Ferdinand Nahimana

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Ferdinand Nahimana, né le 15 juin 1950 à Gatonde dans la préfecture de Ruhengeri au Rwanda, est un universitaire et homme politique rwandais. Il a été l'un des principaux condamnés du « Procès des médias » qui s'est tenu entre 2000 et 2003 devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à Arusha.

Sommaire

[modifier] Formation

Après des humanités classiques au petit séminaire de Rwesero, il intègre l'Université nationale du Rwanda (UNR) de Butare. Durant les évènements de 1972-73 qui aboutiront au coup d'État du général Habyarimana et à la chute du président Kayibanda, il participe à l'action des « Comités de Salut public » chargés de faciliter l'épuration des Tutsi de l'administration, des écoles et de l'université[1].
En 1974, l'UNR lui décerne un baccalauréat en lettres.
En 1977, il obtient une maîtrise ès-arts (option histoire contemporaine) à l'Université Laval de Québec.
En 1986, il soutient une thèse de doctorat en histoire sur les royaumes du nord-ouest du Rwanda à l'université de Paris VII-Jussieu[2].

[modifier] Carrière universitaire, politique et médiatique

Militant du Mouvement révolutionnaire national pour le développement (MRND), originaire de la même région que le président Habyarimana, Ferdinand Nahimana occupe différents postes de responsabilité dans l'université, la fonction publique et le monde politique ; parallèlement à ses activités d'enseignant à l'UNR, il est ainsi successivement : vice-doyen de la faculté des lettres de l'UNR (Butare) de 1978 à 1980, doyen de la même faculté de 1980 à 1981, secrétaire général adjoint de l'UNR (campus de Ruhengeri) de 1981 à 1984, directeur du Centre de la connaissance de l'homme et de la société à l'Institut de recherche scientifique et technologique (IRST) de Butare de 1988 à 1990, directeur général de l'Office rwandais d'information (ORINFOR) à Kigali de 1990 à 1992 ; en 1993, il est désigné pour représenter le Mouvement républicain national pour la démocratie et le développement (MRNDD) dans le « gouvernement de transition à base élargie » qui aurait dû être installé en janvier 1994 au titre de « ministre pour l'enseignement supérieur et la recherche scientifique ».

En 1992, alors directeur de Radio Rwanda, il ordonne, malgré les réserves de son comité de rédaction[3], la diffusion cinq fois répétée d'un tract émanant d'une organisation inconnue annonçant l'assassinat programmé de personnalités politiques proches du pouvoir ; selon de nombreux experts et observateurs[4], la diffusion du contenu de ce tract conduit au massacre de plusieurs centaines[5] de Tutsi dans le Bugesera.
Suite à cet épisode, la nouvelle réalité de la séparation des pouvoirs permise par l'installation d'un gouvernement incluant plusieurs partis d'opposition ainsi que la pression de chancelleries étrangères[6] aboutit au limogeage de Ferdinand Nahimana de ses fonctions de directeur de Radio Rwanda.
Peu après ce limogeage, l'Allemagne décline l'offre de la présidence rwandaise de nommer Ferdinand Nahimana au poste de premier secrétaire de l'ambassade du Rwanda à Bonn.
En 1993, Ferdinand Nahimana fonde avec d'autres cadres MRND tendance Hutu pawa et des reponsables de la Coalition pour la défense de la république (CDR) la Radio télévision libre des mille collines (RTLM) ; émanation et voix de la mouvance ethniste la plus extrême, RTLM sera ultérieurement considérée comme un des instruments décisifs de l'exécution du génocide de 1994. Même s'il n'est pas formellement le directeur de cette station, Ferdinand Nahimana en est de facto l'idéologue principal ; il exerce en outre une position centrale au sein du « comité d'initiative » de la RTLM S.A. .[7]

Le 7 avril 1994, au lendemain de l'attentat contre le Falcon du président Habyarimana, Ferdinand Nahimana se réfugie avec sa famille à l'ambassade de France de Kigali[8]. Le lendemain, il est évacué vers Bujumbura.

[modifier] La fuite

[modifier] Procès et appel

[modifier] Notes et sources

  1. Selon plusieurs témoignages (dont celui de son ancien condisciple José Kagabo, aujourd'hui enseignant à l'EHESS) : dépêches des 20 février et 26 mars 2001 - Agence Hirondelle ; voir aussi François-Xavier Munyarugerero : Réseaux, pouvoirs, oppositions, La compétition politique au Rwanda, L’Harmattan, Paris, 2003 (pp. 135-136). ; Nahimana a toutefois contesté ces faits devant le TPIR : Dépêche du 7 novembre 2002 - Agence Hirondelle
  2. Les grandes lignes de cette thèse dirigée par Catherine Coquery-Vidrovitch serviront à la rédaction de l'ouvrage : Le Rwanda, émergence d'un État, éditions l'Harmattan, Paris, 1993. ISBN 2738417167
  3. Voir, notamment, le témoignage de Thomas Kamilindi, journaliste à Radio Rwanda de 1984 à 1994, devant la chambre de 1re instance du TPIR. Jugement du 3 décembre 2003, pp.231-232 [1]
  4. Témoignages de Philippe Dahinden (membre de « la Commission internationale d'enquête sur les violations des droits de l'homme au Rwanda depuis le 1er octobre 1990 »), et du procureur de la République François-Xavier Nsanzuwera devant la chambre de 1re instance du TPIR [2]. Voir aussi : Rapport de la Commission internationale d'enquête [3] ; Alison Des Forges (dir.), Aucun témoin ne doit survivre, Karthala, HWR/FIDH ; Jean-Pierre Chrétien (dir.), Les médias du génocide, Karthala ; André Guichaoua (dir.), Les crises politiques au Rwanda et au Burundi, Karthala ; Gérard Prunier, Rwanda 1959 - 1996, Histoire d'un génocide, Dagorno.
  5. Les organisations nationales et internationales de défense des droits humains parlent de 300 à 400 victimes, tandis que les autorités rwandaises de l'époque admettent le chiffre de 182.
  6. Notamment belge et allemande.
  7. Il est notamment une des trois seules personnes du conseil d'administration autorisées à signer des chèques au nom de la RTLM S.A.
  8. Audition par la mission d'information de l'assemblée nationale de Jean-Michel Marlaud, ambassadeur de France au Rwanda de mai 1993 à avril 1994 (Tome II, volume 1, p.300).
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