Philippe de Courcillon de Dangeau

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Philippe de Courcillon de Dangeau.Portrait par Hyacinthe Rigaud.
Philippe de Courcillon de Dangeau.
Portrait par Hyacinthe Rigaud.

Philippe de Courcillon, marquis de Dangeau, né au château de Dangeau (Eure-et-Loir) le 21 septembre 1638 et mort à Paris le 9 septembre 1720, est un militaire, diplomate et mémorialiste français, connu surtout pour son Journal où il décrit la vie à la cour de Versailles à la fin du règne de Louis XIV.

Sommaire

[modifier] Sa vie et son œuvre

Frère de Louis de Courcillon de Dangeau, il est né calviniste mais très tôt converti au catholicisme. Il est d'abord réputé pour son habileté au jeu de cartes, au point que l'expression « jouer à la Dangeau » passe dans la langue courante et qu'il attire sur lui l'attention bienveillante de Louis XIV. En 1665, il est nommé colonel du régiment du roi, qu'il accompagne comme aide de camp dans toutes ses campagnes. Il devient, en 1667, gouverneur de Touraine et remplit plusieurs missions diplomatiques à Trèves, Mayence et Modène.

Protecteur des gens de lettres, il se lie avec Boileau, qui lui dédie sa Satire sur la noblesse. La Bruyère le dépeint dans ses Caractères sous les traits de Pamphile. Il est élu membre de l'Académie française en 1668, sans avoir rien publié, et devient en 1704 membre honoraire de l'Académie des sciences, dont il est président en 1706.

De 1684 à 1720, il tient un journal sur la vie quotidienne à la cour de Versailles. Des extraits en sont publiés par Voltaire en 1770, par Madame de Genlis en 1817 et par Pierre-Édouard Lémontey en 1818. C’est en y adjoignant des Additions que Saint-Simon entreprend d'écrire ses propres Mémoires. Les 19 volumes de l'édition complète du Journal de la cour de Louis XIV paraissent pour la première fois entre 1854 et 1860.

[modifier] Anecdote

Dangeau prête volontiers sa plume au roi et à son entourage. L'abbé de Choisy raconte que Louis XIV lui demanda de rédiger ses lettres à Mlle de La Vallière, laquelle lui demanda le même service pour répondre au roi. L'abbé de Choisy relate l'épilogue : « Il faisait ainsi les lettres et les réponses; et cela dura un an, jusqu'à ce que La Vallière, dans une effusion de cœur, avoua au Roi, qui à son gré la louait trop sur son esprit, qu'elle en devait la meilleure partie à leur confident mutuel, dont ils admirèrent la discrétion. Le Roi, de son côté, lui avoua qu'il s'était servi de la même invention.[1] »

[modifier] Jugement de contemporains

La marquise de Créquy

« Le Marquis de Dangeau venait quelquefois souper à l'hôtel de Breteuil, mais il était ligaturé dans une telle discrétion que je ne saurais véritablement que vous en rapporter, sinon qu'il était pour moi le plus inquiétant personnage de la terre, et que j'avais toujours la frayeur de faire ou dire en présence de lui quelque chose qu'il aurait désapprouvé. On disait alors qu'il écrivait ses mémoires, et quand je les ai vu paraître, ils ne m'ont semblé ni plus intéressans ni moins insignifans que leur auteur. Le Marquis de Dangeau n'avait pas moins de vanité que d'ambition ; mais comme sa vanité n'avait rien d'offensif et son ambition rien d'hostile, on s'en moquait un peu, si vous voulez, mais c'était sans intention dénigrante, et d'ailleurs on estimait on lui la véracité, la bienveillance et la parfaite sûreté du caractère. Quand il reçut le collier du Saint-Esprit, il en pleurait de joie pendant la cérémonie ; et quand le Roi, qui s'en divertissait, lui délégua sa grande-maîtrise de l'Ordre de Saint-Lazare, il en prit une grosse fièvre de nerfs, en résultat de son émotion.

La noblesse, Dangeau, n'est point une chimère....

On est fâché que ce soit à lui que Boileau Despréaux se soit adressé pour afficher une si belle découverte. Mme de Montespan racontait que ce même Dangeau lui avait dit une fois, en signe de noblesse, — je veux être décapité, si..., au lieu de — je veux être pendu ! ce qui dit pourtant beaucoup plus et vaut beaucoup mieux en fait d'imprécation gentilhommière ! Philippe de Courcillon, Marquis de Dangeau, Comte de Merle et de Civray, Victome de Saintré, Baron de Sainte-Hermine, Saint-Amand, Bressuire et autres lieux, Chevalier des Ordres du Roi, Chevalier d'honneur de Madame la Dauphine, Grand-Maître des Ordres Militaires et Hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et Saint-Lazare de Jérusalem, Gouverneur de Touraine et Conseiller d'état d'épée, l'un des quarante de l'Académie française, etc., est mort à Paris en 1720, âgé de 86 à 87 ans, car c'était encore de mes contemporains qui n'avait jamais eu d'acte de naissance et qui ne savait pas trop bien son âge ?[2] »

Saint-Simon

« Dangeau, avec toute sa fadeur et sa politique, ne peut se contenir là-dessus dans l'espèce de gazette qu'il a laissée, Saint-Simon...[3] »

« Dangeau […] écrivait depuis plus de trente ans tous les soirs jusqu'aux plus fades nouvelles de la journée. Il les dictait toutes sèches, plus encore qu'on ne les trouve dans la Gazette de France. Il ne s'en cachait point, et le roi l'en plaisantait quelquefois. C'était un honnête homme et un très bon homme, mais qui ne connaissait que le feu roi et Madame de Maintenon dont il faisait ses dieux, et s'incrustait de leurs goûts et de leurs façons de penser quelles qu'elles pussent être. La fadeur et l'adulation de ses Mémoires sont encore plus dégoûtantes que leur sécheresse, quoiqu'il fût bien à souhaiter que, tels qu'ils sont, on en eût de pareils de tous les règnes. J'en parlerai ailleurs davantage. Il suffit seulement de dire ici que Dangeau était très pitoyablement glorieux, et tout à la fois valet, comme ces deux choses se trouvent souvent jointes, quelque contraires qu'elles paraissent être. Ses Mémoires sont pleins de cette basse vanité, par conséquent très partiaux, et quelquefois plus que fautifs par cette raison. Il y est très politique autant que la partialité le lui permet, et toujours en adoration du roi même depuis sa mort, de ses bâtards, de Madame de Maintenon, et très opposé à M. le duc d'Orléans, au gouvernement nouveau, et singulièrement aux ducs, surtout de l'ignorance la plus crasse qui se montre en mille endroits de ses Mémoires.[4] »

[modifier] Notes et références

  1. Abbé de Choisy, Mémoires pour servir l'histoire de Louis XIV, Paris, Mercure de France, Coll. Le temps retrouvé, 1966, p 284-285.
  2. Souvenirs de la Marquise de Créquy, de 1710 à 1803, tome 1, chapitre IV, édition de 1840.
  3. Saint-Simon, Mémoires (1716-1718), Tome VI, Éditions de la Pléiade-Gallimard, 1985, p 86.
  4. Ibid. p 279.

[modifier] Liens externes



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