Ukiyo-e

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Ukiyo-e (Kanji 浮世絵) est un terme japonais signifiant « images du monde flottant ». Ce terme fut appliqué durant l'époque d’Edo (1605-1868) pour désigner l’estampe ainsi que la peinture populaire et narrative. Tout d'abord considéré comme vulgaire par sa représentation de scènes du quotidien, ce genre connut un grand succès auprès des occidentaux après l’ouverture forcée du Japon sur le monde extérieur en 1868.

Ukiyo (浮世, « le monde flottant ») se rapporte à l’impétueuse culture de la jeunesse qui éclot dans les centres urbains de Edo (aujourd’hui Tōkyō), Ōsaka, et Kyōto et qui constitue un monde à part entière. Il s’agit d’une allusion ironique au terme homophone « Monde souffrant » (憂き世), le cycle terrestre de mort et de renaissance duquel les Bouddhistes cherchent à s’échapper.

Cette forme d’art connaît une grande popularité dans la culture métropolitaine d'Edo durant la seconde moitié du XVIIe siècle, naissant dans les travaux monochromes de Hishikawa Moronobu dans les années 1670. Initialement, les estampes sont exclusivement réalisées à l’encre de Chine puis certaines épreuves sont colorées au pinceau. Au XVIIIe siècle Suzuki Harunobu développe la technique d’impression polychrome pour produire des nishiki-e.

Les ukiyo-e sont abordables car ils peuvent être reproduits en grande série. Ils sont principalement destinés aux citadins qui ne sont généralement pas suffisamment aisés pour s’offrir une œuvre originale. Le sujet initial des ukiyo-e était la vie urbaine, en particulier les activités et scènes du quartier des divertissements. De belles courtisanes, des sumotoris massifs ainsi que des acteurs populaires sont ainsi dépeints s’engageant dans des activités attractives. Par la suite, les paysages rencontrent également le succès. Les sujets politiques et les personnages dépassant les strates les plus humbles de la société ne sont pas tolérés dans ces images et apparaissent très rarement. Bien que la sexualité ne soit pas autorisée non plus, elle apparait de façon récurrente dans les épreuves d’ukiyo-e. Les artistes et les éditeurs sont parfois punis pour la création de ces shunga au caractère sexuel explicite.

Sommaire

[modifier] Histoire

Les ukiyo-e peuvent être classés en différentes périodes artistiques : la période Edo, qui comprend les ukiyo-e des origines jusqu’à environ 1867, lorsque la période Meiji débute et se poursuit jusqu’en 1912. La période Edo est généralement calme et offre ainsi un environnement idéal pour le développement de l’art sous une forme commerciale ; tandis que l’ère Meiji se singularise par de nouvelles influences alors que le Japon s’ouvre à l’occident.

[modifier] Les origines

Les racines de l’ukiyo-e remontent à l’urbanisation qui a lieu à la fin du XVIe siècle et amène au développement d’une classe de marchands et d’artisans qui commencent à écrire des fictions et à peindre des images qui sont rassemblées dans des ehon (絵本, « livres d’images », qui présentent des récits illustrés) ou des romans, tels que les Contes d’Ise (Ise-monogatari, 1608) de Honami Koetsu. Les ukiyo-e sont fréquemment utilisés pour illustrer ces livres, mais s’en affranchissent progressivement sous forme d’épreuves sur une feuille volante (ex : carte postale ou kakemono-e) ou d’affiches pour le théâtre kabuki. Les sources d’inspiration sont à l’origine les contes et les œuvres d’art chinois. De nombreuses histoires reposent sur la vie et la culture urbaine et les guides touristiques sont également populaires et globalement sont de nature commerciale et largement répandus. Hishikawa Moronobu, qui utilisait déjà la peinture polychrome, devient très influent à la fin des années 1670.

[modifier] L'essor de l’Ukiyo-e

Toshusai Sharaku – Otani Oniji II, 1794.  L'acteur Kabuki Otani Oniji II dans le role de Yakko Edobe.
Toshusai Sharaku – Otani Oniji II, 1794.
L'acteur Kabuki Otani Oniji II dans le role de Yakko Edobe.

À la moitié du XVIIIe siècle, les techniques permettent la production d’épreuves en couleur, appelées nishiki-e, les ukiyo-e qui sont reproduits sur les cartes postales et les calendriers ont été produits à partir de cette période. Utamaro, Hokusai, Hiroshige, et Sharaku sont les artistes dominants de l’époque. Suite à l’étude de l’art européen, la perspective linéaire fait son apparition et d’autres idées sont assimilées. Les œuvres de Katsushika Hokusai représentent surtout la nature et des paysages. Ses Trente-six vues du mont Fuji (富嶽三十六景, Fugaku sanjurokkei) sont publiées à partir d’environ 1831. Ando Hiroshige et Kunisada Utagawa créent de nombreuses images dont les motifs sont inspirés par la nature.

En 1842, dans le cadre de la réforme Tenpo, les images représentant des courtisanes, des geishas ou des acteurs (par exemple : onnagata) sont interdites. Ces thèmes renouent néanmoins avec le succès dès qu’ils sont de nouveau autorisés.

Pendant l’ère Kaei (1848–1854), de nombreux navires de marchands étrangers arrivent au Japon. Les ukiyo-e de l’époque reflètent les changement culturels.

[modifier] L'ouverture du Japon

Suite à la restauration Meiji en 1868, le Japon s'ouvre aux importations de l’occident, notamment la photographie et les techniques d’imprimerie. Les couleurs naturelles issues de plantes utilisées dans les ukiyo-e sont remplacées par des teintes chimiques anilinées importées d’Allemagne. Alors que les ukiyo-e, largement supplantés par la photographie, passent de mode au Japon, durant le bunmei-kaika (文明開化, le mouvement d’occidentalisation du Japon au début de l’ère Meiji), ils deviennent une source d’inspiration en Europe pour le cubisme ainsi que pour de nombreux peintres impresionnistes parmi lesquels Van Gogh, Monet, Degas ou encore Klimt. Cette influence est appelée Japonisme.

Au XXe siècle siècle, durant les périodes Taishō et Shōwa, l’ukiyo-e connaît une renaissance sous la forme des mouvements Shin-Hanga et sōsaku hanga qui cherchent tous deux à se distinguer de la tradition d’art commercial de masse. Ironiquement, le courant shin hanga, littéralement « nouvelles épreuves », fut largement encouragé par les exportations vers les États-Unis d’Amérique. S’inspirant de l’impressionnisme européen, les artistes intègrent des éléments occidentaux tels que les jeux de lumière et l’expression de l’humeur personnelle mais se concentrent sur des thèmes strictement traditionnels. Le principal éditeur est alors Watanabe Shozaburo à qui l’on attribut la création du mouvement. Parmi les artistes principaux, on peut citer Shinsui Ito et Kawase Hasui qui sont élevés au rang de Trésors Nationaux Vivants par le gouvernement japonais.

Le mouvement sōsaku hanga (litéralement « épreuve créative »), moins reputé, adopte une conception occidentale de l’art : le produit de la créativité des artistes, créativité qui supplante l’aspect artisanal. Traditionnellement, les étapes de réalisation des ukiyo-e — le dessin, la gravure, l’impression et la publication — sont séparées et exécutées par des personnes différentes et hautement spécialisées. Sōsaku hanga défend le point de vue selon lequel l’artiste devrait être impliqué à chaque stade de la production. Le mouvement est établit formellement avec la formation de la Société japonaise d’épreuves créatives en 1918 mais connaît cependant un succès commercial moindre que celui du shin hanga dont les collectionneurs occidentaux préfèrent l’aspect plus traditionnellement japonais. Des ukiyo-e sont toujours produits aujourd’hui et demeurent une forme d’art influente, inspirant notamment les manga et l’anime.

[modifier] Réalisation d’un ukiyo-e

Encrage et impression
Encrage et impression
Gravure des blocs de bois
Gravure des blocs de bois

Les épreuves d’ukiyo-e sont produites de la manière suivante :

  1. L’artiste réalise un dessin maître à l’encre.
  2. Les artisans collent ce dessin face contre un bloc de bois en découpant les zones où le papier est blanc, laissant ainsi le dessin inverse en relief sur le bloc mais détruisant l’œuvre originale dans le processus.
  3. Ce bloc est encré et imprimé de manière à produire des copies quasiment parfaites de l’original.
  4. Ces épreuves sont à leur tour collées à de nouveaux blocs et les zones du dessin à colorer d’une teinte particulière sont laissées en relief. Chacun des blocs imprime au moins une couleur dans l’image finale.
  5. Le jeu de blocs de bois résultant est encré dans les différentes couleurs et appliqué successivement sur le papier. L’impression finale porte les motifs de chacun des blocs, certains étant appliqués plus d’une fois afin d’obtenir la profondeur de teinte souhaitée.

[modifier] Principaux artistes

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

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[modifier] Références

  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Ukiyo-e ».