Philaé

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24°01′31″N 32°53′03″E / 24.02528, 32.88417

Pour les articles homophones, voir Philæ.
Image:Cartouche_lieux.jpg
Article de la série Lieux égyptiens
Lieux
Nomes / Villes
Monuments / Temples
Région
Basse-Égypte / Moyenne-Égypte
Haute-Égypte / Nubie
Localisation
Philaé
Coordonnées géographiques : 24°01'31"N , 32°53'03"E

Philaé (également écrit Philæ[1]) est une ville antique du premier nome de Haute-Égypte.

Philaé est surtout connu pour le temple d'Isis que renferme cette petite île près d'Assouan. Construit tardivement, il est aussi l'un des mieux conservé d'Égypte. Philaé, grâce au (plus) célèbre temple d'Isis, possédait à une époque énormément de terres. Les édifices actuels (temple d'Isis, kiosque et porte d'Hadrien, temple de Maât-Hathor, mammisi, portique…) remontent au crépuscule de la civilisation égyptienne, étant commencés par les derniers pharaons autochtones (Nectanébo Ier) et terminés par les empereurs romains, malgré les petites touches coptes. Philaé était fréquentée jusqu'au VIe siècle par les Blemmyes, peuple de la lointaine Nubie.

Vers 550, l'empereur Justinien interdit le culte d'Isis au temple de Philaé, qui sera transformé en église.

Sommaire

[modifier] Histoire

Temple de Philaé vu du Nil, en 1899
Temple de Philaé vu du Nil, en 1899
De nos jours...
De nos jours...
Plan de l'île de Philaé
Plan de l'île de Philaé

Les monuments de Philaé sont relativement tardifs, les premiers datent des derniers pharaons au IVe siècle av. J.-C. et les derniers de l’époque romaine, en passant par les Ptolémées. Le temple principal est consacré à la déesse Isis.

Il est difficile de déterminer quand débuta le culte d'Isis sur l’île de Philaé. La déesse Hathor était elle aussi vénérée sur l’île. Maîtresse de la Nubie, c’est sous la forme de la lionne Tefnout venant du sud brûlant qu’elle se serait reposée là pour la première fois, en terre égyptienne. Sur l’île voisine de Bigeh se trouvait le tombeau d’Osiris.

Le plus ancien édifice connu remonte au règne de Nectanébo Ier.

De nombreux pèlerins venaient au temple d’Isis durant les périodes ptolémaïques et romaines. En dehors de l’Égypte, le culte d'Isis était très populaire parmi les peuplades du Nord Soudan : la déesse était vénérée par les tribus nubiennes des Nobades et des Blemmyes qui, au début du Ve siècle, harcelaient dans la vallée la frontière sud de l’empire romain d’Orient.

Malgré ces luttes, l’île de Philaé demeurait un terrain de rencontre pacifique entre les deux camps opposés. Les prêtres de ces tribus pouvaient, dans son temple, adorer la déesse Isis. En 453, fut même conclu un traité autorisant les Blemmyes et les Nobades à emprunter pour un temps déterminé, et à emporter dans leur pays, la statue de la déesse.

Le culte d'Isis fut, parmi les cultes rendus aux vieilles divinités pharaoniques, celui qui se maintint le plus longtemps dans l’Égypte chrétienne. C’est seulement sous le règne de l’empereur byzantin Justinien — qui s’occupa de manière active de la christianisation de la Nubie — que les temples furent fermés sur son ordre.

Croix copte
Croix copte

L'empereur Théodose II avait décrété, en 426 de notre ère, que la civilisation grecque était impie et avait donné l’ordre de détruire tous leurs temples. En Égypte, ils décidèrent de transformer les temples en églises ! Ainsi, à coté de la porte d’entrée du temple d'Isis, se trouvait un bas-relief représentant Amon. La tête a été effacée et sculptée d’une croix copte à la place ! On trouve donc un personnage avec une croix copte en guise de tête surmontée des deux plumes d’Amon !

Le spectacle Son et Lumières de Philaé écrit par André Castelot permet de revivre sous la nuit étoilée, les mystères d'Isis ainsi que les dernières grandes heures de l’Égypte pharaonique.

[modifier] Le sauvetage de Philaé

Après la construction par les Britanniques, en 1894, du premier barrage d’Assouan, les temples de Philaé furent en partie immergés par le Nil dix mois sur douze au grand regret de Pierre Loti : « La noyade de Philæ vient, comme on sait, d'augmenter de soixante-quinze millions de livres le rendement annuel des terres environnantes. Encouragés par ce succès, les Britanniques vont, l'année prochaine, élever encore de six mètres le barrage du Nil ; du coup, le sanctuaire d'Isis aura complètement plongé, la plupart des temples antiques de la Nubie seront aussi dans l'eau, et des fièvres infecteront le pays. Mais cela permettra de faire de si productives plantations de coton !… »[2].

Pendant soixante-dix ans donc, la visite du temple de Philaé en barque était un spectacle où le pittoresque s’alliait à la beauté : « Nous y entrons avec notre barque […] Mais combien il est adorable ainsi, le kiosque de Philæ […] »[3].

En 1979, on commença à construire le second barrage, un travail représentant une masse de quarante-trois millions de mètres cubes de matériaux, projet constituant une menace pour Philaé. Il prévoyait, en effet, entre les deux barrages, l’établissement d’un bief. Or, Philaé se trouverait dans la nappe ainsi créée, entre l’ancienne construction en aval, et la nouvelle en amont. Certes, dans ce lac de retenue, le niveau serait inférieur à celui qu’il devait atteindre derrière la nouvelle digue, et inférieur même à la hauteur maxima actuelle. On aurait une sorte de palier. La masse d’eau incluse n’atteindrait le pylône principal du temple d'Isis qu’à la moitié de sa hauteur environ. Ce n’était pas un progrès. Ainsi l’île ne serait jamais plus découverte complètement au cours d’une partie de l’année. Elle n’aurait plus de saison sèche ! D’autre part — et là résidait le péril de mort — la masse d’eau devait subir des oscillations quotidiennes d’une amplitude de six mètres. Il en résulterait un mouvement de bas en haut et de haut en bas qui finirait par limer les murs qui s’aminciraient jusqu’à l’écroulement.

Alors se posait toujours la lancinante question : comment sauver Philaé ? Une solution finit par s’imposer : démonter le temple et le transporter sur l’îlot Aguilkya, trois cents mètres en aval, que les eaux du Nil ne recouvrent jamais.

La gigantesque opération fut menée sous les auspices du ministère de la Culture égyptien, des services d’archéologie du Caire ainsi que de l’Unesco, Mme Christiane Desroches Noblecourt étant la cheville ouvrière de tous les sauvetages.

En premier lieu, il a fallu construire autour de Philaé deux parois métalliques de 17 mètres de haut et distantes de 12 mètres constituées de 850 rideaux d’acier pesant 1276 tonnes qui, une fois remplies de 200 000 mètres cubes de sable, formeraient une protection efficace contre la pression de l’eau environnante. Ensuite l’eau qui se trouvait à l’intérieur de l’enceinte a été pompée et rejetée dans le lac. L’île asséchée, la vase enlevée, commença l’enregistrement. Le moyen consiste à employer des paires d’appareils photographiques de très haute précision afin de donner des photographies stéréoscopiques (tridimensionnelles) de chaque monument que l’on peut ensuite reproduire à l’aide d’un appareil particulier à la photogrammétrie, permettant de tracer une ligne continue de toutes les constructions sur la surface du monument ; le dessin de contour résultant de cette opération est alors tellement précis qu’il donne l’indice de guide nécessaire pour la reconstruction du monument dans son aspect primitif.

Le cadastre photogrammétrique du temple de Philaé fut effectué par l’IGN qui a exécuté approximativement six cents enregistrements photogrammétriques représentant environ 95% de toutes les surfaces des temples.

Les temples ont ensuite été découpés en blocs et extraits du site à l’aide de barges qui ont emmené les morceaux pour les mettre à l’abri, le temps de les reconstruire sur leur nouveau site d’accueil : l’île d’Aguilkia, 300 mètres plus au nord. L’île a été arasée de 30 mètres et remodelée afin de lui donner l’aspect de l’île de Philaé originale, celle d’un oiseau nageant sur le Nil. Le transport des temples commença le 9  septembre   1974 et s’acheva deux années plus tard.

Le gouvernement égyptien, qui avait déjà contribué pour plus de moitié aux frais nécessaires pour sauver les deux temples d’Abou Simbel, envisagea la question de fournir les montants requis. Vingt-trois états ont cotisé à la caisse de l’Unesco ; à ces subsides sont venus s’ajouter les revenus des expositions des trésors égyptiens qui ont sillonné le monde. Le total de toutes ces participations a atteint un montant de plus de 15 millions de dollars.

[modifier] Photos


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[modifier] Notes

  1. Sur un dessin de David Roberts Philæ, Grand portico, 1838 ainsi que dans le titre du roman de Pierre Loti, La mort de Philæ
  2. La mort de Philæ de Pierre Loti ; p. 228.
  3. La mort de Philæ de Pierre Loti ; p. 223.