Daniel François Malan

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Daniel François Malan
Daniel François Malan

Daniel François Malan (22 mai 1874-7 février 1959) était un homme politique d'Afrique du Sud, membre du Parti national et premier ministre de 1948 à 1954, période pendant laquelle il a fait mettre en place la politique d'apartheid.

Sommaire

[modifier] Origines

Les Malan d'Afrique du Sud sont issus d'une famille de huguenots français qui vont participer activement à plusieurs épisodes de l'histoire du peuple afrikaner jusqu'à la fin du XXe siècle.

Au XVIIe siècle, Jacques Malan qui avait fuit la France après la révocation de l'édit de Nantes s'était réfugié aux Pays-Bas. De là, en 1688, il avait été embarqué de force à bord d'un navire en partance pour la colonie du Cap.

Au Cap, Jacques Malan devint viticulteur. Ses fils construisirent une ferme, Vergelegen, au pied de la montagne de la Table. En 1788, son petit-fils, Dawid Malan (1750-1824), homme fortuné, propriétaire de 50 000 pieds de vignes et colonel dans la milice bourgeoise de la colonie du Cap avait été contraint de s'éloigner de la colonie après avoir été pris en flagrant d'adultère avec l'esclave de l'un de ses voisins, violant ainsi le code moral calviniste [1]. Traité de fornicateur par l'église, repoussé par sa femme, il s'enfuit avec sa maitresse dans l'intérieur des terres. Condamné pour vol d'esclaves, il était banni de la colonie du Cap alors que son père, disgracié, le reniait. Dawid Malan franchit la Great river Fish et explora les territoires xhosas. Sa vie à la frontière le transforma. Quelques années plus tard il s'établissait comme fermier et prenait une nouvelle épouse qui lui donnerait plusieurs enfants

En 1815, Dawid Malan participa à la révolte boer de Slagters Neck après la mort du jeune fermier Frederic Bezuidenhout qui avait refusé de comparaitre devant un tribunal britannique. Malan fut inculpé de haute trahison.

En 1838, Hercule Malan, l'un des fils de Dawid Malan, était l'un des Voortrekkers du Grand Trek. Il fut tué avec Piet Retief sous les sagaies des impies du Roi Dingane et empalé, le crâne écrasé à coups de pierre et sa dépouille laissée en pâture aux vautours sur le flanc d'une colline [2]. Son frère Jacob Jacobus Malan vengea Retief et ses compagnons à la bataille de Blood River après avoir prêté serment à Jéhovah au côté de Sarel Cilliers.

Ses fils, Jacobus et Hercule Malan furent co-fondateurs des républiques boers au côté d'Andries Pretorius.

En 1881, Hercule Malan participa à la bataille de Majuba durant la première guerre des Boers à la tête d'une armée composée de garçons de ferme et de vieilles barbes. Lors de le seconde guerre des Boers, un autre Malan, le général Wynand Malan, mena des commandos de résistance en territoire ennemi.

[modifier] Un nationaliste afrikaner

D.F. Malan est né le 22 mai 1874 à Riebeeck West, colonie du Cap et effectue ses études supérieures aux Pays-Bas.

Diplômé de l'université d'Utrecht en 1905, il est ordonné pasteur de l'église réformée hollandaise et exerce pendant plusieurs années son sacerdoce aussi bien au Congo belge qu'en Rhodésie du sud.

Nationaliste afrikaner, il est d'abord un "rénovateur utopiste enclin à qualifier le socialisme d'appel passionné et impérieux à la justice, de force morale plus puissante que la fureur d'un ouragan" [3]. Il soutient James Barry Hertzog lors de sa rupture politique avec le premier ministre Louis Botha et le suit au tout nouveau Parti national en 1914.

En 1915, il est le rédacteur en chef du nouveau journal nationaliste Die Burger.

[modifier] Un homme politique influent du Parti National

En 1918, leader du parti dans la Province du Cap, membre de l' Afrikaner Broederbond (ligue des frères afrikaners), il est élu au Parlement. Ses discours sont alors centrés sur le rejet de l'impérialisme britannique. La question raciale n'est pas alors au centre des préoccupations politiques des blancs sud-africains. La préoccupation majeure des Afrikaners qui soutiennent le parti national est de déchirer l'Union Jack, de ressusciter les républiques boers et d'extirper le volk (le peuple afrikaner) de sa misère [4].

En 1924, DF Malan est nommé ministre de l'intérieur dans le nouveau gouvernement d'Hertzog.

En 1925, il défend au parlement avec succès la substitution du néerlandais par l'afrikaans comme langue officielle au côté de l'anglais.

[modifier] Le leader du Parti National purifié

En 1933, il est opposé à l'union nationale et à la fusion du Parti national avec le Parti sud-africain de Jan Smuts.

En 1934, avec 19 députés, il refuse de rejoindre le nouveau Parti Uni de Hertzog et Smuts et prend la tête d'un « Parti National Purifié ».

Lors des élections de 1938, le Parti National Purifié gagne une dizaine de sièges et confirme son statut d'opposition officielle. Malan est confortablement réélu dans sa circonscription de Calvinia (province du Cap).

En 1939, Malan s'oppose à l'entrée en guerre de l'Afrique du Sud au côté des Britanniques et opte pour la neutralité. Il apporte alors le soutien de son groupe parlementaire à Hertzog mais celui-ci est mis en minorité au sein de son propre parti.

Hertzog démissionne de ses responsabilités gouvernementales et quitte le Parti Uni avec ses quelques fidèles pour rejoindre brièvement le Parti national "réunifié".

En 1942, Malan rédige un projet de constitution publié dans les deux quotidiens de langue afrikaans (Die Burger au Cap et Die Transvaaler à Johannesburg) où il évoque la ségrégation territoriale et l’inégalité entre Blancs et non-Blancs sur la base d'un "paternalisme chrétien", plaçant les premiers au-dessus des seconds.

Lors des élections de 1943, en remportant 42 sièges (+ 16) et 36% des suffrages, Malan gagne son bras de fer contre les dissidences de droite, dont celle de Oswald Pirow, alors que le Parti Uni de Smuts confirme sa domination sur la vie politique sud-africaine (105 sièges).

[modifier] Le premier ministre de l'apartheid (1948-1954)

En 1948, le Parti National, allié au Parti Afrikaner de Nicolaas Havenga, gagne les élections générales contre le Parti Uni de Smuts en proposant l'instauration de l'apartheid, un programme opposé au concept d'égalité, et qui prolonge à l'extrême la "Colour Bar", en vigueur dans la plupart des colonies britanniques, et qui réglementait les relations interraciales.

Malan est nommé premier ministre le 4 juin 1948. Il nomme dans son gouvernement exclusivement des Afrikaners, notamment Hendrik Verwoerd qui met en place les principes de développement séparé des races. Tous les nouveaux ministres sont aussi membre de l'Afrikaner Broederbond, à l'exception de deux d'entre eux, Eric Louw et Nicolaas Havenga.

C'est sous son mandat que l’arsenal législatif de l’apartheid est mis en place, visant à préserver l’identité du « Volk » (le peuple afrikaner). Ainsi, le refus de toute mixité génétique et racial est inscrite dès la loi de 1949 sur l’interdiction des mariages interraciaux (illégaux, ils sont passibles des tribunaux) et celle de 1950 sur l’interdiction des relations sexuelles interraciales. En 1950, le "Groups Areas Act" (la loi fondamentale de l'apartheid) renforce la ségrégation résidentielle au prix du déplacement de centaines de milliers de personnes. La même année, une loi sur l’immatriculation de la population ("Population Registration Act") institutionnalise la classification raciale pour chaque habitant du pays.

En 1951, le Parti Afrikaner d'Havenga fusionne avec le Parti National Purifié de Malan pour former le Parti national qui remporte les élections générales.

En 1953, c'est au tour des lieux publics d'être codifiés racialement.

Mais assez curieusement, alors qu'il est encore premier ministre, Malan émet des réserves sur certains aspects systématiques de l'apartheid.

Bénéficiant d'une longue carrière politique, il est également plus rompu aux négociations et aux compromis avec ses adversaires que ne le seront ses successeurs immédiats. Ainsi, il n'ignore pas l'opposition parlementaire et assiste à la première cinématographique à Johannesburg de l'adaption de "O pleure mon pays bien-aimé" au côté de son auteur, l'écrivain progressiste et député libéral Alan Paton. Il renonce également à militer pour l'instauration de la république pour se concilier les anglophones à qui il avait fermé les portes de son gouvernement. Enfin, il se rapproche de Nicolaas Havenga, le ministre le plus modéré et le plus critique de son gouvernement, hostile au retrait du droit de vote des métis.

Le 30 novembre 1954, Malan, malade, ayant estimé son œuvre achevé, se retire de la politique. Son dernier acte public est de soutenir Nicolaas Havenga pour lui succéder au poste de premier ministre contre Johannes Strijdom, un ardent républicain nationaliste du Transvaal. Mais c'est ce dernier qui est choisi par le parti pour lui succéder à la tête du gouvernement.

Daniel François Malan meurt le 7 février 1959 à Stellenbosch.

[modifier] Postérité

L'aéroport international du Cap portera son nom jusqu'en 1995. De nombreuses artères continuent de l'honorer aujourd'hui même si son nom figure sur la liste noire de l'ANC.

Au début des années 2000, l'avenue « DF Malan Drive » à Johannesburg est débaptisé pour porter dorénavant le nom de Beyers Naudé, un autre pasteur de l'église réformée hollandaise, mais lui, opposé à l'apartheid.

Néanmoins en 2004, DF Malan figure en 81e position dans la liste des 100 plus grands sud-africains de tous les temps, devançant James B. Hertzog (83) et Pieter Botha (87).

En 1993, Rian Malan exposera dans un livre « Mon cœur de traitre » les difficultés existentielles de porter ce patronyme, symbole de la ségrégation, dans la nouvelle Afrique du Sud.

[modifier] Citations

  • « L’apartheid n’est pas la caricature sous les traits de laquelle on l’a si souvent représenté. Bien au contraire, il signifie pour les non-Européens une large mesure d’indépendance, car il les habitue à ne compter que sur eux-mêmes et développe leur dignité personnelle. Il leur offre, en même temps, une plus grande possibilité de se développer librement, conformément à leur caractère et à leurs capacités (...) Pour les deux races, il signifie des relations mutuelles pacifiques et la coopération en vue de leur prospérité commune. Le gouvernement s’efforcera, avec résolution et détermination, d’aboutir à la réalisation de cet heureux état de choses ». Daniel Malan lors d'une allocation radio diffusé en juin 1948.

[modifier] Notes

  1. Il eut un enfant métis avec cette esclave
  2. Rian Malan, Mon coeur de traitre, p 12
  3. Rian Malan, p 33
  4. Rian Malan, p 35

[modifier] Bibliographie

  • Rian Malan, Mon cœur de traître, Plon, 1991 (sur les origines de la famille Malan)

[modifier] Liens externes

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