Enmerkar et le seigneur d'Aratta

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Enmerkar et le seigneur d'Aratta est un récit légendaire sumérien, basé peut-être sur des faits réels remontant à la première moitié du IIIe millénaire avant J.-C. Il fait partie d'un cycle de récits ayant pour cadre les conflits qui opposent le roi Enmerkar d'Uruk au roi de la ville d'Aratta (quelque part dans le sud-ouest de l'Iran actuel).

Le récit commence par la décision d'Enmerkar, de soumettre la cité rivale d'Aratta. Pour cela, il demande à sa sœur, la déesse Inanna (puisqu'ils sont tous les deux les enfants du dieu-soleil Utu) de l'aider à se faire livrer par le peuple d'Aratta un tribut destiné avant tout à restaurer le temple d'Enki à Eridu, l'Apsû, mais aussi à embellir le sanctuaire de la déesse situé à Uruk. Inanna conseille alors à Enmerkar de dépêcher un héraut, qui traversera les redoutables montagnes séparant les deux cités pour avertir le seigneur d'Aratta. Enmerkar s'exécute, et le héraut franchit les montagnes, arrive à Aratta où il prévient son seigneur (dont le nom ne nous est jamais donné) de livrer le tribut, et d'envoyer son peuple bâtir l'Apsû, sous peine de représailles. Mais ce dernier refuse. Le héraut retourne donc à Uruk, où son maître élabore un stratagème destiné à faire plier son rival.

Enmerkar renvoie le héraut à Aratta, où il récite "l'incantation d'Enki", hymne composé par Enmerkar commémorant ce dieu, dans le but de séduire le seigneur d'Aratta pour qu'il consente à payer le tribut destiné à l'Apsû. Mais ce dernier refuse encore. Enmerkar renouvelle ses menaces, mais le seigneur d'Aratta reste inflexible, se sentant l'égal du roi d'Uruk et se proclame protégé d'Inanna. Mais le héraut lui annonce qu'Inanna l'a abandonné, et est désormais du côté d'Uruk, et à même promis d'aider Enmerkar à soumettre Aratta. Affligé, le seigneur d'Aratta, consent à se soumettre à Uruk, à la seule condition que Enmerkar lui envoie une importante quantité de grain. Celui-ci réfléchit, procède à des rituels, et accepte finalement. Mais il charge son héraut d'augmenter ses exigences en demandant de nouvelles pierres précieuses.

Le seigneur d'Aratta, dans un sursaut d'orgueil, refuse et demande à Enmerkar de lui livrer, lui, ces pierres précieuses. Lorsque le roi d'Uruk apprend cela, il renvoie le héraut à Uruk, sans message, mais avec son spectre. Ceci effraie le seigneur d'Aratta, qui est prêt à céder, mais se ravise, et propose à Enmerkar d'organiser un combat singulier entre deux champions des deux cités, pour déterminer le vainqueur du conflit (qui reste diplomatique). Le roi d'Uruk accepte le défi, mais augmente ses exigences, en demandant au peuple d'Aratta de faire des offrandes importantes pour le temple d'Inanna à Uruk, l'Eanna, ce qui constituerait une humiliation après le soutien apporté par la déesse à Uruk au lieu d'Aratta.

Pour adresser son message, Enmerkar recourt alors à une invention : l'écriture. Le texte précise : "Le clou est enfoncé", ce qui traduit l'acceptation d'une transaction. En effet, l'enfoncement d'un clou en argile était une pratique juridico-magique symbolisant un transfert de propriété (attesté du XXVe au XIIIe siècle avant J.-C.). C'est surtout un véritable piège tendu au seigneur d'Aratta, qui, en acceptant simplement de lire cette ligne, scelle son destin. Il se trouve devant un commandement impérieux auquel il ne peut plus se dérober. La reconnaissance de sa défaite marque aussi le retour des bonnes grâces divines : Arrata reçoit le secours d'Ishkur, le dieu de l'Orage, qui lui offre de grandes quantités de blé. Fort de ce soutien, il peut relever la tête.

La suite du texte est lacunaire. Le peuple d'Aratta livre le tribut à l'Eanna, et fournit les matériaux pour construire l'Apsû.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

  • S. N. Kramer, L'Histoire commence à Sumer, Flammarion, Paris, 1993
  • Jean-Jacques Glassner, Ecrire à Sumer - l'invention du cunéiforme, Seuil, coll. « L'univers historique », Paris, 2000.