Thomas Hobbes

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Thomas Hobbes
Philosophe occidental
XVIIe siècle
Thomas Hobbes: portrait par John Michael Wright (National Portrait Gallery, Londres)
Thomas Hobbes: portrait par John Michael Wright (National Portrait Gallery, Londres)
Naissance : 5 avril 1588
Décès : 4 décembre 1679
École/tradition : contractualiste
Principaux intérêts : Physique, Éthique, Politique, Langage,
Idées remarquables : Politique moderne, contrat social, état de nature
Influencé par : Machiavel, Aristote
A influencé : politique, science, Spinoza, Rousseau

Thomas Hobbes (5 avril 1588 à Westport, Angleterre4 décembre 1679 à Hardwick Hall dans le Derbyshire en Angleterre) est un philosophe matérialiste-nominaliste anglais. Son œuvre majeure, le Léviathan, eut une influence considérable sur la philosophie politique moderne, par sa conceptualisation de l'État de nature anarchique et du contrat social qui fonde les bases de la société civile. Paradoxalement, le Léviathan eut une influence considérable sur l'émergence du libéralisme et de la pensée économique libérale du XXe siècle - notamment la théorie des jeux, le concept du dilemme du prisonnier étant souvent attribué à Hobbes à titre posthume. La portée de l'œuvre de Hobbes et sa conceptualisation de l'État d'Anarchie eut également une influence sur l'étude des relations internationales et de son courant rationaliste dominant : le réalisme.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Les premières années

Thomas Hobbes raconte que sa mère accoucha avant terme sous le choc de la nouvelle de l'appareillage de l'Invincible Armada. Son père était vicaire de Charlton et de Westport ; il fut forcé de quitter la ville, abandonnant ses trois enfants au soin d'un frère plus âgé, Francis.

Hobbes reçoit l'enseignement de l'église de Westport dès l'âge de quatre ans et entre ensuite à l'école de Malmesbury, puis dans une école privée tenue par un jeune homme, Robert Latimer. Hobbes fait preuve d'une précocité intellectuelle remarquable : à l'âge de six ans, il apprend le latin et le grec, et vers quatorze ans, il traduit en latin Médée d'Euripide. Il entre à Hertford College (Oxford) en 1603 puis à Magdalen Hall (Oxford) en 1605, où il prend la vie universitaire en aversion. Le principal de Magdalen est alors John Wilkinson, un puritain agressif qui aura une certaine influence sur Hobbes.

[modifier] Les années de formation

À l'université, Hobbes semble avoir suivi son propre programme d'études ; il « était peu attiré par l'étude scolastique ». Il conclut ses études et obtient le degré de Bachelor of Arts en 1608. Puis, il devient tuteur du fils aîné de William Cavendish, baron de Hardwick et futur comte de Devonshire. Il est chargé de voyager sur le continent avec son élève ; il parcourt ainsi la France, l’Italie, l'Allemagne en 1610, année de l'assassinat de Henri IV de France. De retour en Angleterre, il se met à l'étude des belles lettres, lisant et traduisant Thucydide, son historien préféré. Sa traduction parait en 1628, année où meurt son élève et ami.

Il devient peu après de nouveau travelling tutor (que l'on peut traduire en français par « précepteur itinérant ») du fils du comte de Clifton et retourne sur le continent. Il passe dix-huit mois à Paris, et se rend à Venise. De retour en Angleterre en 1631, il se voit confier le jeune comte de Cavendish. C'est vers cette époque (1629 – 1631) qu'il découvre Euclide et se prend de passion pour la géométrie. Trois ans plus tard, Hobbes et son élève visitent la France et l’Italie et restent huit mois à Paris, jusqu'à l'automne 1637.

Il est alors mis en rapport avec le père Mersenne, qui lui ouvre les portes de la société savante de Paris et l’incite à publier ses ouvrages de psychologie et de physique. Il décrit dans une autobiographie son état de méditation incessante, « en bateau, en voiture, à cheval », et c’est en effet à ce moment de sa vie qu’il conçoit le principe de sa physique, le mouvement, seule réalité génératrice des choses naturelles. Ce principe lui paraît bientôt capable de fonder la psychologie, la morale et la politique.

[modifier] Troubles et chute de Charles Ier

A partir de 1640, l’Angleterre connaît une opposition de plus en plus violente entre le Roi et le Parlement. Hobbes prend parti pour le Roi, il quitte Londres en 1640 pour Paris et il y reste en exil pendant 11 ans. Vers 1642, il écrit un petit traité, Éléments de la loi naturelle et politique, en réaction aux événements qui troublent la vie politique, traité écrit en anglais où il s'efforce de démontrer que « la puissance et le droit sont liés à la Souveraineté par une connexion inséparable. » Le livre n'est pas publié, mais des copies circulent et font connaître Hobbes.

Vers cette époque, René Descartes, alors en Hollande, charge Mersenne de communiquer les Méditations sur la philosophie première pour recueillir des commentaires des meilleurs esprits. Mersenne,ayant fait la connaissance de Hobbes, s'adresse à lui, et Hobbes écrit les Troisièmes Objections, qui sont un témoignage précieux pour l’étude de sa philosophie première. Ses objections sont transmises anonymement à Descartes en janvier 1641. Après d'autres objections de Hobbes, contre la Dioptrique cette fois, transmises par lettres signées, Descartes finit par refuser d'avoir encore affaire à « cet Anglais ».

Après cet épisode, Hobbes reprend ses travaux et publie en 1642 De Cive, où il explique que la solution aux guerres civiles qui secouent l’Angleterre consiste à faire du pouvoir religieux une fonction du gouvernement. Il publiera une édition augmentée de cette œuvre en 1647, au moment où il termine son traité De la nécessité et de la liberté'.

En 1647, alors qu'il prévoit de se retirer dans le midi de la France, il est nommé professeur de mathématique du jeune prince de Galles (le futur Charles II[2) qui est réfugié en France. Il exerce ces fonctions jusqu'au départ du prince pour la Hollande, en 1648.

Léviathan.
Léviathan.

En 1650, sont édités contre son gré et séparément, les deux parties des « Elements of law natural and politic » : la Nature humaine ou les Éléments fondamentaux de la politique, et le De corpore politico. L'année suivante, il regagne enfin l'Angleterre et fait paraître à Londres sa grande œuvre : Léviathan, qui provoque le scandale. Il est accusé d'athéisme et de déloyauté et rencontre de nombreux adversaires (théologiens et universitaires d'Oxford, tous membres de la Royal Society) qui se liguent contre lui. Il soutient ainsi plusieurs disputes, par exemple avec l'évêque John Bramhall, ou avec les universitaires d'Oxford (accusés fort injustement d'ignorance par Hobbes) d'où sortiront par exemple les Questions relatives à la liberté, à la nécessité et au hasard (1666). Pendant plus d'un quart de siècle, il y eut ainsi attaques, répliques, en physique avec Robert Boyle sur le vide, dans le domaine des mathématiques, avec John Wallis sur l'arithmétique et l'infini, où il apparaît que Hobbes surestimait beaucoup ses découvertes. Ces énormités mathématiques sont ainsi jugées risibles ou pitoyables. Néanmoins, il ne renonce pas, publie en 1655 le De Corpore, première partie des « Élements de Philosophie » qui contiennent sa philosophie première, sa logique, sa physique et la très controversée démonstration de la quadrature du cercle. En 1658 le De homine, troisième partie de sa trilogie, où l'optique occupe une certaine place, et il persiste dans la publication de ses découvertes mathématiques (Quadrature du cercle, cubature de la sphère, duplication du cube, 1669) qui sont réfutées par ses adversaires, en particulier par John Wallis. Il doit également se défendre contre les rumeurs selon lesquels il aurait écrit le Léviathan pour gagner la faveur de Cromwell.

[modifier] La restauration

Après le rappel de Charles II, Hobbes est accueilli à la cour et devient le familier du roi. Il reçoit une pension de cent livres. Mais cette fortune favorable n'est pas de longue durée. Dans l'entourage du roi, Hobbes compte de nombreux ennemis, et parmi eux des évêques qui entreprennent de réfuter le corrupteur de la morale.

Le 31 janvier 1667, peu de temps après l'incendie de Londres, une loi est votée à la chambre des communes, permettant de prendre des mesures contre les athées et les sacrilèges ; il y est fait mention du Léviathan. La lenteur des procédures sauve Hobbes, qui prépare un plaidoyer, publié avec la traduction latine du Léviathan en 1668. Mais il a surtout de puissants protecteurs, et le roi le soutient à la condition qu’il ne publie plus de livres de politique ou de religion.

Il compose Béhémoth en 1670, puis un dialogue et une Histoire ecclésiastique, et, en 1672, une autobiographie en distiques latins. À partir de 1675, il passe ses derniers jours hors de Londres, chez ses amis de la famille Devonshire. En août 1679, il prépare encore une œuvre pour l'impression ; mais, en octobre, la paralysie l'en empêche, et le 4 décembre, il meurt à Hardwick.

Sur une plaque de marbre noir, on peut lire :

« vir probus et fama eruditionis domi forisque bene cognitus. »

Selon une anecdote, Hobbes lui-même aurait proposé de graver sur sa tombe :

« Voici la véritable pierre philosophale. »

[modifier] La controverse avec Descartes

La controverse avec Descartes porte sur les méditations sur la philosophie première. Thomas Hobbes envoie à Descartes ses objections par l'intermédiaire de Mersenne qui par prudence préserve son anonymat et se contente de mentionner "philosophe anglais". Descartes n'est pas dupe et demandera explicitement à Mersenne de ne plus avoir de contact avec Hobbes qu'il soupçonne de plagiat.

[modifier] Les concepts fondamentaux de Hobbes

Dans la seconde section du De corpore, Hobbes fait l'hypothèse que l'univers est anéanti, mais que l'homme subsiste ; sur quoi cet homme pourra philosopher ?

« Je dis qu'à cet homme il restera du monde et de tous les corps que ses yeux avaient auparavant considérés ou qu'avaient perçus ses autres sens, les idées, c'est-à-dire la mémoire et l'imagination de leurs grandeurs, mouvements, sons, couleurs, etc. toutes choses qui, bien que n'étant que des idées et des fantômes, accidents internes en celui-là qui imagine, n'en apparaîtront pas moins comme extérieures et comme indépendantes du pouvoir de l'esprit. »

Ainsi, toutes les qualités des choses qui s'offrent à nos sens sont-elles des états affectifs inhérents au sujet. Il n'y aurait rien d'absurde, selon Hobbes, à ce qu'un homme éprouve ces affections une fois que le monde a disparu, après son anéantissement par Dieu. Dans cette fiction, l'esprit n'agit que sur des images, et c'est à elles qu'il donne des noms. Mais, remarque Hobbes, c'est aussi bien ce qui se produit lorsque le monde existe :

« Que nous calculions les grandeurs du ciel ou de la terre, ou leurs mouvements, nous ne montons pas dans le ciel, afin de le diviser en parties et de mesurer ses mouvements ; cela, nous le faisons bien tranquilles dans notre cabinet ou dans l'obscurité. »

Ces images qui forment l'objet exclusif de nos pensées, peuvent être considérées de deux points de vue : ce sont des accidents internes de l'esprit ou ce sont les espèces des choses extérieures en tant qu'elles paraissent exister. Le premier point de vue concerne la psychologie et les facultés de l'âme ; le second est objectif, puisque ces images de notre imagination composent le monde.

[modifier] Psychologie

Pour Hobbes, la psychologie est l'étude de la propagation de mouvements matériels qui agissent sur les dispositifs physiologiques nerveux et produisent les réactions et les attitudes.

[modifier] Morale

«L'intérêt et la crainte sont les principes de la société et toute la morale consiste à vivre selon notre bon plaisir.» Thomas Hobbes Le Traité du citoyen

Thomas Hobbes s’est approprié le langage de la loi naturelle au sens traditionnel du terme pour défendre une thèse qui synthétise les deux principales positions qui s’y opposaient (la théorie des droits naturels et le conventionnalisme humaniste).

[modifier] Politique

Auteur du Léviathan en 1651, des Éléments de la loi naturelle et politique en 1640 et du Citoyen (De Cive) en 1641, il est l'un des premiers philosophes contractualistes qui tente de refonder la légitimité du pouvoir des dirigeants sur autre chose que la religion ou la tradition. Son projet est de fonder l'ordre politique sur un pacte entre les individus, afin de faire de l'homme un acteur décisif dans l'édification de son propre monde social et politique[1]. Sa réflexion politique est fondée sur son anthropologie philosophique, qui fait de l'homme un être mû par la crainte et le désir. Il doit ainsi sortir de l'état primitif et fonder un état artificiel sur les bases de la raison : c'est le passage de l'état de nature à l'état civil.

[modifier] L'état de nature

Hobbes est un des premiers à "inventer" un état de nature pré-existant à la société humaine, afin d'y déceler comment les hommes y agirait sans arbitre[2]. C'est toutefois un état inventé, non réel. Thomas Hobbes se démarque ainsi nettement de la tradition politique qui reposait sur Aristote et Thomas d'Aquin, pour qui l'homme est un être naturellement sociable.

Thomas Hobbes, qui a longuement médité sur la Politique d'Aristote, s'oppose à la tradition aristotélicienne selon laquelle l'homme est un animal naturellement social. Pour Hobbes, l'homme est sociable non par nature, mais par accident. L’état de nature, c’est l’état de la "guerre de tous contre tous". Hobbes dira (reprenant Plaute) que "l’homme est un loup pour l’homme" (homo homini lupus). L’état de nature ne doit pas être compris comme la description d’une réalité historique, mais comme une fiction théorique. Il n'a bien sûr jamais existé, mais il est une hypothèse philosophique féconde, une construction de l'esprit qui vise à comprendre ce que nous apporte l'existence sociale. Cet état représente ce que serait l'homme, abstraction faite de tout pouvoir politique, et par conséquent de toute loi. Dans cet état, les hommes sont gouvernés par le seul instinct de conservation - que Hobbes appelle " conatus " ou désir. Or, à l’état de nature, les hommes sont égaux, ce qui veut dire qu’ils ont les mêmes désirs, les mêmes droits sur toutes choses, et les mêmes moyens - par ruse ou par alliance - d’y parvenir. Chacun désire légitimement ce qui est bon pour lui. Chacun essaie de se faire du bien et chacun est seul juge des moyens nécessaires pour y parvenir. C'est pourquoi bien souvent les hommes ont tendance à entrer en conflit les uns avec les autres pour obtenir ce qu'ils jugent bon pour eux.

À l'état de nature, l'homme est dénué de toute bonté, comme les animaux livrés à la "loi de la jungle". Il y règne la puissance anarchique de la multitude (potentia, en latin). Doué de raison, c’est-à-dire de la faculté de calculer et d’anticiper, l'homme prévoit le danger, et attaque avant d’être attaqué. L'homme le plus faible pourrait avec de la ruse l'emporter sur le plus fort. Chacun est donc persuadé d'être capable de l'emporter sur autrui et n'hésite pas à l'attaquer pour lui prendre ses biens. Des alliances éphémères se nouent pour l'emporter sur un individu. Mais à peine la victoire est-elle acquise que les vainqueurs se liguent les uns contre les autres pour bénéficier seul du butin.

Cette guerre est si atroce que l'humanité risque même de disparaître. A ceux qui penseraient que cette vision de l'humanité est pessimiste, Hobbes rétorque que même à l'état social où pourtant existent des lois, une police, des juges, néanmoins nous fermons à clef nos coffres et nos maisons de peur d'être détroussés. Or l'état de nature est sans loi, sans juge et sans police... C’est l’angoisse de la mort (la mort violente) qui, résultante de l'égalité naturelle, est responsable de l’état de guerre et fait peser sur la vie de tous une menace permanente. Cet état, fondamentalement mauvais, ne permet pas la prospérité, le commerce, la science, les arts, la société.

[modifier] L'état civil et le pouvoir Souverain

Une humanité livrée à elle-même, sans l'ordre social aurait fini par disparaître. Ce qui va sauver l'homme c'est sa peur de mourir et son instinct de conservation. L'homme comprend que pour subsister, il n'y a pas d'autre solution que de sortir de l'état de nature. C'est la passion qui le pousse à sortir de l'état de nature : la peur de la mort, le désir des choses nécessaires à la vie et l'espoir de les obtenir par son travail[3]. Cependant, pour Hobbes, cela ne signifie pas qu'il n'existait pas de droit naturel antérieur à la formation de la société : il existait un droit de nature, c'est celui de préserver sa propre vie par tous les moyens[4].

La loi de nature est un précepte de la raison, ou que la raison découvre, et qui limite le droit naturel et le rationalise en quelque sorte. La première et fondamentale loi de nature est qu'il faut rechercher la paix et ne rechercher le secours de la guerre que si la première est impossible à obtenir. Ces lois naturelles sont éternelles et immuables[5], car elles reposent sur la rationalité que chacun possède et non sur un consentement collectif. Mais elles doivent êtres appliquées par tous. Pour y arriver, dit Hobbes, il est nécessaire de renoncer à certains de ses droits, car rien ne peut garantir l'application par tous de la loi naturelle. C'est là qu'intervient la théorie du contrat. Ce qui va permettre de passer de la nature à la société, de la guerre à la paix, c'est un contrat passé entre les sujets et un souverain. Plus qu'un consentement, il s'agit d'un réel transfert de tous ses droits naturels à une personne qui est appelée le Souverain, ou Leviathan. Hobbes insiste encore plus en montrant qu'il s'agit d'une unité réelle de tous les individus : « C'est plus que le consentement ou la concorde : il s'agit d'une unité réelle de tous en une seule et même personne, faite par convention de chacun avec chacun »[6]. Chacun contracte avec chacun en vue de transférer tous ses droits à un Souverain qui les détiendra tous.

De par sa puissance, le Souverain est ainsi la garantie que les hommes ne retomberont pas dans l'anarchie de l'état de nature ; et il mettra en application ce pour quoi il a été fait en promulguant des lois civiles auxquelles tous doivent se soumettre « De même que pour parvenir à la paix et grâce à celle-ci à leur propre conservation, les humains ont fabriqué un homme artificiel, que nous appelons un état, de même ils ont fabriqué des chaînes artificielles appelées lois civiles »[7]. Le Souverain a donc pour fin la conservation des individus.

L'expression "l'homme est un loup pour l'homme" est hobbesienne, mais ne résume pas sa pensée, l'homme pouvant être aussi un Dieu pour l'homme. D'autre part, l'homme ne peut être un animal dans cette conception, puisque l'homme produit du social. L'homme et l'animal s'opposent dans leur rapport au temps (mémoire et durée pour l'homme ; immédiateté pour l'animal).

[modifier] Des causes de dissolution de l'état

Le pouvoir Souverain, qui décide des lois, des récompenses ou des punitions, en vue de la conservation de chacun et de permettre à chacun de conserver sa propriété privée et de contracter avec d'autres individus, auquel tous les individus sont soumis, reste toutefois fragile : le Leviathan est un "dieu mortel"[8]. Les causes de dissolution sont les suivantes[9] :

  • L'imperfection de leurs institutions
  • l'absence de pouvoir vraiment absolu
  • le jugement privé de chacun sur ce qui est bon ou mal
  • des mauvais préjugés contre le pouvoir
  • prétendre être inspiré divinement
  • l'assujetissement de la puissance souveraine aux lois civiles
  • l'attribution à des sujets d'une propriété absolue
  • la guerre avec les nations voisines
  • l'émancipation du religieux de la sphère publique

Au niveau des relations internationales, Hobbes aura été l'un des principaux inspirateurs du courant réaliste fondé par Kissinger et Morgenthau.

[modifier] La religion

Hobbes a entièrement conscience du problème théologico-politique, c'est à dire des problèmes et des interférences souvent néfastes entre la sphère religieuse (surtout Chrétienne) et la sphère politique. Notamment parce qu'il a connu lui-même les guerres de religion en Angleterre. C'est ainsi qu'il consacre pratiquement la moitié de son oeuvre politique à la question religieuse.

Le pouvoir Ecclésiastique n'est que le pouvoir d'enseigner[10]. Il ne peut donc pas se permettre d'imposer des règles de lui-même aux individus. C'est la religion Catholique qui est clairement visée par Hobbes, car elle est une sphère de pouvoir autonome et créée une dualité entre le pouvoir souverain civil et le pouvoir Ecclesiastique, entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. Hobbes résout le problème en subordonnant le pourvoir religieux au pouvoir politique[11]. Ainsi c'est le Souverain qui doit décider des questions religieuses et tous doivent lui obéir« Dieu parle par ses vices-dieux - ou lieutenants - ici sur terre, c'est à dire par les rois souverains »[12]. De plus, puisque le Souverain est institué par la volonté de tous, et doit faire respecter les lois de nature, qui sont de Dieu, il n'y a pas d'opposition flagrante.

[modifier] Postérité politique

Hobbes est encore très présent aujourd'hui. On peut même l'opposer à Rousseau dans les conflits politiques liés à l'application de la souveraineté démocratique. Il est reconnu comme étant le penseur d'une bourgeoisie éclairée de pouvoir ; puisque amené à résumer parfois les contraintes politiques ainsi : faire le bien de la société civile parfois malgré elle. Si l'homme emboîté dans les contraintes des destinées communes vient à protester contre ceux qui les commandent ; il faudra juger de la recevabilité de ses griefs au regard des impératifs devant mener au développement de la société chaque jour renouvelée.

[modifier] Œuvres

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Voir sur Wikisource : Thomas Hobbes.

[modifier] Oeuvres complètes

Thomas Hobbes Opera philosophica quae latine scripsit, 5. Vol., édition . Molesworth, Londres, 1939-1845, réimpression, Aalen, 1966.

The English Works of Thomas Hobbes, 11 vol., édition W. Molesworth, Londres, 1939-1945, réimpression Aalen, 1966.

[modifier] Textes et traductions

  • A short tract on First Principles, (1630), British Museum, Harleian MS 6796, ff. 297-308
    • Court traité des premiers principes, textes, traduction et commentaire par J. Bernhardt, Paris, PUF, 1988.
  • De principiis, (1638-1639), National Library of Wales, Aberystwyth, MS 5297 ; publié par J. Jacquot et H.W. Jones en Appendice II de la Critique du « De Mundo » de Thomas White, 449-460 ; « De principiis. Notes de Herbert de Cherbury sur une version ancienne de De Corpore », traduction, introduction et notes par L. Borot, in Philosophie, n°23, été 1989, 3-21.
  • The Elements of Law Natural and Politic. (1640), EW IV 1-228
    • Éléments de loi, traduction d'Arnaud Milanese, Paris, Allia, 2006, 345 p., avec notes bibliographiques, bibliographie et glossaire (ISBN 2844851940) (publié avec Sur la vie et l'histoire de Thucydide, Court traité des premiers principes et De Corpore à l'époque des Elements of law).
  • Tractatus opticus I, (1640, publié en 1644 par Mersenne dans ses Cogita physico-mathematica), OL V, 217-248.
  • Objectiones ad Cartesii meditationes, Objectiones tertiae, (1641), in Œuvres de Descartes,AT, IX-1, 133-152 et OL V, 249-274.
  • De Cive (1642-1647), édition critique par H. Warrender, original latin et traduction anglaise, Oxford, Clarendon Press, 1983.
  • Critique du « De Mundo » de Thomas White, (1643, introduction, texte critique et notes par J. Jacquot et H.W. Jones, Paris, Vrin-CNRS, 1973.
  • Logica, Ex T.H. et Philosophia prima. Ex T.H. (1644-1645), Chatsworth MS A. 10, publié par J. Jacquot et H.W. Jones en Appendice III de la Critique du « De Mundo » de Thomas White, 461-513.
  • Of Liberty and Necessity, (1645, publié sans l’accord de Hobbes en 1654), EW IV, 229-278 ; De la liberté et de la nécessité, traduction et notes par F. Lessay, in Ouvres traduites, T. XI-1, Paris, Vrin, 1993, 29-118.
  • Human Nature, or the Fundamental Elements of Policy. Being a discovery of the faculties, acts and passions of the soul of man, from their original causes, according to such philosophical principles as are not commonly known or asserted (1650)
    • De la Nature Humaine, ou Exposition des facultés, des actions & des passions de l'âme, & de leurs causes déduites d'après des principes philosophiques qui ne sont communément ni reçus ni connus. (1772) Londres, traduit par le Baron d'Holbach. (1971) Paris, Vrin.
  • De Corpore Politico or the Elements of Law Moral and Politick, with discouses upon several Heads as : of the law of nature, of oaths and covenants ; of several kinds of government, with the changes and revolutions of them. (1650)
  • Léviathan (1651, en anglais), édition de C.B. Macpherson, Pelican Classics, Penguin Books, 1968, 1981 ; (1668 en latin), OL III ; Leviathan, introduction, traduction et notes par F. Tricaud, Paris, Sirey, 1971 ou encore la traduction de M. Pécharman sur base de celle de F. Tricaud aux éditions Vrin, « Bibliothèque des Textes Philosophiques ». 560 p., 13,5 × 21,5 cm. ISBN : 978-2-7116-1744-9
  • De Corpore, (1655), OL I Nous citons ce texte d’après notre traduction.
  • The questions concerning Liverty, Necessity and Chance, (1656), EW V 1-455.
  • Six Lessons to the Professors of the Mathematics (1656), EW VII, 181-356.
  • De Homine (1658), OL II, 1-32 ; Traité de l’homme, traduction et commentaire par P.M. Maurin, Paris, Blanchard, 1974.
  • Examinatio et emendatio mathematicae hodiernae, (1660), OL IV, 1-232.
  • Belemoth, or the Long Parliament, (1660-1668 publié à titre posthume en 1682), éd. T. Tönnies, revue par M.M. Goldsmith, Londres, F. Cass, 1969
    • Béhémoth ou le long parlement, introduction, traduction et notes par L. Borot, Œuvres traduites, T. IX, Paris, Vrin, 1990.
  • Historia ecclesiastica carmine elegiaco concinnata (1660, publié à titre posthume en 1688), OL V, 341-408.
  • Dialogus physicus de natura aeris, (1661), OL V, 341-408.
  • A Dialogue between a Philosopher and a Student of the Common Laws of England (1666), édition critique par J. Cropsey, Chicago et Londres, University of Chicago Press, 1971
    • Dialogue entre un philosophe et un légiste des common-laws d’Angleterre, introduction, traduction et notes par L. et P. Carrive, Œuvres traduites, T.X. Paris, Vrin, 1990.
  • An Historical Narration concerning Heresy, and the Punishment thereof, (1666), EW IV 385-408
    • Relation historique touchant l’hérésie et son châtiment, introduction, traduction et notes par F. Lessay, in Hérésie et histoire, Œuvres traduites. T. XII-1, Paris, Vrin, 1993, 17-55.
  • An Answer to a Book Published by Dr. Bramhall, late Bishop of Derryn Called the « Catching of the Leviathan », (1667/8, publié à titre posthume en 1682), EW IV, 279-384 .
    • Réponse à un livre publié par le Docteur Bramhall, feu évêque de Derry, intitulé « La capture de Léviathan », introduction, traduction et notes par F. Lessay, in De la liberté et de la nécessité, Œuvres traduites, T. XI-1, Paris, Vrin, 1993, 121-261.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • (en) H. MacDonald et M. Hargreaves, Thomas Hobbes, a Bibliography, Londres, The Bibliographical Society, 1952.
  • (fr) A. Garcia, Thomas Hobbes : Bibliographie internationale de 1620 à 1986, Caen, Presses de l’Université de Caen, 1986.
  • (en) J. Aubrey, Aubrey’s Brief Lives, édité par O. Lawson-Dick, Londres, Martin Secker & Wartburg, 1949, Mandarin, 1992 . (fr) Traduction française partielle : J. Aubrey, Vies brèves, traduit et présenté par Jean-Baptiste de Seynes, Paris, Obsidiane 1989. La Vie de Thomas Hobbes des Brief Lives a été également traduite et publiée par R. Polin dans son édition de la traduction Sorbière du De Cive, Paris, Sirey, 1981, 3-25.
  • (en) The Correspondence of Thomas Hobbes, 2. Vol., édité par Noël Nalcolm Oxford, Clarendon Press, 1994.
  • (fr) Yves-Charles Zarka, Hobbes et la pensée politique moderne, PUF, Quadrige, 2001
  • (fr) Dominique Weber, Hobbes et le désir des fous. Rationalité, prévision et politique, PU Paris-Sorbonne, 2007 ; Hobbes et l'histoire du salut. Ce que le Christ fait à Léviathan, PU Paris-Sorbonne, 2008.

Depuis 1988, paraît annuellement un Bulletin Hobbes, bibliographie critique internationale des études hobbesiennes, in Archives de Philosophie.

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

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Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Thomas Hobbes.

[modifier] Notes et références

  1. Yves Charles Zarka, Hobbes et la pensée politique moderne, PUF, quadrige, 2001, p.19
  2. Léviathan, chapitre 13 sur l'état de nature
  3. Léviathan, chap. 13, in éditions Gallimard, 2000, p. 228
  4. Léviathan, chap. 14, in éditions Gallimard, 2000, p. 229
  5. Léviathan, chapitre 15, Gallimard, Folio, 2000, p. 267
  6. Léviathan, chapitre 17, Gallimard, Folio, 2000, p. 288
  7. Léviathan, chapitre 21, Gallimard, Folio, 2000, p. 339
  8. Léviathan, chp. 17, p. 288
  9. on trouve un exposé des causes de dissolution au chapitre 29 du Léviathan, au chapitre XII du De cive et dans éléments de la loi naturelle et politique partie II, chapitre VIII
  10. Léviathan, chp. 42, p. 700
  11. Éléments de la loi naturelle et politique, II, chap. VI et VII
  12. Éléments de la loi naturelle et politique, II, VII, 11



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