Timée (Platon)

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Critique de la théorie des Idées,

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Le Politique - Timée
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Les Rivaux - Théagès – Épinomis
Minos - Clitophon

Personnages du dialogue : Socrate, Timée, Hermocrate, Critias

Platon, dans Le Timée et le Critias, s'attache à la description d'une cité idéale. Le philosophe grec poursuit dans ces deux ouvrages un but précis : démontrer aux hommes de son époque que dans les temps anciens la Grèce avait été capable de vaincre des ennemis puissants, commandés par des rois fabuleux. Ces livres constituent donc une mise en garde contre une décadence possible de la cité grecque, pour peu qu'elle abandonne les principes qui ont fait sa force.

[modifier] Origine du Timée

Le témoignage de Diogène Laërce nous rapporte une tradition qui dit que Platon aurait plagié l'oeuvre de Philolaos de Crotone pour écrire son Timée [14]. Ce dernier aurait écrit le premier l'histoire de l'Atlantide, et Platon l'aurait plagié littéralement après avoir acheté aux enchères les manuscrits originaux de Philolaos... Nous n'avons rien pour vérifier ces accusations. Mais si on suit la tradition, Philolaos de Crotone avait eu comme maître un certain Pythagore. Or, qui était Pythagore ? Le fils d'un Phénicien ! Et, qui étaient les Phéniciens ? Un peuple très puissant qui était maître des mers comportant d'excellents navigateurs qui fondèrent dès -1100 Gadès au-delà des colonnes d'Hercule... De plus, on connaît l'expédition de Néchao II accomplie par les Phéniciens vers -600. Et, il n'est pas impossible, ou, du moins, il est tentant de voir dans cette expédition, qui est censée avoir fait le tour de l'Afrique, un début potentiel d'élaboration du mythe qui sera celui de l'Atlantide retranscrit plus tard par Platon. En suivant ce raisonnement, Philolaos aurait tenu de Pythagore ces contes que lui-même tenait de ses parents et de la tradition phénicienne.

  • Diogène Laërce Vie de Philolaos : "Il a écrit un livre dont Hermippe dit, sur la foi d’un écri­vain, que Platon le philosophe, venu en Sicile chez Denys, l’acheta aux parents de Philolaos quarante mines de monnaie d’Alexandrie, et qu’il en tira la matière de son Timée. D’autres auteurs racontent que Platon reçut ces livres de Denys, alors qu’il demandait la grâce d’un jeune homme, disciple de Philolaos et jeté en prison.". De ces deux traditions la plus crédible est la deuxième ; en effet Hermippe dit que Platon aurait payé avec de la monnaie d'Alexandrie.. or, Platon est mort en -347 et Alexandrie n'est fondée que 16 ans plus tard... la deuxième tradition qui veut que Denys ait donné à Platon les écrits de Philolaos est plus plausible, mais n'est pas forcément beaucoup plus crédible : en effet, le mot d'ordre de l'école pythagoricienne était d'empêcher autrui de lire les livres du maître Pythagore; la récupération de ces livres n'a donc pu se faire qu'à l'époque de la destruction de l'école (fin V° s.), or l'école pythagoricienne a été détruite par le feu et dans la surprise et la violence, il est donc difficile d'imaginer que les écrits aient survécu ; du moins leur survie peut être objectivement sujette à caution.

[modifier] Eléments et polyèdres réguliers

Platon, comme certains présocratiques, considère que le monde est composé de quatre éléments, la terre, le feu, l'eau et l'air. Or au moment de l'écriture du Timée, les mathématiciens savaient qu'existaient quatre polyèdres convexes réguliers : le tétraèdre, le cube, l'octaèdre et l'icosaèdre. Platon considère qu'à chaque élément convient un polyèdre : le cube convient à la terre parce que c'est le plus stable, le tétraèdre au feu parce que c'est le plus anguleux, donc le plus douloureux, l'octaèdre à l'eau et l'icosaèdre à l'air. En fait, il manquait le dodécaèdre, mais le mathématicien Théétète montra qu'il n'en existait pas d'autres. Platon, dans l'Epinomide, associera ce nouveau polyèdre à l'éther.

[modifier] Le Critias

  • Critias (grand-père de l'un des trente tyrans que Sparte avait nommés au gouvernement d'Athènes, en 404 avant Jésus-Christ) rapporte dans le Timée ce qu'a dit Solon le Sage : « Il y a en Égypte. dans le Delta, vers la pointe duquel le Nil se partage, un certain pays, qu'on appelle Saitique, et dont la plus grande ville est Sais. C'est une déesse qui l'a fondée : en égyptien, son nom est Neith, mais en grec, c'est Athéna ».

Solon a entendu, de la bouche « des prêtres les plus savants », une étrange prophétie :

« Une déviation se produit parfois dans les corps qui circulent au ciel, autour de la terre. Et à des intervalles de temps largement espacés. tout ce qui est sur terre périt alors par la surabondance du feu. Tous ceux qui habitent sur les montagnes, dans les lieux élevés et dans les endroits secs, périssent plutôt que ceux qui demeurent proches des fleuves et de la mer. Mais pour nous, le Nil, notre sauveur en d'autres circonstances, nous préserve aussi de cette calamité-là... La race la meilleure et la plus belle parmi les hommes, vous ne savez pas que c'est dans votre pays qu'elle est née... Vous l'ignorez parce que pendant de nombreuses générations les survivants sont morts sans avoir été capables de s'exprimer par écrit. Oui, Solon, il fut un temps, avant la grande destruction par les eaux, où la cité qui est aujourd'hui celle des Athéniens, était de toutes la meilleure dans la guerre et singulièrement la mieux policée à tous égards. Y furent accomplis les exploits les plus beaux, et il y eut les organisations politiques les meilleures. »

Et le prêtre décrit alors ce qu'était l'organisation sociale d'Athènes, neuf mille ans avant qu'elle soit engloutie par une catastrophe.

« .. en premier lieu, la classe des prêtres, séparée de toutes les autres, puis la classe des artisans, la classe des bergers, celle des veneurs et celle des laboureurs. Pour la classe des combattants, elle est également distincte de toutes les autres, et qu'à ses membres la loi a prescrit de ne s'occuper de rien, sinon de ce qui concerne la guerre. »

C'est, selon l'interlocuteur de Solon, cette organisation sociale (que les philosophes appelleront la cité platonicienne) qui permet d'expliquer :

« comment votre cité anéantit jadis une puissance insolente qui envahissait à la fois toute l'Europe et toute l'Asie et se jetait sur elle du fond de la mer Atlantique. Car, en ce temps-là, on pouvait traverser cette mer. Elle avait une île. devant ce passage que vous appelez, dites vous. les colonnes d'Hercule Cette île était plus grande que la Libye (c'est ainsi que l'on appelait alors la partie de l'Afrique située à l'ouest de l'Égypte) et l'Asie réunies. Et les voyageurs de ce temps-là pouvaient passer de cette île sur les autres îles, et, de ces îles, ils pouvaient gagner tout le continent, sur le rivage opposé de cette mer qui méritait vraiment son nom (Atlantique). Car d'un côté, en dedans de ce détroit dont nous parlons, il semble qu'il n'y ait qu'un havre au goulet resserré, et de l'autre, au-dehors, il y a cette mer véritable et la terre qui l'entoure et que l'on peut appeler véritablement un continent. Or, dans cette île atlantique, des rois avaient formé un empire grand et merveilleux- Cet empire était maître de l'île tout entière et aussi de beaucoup d'autres îles et portions du continent. En outre, de notre côté, il tenait la Libye jusqu'à l'Égypte et l'Europe jusqu'à la Tyrrhénie (Italie occidentale). Cette puissance entreprit d'asservir votre territoire, le nôtre et tous ceux qui se trouvent de ce côté-ci du détroit. Mais la puissance de votre cité fit éclater aux yeux de tous son héroisme et son énergie. Car elle l'a emporté- D'abord à la tête des Hellènes puis, abandonnée par les autres, elle vainquit les envahisseurs, libéra tous les autres peuples et nous-mêmes qui habitons à l'intérieur des colonnes d'Hercule. Mais, dans le temps qui suivit, il y eut des tremblements de terre effroyables et des cataclysmes. Dans l'espace d'un seul jour et d'une nuit terribles, toute votre armée fut engloutie d'un seul coup sur la terre et, de même, l'île Atlantide s'abîma dans la mer et disparut. Voilà pourquoi, aujourd'hui encore, cet océan de là-bas est difficile et inexplorable, par l'obstacle des fonds vaseux et très bas que l'île, en s'engloutissant. a déposés. »

Dans le Critias, Platon apporte des précisions sur l'organisation du royaume de l'Atlantide. Ce dialogue s'interrompt toute fois brutalement, sans que l'on sache si Platon écrivit jamais la suite, dans laquelle il devait détailler la guerre des Athéniens contre les Atlantes, ou si celle-ci fut perdue. Le même doute subsiste quand à l'existence du troisième dialogue, l'Hermocrate, qui devrait en toute logique compléter le triptyque.