Taxe carbone

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La taxe sur les émissions de carbone ou taxe carbone, également appelée fiscalité carbone, contribution climat-énergie[1], ou encore prime d'assurance carbone par ses défenseurs comme Jean-Marc Jancovici[2], est une proposition de taxe sur tous les combustibles fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel, etc...) avec un taux variable. Ce taux dépendrait principalement, voire exclusivement, du contenu en carbone du combustible considéré, et donc des émissions de dioxyde de carbone (CO2). Cette taxe serait en augmentation douce et progressive d'année en année. Cette mesure s'inspire des propositions faites dans les années 1920 par l'économiste libéral néoclassique Arthur Cecil Pigou[3], et peut donc être qualifiée de taxe pigouvienne.

La proposition a été reprise en France depuis quelques années et a envahi le débat politique par son inscription dans les cinq propositions du Pacte écologique de Nicolas Hulot.


Sommaire

[modifier] Objectifs de la taxe carbone

Ses défenseurs en France, Jean-Marc Jancovici[4], Nicolas Hulot[5] et Marcel Robert[6], insistent sur le fait que la taxe carbone poursuit deux objectifs de sauvegarde des hommes et de la planète :

  • Réduire les émissions de CO2, gaz à effet de serre, pour limiter les catastrophes promises par le réchauffement climatique.
  • Préparer en douceur la société à un épuisement progressif, inéluctable, des ressources en énergies fossiles.
  • Et, accessoirement, servir de tampon à l'augmentation sans doute brutale et aléatoire du prix de combustible comme l'essence dans un futur incertain mais probablement proche.


[modifier] Nécessité de la taxe carbone

Les défenseurs de la taxe carbone expliquent que toutes les incitations, subventions, mesures pour inciter les consommateurs et les entreprises à des comportements vertueux dans des domaines précis pris isolément, ne pourront avoir qu'un impact extremement limité, car ce qui est économisé d'un coté est toujours transferé ailleurs, par exemple :

  • « La surface habitable par français est passée de 25 à 35 m2 entre 1975 et 2000 et, en tenant compte de l'augmentation de la population pendant cet intervalle de temps, la surface totale de logements à presque doublé. De ce fait, malgré une consommation de chauffage au m2 divisée par deux, la consommation globale d'énergie de chauffage en France n'a pas baissé : la meilleure isolation des logements n'a pas été affectée à une baisse de la consommation, mais à une augmentation des surfaces chauffées. »[4]
  • Il faut moins de kérosène qu'avant pour faire voler un avion de 300 places, mais il en vole considérablement plus, car le prix du billet est devenu de plus en plus accessible.
  • Les voitures sont assurément plus économes aujourd'hui qu'il y a 30 ans, et le seront plus encore demain... mais le nombre de voiture sur la planète aura doublé ou triplé...
  • Les réfrigérateurs d'aujourd'hui sont une merveille d'économie comparé aux monstrueuses machines polluantes qu'ils étaient dans les années 60 mais... le réfrigérateur de 150L a été troquée contre un autre de 350L trés économe, auquel on a adjoint un congélateur assurément économe (prés de la moitié des ménages français en possèdent un, contre quasiment 0% en 1973), ainsi que pleins d'autres appareils trés économes...


Les défenseurs de la taxe expliquent donc que le determinant principal de la consommation globale d'énergie fossile, ce n'est pas les performances des objets qui en consomment, mais « le prix de l'énergie fossile ramené au pouvoir d'achat »[4], et ainsi, que si nous voulons économiser volontairement l'énergie fossile, nous devons désirer une hausse de son prix en termes réels. C'est à ce seul prix que les progrès techniques seront affectés à une baisse de la consommation globale d'énergie fossile.

[modifier] Propriétés fondamentales

Pour être efficace sur les objectifs, la taxe carbone devrait avoir plusieurs propriétés fondamentales :

  • Être planifiée et annoncée très longtemps à l'avance (par exemple sur 15 ans) afin que les citoyens comme les entreprises puissent la prendre en compte dans leurs projets d'avenir sans avoir à en souffrir (notamment par le choix des moyens de transport les moins polluants).
  • Être en croissance lente, progressive mais perpétuelle. Cette croissance devrait être supérieure à celle du pouvoir d'achat : c'est en effet le seul moyen efficace de dissuader l'usage des énergies qui accélèrent le changement climatique. Il faut, comme l'explique Jean-Marc Jancovici, « monter le prix de ce qui pose problème, plus vite que notre pouvoir d'achat » [2].
  • Être appliquée autant que possible à tous les combustibles: essence, fioul, kérosène, gaz naturel, etc... et pourquoi pas aussi aux autres sources d'émissions de gaz à effet de serre comme le méthane émis par l'élevage. (Lequel représente 5 à 10% des émissions de gaz à effet de serre francaises en équivalent CO2)
  • Être régulée pour permettre de garder autant que possible une augmentation lente et régulière du prix des ressources fossiles : C'est à dire, jouer le rôle de tampon lors de variations rapides du coût international du pétrole (si le coût international du pétrole augmente très vite temporairement, la marge de la taxe est diminuée temporairement pour absorber cette augmentation brusque. A l'inverse, si le coût international du pétrole diminue un peu temporairement la marge de la taxe est augmenté.)


(Note : Dans le contexte recent de l'augmentation du prix du baril de pétrole en 2007/2008, le prix de l'essence augmente déjà plus vite que le pouvoir d'achat.)

Le revenu de la taxe carbone serait utilisé pour faciliter la transition de la société vers une consommation plus sobre, dégageant moins de CO2.

[modifier] Pays appliquant des fiscalités ressemblant un peu à la taxe carbone

[modifier] Suède

Premier exemple observé. La taxe fut introduite dès 1991. Il s'agit en réalité d'une contribution tarifiée selon la quantité de combustibles consommée (hydrocarbures, gaz naturel et charbon). La réforme fut introduite parallèlement à des baisses des autres taxes sur la consommation de combustibles afin que le prix pour le consommateur ne varie pas, ce qui limita la lisibilité du système. De fortes exonérations furent également consenties aux industries (seulement 25% des taux, puis 50% aujourd'hui encore).

[modifier] Danemark

Seul exemple d'application du concept de taxe carbone avec un taux réellement modulé. L'impôt s'applique à tous (administrations, entreprises, ménages) et repose sur la quantité de combustibles et d'électricité consommés. Le taux est modulé selon le niveau d'émission en CO2 des produits.

Le principal défaut de ce dispositif est son coût de gestion (2% du produit).

[modifier] Allemagne

Les taxes reposant sur les combustibles et l'électricité ont été relevées depuis la fin des années 1990. Mais le taux n'est pas modulé selon les émissions en CO2, et le charbon n'est pas concerné, ce qui ne correspond pas exactement au concept initial.

Des résultats intéressants ont été observés (baisse de la consommation, notamment pour les carburants : -12% pour l'essence et -2% pour le gazole entre le premier semestre 1999 et le premier semestre 2001). Ceux-ci peuvent cependant être au moins partiellement attribués à la hausse du prix du baril, et à la réévaluation du dollar entre 1999 et 2001.

[modifier] Royaume-Uni

Le Climate Change Levy créé en avril 2001 est assis sur la consommation des industries et des commerces, ainsi que du secteur public. Les ménages ne sont donc pas concernés (mais furent touchés par une hausse des accises sur les hydrocarbures de 5 à 6% par an entre 1993 et 2000). Il s'agit cependant d'un dispositif mixte entre la taxe carbone et une taxe sur l'énergie, puisque la production d'électricité nucléaire ou hydraulique n'est pas exclue du dispositif (contrairement aux énergies renouvelables et à la cogénération).

Les émissions en CO2 de l'industrie britannique ont diminué au-delà des objectifs fixés par accords sectoriels, et ce dès 2002.

[modifier] Autres

La Finlande, la Norvège, les Pays-Bas ont également introduit des mesures comparables. La Nouvelle-Zélande devait l'adopter mais a fait marche arrière fin 2005 après un changement de majorité parlementaire.

[modifier] Pays réfléchissants à l'instauration de la taxe carbone

[modifier] France

Le gouvernement français a, à travers le Grenelle de l'environnement, decrété la « mise à l'étude » de la taxe carbone, mais ne l'a pas validée, alors qu'elle faisait partie intégrante du Pacte écologique de Nicolas Hulot, que tous les partis politiques importants ont par ailleurs signés en 2007, pendant la campagne présidentielle. Les membres du gouvernement sont donc accusés de trahir leurs engagements vis-à-vis du Pacte écologique.

[modifier] Citations

  • « Si on n’augmente pas le prix de l’énergie, on se dirige droit vers une dictature. » Marcel Boiteux, directeur de L'EDF de 1967 à 1987.[7]
  • « Au stade individuel, qu'est-ce que chacun de nous peut faire, trés concretement, pour aider au "mieux-être" de la planète ? » demande Marie Drucker, dans son documentaire Pour quelques degrés de plus sur France 3, à Jean-Marc Jancovici. Celui-ci répond : « Ma réponse va peut-être vous surprendre, mais ce qu'on peut faire de mieux, c'est que la prochaine fois qu'un sondeur passera nous demander si on est pour ou contre une hausse programmée du prix de l'essence, qu'on lui dise qu'on est pour. »[2]

[modifier] Liens internes

[modifier] Sources

[modifier] Notes

  1. Grenelle de l'environnement Pacte écologique de Nicolas hulot
  2. abc Interview de Jean-Marc Jancovici sur France 3 dans lequel il explique la taxe carbone
  3. Arthur Cecil Pigou, The Economics of Welfare, 1920
  4. abc Jean-Marc Jancovici et Alain Grandjean, Le plein s'il vous plaît ! - La solution au problème de l'énergie, (ISBN 978-2020857925).
  5. Pacte écologique 2007 de Nicolas Hulot
  6. Pour en finir avec la société de l'automobile de Marcel Robert
  7. LA TAXE CARBONE, SVP

[modifier] Liens externes


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