Fibule de Préneste

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La fibule de Préneste est présentée comme portant le plus ancien écrit en latin trouvé dans le Latium, daté du VIIe siècle av. J.-C. Elle est conservée au Musée préhistorique Pigorini à Rome.

Sommaire

[modifier] Origine de la fibule

Cette fibule a été présentée pour la première fois en 1887 par l’archéologue allemand Wolfgang Helbig (1839-1915). Celui-ci disait l’avoir achetée à un ami en 1876, et donnait comme origine la tombe Bernardini, découverte en 1851 et fouillée à partir de 1871 près de l’antique cité latine de Préneste (actuelle Palestrina). L’objet fut inscrit à l’inventaire de la tombe Bernardini jusqu’en 1919, date à laquelle il en fut retiré, en raison de l’absence de certitudes archéologiques sur sa provenance exacte.

Notons qu’une fibule semblable, en or et gravée, a été trouvée en Étrurie à Clusium (actuelle Chiusi) (Recherches sur la fibule d’or inscrite de Chiusi : la plus ancienne mention épigraphique du nom des Étrusques de Jacques Heurgon, Rome, 1971). D’autres fibules du même type ont été retrouvées en Étrurie, dans le Latium et en Campanie, et datées entre les ‑VIIIe et ‑VIe siècles.

[modifier] Description

La fibule, longue de 11,7 cm, est un bijou en or. De type dit fibula a drago (fibule à dragon), elle se présente de profil sous la forme d’une boucle ronde prolongée par une aiguille et son fourreau. Le fourreau de la fibule porte une inscription rédigée de droite à gauche.

Transcrite en caractères modernes, elle se lit comme suit :

MANIOS MED FHE FHAKED NUMASIOI

Qui donne en latin classique, MANIUS ME FECIT NUMARIO, traduit par « Manius m’a fait pour Numarius (Numérius) »

Les arguments en faveur de l’ancienneté de l’inscription sont les suivants :

  • la rédaction de droite à gauche ;
  • la transcription archaïque de la consonne latine aspirée f par fh ;
  • la grammaire archaïque avec un nominatif en –os, un datif en –oi, le pronom personnel à l’accusatif med, le parfait du verbe facere avec redoublement de la syllabe initiale ;
  • la forme archaïque des lettres, comparables aux lettres des inscriptions grecques trouvées à Cumes ;
  • le texte est antérieur au "rhotacisme" : on appelle ainsi le fait qu'en latin classique, les "s" placés entre voyelles (numaSioi) ont évolué en "r". Par exemple, l'infinitif amase devient amare, alors que "esse" demeure en l'état.

[modifier] Discussions sur l’authenticité

Des doutes ont été émis sur l’authenticité de l’inscription dès le début du XXe siècle, vu les circonstances incertaines de sa découverte. La fibule est néanmoins mentionnée dans des ouvrages consacrés à la Rome antique (comme le très classique Guide romain antique de 1952), et elle a été présentée en 1977 à l’exposition au Petit Palais (Paris) sur la naissance de Rome. Le catalogue de l’exposition en présente deux photos, parmi les objets de la tombe Bernardini. Toutefois, on constate que ces clichés, en vues de dessus et de face arrière, omettent de montrer l’inscription, néanmoins évoquée dans les exposés en préambule du catalogue.

L’épigraphiste italienne Margherita Guarducci (1902-1999) émit en 1979 l’avis que cette fibule serait un faux, fruit de la collaboration entre Wolfgang Helbig et l’antiquaire Francesco Martinetti. Sa position n’a pas fait l’unanimité et le débat n’est actuellement pas clos, quoique plusieurs sites sur Internet présentent la fibule comme une falsification. Des moyens puissants tels que le microscope électronique pourraient être utilisés pour l’examen de la gravure du texte suspecté, mais l’emploi de telles méthodes n’est pas signalé dans les articles évoquant cette fibule.

[modifier] Sources

  • G. Hacquard, Guide Romain antique, classiques Hachette, 1952
  • Massimo Pallotino et Giovanni Colonna, Naissance de Rome, catalogue d’exposition au Petit Palais à Paris, 1977

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes

[modifier] Bibliographie

  • Corpus Inscriptionum Latinarum I 2 2, 3
  • Ernst Diehl, Altlateinische Inschriften, Berlin, n° 719
  • Vittore Pisani, Testi latini arcaici e volgari, Torino 1960, n° A 3.
  • Jacques Heurgon, Recherches sur la fibule d’or inscrite de Chiusi : la plus ancienne mention épigraphique du nom des Étrusques, "Mélanges de l’École Française de Rome", tome 83 (1971), pp. 9-28
  • Massimo Pallottino, Giovanni Colonna, Naissance de Rome, catalogue de l'exposition au Petit Palais à Paris, 1977
  • Franz Wieacker, Die Manios-Inschrift von Präneste : zu einer exemplarischen Kontroverse, Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen 1984, 29 pp. ("Nachrichten der Akademie der Wissenschaften in Göttingen. Philol.-hist. Kl.", 1984,9, pp. 373-399).

Ouvrages contestant l'authenticité de l'inscription :

  • Margherita Guarducci, La cosiddetta fibula prenestina. Antiquari, eruditi e falsari nella Roma dell'Ottocento, "Atti della Accademia Nazionale dei Lincei. Memorie", Classe di scienze morali, storiche e filologiche, serie VIII, vol. 28, fasc. 2, Roma 1980.
  • Margherita Guarducci, Nuova appendice alla storia della «Fibula prenestina», "Rendiconti dell'Accademia Nazionale dei Lincei. Classe di Scienze morali, storiche e filologiche", ser. IX, 2 (1991), pp. 139-146
  • Arthur E. Gordon, Illustrated Introduction to Latin Epigraphy, Berkeley/Los Angeles/London 1983, ISBN 0-520-03898-3
  • Larissa Bonfante, Etruscan Life and Afterlife: A Handbook of Etruscan Studies, Wayne State University Press, Detroit, 1986

Ouvrages affirmant l'authenticité de l'inscription :

  • Alfred Ernout, Recueil de textes latins archaïques, Librairie Klincksieck, 1916, p. 3-4
  • Winfred P. Lehmann, Historical Linguistics : an Introduction, Routledge, Londres, 1993 (ISBN 0-415-07242-5)
  • R. Wächter, Altlateinische Inschriften. Sprachliche und epigraphische Untersuchungen zu den Dokumenten bis 150 v. Chr., Lang, Berne, 1987 (ISBN 3-261-03561-7)
  • E. Formigli, Indagini archeometriche sull'autenticità della Fibula Praenestina. "MDAI"(R) 99 (1992) 329-343, Tav. 88-96.