Léviathan (Auster)

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Léviathan est un roman de Paul Auster paru en 1992, traduit pour les éditions Actes Sud en 1993.

Il porte en exergue : « Tout État actuel est corrompu » (Ralph Emerson).

Sommaire

[modifier] Le Léviathan

Le Léviathan est dans le Livre de Job un monstre gigantesque, qui sera plus tard représenté par une gueule ouverte ; dans la langue, il passe pour désigner toute chose monstrueuse et terrifiante. Avec Thomas Hobbes en 1651, il devient l’État, l’État despotique, le pouvoir absolu, le seul qui, malgré son visage peu amène semble au philosophe le garant d’une vraie société civile. Le romancier allemand Arno Schmidt intitule « Léviathan » une de ses nouvelles qui décrit la fuite désespérée de civils à Berlin, sous les bombes en 1943. On y rappelle que Nietzsche appelait l’État « un monstre froid ».

[modifier] Narration

La narration est classique en cela qu’elle commence par la fin et reprend tout de suite à un moment antérieur où se sont rencontrés les deux personnages principaux ; puis des allées et venues dans le passé, au hasard semble-t-il des souvenirs du narrateur qui cherche à reconstituer le pourquoi de l’événement qui ouvre le livre.

[modifier] L’histoire

Peter Aaron, écrivain et narrateur de l’histoire, vient de lire dans le journal le récit de la fin « explosive » de son ami Benjamin Sachs. Entouré de dynamite, jusqu’à devenir une véritable « bombe humaine », il s’est donné la mort dans sa voiture sur une autoroute. Peter s’attend à la visite de la police, et n’est pas étonné de cette fin pour Benjamin. Le destin de ce dernier fut marqué par la bombe qui explosa à Hiroshima au moment de sa naissance le 6 août 1945. Peter évoque la vie de son ami : un itinéraire de quarante ans qui passe par l’écriture. Si Peter et Benjamin sont tout deux écrivains de fiction, Benjamin n’a écrit qu’un seul roman : un livre dans lequel il essaie d’imiter « tous les styles » moins pour faire preuve de virtuosité que faute de pouvoir opter pour une seule solution. Le parcours de Sachs est semé de détails significatifs quant à son problème d’identité et sa conviction d’être « l’enfant de la bombe ». Par exemple, la mère de Ben l’emmena enfant avec ses copains visiter la statue de la Liberté. Saisie de vertige, elle s’assied sur une marche, tandis que son fils grimpe tout seul dans la « torche » et s’y livre à des contorsions dangereuses… au cours d’une fête, et alors qu'il est déjà marié, Ben se laisse séduire par Maria, artiste volubile (inspiré directement de l'artiste Sophie Calle qui en retour se conformera personnellement au personnage de Maria, créé par Auster, pour composer une œuvre, Gotham Handbook) et ex-amante de Peter. Il la suit jusqu’en haut d’un échelle de secours d’où il tombe de plusieurs mètres de haut. Sa vie change ; il divorce, cesse d’écrire, se retire dans une maison en forêt.

L’itinéraire de Sachs prend un relief inattendu ; le nouveau livre sur lequel il travaille « Léviathan » ; dont on reste à ignorer le contenu, ne l’empêche pas de rencontrer un homme en voiture, qu’il tue, en état de légitime défense. Dans le véhicule, il trouve des explosifs, et beaucoup de billets de banque. Apprenant que l’homme est marié et père, il ne veut pas le livrer à la police et s’obstine à vivre chez sa femme, lui donner l’argent, adoptant sa fillette. Tout cela ne lui apporte guère de satisfaction ; alors, il commence une carrière de terroriste à l’image de l’homme qu’il a tué ; cet homme travaillait pour le FBI : Sachs, lui, ne s’attaque qu’à des statues de la Liberté en miniature contre lesquelles il commet nombre d’attentats, avant de s’en prendre à sa propre personne.

[modifier] Conclusion

Le couple Pete/Benjamin apparaît comme un organe qui comprend deux individus complémentaires l’écrivain qui a réussi et veut croire aux valeurs de la création littéraire (c’est aussi un personnage mineur, effacé) et celui qui n’y croit plus et cesse vite d’écrire, pour se lancer dans l’action. Des actions un peu dérisoires : attenter à des statues de la Liberté… sans pouvoir s’en prendre à la principale… mais courageuses et d’une valeur symbolique. Ce roman témoigne à travers ses personnages d’une nation en quête d’identité, qui a perdu ses repères.

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