en fin de recueil. Une deuxième édition augmentée paraît en 1845. Il ne se contente pas d'éditer les textes rédigés dans un breton exempt de mots français, mais les fait précéder d'une notice où perce selon certains son royalisme et l'exaltation de la Bretagne d'avant l'annexion. Yves Le Berre rejette[1] cette interprétation. Il note que La Villemarqué s'est présenté aux élections sous l'étiquette républicaine et n'a jamais été séparatiste.

Il devient alors la figure de proue d'un mouvement littéraire et culturel que l'on considère comme la renaissance du vieil esprit autonomiste incarné par les historiens Pierre Le Baud et Bertrand d’Argentré au temps des ducs et au début de l'annexion et par le marquis de Pontcallec, exécuté pour conspiration en 1720, dont La Villemarqué héroïse la vie dans l'un des chants du Barzaz Breiz avec des paroles explicitement antifrançaises.

Issu d'un milieu noble où les traditions orales étaient prégnantes, il fait peu de doute que La Villemarqué ait été influencé par l'écho encore proche des polémiques, révoltes et conspirations suscitées par l'instauration et le renforcement du pouvoir royal, puis républicain.

Il collabore à l'œuvre de Jean-François-Marie Le Gonidec, traducteur de la Bible en breton, dont il publie le Dictionnaire Français-Breton en 1857 à titre posthume en le faisant précéder d'un Essai sur l'avenir de la langue bretonne. Tous deux sont les promoteurs d'une orthographe nouvelle débarrassée des conventions françaises et cherchent à remplacer les termes français par des mots issus de racines bretonnes ou galloises.

Cumulant les honneurs, il devint en 1858 membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Considéré comme un des savants européens les plus éminents en matière de traditions populaires, il correspond avec ses pairs, parmi lesquels les Frères Grimm.

En 1867, au congrès de l'Association bretonne à Saint-Brieuc, un de ses jeunes disciples, François-Marie Luzel, suscite une polémique en attaquant le maître sur le terrain de l'exactitude dans le recueil des textes, car ses collectes dans le Trégor ne lui ont pas permis de retrouver les chants tels que retranscrits par La Villemarqué. Celui-ci ne répond pas, mais laissera entendre en privé qu'il ne pouvait que se conformer aux usages de son temps et modifier ou améliorer les textes.

Les deux adversaires se retrouveront plus tard à Quimper où Luzel devient trésorier de la Société archéologique du Finistère, alors que La Villemarqué en est le président inamovible depuis 1876.

La Villemarqué meurt en décembre 1895, 10 mois après Luzel.

[modifier] Epilogue

La mise au jour des carnets de collecte a montré que La Villemarqué basait son travail de reconstitution et de réfection sur un large corpus existant. À l'opposé, l'étude des carnets de Luzel a montré qu'il prenait des notes succinctes en français ou en breton avant d'écrire plus tard les textes.

Les notices précédant les chants, par contre, se révèlent fantaisistes : elles placent dans un lointain passé des textes généralement composés au XVIIIe siècle. Néanmoins certains chants du Barzaz Breiz (Merlin, Scolan,...) montrent des archaïsmes qui peuvent faire suspecter des origines très anciennes (peut-être jusqu'au XIIème siècle).

Son influence contemporaine et posthume a été considérable en Bretagne et à l'étranger. Il n'est pas exagéré de dire qu'il est à l'origine de nombreuses vocations politiques et littéraires. De nombreuses œuvres, y compris contemporaines, ont été inspirées par le Barzaz Breiz dans le domaine de la poésie, du théâtre, de la musique et de la peinture. La traduction bretonne de son nom, Kervarker, est utilisée pour un site internet consacré au breton.

[modifier] Notes et références

  1. « Rapport sur la dissertation en langue bretonne » in « Qu'est-ce que la littérature bretonne ? »

[modifier] Lien externe

  • Kervarker, traduction littérale en breton de "Villemarqué", est un site dédié à la langue bretonne

[modifier] Voir aussi