Corps de rupture

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En mathématiques et plus précisement en algèbre dans le cadre de la théorie de Galois un corps de rupture d'un polynôme à coefficients dans un corps K est une extension algébrique de K contenant au moins une racine du polynôme.

Les corps de ruptures ne sont pas en général ceux utilisés dans le contexte de la théorie de Galois, car ils ne possèdent pas les bonnes propriétés nécessaires pour appliquer le théorème fondamental de la théorie de Galois. En revanche ils sont une étape dans la construction des corps de décompositions, qui eux dans le cas où le critère de séparabilité est assuré permettent d'appliquer le théorème fondamental.

Sommaire

[modifier] Motivation

Soit K un corps et P(X) un polynôme à coefficient dans K. une question naturelle se pose, existe-t-il une extension algèbrique L du corps K contenant une ou plusieurs racines du polynôme? La réponse est positive, de plus il est possible de construire une extension finie ayant ces propriétés. Cette extension s'appelle un corps de rupture.

La technique utilisée consiste à quotienter l'anneau des polynômes par un idéal principal et plus précisement par un idéal maximal, c’est-à-dire un idéal contenu dans aucun autre idéal que l'anneau K[X]. Cette technique permet de construire un nouveau corps. Il est alors nécessaire d'identifier le corps K avec un sous-corps de L pour permettre au polynôme d'opérer sur L.

Soit (L, j) une extension de corps d'un corps K et P(X) un polynôme à coefficients dans K. Si l'on note K* l'image de K par j, alors il existe un isomorphisme φ naturel de K[X] dans K*[X] défini par:

Soit \; (a_i) \in K^n \; tel \,que \; P(X)= \sum_{i \in [1,n]} a_i X^n \; alors \; \varphi(P)(X) = \sum_{i \in [1,n]} j(a_i) X^n

L'identification de K et K* permet d'identifier K[X] et K*[X] à travers l'isomorphisme d'anneau φ. P(X) apparaît alors comme un élément de L[X] à coefficients dans K inclus dans L. Un polynôme de K[X] opère donc naturellement sur L. Il est alors possible de parler de racine de P(X) dans L.

Si un corps de rupture possède le mérite d'exister, en revanche il ne contient pas, en général l'intégralité des racines de P(X). Il apparaît alors nécessaire de réitérer l'opération jusqu'à ce qu'une extension algébrique contenant toute les racines soit construite. On parle alors de corps de décomposition.

[modifier] Définitions

Soit K un corps et P(X) un polynôme à coefficients dans K.

Une définition généralement admise est la suivante[1] :

On démontre que tout corps de rupture contient un sous-corps isomorphe au quotient de K par l'idéal engendré par P(X). Pour cette raison, le terme corps de rupture désigne alors tout sous-corps isomorphe à ce quotient. L'expression : le corps de rupture désigne toujours un corps de cette nature[2].

Elle contient néanmoins une ambigüité. L'expression corps de rupture est aussi utilisée dans le cas où le polynôme P(X) n'est pas irréductible. Dans ce cas, l'unicité de l'extension minimale n'est plus garantie. Ainsi, dans Q[X] (ici Q désigne le corps des nombres rationnels), le polynôme X4 - X2 - 2 possède deux corps de rupture de dimension minimale : Q[i] et Q[√2].

[modifier] Exemples

Soit dans le corps des nombres réels, le polynôme X2 + 1. Dans son corps de coefficients, le polynôme ne contient aucune racine. En effet, tout carré du corps des nombres réels est positifs. Un corps de rupture naturel de ce polynôme est celui des nombres complexes.

Soit dans le corps des nombres rationnels le polynôme X3 - 2. L'extension de corps engendrée par r la racine cubique de deux. C'est une extension qui apparaît comme un espace vectoriel de dimension trois ayant comme base (1, r, r2). Cependant cette extension ne contient pas toutes les racines du polynôme en effet, il en existe deux ayant une composante complexe et qui ne sont pas élément du corps.

[modifier] Propriétés

  • Soit P(X) un polynôme irréductible de degré n sur K, alors il existe un corps de rupture L. Sa dimension est égale au degré du polynôme.
  • Soit P(X) un polynôme sur K, alors il existe un corps de rupture L sur K.

Soit L le corps de rupture d'un polynôme irréductible P(X) de degré n, alors la première proposition nous assure qu'il existe un corps de rupture. Il existe aussi des sous-corps de la clôture algébrique Ω contenant une racine de P(X). La clôture algébrique d'un corps est un sur-corps de K tel que tout les polynômes à coefficients dans le sur-corps soit scindé, c’est-à-dire se décomposent en produit de polynômes du premier degré. Si α est une racine de P(X) dans Ω alors K[α] est aussi un sur-corps de K contenant une racine du polynôme. La proposition suivante établit le lien entre le corps de rupture et les sous-corps de la clôture algébrique isomorphe au corps de rupture.

  • Il existe au plus n morphismes de L dans Ω. Si P(X) est un polynôme séparable, alors il existe exactement n morphismes.

Une polynôme est dit séparable s'il n'admet pas de racine multiple. C'est en souvent le cas pour un polynôme irréductible, c'est toujours vrai pour les corps des nombres rationnels des nombres réels ou pour les corps finis. La dernière propriété est démontrée dans l'article sur les extensions séparables.



[modifier] Voir aussi

[modifier] Référence

  1. Cette définition est par exemple celle donnée dans notion de théorie des corps de D. Harari ou encore celles de mathématiques.net
  2. Cette deuxième définition est enseignée en université, on la trouve par exemple dans un cours sur les corps finis de l'Université de Nice, dans une feuille d'exercice de l'Université Denis Diderot, c'est aussi la définition qu'en donne Espacemath

[modifier] Liens externes

[modifier] Références

R. et A. Douady Algèbre et théories galoisiennes Cedic/Fernand Nathan 1978
S. Lang Algebre Dunod 2004
P. Samuel Théorie algébrique des nombres Hermann Paris 1971
Articles de mathématiques en rapport avec la Théorie de Galois
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