Lev Koulechov

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Lev Koulechov est un cinéaste et théoricien russe (1er janvier 1899 à Tambov - 30 mars 1970 à Moscou).

À partir de 1920, Koulechov dirige l’école de cinéma de Moscou, le VGIK, où il crée un laboratoire qui expérimente le montage de façon presque scientifique. Exemple : il prend un vieux film de l’époque tsariste et choisit un gros plan sur le visage assez inexpressif de l’acteur principal, qu’il tire en trois exemplaires. Il accole alors à chacun d’eux un autre plan. Dans le premier cas, on a le plan d’une table sur laquelle est posée un bol de soupe ; les spectateurs interrogés affirment alors qu’on voit dans les yeux du personnage qu’il a faim. Dans le deuxième cas, on accole au gros plan du visage le plan d’un cadavre à terre ; les spectateurs affirment alors qu’on voit dans les yeux de l’acteur une grande tristesse. Dans le troisième cas, on accole le plan d’une femme nue ; les spectateurs affirment enfin qu’on voit dans le regard de l’acteur une grande excitation.

Par ailleurs, tous les spectateurs sont d’accord pour reconnaître le talent incontestable de l’acteur. Avec cette expérience, Koulechov montre qu’un plan isolé n’a aucun sens, il ne prend signification qu’avec son environnement, avec ce qui le suit ou le précède. En effet, le spectateur essaie toujours d’établir un lien logique entre deux plans qui se succèdent et qui n’ont pas forcément de lien direct. Le spectateur ne peut pas s’empêcher de faire des liens, il est un narrateur incessant. Il est donc possible de renverser le sens, et de faire en sorte de guider le spectateur dans ses liens qu’il établit. Le montage permet d’influencer la réflexion du spectateur. Le cinéaste peut viser certains effets, il y a réflexion sur le montage, et non plus improvisation comme avec Dziga Vertov.

Cependant sa signification par le montage est à relativiser. Il montre comme dans le constructivisme pictural que tout est construction. Il affirme en juin 1923 dans la revue LEF (revue de l'avant-garde artistique) "Ne copiez pas sur les yeux". Ainsi il ne recherche pas la réalité visible de ses propres yeux mais une réalité politique (inscription dans le contexte du cinéma de "propagande" au sens relativisé, non diabolisé de moyen d'action sur la conscience des masses). Il propose ainsi 2 types de montages  :

  • Le montage réflexe qui influe sur les sentiments, l'affectif. C'est un montage de plan compris dans le déroulement logique de l'action mais produisant un effet de réflexe chez le spectateur.
  • Le montage des attractions qui va provoquer l'apparition d'une idée, jouer avec l'intellect. On assiste à un dépassement du déroulement logique de l'action par une collision de deux plans de nature différente.

Ces deux types de montage sont utilisés chez Eisenstein notamment dans Octobre.

[modifier] Bibliographie

  • L’Art du cinéma et autres écrits, traduction de Valérie Pozner, Lausanne, L’Age d’Homme, 1994.

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