Forme transitionnelle (évolution)

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Une forme transitionnelle désigne une espèce d'êtres vivants qui représente une forme intermédiaire dans l'évolution entre deux autres espèces. Dans le langage courant et les médias, on utilise aussi - et à tort - le terme "chaînon manquant" ou encore "maillon". Un fossile transitionnel désigne les restes fossiles d'une forme transitionnelle.

L'évolution des espèces vivantes est un phénomène continu. L'enchaînement des processus d'extinctions et de spéciations, combinés aux hasards de la fossilisation, mènent fréquemment à l'observation d'espaces plus ou moins grands dans les séries fossiles ou dans les arbres phylogénétiques. Certains de ces espaces, particulièrement larges, appellent à la recherche de formes intermédiaires, dont l'existence est prédite par la théorie de l'évolution.

Une forme transitionnelle entre deux taxons conserve à la fois des attributs primitifs du premier groupe tout en présentant des caractéristiques nouvelles qui se retrouveront dans l'espèce vers laquelle il marque la transition. Le concept reste toutefois nébuleux et arbitraire, puisque l'isolation d'une forme transitionnelle n'est possible qu'a posteriori, c'est-à-dire après avoir défini une transition dans un processus évolutif continu. En paléontologie, le fossile transitionnel est un organisme qui représente particulièrement bien la dynamique de cette transformation d'une espèce ancestrale vers une nouvelle. La vision populaire du chaînon manquant résulte donc d'une mauvaise représentation du processus évolutif, qui néglige son aspect continu et buissonant.

Sommaire

[modifier] Évolution humaine

Schéma stéréotypé de la « transition homme-singe »
Schéma stéréotypé de la « transition homme-singe »

Une image courante dit que « l'homme descend du singe ». On a longtemps cru que selon la théorie de Charles Darwin, il devait exister des êtres intermédiaires. Ce besoin d'un chaînon manquant a poussé à de nombreuses recherches. Il est aussi souvent employé comme argument contre la théorie de l'évolution elle-même.

Cette conception « gradualiste » qui verrait les animaux « s'élever » progressivement vers l'espèce humaine au cours de l'évolution est aujourd’hui abandonnées. En fait les biologistes ne considèrent pas que l'homme serait le descendant d’êtres semblables aux singes actuels, mais au contraire que l'homme est « cousin » des chimpanzés, gorilles et autres primates. D’ailleurs, au sens large, les termes « singe » et « primate » incluent l'homme, tout comme « animal » l'inclut (dans tout le reste du texte, on emploie par commodité le sens courant du mot « singe », qui exclut l'homme). Le chaînon manquant n'apparaît alors plus comme un intermédiaire au sens qu'il serait notre « père », le singe étant notre « grand-père », mais serait plutôt le dernier ancêtre commun aux hommes et aux singes.

Le besoin que l'on ressentait de trouver ce chaînon manquant permit à un faussaire de berner les scientifiques en fabriquant l'Homme de Piltdown à partir de morceaux de squelette d'homme et d'orang-outan.

On sait aujourd'hui que l'évolution humaine s'est faite de manière plus buissonnante que linéaire. De plus, les chimpanzés sont plus proches des humains que des gorilles par exemple. Il est impossible de créer un groupe monophylétique (dont les représentants sont plus proches entre eux que de toute autre espèces) de primates qui inclue gorille et chimpanzés et exclue l'homme. L'homme ne descend donc pas du singe mais est un singe. La lignée humaine étant aujourd'hui assez bien connue, il n'y a plus vraiment de vide à combler. Le problème actuel de la paléontologie est plutôt de comprendre comment se sont succédé ces multiples espèces.

En 2004, la découverte du Piérolapithèque en Catalogne a fourni de nouveaux éléments sur la question du dernier ancêtre commun. On a pu dater en effet cette espèce à environ 13 millions d'années.

[modifier] Autre évolution : Les oiseaux

Icône de détail Article détaillé : Histoire évolutive des oiseaux.

Contrairement à une idée reçue largement répandue, les dinosaures n'ont pas disparu lors de la crise K/T d'il y a -65 Ma. En effet, une famille de dinosaures a survécu jusqu'à l'époque actuelle : les oiseaux. L'analyse phylogénétique montre par exemple que les tyrannosaures sont bien plus proche de l'archéoptéryx et des oiseaux actuels que des tricératops[1]. Ainsi, de la même manière que l'homme ne descends pas du singe mais est un singe, les oiseaux ne descendent pas des dinosaures mais sont des dinosaures[2].

[modifier] Dans les œuvres de fiction

Le roman Les Animaux dénaturés de Vercors est basé sur l'hypothèse suivante: et si le chaînon manquant était trouvé non fossile mais vivant? Le problème de savoir s'il s'agit ou non d'un homme au sens d'un être protégé par la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui serait une question sans intérêt pour les paléontologues, se pose alors. Puisque par définition cet être se trouve au milieu entre l'humain et le singe.

Mais Vercors n'est pas le seul à avoir écrit autour du thème du chaînon manquant. Bernard Werber aussi s'y est attelé. Dans "Le Père de nos pères", il met en scène deux journalistes, Lucrèce Nemrod et Isidore Katzenberg, qui se lancent à la poursuite du chaînon manquant.

[modifier] Notes et références

  1. R.O. Prum et A.H. Brush : Les plumes de dinosaures. Pour la Science (juillet-Août 2005), dossier Le Monde des Dinosaures
  2. G. Lecointre et H. Le Guyader 2006 : Classification phylogénétique du vivant. Éd. Belin (3eme ed) ; ISBN 2701142733