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[modifier] Pas de Gays en Iran... mais nombre de couples homosexuels

New America Media, Commentary, William O. Beeman, Posted: Sep 26, 2007

Note de l'Éditeur: le commentaire du président iranien Mahmoud Ahmadinejad selon lequel l'homosexualité ne prend pas en Iran la même forme qu'en Occident est vrai d'une certaine façon, écrit l'anthropologue William Beeman. En fait, les relations homosexuelles en Iran sont vraiment très différentes de ce que l'on appelle "être gay" en Occident.

La déclaration du président iranien Mahmoud Ahmadinejad du 24 septembre à l'université de Colombia, selon laquelle l'homosexualité n'existe pas en Iran, a été tournée en dérision. Bien que cela puisse sembler incroyable à bon nombre d'Américains, il existe des différences culturelles dans la mise en place du comportement sexuel.

En tant qu'anthropologue, je peux attester que la sexualité varie considérablement entre les cultures. La notion d'être "homo" ou "hétéro" ne concorde pas avec ce que l'on observe du comportement sexuel humain, qui est beaucoup plus nuancé. Cette catégorisation est un artefact de la culture américaine, qui se glorifie de classer les gens en catégories binaires. Ceux qui se déclarent "bissexuels" (autre catégorie ambigüe) aux États-Unis sont souvent pris à partie par les deux communautés, gay et hétéro, qui leur reprochent un manque d'honêteté quant à leur sexualité.

Bien sûr, il est impossible de savoir précisément ce que cette remarque du président Ahmadinejad voulait dire. Mais ce qui est sûr, c'est que la mise en place du comportement homosexuel et plus encore, de l'affection homosexuelle est extrêment différente entre l'Iran et l'Europe ou l'Amérique. On a assisté à l'émergence d'une culture gay à l'occidentale en Iran - bar et clubs gays - mais c'est un phénomène très récent, limité aux classes privilégiées et probablement inconnu du président Ahmadinejad, issu du milieu des classes moyennes, voire défavorisées. Ce phénomène gay à l'occidentale est récent, et différent de la pratique homosexuelle traditionnelle en Iran. En fait, il n'y avait même pas de mot pour "homosexualité" en persan avant le 20ème siècle. Il a du être inventé. Le terme employé par le président Ahmadinejad est "hamdjensbâz", un néologisme qui signifie littéralement "jouer avec le même sexe".

En Iran, le comportement homosexuel est subdivisé de manière stricte en rôles actif et passif. Les termes arabes "fâ'el" et "maf'oul" (actif et passif, termes grammaticaux utilisés en fait pour décrire les aspects des verbes) étaient communément employés pour désigner ces rôles. Le partenaire passif est encore désigné par le terme arabe "obneh", ou plus crûment "kouni" (koun signifie anus). La différence actif-passif dans l'homosexualité est bien connue en Occident, mais elle est construite de manière bien différente en Iran et dans d'autres cultures arabes et méditerranéennes.

Les partenaires actifs en Iran ne se considèrent pas comme homosexuels. En fait, c'est une espèce d'auréole macho dans certains milieux que d'avoir joué le rôle de partenaire actif avec un autre homme. Les partenaires passifs sont dénigrés et portent des stigmates à vie si leur rôle sexuel est dévoilé, même si ça n'est arrivé qu'une seule fois. Ils ont été déflorés, comme les femmes perdent leur virginité, et sont considérés comme "kharâb", ou détruits.

En réalité, beaucoup d'hommes couchent à droite et à gauche, mais si l'on apprend qu'ils ont eu des relations avec un autre homme, ils affirmeront en public qu'ils étaient le partenaire actif. Les relations homosexuelles entre femmes ont également lieu, mais elles restent très secrètes en Iran, et on en parle quasiment jamais.

Les relations sentimentales sont très différentes. Hommes et femmes peuvent développer, à titre exceptionnel, un attachement à une personne du même sexe, à un point tel que des Occidentaux jureraient qu'ils ont des relations sexuelles. Mais ce n'est pas nécessairement le cas. S'embrasser, se tenir les mains, pleurer, être jaloux, avoir des contacts physiques et autres signes de relation est possible sans activité sexuelle, et même avec une appréhension totale de celle-ci, à cause de la catégorisation actif-passif dans la relation sexuelle et de la peur de l'homme traité en partenaire passif. Un homme qui en aime vraiment un autre ne veut pas l'abaisser au rang de partenaire passif.

Plus communément, des adolescents développant une relation sentimentale peuvent épouser des sœurs de façon à se créer un lien durable. Il y a même une cérémonie de quasi-mariage basée sur l'idée de "mouta", ou mariage temporaire, par le biais de laquelle deux hommes ou deux femmes peuvent devenir des "parents" fictifs. Cela résoud beaucoup de choses, permettant des relations intimes au sein même des relations familiales, mais cela impose également un tabou encore plus fort sur les relations sexuelles, qui seraient alors considérées comme un inceste.

Il arrive à des Iraniens qui viennent en Europe et aux États-Unis de "découvrir" qu'ils sont gay après s'être libérés du système culturel rigide qui les classait obligatoirement dans un rôle actif ou passif.

Il est certain que la sodomie est passible de la peine de mort en Iran, mais de telles exécutions ont été historiquement extrêmement rare en comparaison de la pratique homosexuelle en Iran. On a beaucoup parlé des deux garçons qui ont été exécutés à Machhad il y quelques années pour "avoir été homosexuels", selon la presse occidentale. Cependant, ils ont été exécutés pour avoir commis un viol sur un mineur. Le père de la victime, poussé par la rage et le chagrin, avait porté plainte. Dans la plupart des cas, la honte de la victime et de sa famille est telle que personne n'en parle.

En fin de compte, l'Iran, tout comme les États-Unis, catégorise la sexualité d'une façon qui ne correspond pas aux inclinations humaines. Cependant, il ne fait aucun doute que les deux systèmes sont très différents.

William O. Beeman est professeur au département d'anthropologie de l'université du Minnesota. Il a effectué des recherches en Iran pendant plus de 30 ans et parle le persan couramment. Il est l'aueur de "Langage, staut et pouvoir en Iran" ainsi que de "Le grand Satan contre les mollahs fous : comment les États-Unis et l'Iran se diabolisent mutuellement".