Suzanne Ramon

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Suzanne Ramon est une violoncelliste née à Budapest.

Dès 8 ans, elle intégrait l'Académie Ferenc Liszt avec dispense d'âge, avant de remporter, à 10 ans, le prix Béla Bartok. Mais ses 10 ans, c'était en 1956, le bouleversement, la terreur, - et l'exil. Sa famille parvient à émigrer en Israël et la petite Shoshana, comme on l'appelle alors, continue passionnément à confier ses sentiments à son violoncelle et même, dès 13 ans, à les partager avec le public : c'est en effet à cet âge qu'elle fait ses débuts au Palais des Arts de Tel-Aviv, avec rien moins que le Concerto de Schumann. En 1962 elle reçoit une bourse pour venir travailler à Paris avec le grand André Navarra au Conservatoire national supérieur de musique. C'est pour elle une révélation qui comptera.

La jeune Suzanne arrive dans la capitale française : le pianiste hongrois Georges Cziffra, impressionné par ses dons « hors du commun », l'accueille, l'héberge, la traite comme sa propre fille.

Nous sommes en 1964 : au Conservatoire de Paris, Suzanne Ramon remporte le Premier Prix de violoncelle à l'unanimité, elle est lauréate du Concours international de Genève, se voit décerner le Grand Prix Oreste Ferrari en Italie où elle sera également lauréate de l'Académie Chigiana de Sienne. Pour couronner l'ensemble, l'année suivante elle remporte le Premier Prix de musique de chambre au Conservatoire de Paris, avec Catherine Collard au piano.

A l'issue de ses années d'apprentissage, Suzanne Ramon se trouve au confluent de trois grandes influences, austro-hongroise, israélienne et française,-la tradition de la musique, la tradition des instruments à cordes, la tradition de la culture, - Elle entame alors une carrière internationale, fait quelques rencontres qui la marqueront : Pablo Casals, Isaac Stern, Yehudi Menuhin, ... celle de Mstislav Rostropovitch plus particulièrement et, sans éclat intempestif, sans battre les estrades inconsidérément, elle approfondit et creuse son rapport brûlant à la musique, - un rapport à la fois physique et spirituel.

Bientôt la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Canada, la France, l'Italie, la Hongrie, l'Allemagne, la Suède, le Danemark, la Belgique l'acclament...

Il faut en effet tout à la fois entendre et voir Suzanne Ramon envelopper entre ses bras son instrument, un superbe Guarnerius 1690 au son d'ambre et d'épices, aux couleurs de cognac doré, dont la voix sous l'archet déclame ou chante, rugit ou pleure -une voix humaine qui vient du fond du ventre et de la mémoire.

Il faut entendre ces attaques qui plongent dans la chair du son avec quelque chose de vertigineux, voir ce geste de l'attaque aussi, impérieux, comme partageant l'univers de l'écoute, séparant le monde du silence et celui de ce chant hauturier.

Et la largeur de ses phrasés ensuite, ces vastes périodes à la respiration ample, cet engagement total du corps dans le son, ce sens de la pulsation dramatique, et ce souffle surtout, immense, soulevé, porté par une charge émotionnelle qui renverse, qui bouscule : il y a chez Suzanne Ramon une puissance ravageuse qui lui fait sculpter la musique comme personne, l'empoigner et comme l'offrir en une oblation, où l'élan mystique rejoint l'élan physique,-quelque chose qui s'apparente tout simplement à l'amour.

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