Gia Long

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Gia Long, né à Hué en 1762, connu dans sa jeunesse comme Nguyễn Phúc Ánh, mort au même endroit le 3 février 1820, seigneur du Sud, premier empereur du Viêt Nam et fondateur de la dynastie impériale des Nguyễn.

[modifier] Biographie

Gia Long est le titre impérial que prit le 31 mai 1802, le prince Nguyễn Phúc Ánh, de la puissante famille des Nguyễn, pour son règne, lors de l'unification de l'empire du Viêt Nam. Celui-ci s'étend alors de la frontière de Lang Son jusqu'à la pointe de Cà Mau sur le golfe de Siam. « Gia Long » résulte de la combinaison de « Gia », de « Gia Ðình », l'ancien nom de Saïgon et « Long », de « Thăng Long », l'ancien nom de Hanoï (Hà-Nội).

À 16 ans, sa famille (qui, depuis le XVe siècle, règne au nom de la dynastie des Lê sur les marches du Sud Viêt Nam) a été renversée par les Tây Sơn, et tous ses parents sont tués. Il se réfugie dans le delta du Mékong et parcourt toute la Cochinchine, gagnant le surnom de « général Gia Ðình ». En 1802, il prend le pouvoir et réunifie le Viêt Nam, séparé par la guerre civile depuis le XVIIe siècle. Pour venger les membres de sa famille tués par les Tây Sơn, il fait torturer et mettre à mort ses ennemis, comme la générale Bùi Thị Xuân, le fils de l'empereur Quang Trung, le roi Nguyễn Quang Toản, etc. Pour des raisons politiques, il n'hésite pas non plus à tuer les gens qui l'ont servi avec dévouement lorsqu'il était encore un jeune prince, Nguyễn Văn Thành ou encore Ðặng Trẫn Thường. C'est pour cette raison qu'on le compare souvent à Lưu Bang, le grand empereur des Han ayant réservé le même traitement à l'égard de ses anciens compagnons de route. Néanmoins, il sait faire preuve de justice et de pitié : ayant appris que Nguyễn Văn Thành était en fait innocent du crime dont on l'accusait, il donne l'ordre de libérer sa famille et restitue à celle-ci tous les biens et les titres confisqués.

On trouve aussi son attachement profond à la vie de ses subordonnés à travers le message qu'il avait adressé à son beau-frère, le général Võ Tánh chargé de défendre Qui Nhon, ou à l'évêque Pigneau de Béhaine, son père spirituel et son conseiller militaire, à travers la cérémonie organisée à la mort de ce dernier. Il était aussi un guerrier séducteur. Ses égards envers la reine Ngọc Bích, la dernière fille du dernier roi de la dynastie Lê, femme de son adversaire, le jeune roi Canh Thình (fils du roi Quang Trung) est exemplaire. Elle devient ensuite sa première concubine, et en a deux garçons. C'est en son honneur que naquit ce dicton vietnamien :

« Số đâu mà số lạ lùng
Con vua mà lấy hai chồng làm vua<
(Le sort est tellement bizarre
La fille du roi est mariée deux fois avec deux rois). »

En 1787, un traité alliant la France et le Viêt Nam est paraphé à Versailles par le comte de Vergennes et le comte de Montmorin pour le roi Louis XVI, et par son fils Nguyễn Phúc Cảnh assisté de l'évêque d'Adran, Pierre Joseph Georges Pigneau de Behaine. Malgré le traité, la collaboration d'un grand nombre d'officiers français dans ses rangs, et l'intérêt qu'il porte aux sciences et aux techniques de l'Occident, Gia Long continue à adopter une politique très ambiguë envers les Européens, en particulier envers les missionnaires.

À travers la construction de la Cité pourpre, le maintien du système des mandarins, la réforme du code des Lê basé sur celui des Qing en Chine, il apparaît comme un admirateur de la dynastie des Ming et des Qing, un confucianiste convaincu et un empereur plutôt réactionnaire. À la fin de son règne, il entame ainsi une politique de repli en choisissant comme successeur le prince Nguyễn Phúc Ðảm, soutenu par la plupart des mandarins confucianistes, au lieu des enfants du prince Cảnh, mort prématurément de maladie. Ce prince, connu sous le nom de règne Minh Mạng, n'hésite pas par la suite à faire mourir les enfants et la femme de Cảnh (Mỹ Ðường) et donne une raison aux Européens, en particulier au gouvernement français d'intervenir militairement, en menant une politique délibérément anti-occidentale et anti-catholique et en renouant ainsi avec une politique d'alignement sur les lignes directrices de la politique chinoise.

Nguyên Anh aurait pu devenir un grand empereur, à l'image d'un Meiji japonais. Il avait l'avantage d'être entouré par un grand nombre de français, y compris son médecin particulier. Il avait un esprit très ouvert aux avancées techniques occidentales. Le Viêt Nam perdit là une belle occasion d'entrer dans une ère de modernisation.

En effet, alors qu'il modernisait fortement son armement (les forteresses de style Vauban qui parsèment le pays datent de son époque, et l'empire comptait plus de pièces de canonerie que la France à la même période), il s'acharna à détruire les structures traditionnelles du Viêt Nam pour les aligner sur celles de la Chine :

  • perte de la personnalité juridique pour les femmes et interdiction de l'accès à l'éducation (interdiction de leur apprendre à lire et écrire), aux postes de fonctionnaires civils et militaires (précédemment seuls les postes d'eunuques de Palais impérial étaient réservés à des hommes),
  • établissement d'un service militaire obligatoire pour les hommes de 16 à 60 ans, d'une durée de 6 mois par an, hors de leurs régions d'habitation, entraînant une forte déstructuration des familles, qui restent à la merci des fonctionnaires (puisque les femmes n'ont plus aucun droit juridique, les familles sont donc sous tutelle directe de l'administration)
  • légalisation de l'esclavage commercial alors qu'il était précédemment essentiellement une peine substitutive à la peine de mort
  • destruction de la structure en « 3 armées » qui permettait une certaine indépendance des populations (diminuant des risques de révoltes face aux éventuels abus des gouvernants) mais aussi une bonne résistance aux invasions (la totalité de la population était militairement formée depuis l'enfance par le système des « 3 armées »)
  • établissement d'un code le « Hoàng Việt luật lệ » directement inspiré du code chinois des Qing.