Stœchiophonie

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

La stœchiophonie ou langue simplifiée est une langue universelle proposée par Henri Joseph François Parrat dans un ouvrage paru pour la première fois en 1858 et suivi de deux autres éditions, dont une en allemand, en 1861. Il s'agit d'une pasigraphie alphabétique, comme la pasilalie d’Abel Burja, dont Parrat entend pourtant se démarquer dans sa préface, et la langue analytique de John Witkins[1] étudiée par Jorge Luis Borges[2].

Cette langue ne semble pas avoir eu beaucoup d'adeptes, sauf au sein de la Société jurassienne d’émulation dont Parrat était membre et où sa langue simplifiée a remporté un certain succès lors de sa parution[3]. Bien qu'elle appartienne à ces multiples projets de langue parfaite recherchée par les fous du langage décrits par Marina Yaguello[4], Umberto Eco[5] et André Blavier[6], aucun de ces trois auteurs ne le mentionnent. Le Dictionnaires des langues imaginaires[7] ne fait que l'évoquer, citant rapidement Ernest K. Drezen[8]. Le site de la Bibliothèque de l'Institut de France et celui de l'Université de Paderborn ne sont pas plus diserts[9]. Il en est de même dans une chronique de Bertrand Galimard Flavigny sur Canal-Académie[10].

Dans son « Avant propos à l'édition de 1858 » , qui prend la forme d'un dialogue entre un philologue et l’auteur, Parrat présente ainsi son projet de langue simplifiée :

« L'auteur. - [...] Ma méthode est fondée sur 250 éléments, qui représentent autant d’idées simples et c’est la combinaison de ces 250 éléments, deux à deux, etc., qui donne les idées complexes.

« Le philologue. - Je comprends ; vous avez trouvé ces éléments dans les différentes langues modernes, qui vous ont donné pour chaque idée le mot simple.

« L'auteur. - J’aurais pu, peut-être, opérer ainsi ; mais j’ai préféré les tirer de la langue sanscrite (à l’exception de quelques-uns dont l’origine est sémitique), la mère de toute les langues, sans m’attacher cependant à donner à chacun de mes éléments la modulation propre à la langue de l’Inde, où toutes les euphonies de ses articulations, qui, comme l’on sait, sont loin de la simplifier (Voir mes Principes d’étymologie, p.7)[11]. Chaque langue européenne ne comprend qu’un certain nombre d’éléments indiens, et ils ne sont pas les mêmes dans toutes les langues ; on trouve dans une de ces langues des racines sanscrites, qui n’existent pas dans une autre, et leur nombre relatif dans chaque langue est très-variable. Il n’y aurait donc rien d’étonnant si on rencontrait dans ma Langue simplifiée plus ou moins de mots analogues aux mots grecs, latins, allemands, français, etc. Je ferai seulement remarquer qu’ils ne s’y trouvent qu’accidentellement. Les mots représentants les idées simples sont, comme je l’ai dit, tirés du sanscrit, et ceux représentant des idées complexes ne sont autre chose que des définitions exprimées au moyen des 250 éléments.

« Le philologue. - Deux cent cinquante éléments, c’est beaucoup ; n’auriez vous pas pu en réduire encore le nombre ? » [à compléter]

[modifier] Notes

  1. John Witkins (1614-1672), évêque de Chester et beau-frère d’Olivier Cromwell, a exposé un projet de langue philosophique dans son Essay Towards a Real Character and a philosophical Langage (Londres, 1668)
  2. « La langue analytique de John Wilkins », Enquêtes, suivi de Entretiens, Gallimard, 1986 (Folio), p. 138-143.
  3. Actes de la Société jurassienne d’émulation de 1858, Porrentruy, 1859.
  4. Les Fous du langage : des langues imaginaires et de leurs inventeurs, Paris, Seuil, 1984
  5. La recherche de la langue parfaite, Paris, Seuil, 1994,
  6. Les Fous littéraires, Éditions des Cendres, 2000, chapitre « Myth(étym)ologie », p. 155-169
  7. Paolo Albani et Berlinghiero Buonarroti, Dictionnaires des langues imaginaires, Paris, Les Belles Lettres, 2001.
  8. Historio de la Mondlingvo, nouv. éd. 1991, p.50
  9. Que ce soit sur la page concernant les langues artificielles et universelles à la bibliothèque de l’Institut de France ou sur le site de l’université de Paderborn dans un cours en esperanto de Vera Barndovska-Frank, Parrat est simplement mentionné, sans plus de commentaire, parmi les nombreux inventeurs de méthodes de langues universelles du XIXe siècle.
  10. Bertrand Galimard Flavigny, La quête des hommes pour une langue commune
  11. Principes d’étymologie naturelle basés sur les origines des langues sémito-sanscrites, Paris, Vve Dondey-Dupré, 1851

[modifier] Sources

  • Langue simplifiée. Porrentruy, 1858.
  • Stœchiophonie oder vereinfachte Sprache. Solothurn, 1861.
  • Stœchiophonie ou la langue simplifiée, 2e édition. Soleure, impr. J. Gassmann, 1861. In-8°, viii-43 p.