Loi de non-contradiction

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La contradiction est une relation existant entre deux termes ou deux propositions dont l’un(e) affirme ce que l’autre nie – A et non-A sont contradictoires, les phrases « Tous les hommes sont barbus » et « Quelques hommes ne sont pas barbus » sont contradictoires.

Nous nommerons « principe de contradiction » cette loi qui veut qu’on ne peut affirmer et nier le même terme ou la même proposition : "Il est impossible qu’un même attribut appartienne et n’appartienne pas en même temps et sous le même rapport à une même chose" (Aristote, Métaphysique, 1005 b 19-20). Assurément, une chose peut être blanche aujourd’hui ou d’une autre couleur demain[1]. De même, cette chose est plus grande ou plus petite qu’une autre à un moment donné. Mais, il est impossible que ces déterminations apparaissent simultanément et s’appliquent du même point de vue à cette chose. Impossible donc qu’à la fois une chose soit et ne soit pas.

Sommaire

[modifier] Nécessité du principe de contradiction?

[modifier] Le principe de contradiction est un axiome

Aristote pose le principe de contradiction comme une nécessité absolue. Il est un axiome, c’est-à-dire: il est une vérité première qui contribue à démontrer les autres vérités, mais lui-même ne peut être déduit en vertu de sa simplicité et de son caractère premier. Qu’est ce à dire plus précisement ?

  • En un premier temps, il s'agit du caractère "performatif" du principe. Quiconque ne se borne pas au silence mais accepte de dire quelque chose de sensé, dès lors qu’il commence à parler, dit quelque chose de déterminé et exclut implicitement la référence à autre chose : dire a, c’est exclure d’entendre tout ce qui n’est pas a, ou qui est non-a. Cette « monstration » du principe en assure l’infaillibilité simplement parce que le principe de contradiction sera la condition préalable de toute pensée et de tout discours. « Le principe […] n’est pas de demander à l’adversaire de dire que quelque chose est ou n’est pas […], mais de dire du moins quelque chose qui présente une signification pour lui-même et pour autrui. » (Aristote, Métaphysique, 1006 a 18-21) Toujours déjà, nous donnons un sens à ce que nous nommons. La décision du sens constitue, pour B. Cassin et M. Narcy, la signification et l’enjeu essentiel du principe de contradiction. La proscription de la contradiction devient une évidence première et indémontrable, puisqu’elle conditionne jusqu’à la possibilité de dire quelque chose.
  • En un deuxième temps, la non-contradiction ne ressortit pas seulement au discours. Il est possible, et peut-être requis, d’en rechercher le fondement au plan de l’être lui-même. L’impossibilité logique d’affirmer et de nier en même temps le prédicat du sujet se fonde sur l’impossibilité ontologique de la coexistence des contraires. Dès lors, plus qu’une faute de discours, la contradiction devient la mesure même de l’impensable. C’est une incohérence dévoilée dans toute son absurdité par les sept arguments exposés à la fin du 4e chapitre du Livre Gamma de la métaphysique. Par exemple, si le réel est contradictoire, alors, conclut Aristote, il n’y a plus de distinction entre un homme et un bateau – cf. notamment Métaphysique 1007 b 20 –. De surcroît, la contradiction qu’implique le mouvement – ce qui change devient contradictoirement ce qu’il n’est pas – n’est qu’une apparence. Ce serait de l’« ignorance, en effet, » que d’avoir oublié les principes exposés dans le Physique.

[modifier] Le principe de contradiction est une nécessité éthique

Dans son ouvrage, Du principe de contradiction chez Aristote, Jan Łukasiewicz commente et critique l’entreprise aristotélicienne. Selon lui, Aristote échoue dans la tâche qu’il s’est fixé : il ne peut justifier l'absolue nécessité d’un principe de contradiction. Pourtant, si l’argumentation d’Aristote est déficiente, son principe n’en reste pas moins indispensable. Dans une autre optique cependant : non plus comme une loi ontologique ou logique mais comme nécessité pratique. Un fait anthropologique commande et impose un principe de contradiction. Il est notre seule arme contre le mensonge et le relativisme des sophistes.

  1. Voir l'article sur la logique modale.

[modifier] Voir aussi