Élie Decazes

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Élie, duc Decazes, politicien français
Élie, duc Decazes, politicien français

Élie Decazes (28 septembre 1780 à Saint-Martin-de-Laye24 octobre 1860 à Decazeville) était un politicien français.

Fils du lieutenant particulier de la sénéchaussée et présidial de Libourne (Gironde), Élie Decazes commence des études à l’école militaire de Vendôme de 1790 à 1799. Après ses études militaires, il entame des études de droit, et deviendra en 1805, après son mariage avec la seconde fille du comte Muraire, juge au tribunal civil de la Seine. Il est nommé ensuite conseiller de Louis Bonaparte en 1807, et devient avocat-conseil à la cour de l'appel de Paris en 1811. Il fut en même temps attaché comme conseil au jeune roi de Hollande, Louis, et à l'impératrice mère.

Immédiatement après la chute de l'Empire, il n'en accueillit pas moins la Restauration avec empressement, refusa de signer une adresse de félicitation à Napoléon Ier après son retour de l'île d'Elbe, se déclarant royaliste, il reste fidèle aux Bourbons pendant les Cent-Jours. Par l'entremise de Joseph-Dominique Louis dit baron Louis, il peut rencontrer le roi Louis XVIII pendant cette période, qui le récompense pour sa fidélité en le nommant préfet de police de Paris le 7 juillet 1815.

Sommaire

[modifier] Favori de Louis XVIII

Bien que Louis XVIII ait l’habitude de ne s'entretenir de politique qu'avec ses ministres, Decazes obtient l'autorisation de faire ses rapports directement au roi. Il devient le favori de Louis XVIII qui l’appelle même « mon fils ». Détesté des ultras, cet homme de police, ancien collaborateur de Fouché en 1815, puis ensuite ministre de Armand Emmanuel du Plessis de Richelieu, sait attirer les faveurs du roi pour qui, il devient indispensable.

Louis XVIII se prend peu à peu d’amitié avec Decazes, car pour lui, il est le plus sincère des ministres, il ne parle pas inutilement mais simplement sans respects excessifs, sans trop d’humilité.

Il prit sur ce prince un grand ascendant, qu'il devait à l'amabilité de ses manières et au charme de son esprit tout autant qu'à l'accord des vues; s'opposa de toutes ses forces aux excès de la réaction ultra-royaliste.

[modifier] Royaliste modéré

Entre temps, il avait été élu député de la Seine en août 1815, défendant un royalisme modéré par ses fonctions de député et de ministre. Les royalistes modérés étant en minorité dans la « Chambre introuvable » de 1815 face aux ultras. Les élections législatives d’août 1815 voient le triomphe des ultras, remportant 350 sièges sur 389, ce qui incite Louis XVIII à dire qu’il s’agit d’une Chambre introuvable parce que, pour lui, elle ne représente pas la réalité de l’opinion française. Louis XVIII persuadé par Decazes ne peut que dissoudre la Chambre, c’est l’ordonnance du 5 septembre 1816. Après la dissolution de la Chambre, par Louis XVIII, et l’élection d’une nouvelle Chambre en 1816, un groupe politique se fait plus remarquer que les autres : les constitutionnels modérés avec par exemple le duc Decazes. Ce parti est surtout attaché à la Charte, et est hostile à la Révolution comme à la Contre-Révolution.

Les élections de 1816 a épuré les ultras de l’administration (rupture avec la droite du ministère de Richelieu). Decazes devient grâce à l’appui du Roi, le chef de la majorité, et le ministre de l’intérieur jusqu’en novembre 1819. Decazes devient alors, à 38 ans, le plus jeune président du conseil de la France. Il mène une politique qui se veut libérale sans le dire explicitement. Son ambition : « Royaliser la nation et nationaliser les royalistes ». Ses diverses actions en faveur de l’industrie, du commerce et de l’agriculture témoigne d’une volonté de développer économiquement la France.

Peu à peu, Decazes va voir son champ d’action se réduire. Il se retrouve avec une multitude d’ennemis, entre des ultras qui dénoncent quotidiennement son libéralisme et des libéraux qui trouvent ses réformes trop timides. Decazes essaye alors de mettre en place un rapprochement avec les ultras en modifiant la loi électorale, vers une tendance plus favorable aux grands propriétaires, il prend donc la direction d’un gouvernement « droitisé » en novembre 1819.

Mais une affaire de meurtre va peu à peu entraîner la chute de Decazes et de sa carrière politique. En effet, le 13 février 1820, le duc de Berry est assassiné par un ouvrier sellier, Louvel. La presse ultra se déchaîne alors contre Decazes, accusé d’être responsable de l’assassinat du duc de Berry. Pour la dynastie des Bourbons, l’événement est encore plus grave car le duc de Berry était le seul à pouvoir assurer une descendance à la dynastie. De plus, les lois d’exception proposées par Decazes sont refusées par la Chambre. Decazes n’a plus le choix, et est obligé de démissionner. Ces derniers événements marqueront la fin de la carrière politique d’un homme dont le principal mérite aura été de comprendre que la durée d’un régime dépend d’une entente des diffèrentes forces vives de la nation.

[modifier] Ministre de la Police

Comme ministre de la Police, il réprima les insurrections provoquées par les royalistes ultras (la Terreur blanche). Decazes fut à l’initiative de plusieurs lois et réformes tendant à libéraliser la France comme :

  • l’abolition des lois d’exceptions
  • l’élargissement du vote électoral en matière d’âge et cens (révisé par l’ordonnance du 13 juillet 1815)
  • la loi Gouvion Saint-Cyr en 1817 sur le recrutement militaire
  • les lois de Serre en 1819 imposent aux journaux de se déclarer et de payer un cautionnement mais elles suppriment également l’autorisation préalable et la censure, entraînant un développement de la presse nationale.

Après la démission du duc de Richelieu en 1818, il prit la direction effective du gouvernement du général-marquis Dessolles. Le ministère Dessolles, comprenant Decazes à l'Intérieur, le baron Louis aux Finances, et le maréchal Gouvion-Saint-Cyr à la Guerre, était entièrement libéral; et son premier acte fut de supprimer le ministère de la Police, car Decazes avait senti son incompatibilité avec le régime de la Liberté. Ses réformes rencontrèrent une vive hostilité à la Chambre des pairs, où les ultras étaient majoritaires, Decazes brisa leur avantage à la Chambre en obtenant du Roi la création d’une fournée de soixante pairs constitutionnels, le 5 mars 1819. Par ses réformes, la France retrouve sa prospérité économique, et le ministère devient populaire.

Mais les grandes puissances de l'alliance observaient la montée du libéralisme en France avec une inquiétude croissante. Metternich déplora particulièrement la « faiblesse » du ministère, et quand en 1819 les élections confirmèrent cette tendance, notamment avec l'élection du célèbre abbé Grégoire, les gouvernements européens réfléchirent à mettre en œuvre les clauses secrètes du Traité d'Aix-la-Chapelle (1818). C'est cette menace d'interposition étrangère, plutôt que la clameur des « Ultras », qui obligea Louis XVIII à une modification de la loi électorale afin de rendre impossible à l'avenir un « scandale » tel que l'élection de l'abbé Grégoire.

Il recourut pour se maintenir à un système de bascule qui laissait dominer alternativement chaque parti : cette situation va même pousser Decazes à établir une modification de sa propre loi électorale et à constituer un ministère royaliste : Dessolles et le baron Louis, refusèrent de s'embarquer dans cette politique et démissionnèrent ; Decazes prit la tête du nouveau ministère, en tant que président du conseil le 19 novembre 1819. L'exclusion de Grégoire de la chambre et des changements de la Charte rendirent les libéraux hostiles sans pour autant réconcilier les « Ultras ». Quand le 13 février, le duc de Berry fut assassiné, on l'accusa d'être, directement ou indirectement, complice du crime par sa complaisance du roi envers les libéraux.

Decazes, prévoyant l'orage, remit immédiatement sa démission au roi, qui la refusa dans un premier temps, en lui disant : « ils attaqueront non votre système, mon cher fils, mais le mien ». Finalement contraint à la démission en février 1820, Decazes est élevé au rang de duc, et se retire honorablement comme ambassadeur en Grande-Bretagne.

Ceci mit fin à sa carrière dans l'exécutif. Rappelé de ce poste sous le ministère Villèle en décembre 1821 il prend place à la Chambre des pairs, où il continua à prôner une politique libérale. Il adhéra après 1830 à la monarchie de juillet. Il fut nommé en 1834 grand référendaire de la Chambre des Pairs. Il quitta entièrement les affaires et la vie politique à partir de 1848.

Indépendamment de son rôle politique, Decazes signala son administration par des mesures favorables aux arts, à l'agriculture et à l'industrie : il rétablit en 1819 l'exposition quinquennale des produits de l'industrie. En 1826, il fonde avec sa fortune personnelle une société pour développer le charbon et le fer dans l'Aveyron. La ville qui abritait les ouvriers prit le nom de Decazeville en 1829.

Le roi du Danemark l'avait fait duc de Glücksbierg en 1818.


Précédé par Élie Decazes Suivi par
Marquis Dessolles
Premier ministre
1819-1820
Armand Emmanuel du Plessis de Richelieu
Précédé par Élie Decazes Suivi par
Joseph Henri, Joachim Lainé Ministre français de l'Intérieur

1818-1820

Joseph Jérôme Siméon
Joseph Fouché Ministre français de la Police

1815-1818

Charlemagne de Maupas 1852-1853

[modifier] Bibliographie


  • DEMIER (Francis), La France du XIXe siècle 1814-1914, Seuil, 2000, 606 pages.
  • CARON (Jean-Claude), La France de 1815 à 1848, Armand Colin, Paris, 2004, 193 pages.
  • GARRIGUES (Jean) et LACOMBRADE (Philippe), La France au XIXe siècle 1814-1914, Armand Colin, Paris, 2004, 191 pages.
  • EL GAMMAL (Jean), Histoire politique de la France de 1814 à 1870, Nathan, Paris, 1999, 248 pages.
  • LEVER (Evelyne), Louis XVIII, Fayard, 1988, 597 pages.
  • HOEFER (Jean Chrétien Ferdinand) et FIRMIN-DIDOT, Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, F.Didot frères, 1853. Accessible via Google Books.

[modifier] sources

  • VAPEREAU (Gustave), Dictionnaire universel des contemporains contenant toutes les personnes ..., L. Hachette, 1858. Accessible via Google Books.[1]

Voir également : Louis Decazes, fils d'Elie Decazes, ministre des Affaires étrangères sous l'Ordre moral.