Harm principle

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Le Harm principle, ou principe de non-nuisance, est un principe de philosophie politique et morale énoncé par John Stuart Mill dans son ouvrage De la liberté. Si Mill est l'auteur de ce principe, le terme lui-même est dû à Joël Feinberg.

Le Harm principle énonce que la seule raison pour laquelle quelqu'un peut être condamné moralement est s'il a nuit à autrui.

Au-delà de sa simplicité apparente, ce principe pose des questions méta-éthiques cruciales. Mill n'ayant pas précisé exactement ce qu'il entendait par nuire ou par autrui, il s'agit pour ses successeurs de savoir ce que signifie nuire, qui ou quoi peut nuire, et à quel type d'entités (des individus, des groupes, etc.) on peut causer du tort.

Sommaire

[modifier] Responsabilité

Le fait de ne pas nuire à autrui peut se comprendre de deux façons :

  1. Il ne faut pas nuire à autrui par son action
  2. Il ne faut nuire à autrui ni par son action ni par son inaction

La compréhension qu'on a du harm principle modifie le type de responsabilité morale qu'a l'agent. Dans l'acception (1) la responsabilité est uniquement positive : l'agent est responsable de ce qu'il fait, et non de ce qu'il ne fait pas. Dans l'acception (2) la responsabilité sera aussi négative : on sera moralement responsable de ce qu'on ne fait pas.

Bien que Mill considère que les cas de nuisance par inaction soient des « exceptions » à son principe, et qu'il demande avant tout de ne pas nuire directement, les philosophes postérieurs considèrent généralement ces cas plutôt comme une « extension » du principe de non nuisance.

En France, les lois condamnant la non assistance à personne en danger illustrent bien l'idée d'une responsabilité négative. Si l'on n'aide pas une personne en difficulté on lui nuit par inaction, certes on n'agit pas contre elle, mais notre inaction lui nuit. Toutefois si l'on admet une version du harm principle récusant la notion de responsabilité négative, il n'y aura aucun tort moral à ne pas aider une personne en danger.

[modifier] Nuisance

Le harm principle suppose qu'on puisse définir ce qu'est nuire, mais surtout qu'on différencie « nuire » d'autres notions telles que « causer du dommage ».

Si l'on entend « nuire » dans un sens trop large, on tend à s'éloigner du contexte libéral dans lequel s'inscrit le harm principle. On pourrait imaginer que porter un signe religieux au sein d'un groupe d'athées fervents nuit à ces athées ; mais on sort alors du cadre libéral où émerge le principe millien.

Il s'agit aussi de ne pas confondre causer une nuisance et causer du dommage. Lorsqu'on joue à un jeu à un seul gagnant, celui qui gagne cause une forme de dommage aux perdants, mais il ne fait rien d'immoral. Cela sera le cas si l'on soutient que le gagnant nuit aux perdants.

[modifier] Autrui

Le harm principle engage à ne pas causer de tort à autrui. C’est-à-dire à un individu ou a un groupe d'individu. Il n'y a donc pas forcément de tort moral à attaquer des symboles ou des entités abstraites : brûler le drapeau d'un État, détruire des idoles religieuses n'est donc pas nécessairement immoral (selon la compréhension de « nuire » qu'on aura).

La question de savoir qui est autrui est cependant complexe. Par exemple le harm principle ne précise pas si autrui doit être vivant pour qu'on ait une responsabilité morale envers lui. Cela n'est pas aussi absurde que ça parait au premier abord : a-t-on une responsabilité morale envers les morts ? envers les générations futures ? Les réponses varieront selon les « versions » du harm principle que l'on endossera.

[modifier] Voir aussi

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