Lettres édifiantes et curieuses

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Les Lettres édifiantes et curieuses forment une large collection de 34 volumes de lettres envoyées en Europe par des Jésuites missionnaires en Chine, au Levant, en Inde, en Amérique, et ailleurs. Publiés entre 1702 et 1776, cette collection fit beaucoup pour ouvrir l’Europe de la Renaissance (surtout la France) aux cultures non-européennes.

Sommaire

[modifier] Origine

Pour que le gouvernement de la Compagnie de Jésus soit basé sur une bonne information, saint Ignace de Loyola établit un système de correspondance par lequel tout jésuite ayant autorité devait lui écrire régulièrement (Constitutions, N°674, 790). Il y avait ainsi les Relations annuelles des diverses missions, et les autres lettres adressées plus personnellement à Ignace, au ton nettement plus chaleureux. Du vivant du saint quelques lettres envoyées de l’Inde par saint François Xavier (janvier 1544, avril 1552, etc.) furent à l’origine de nombreuses vocations missionnaires.

[modifier] Développement

  • L’aspect édifiant :

Comme tout le travail apostolique, en Europe aussi bien que missionnaire, dépendait de la générosité de bienfaiteurs il était important de les informer régulièrement sur ce qui se faisait avec leurs dons. Il y eut alors deux types de lettres, les Lettres d’affaires qui traitaient des personnes et des problèmes à résoudre et les autres qui parlaient du travail apostolique, son développement et ses succès. Les premières étaient à usage interne et destinée strictement au gouvernement interne de la Compagnie, les autres (les édifiantes) étaient copiées et répandues parmi les amis, prélats, et bienfaiteurs divers. Elles eurent beaucoup de succès.

  • L’aspect curieux :

Durant le XVIe siècle et le XVIIe siècle les voyages outre-mer (à but commercial) se multipliant entre l’Europe et les autres continents, surtout Amérique et Asie, une grande curiosité se développa que les marchands qui n’avaient que des contacts épisodiques avec ces ‘'nouveaux pays'’ ne pouvaient satisfaire. Les missionnaires qui y habitaient et en avaient appris la langue étaient de bons observateurs (car intellectuellement bien formés) et pouvaient répondre à cette demande. A l’aspect édifiant de leurs lettres ils ajoutèrent le curieux. Il y a les souffrances des missionnaires, les joies de nombreux baptêmes, les martyres également. S’ajoute dans la même correspondance de véritables reportages sur la Chine, son mode de gouvernement les particularités de sa langue, ses mœurs et coutumes. Tout cela donna naissance à la première sinologie européenne et suscita un véritable engouement pour les '‘chinoiseries'’ et tout ce qui venait de l’empire du Milieu. D’autres lettre circulaient également, qui venait d’Amérique, du Levant et de l’Inde mais ce sont les lettres de Chine qui eurent le plus grand retentissement. Cet enthousiasme poussa même le Père Jean-Baptiste Du Halde - qui de sa vie ne quitta jamais Paris - à écrire une Description de la Chine entièrement basée sur la correspondance reçue. Elle fit autorité.

[modifier] Publication de la collection

Des publications partielles de lettres eurent lieu durant le XVIIe siècle (La toute première lettre imprimée fut celle de saint François Xavier aux étudiants de Paris, en 1545). Le père Charles Le Gobien, procureur à Paris des missions jésuites de Chine entreprit de les rassembler et de les publier ensemble. Comme le premier volume (sorti en 1702) fut très bien reçu, il en publia d’autres au rythme de un par an (vol. I-VIII). Il donna comme titre à la collection : Lettres édifiantes et curieuses écrites des missions étrangères par quelques missionnaires de la Compagnie de Jésus. Le père Jean-Baptiste Du Halde prit la relève et publia (de 1709 à 1743) les volumes IX à XXVI. Finalement les volumes XXVII à XXXIV furent publiés par le père Patouillet, entre 1749 et 1776.

[modifier] Influences des Lettres

Ces publications jouèrent un rôle primordial dans l’ouverture et l’évolution des idées du Siècle des Lumières. Les grands esprits de l’époque tel que Voltaire et Montesquieu ne tarissaient pas d’éloges pour ce que les lettres leur apportèrent. Gottfried Leibniz parlait de la mission jésuite en Chine comme de la plus grande affaire de notre temps. Par leur objectivité précise, la diversité et l’ampleur des sujets traités et la profondeur de la réflexion elles méritent d’être placées parmi les grandes œuvres encyclopédiques du siècle des Lumières. Elles permirent une première relativisation de beaucoup de mœurs et coutumes européennes.

[modifier] Publications successives

L’œuvre fut traduite en tout ou en partie en espagnol (16 vol. ; 1753-57), Italien (18 vol. ; 1825-29), allemand (7 vol. ; 1726-61). Pour l’édition en anglais (2 vol.; 1743) John Lockman estima bon d’en retirer les récits de conversions et miracles car assez insipides et ridicules aux yeux des lecteurs anglais, et en fait à toute personne intelligente et de bon goût. De nouvelles éditions virent le jour durant le XIXe siècle, les lettres étant alors arrangées par région d’origine. La dernière grande édition complète est celle de L. Aimé-Martin, sortie de presse en 1838 et 1843.

[modifier] Références

  • Du Halde, Jean-Baptiste, Lettres édifiantes et curieuses…, (34 vol.), Paris, 1703-1776.
  • Caillot, A., Beauté des lettres édifiantes et curieuses, Paris, 1838.
  • (Lettres de Chine) : Vissiere, Isabelle, Lettres édifiantes et curieuses de Chine, Paris, 1979.
  • (Lettres de Nouvelle-France) : Roustang, François, Jésuites de la Nouvelle-France, Paris, 1960.

[modifier] Liens externes