L'Art de bien mourir

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L'orgueil du mourant est l'une des cinq tentations répertoriées par l'Ars moriendi. Sur cette représentation, le démon propose une couronne au mourant, sous l’œil désapprobateur de Marie, Jésus et Dieu. Sculpture sept (4a) parmi onze, Pays-Bas, circa 1450.
L'orgueil du mourant est l'une des cinq tentations répertoriées par l'Ars moriendi. Sur cette représentation, le démon propose une couronne au mourant, sous l’œil désapprobateur de Marie, Jésus et Dieu. Sculpture sept (4a) parmi onze, Pays-Bas, circa 1450.

L'Ars moriendi (L’art du décès, l’art de bien mourir) est le nom de deux textes latins datant respectivement de 1415 et 1540. Ils se proposent de nous aider à bien mourir, selon les conceptions chrétiennes de la fin du Moyen Âge. À peine 60 ans après l’épidémie de peste noire, le climat restait au macabre. Très populaires, ces livres ont été traduits dans la plupart des langues d’Europe de l’ouest, fondant une tradition littéraire des guides de décès et de sa bonne pratique.

À l’origine il y avait une version longue et plus tard une version courte contenant onze sculptures sur bois, images plus facilement interprétables et mémorisables.

Sommaire

[modifier] La version longue

La version longue, originale, appelée Tractatus (ou Speculum) artis bene moriendi, a été écrite en 1415 par un moine dominicain anonyme, vraisemblablement à la demande du concile de Constance (Allemagne, 1414–1418). Largement lu et traduit dans les langues de l’Europe de l’ouest, il a été très populaire en Angleterre, où il a créé une tradition littéraire qui culminera au XVIIe siècle avec le Holy Living and Holy Dying (Nancy Beaty, 1970,The Craft of Dying: A Study of the Literary Traditions of the Ars Moriendi in England). Pour plus de renseignements sur cette tradition, on peut consulter The Waye of Dying Well et The Sick Mannes Salve. L'Ars moriendi fut parmi les premiers livres imprimés et largement diffusés, en particulier en Allemagne.

Il est formé de six chapitres :

  1. Le premier chapitre décrit les bons côtés du décès et en conclut que la mort n'est pas à craindre.
  2. Le second chapitre présente les cinq tentations qui assaillent le mourant et les moyens de s'en défendre. Ces tentations sont le manque de foi, le désespoir, l'impatience, l'orgueil et l'avarice.
  3. Le troisième chapitre énumère les sept questions à poser au mourant, ainsi que les consolations disponibles grâce à la rédemption que propose l'amour du Christ.
  4. Le quatrième chapitre pose la vie du Christ en modèle.
  5. Le cinquième chapitre s'adresse aux proches et à la famille, indiquant l'étiquette à suivre autour d'un lit de mort.
  6. Le sixième chapitre renferme les prières à dire pour le mourant.

[modifier] La version courte

La version courte, produite aux Pays-Bas avec l'émergence des gravures (réalisées à partir de sculptures en négatif sur du bois), est datée aux environs de 1450. C'est essentiellement une adaptation du second chapitre (sur les tentations du mourant). Elle contient onze gravures, dont les dix premières réparties en paires, une pour chaque tentation. Chaque paire représente d'abord le démon tentant le mourant, puis sur la deuxième planche la réponse adaptée. La onzième gravure représente le mourant, victorieux de ces épreuves, accueilli au Paradis alors que le démon s'en retourne en enfer. Bien que la version courte ait connu autant de succès que la version longue, il n'y en pas eu de traduction anglaise.

[modifier] Le sens

Si la littérature médiévale présente souvent le besoin de se préparer à la mort de quelqu’un au travers du thème du lit de mort, il faut attendre le XVe siècle pour avoir une littérature prenant le point de vue du mourant: comment bien se préparer à sa mort, quel est le sens d’une bonne mort et comment y parvenir. L’accompagnement du mourant dans ses derniers instants, sa préparation au passage vers l’autre monde étaient jusqu’alors l’apanage du prêtre. Les rangs décimés par la peste noire, l’église trouve avec l'Ars moriendi une solution innovante à ses problèmes d’effectifs. Grâce à ce « guide des derniers instants », chacun peut alors accompagner son mourant en l’absence d’un prêtre, chose inconcevable avant la peste noire.

L'Ars moriendi est un guide pour les mourants des XIVe et XVe siècles confrontés aux horreurs de la peste noire. Il sera également utilisé par une certaine population désirant se distinguer en respectant « les formes », au sein d’une société de plus en plus consciente des statuts, dans une Europe décimée, mais prospère.

[modifier] Œuvres dérivées

  1. The Art of Dying, une chanson de 1970 par George Harrison (des Beatles).
  2. Ars Moriendi, une chanson de 1999 par Mr. Bungle. (album "California")
  3. Ars moriendi eller de syv dødsmåter (Ars moriendi or the seven ways of dying), un recueil de poèmes par Georg Johannesen (auteur Norvégien).
  4. Ars Moriendi, une peinture de Peter Myer.
  5. Ars Moriendi, un instrumental par le groupe de black metal suédois "Marduk"

[modifier] Références

  • Anonymous. "The Art of Dying Well," in Medieval Popular Religion, 1000-1500, a Reader. Ed. John Shinners, London: Broadview Press, 1997: 525-535. ISBN 1551111330 - English translation.
  • Nancy Beaty (1970). The Craft of Dying: A Study of the Literary Traditions of the Ars Moriendi in England. ISBN 0300013361
  • N.F. Blake (1982). "Ars Moriendi". Dictionary of the Middle Ages. v.1, pp547-8. ISBN 0684167603
  • L'article anglais original

[modifier] Liens externes