Guillaume Ier de Warenne

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Guillaume de Warenne ou de Varenne (William of Warenne ou of Warren en anglais) († 24 juin 1088), fut l'un des compagnons de Guillaume le Conquérant dans sa conquête de l'Angleterre en 1066. Important baron anglo-normand, il fut l'un des hommes les plus riches de l'Angleterre nouvellement conquise. Il fut fait 1er comte de Surrey par Guillaume II le Roux peu avant sa mort. Il fut aussi le fondateur d'une dynastie qui domina le comté de Surrey jusqu'en 1347.

Il était le fils de Rodulf[1] († peu après 1074) et très probablement de Béatrice († après 1053), l'une des nombreuses nièces de Gunnor (voir plus bas). Son toponyme vient très probablement de la rivière Varenne.

Sommaire

[modifier] Biographie pré-conquête

Jeune homme, Guillaume aide le duc à consolider son pouvoir sur la Normandie, notamment dans les campagnes de 1052 et 1054 qui culminèrent avec la bataille de Mortemer. À l'issue de celle-ci, le duc dépouille Roger de Mortemer, son chef d'armée pour cette bataille, cousin de Guillaume, de toutes ses possessions pour avoir libéré le prisonnier Raoul IV de Vexin, comte de Valois, dont Roger est aussi le vassal. Il se réconcilie plus tard avec le duc qui lui rend toutes ses possessions, sauf le château de Mortemer qui est confié à Guillaume[2].

Guillaume fait partie des principaux barons du duché, et il est donc consulté par le duc Guillaume à propos de son projet d'invasion de l'Angleterre[3].

[modifier] Biographie post-conquête

Le château de Lewes (Sussex)
Le château de Lewes (Sussex)

Il est l'un des vingt compagnons du Conquérant identifiés avec certitude à la bataille de Hastings, et est donc probablement un commandant d'une partie de l'armée normande. En 1067, le roi Guillaume, de retour en Angleterre lui confie le rape de Lewes (Sussex), avec charge pour lui d'y construire un château fort. Les rapes du Sussex sont des territoires stratégiques pour la protection de la route vers et depuis la Normandie. Le château de Lewes permet de surveiller le fleuve côtier Ouse. Entre autres possessions importantes, il reçoit aussi l'honneur de Conisbrough dans le Yorkshire du Sud[4] et Castle Acre dans le Norfolk. Il y construit aussi des châteaux forts.

[modifier] La richesse des Warenne

Le Domesday Book nous indique qu'en 1086, Guillaume de Warenne est le cinquième plus riche baron d'Angleterre, après Odon de Bayeux et Robert de Mortain, les demi-frères du roi, et les comtes Roger II de Montgommery et Guillaume FitzOsbern. La valeur de ses possessions en Angleterre est évaluée à 1140£ annuelles. 548£ lui reviennent directement chaque année, le reste revient à ses sous-tenants (ses vassaux). À cette époque, il détient environ 300 manoirs, mais aucune terre dans le Surrey[5].

Il possède des terres dans onze comtés[6],[7], principalement dans le Norfolk et le Yorkshire, comme tenant en chef ou sous-tenant. En 1088, il reçoit en plus le titre de comte de Surrey, ce qui lui donne un revenu supplémentaire considérable puisqu'il perçoit une partie des revenus générés par le domaine royal dans ce comté.

En mars 2000, le Sunday Times publia une enquête sur les plus riches personnalités de Grande-Bretagne du millénaire qui allait s'achever. Leurs calculs[8] montra qu'en valeur actuelle, Guillaume de Warenne était le plus riche particulier de tout le IIe millénaire britannique avec une valeur estimée de ses biens à 57,6 milliards de livres sterling actuelles[9].

Le calcul est certes spécieux – d'ailleurs les dix premiers du classement vécurent au Moyen Âge, mais démontre que les possessions de Guillaume de Warenne étaient gigantesques.

En 2007, dans un livre intitulé The Richest of the Rich (Les plus riches des riches), Philip Beresford et William D. Rubinstein désignent Alain le Roux comme le particulier le plus riche d'Angleterre de tous les temps. En utilisant le même type de calcul que pour l'étude de 1999, sa fortune est estimée à 74 milliards de livre sterling[10].

[modifier] La révolte des comtes

Icône de détail Article détaillé : Révolte des comtes.

En 1075 éclate la révolte des comtes Ralph de Gaël, comte de Norfolk et Suffolk, et Roger de Breteuil, comte d'Hereford. Guillaume et Richard de Bienfaite[11], que le roi a établi comme régents (Joint Chief Justiciar) pendant son absence, convoquent les rebelles à la cour. Ceux-ci ne daignant pas obéir aux ordres, ils lèvent l'armée d'Angleterre, aidés des évêques Odon de Bayeux et Geoffroy de Montbray, et livrent aux rebelles un combat sanglant. Orderic Vital précise que les rebelles capturés ont le pied droit tranché afin de pouvoir être reconnus[12].

[modifier] La rébellion de 1088

Icône de détail Article détaillé : Rébellion de 1088.

Guillaume le Conquérant meurt en 1087, et en 1088 survient une révolte du fait que les barons anglo-normands doivent servir deux seigneurs, les fils aînés du roi, Robert Courteheuse pour leurs territoires en Normandie, et Guillaume II le Roux pour leurs possessions anglaises. Guillaume de Warenne est l'un des rares barons à rester fidèle au roi[13], alors que ses adversaires veulent le remplacer par le duc Robert, son frère aîné, plus facilement manipulable. Guillaume est immédiatement récompensé de son soutien au roi, et fait comte de Surrey en avril ou mai 1088[14]. La rébellion est un échec, mais Guillaume meurt d'une blessure lors du siège du château de Pevensey.

Il est inhumé dans le chapitre du prieuré dédié à saint Pancrace qu'il avait fondé à Lewes[15] vers 1078. Ce prieuré fut la première cellule clunisienne en Angleterre.

Guillaume de Warenne eut une carrière météorique. Fils cadet d'un noble normand mineur, il devint l'un des hommes les plus riches d'un des plus riches royaumes d'Europe, grâce à une loyauté irréprochable envers ses seigneurs. Il fut aussi le fondateur d'une dynastie riche et puissante qui domina le comté de Surrey jusqu'en 1347.

[modifier] Controverses

[modifier] Sur l'identité de sa mère

L'identité de sa mère est sujette à débat, il existe des chartes de donation le mentionnant comme le fils d'Emma, qui serait la seconde femme de son père. Ce mariage n'aurait eu lieu que vers 1055, ce qui est incompatible avec l'âge de Guillaume à la bataille de Hastings en 1066. Il y a donc probablement confusion entre deux Rodulf, père et fils. Guillaume serait donc plus probablement le fils de Béatrice († après 1053), l'une des nombreuses nièces de Gunnor, l'épouse du duc de Normandie Richard Ier. Guillaume de Jumièges[16] mentionne Guillaume comme fils de cette nièce de Gunnor, toutefois les filiations de Guillaume de Jumièges sont douteuses, puisqu'il indique dans la même phrase que Roger de Mortemer est son frère.

[modifier] Sur les origines de sa femme Gundred

Les historiens s'accordent aujourd'hui pour affirmer qu'elle était la sœur de Gherbod le Flamand, l'officieux comte de Chester, confirmant ainsi la filiation donnée par Orderic Vital[17]. Il a existé néanmoins un vif débat autour de son ascendance, certains historiens et généalogistes[18] la considérant comme une fille légitime de Guillaume le Conquérant et de Mathilde de Flandre, ou comme une fille de Mathilde par un précédent mariage inconnu.

La charte de fondation du prieuré de Lewes, contient la phrase latine suivante attribuée à Guillaume de Warenne : « pro salute dominae meae Matildis Reginae matrix uxoris meae. » (pour [...] la reine Mathilde, mère de ma femme). Par conséquent, il a été fait l'hypothèse que Gundred et son frère Gherbod seraient les enfants de Mathilde, ce qui expliquerait pourquoi Gherbod, un Flamand, se verrait confier le très stratégique comté de Chester suite à la conquête. Ces historiens affirment que le parentage donné par Orderic Vital est suspicieux. En effet, dans la même phrase, il affirme que le roi Guillaume donne le comté de Surrey à Guillaume de Warenne juste après la conquête, ce qui est bien évidemment faux. Toutefois, Allison Weir, dans son ouvrage[19] Généalogie complète des familles royales britanniques, affirme que la charte de fondation du prieuré est un faux. Autre indice, le Domesday Book mentionne un Frederick comme beau-frère de Guillaume. Ce Frederick étant un flamand, donc frère de Gundred, il est peu probable que la reine ait eu trois enfants d'un mariage sans qu'il n'en reste une trace.

[modifier] Mariage et descendance

Vers 1070, il épousa Gundred, sœur de Gerbod le Flamand, officieux comte de Chester. Elle mourut en couches le 27 mai 1085 à Castle Acre, Norfolk. Ils eurent :

En secondes noces, il aurait épousé une sœur de Richard Guet.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Références

  1. ou Raoul, Ranulf, Randolf etc.
  2. Orderic Vital, Histoire de la Normandie, éd. Guizot, 1826, vol. III, livre VII, p. 203
  3. Histoire de la Normandie, vol. II, livre III, p. 115
  4. Voir l'histoire de Conisbrough sur conisbroughcastle.org.uk
  5. C. Warren Hollister, The Greater Domesday Tenants-in-Chief, Domesday Studies, Éd. J.C. Holt (Woodbridge), 1987, p. 219-248
  6. Voir le site domesdaybook.co.uk en lien externe
  7. Sussex, Essex, Suffolk, Norfolk, Yorkshire, Oxfordshire, Shropshire, Cambridgeshire, Bedfordshire, Lincolnshire, Huntingdonshire.
  8. Chaque candidat fut évalué suivant sa contribution au produit national net du pays quand il mourut, ou quand sa fortune était à son point culminant. Ce pourcentage fut ensuite multiplié par le produit intérieur net de 1999.
  9. BBC News | UK | Warlord tops richest ever list
  10. Jaya Narain, « 1066 invader was Britain's wealthiest man in history », dans le Daily Mail, 8 octobre 2007. [(en) Texte de l'article dans le Daily Mail (page consultée le 28 janvier 2008)]
  11. Richard de Bienfaite, descendant des comtes de Brionne, primogéniteur de la famille de Clare.
  12. Histoire de la Normandie, vol. II, livre IV p. 253
  13. Histoire de la Normandie, vol. III, livre VIII, p. 234
  14. Histoire de la Normandie, vol. III, livre VIII, p. 277
  15. Histoire de la Normandie, vol. III, livre VIII, p. 277
  16. Guillaume de Jumièges, Gesta Normannorum ducum, liv. VIII, chap. XXXVII, p. 303-304
  17. Histoire de la Normandie, vol. III, livre VII, p. 214
  18. Sir George Floyd Duckett, Observations on the parentage of Gundreda, the daughter of William, duke of Normandy, Sussex Archaeological Society, 1878
  19. Allison Weir, Britain's Royal Families: The Complete Genealogy, Éd. Pimlico, 2e édtition, 2002 (ISBN 0712642862)

[modifier] Sources

  • Christopher Teyerman, « William Warenne », dans Who's Who in Early Medieval England, 1066-1272, Éd. Shepheard-Walwyn, 1996, p. 36-37, (ISBN 0856831328).