Spiritualité

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La spiritualité définit l'élan de l'âme ou l'ensemble de croyances, de pratiques et d’études qui traitent de l’être vivant en relation avec sa nature essentielle, son âme ou son esprit, par opposition à ses besoins matériels ou à ses ambitions "mondaines" (terrestres). Cette quête métaphysique oppose souvent un besoin d’éternité à l'apparente évanescence du Monde, et elle s'appuie notamment sur une ascèse pour défaire l'individu des attachements qui empêchent le progrès spirituel.

Sommaire

[modifier] Vue d'ensemble

Chaque religion, ainsi que d'autres courants ou traditions, a pu développer une spiritualité propre; on peut cependant rechercher des convergences au niveau fondamental de leurs motivations et de leurs manifestations.

[modifier] Origine et perspectives

Bien que les traditions spirituelles se soient développées de façon souvent très normative (dans le cadre d’Églises établies, ou de rites traditionnels), l’aspiration spirituelle existe semble-t-il depuis la nuit des temps, liée à l'espoir d'une survie après la mort physique ainsi qu'à des rites propitiatoires proches du chamanisme (pour appeler une bonne chasse, de bonnes récoltes etc.). Certains ont pu y lire un moyen de ne pas se confronter à la réalité de notre condition de mortels; selon d’autres il révèle la mémoire intrinsèque de l’immortalité de l’âme.

La spiritualité a connu dans le monde contemporain des prolongements en philosophie (avec des courants de spiritualité laïque ou athée), mais aussi en psychologie, des thérapies l'intégrant dans leur champ.

La spiritualité se situe donc sur un terrain où se rencontrent religions, philosophie, psychologie, dont les différentes approches sont souvent conflictuelles mais aussi s'interfécondent.

[modifier] Nature d'une expérience spirituelle

Vécue d'abord de façon personnelle, l'expérience spirituelle favorise néanmoins une lecture désintéressée de la condition humaine et du Monde. Elle veut impliquer toutes les capacités de l'individu, afin de le faire accéder à une conscience de l’être dans sa totalité.

La spiritualité conduit alors ses adeptes à des démarches qui ne sont pas seulement intellectuelles mais également mentales, émotionnelles et mystiques, cherchant à générer une expérience transcendante, une relation (selon l'une des étymologies de religion) avec Dieu, le Soi, la Conscience, l’Âme, le Monde, le Devenir etc. Pour certains, le but de la spiritualité est l'éveil spirituel, l'accession à un état de conscience amélioré et durable.

La liberté, le sens, l'intention sont des problématiques que rencontrent (et souvent dépassent) les pratiquants d'une spiritualité, mais elles sont plus spécifiques à l'expérience mystique.

[modifier] Exercices spirituels

D'un point de vue plus concret, on remarque dans les différentes traditions un certain nombre de pratiques qui donnent corps à la spiritualité:

Certaines de ces activités sont solitaires, d'autres collectives, certaines se vivent dans la retraite (cellule, enclos monastique) et d'autres "à l'extérieur" (dans la société civile); enfin certaines sont contemplatives, d'autres plus pratiques. Le choix des activités et l'importance relative donnée à chacune permet de définir la spiritualité propre à chaque courant spirituel.

Toutes ces activités sont expressément définies et organisées lorsque l'expérience spirituelle est vécue au sein d'un monastère (ou son équivalent), les tâches domestiques étant alors également incluses dans le champ de la pratique spirituelle et donc stipulées par la Règle monastique.

[modifier] Spiritualité religieuse

La spiritualité religieuse se rapporte à l'aspiration à se "relier" (du latin "religare"). Il s'agit alors essentiellement de se relier à Dieu, au Divin, à une réalité transcendante. Par extension, la religion est ce qui tend à relier aux hommes et à la nature mais toujours sur la base du lien à Dieu. Les principes religieux exposent les raisons et les méthodes de ce "religare" mais la religion peut produire des effets tout à fait opposés en conduisant l'humanité à la guerre et à la division. La spiritualité religieuse s'est développée sans véritable concurrence pendant de nombreux siècles pour les chrétiens, jusqu'à l'apparition des sectes chrétiennes (au sens de "branches nouvelles"), qui ont séparé les catholiques des protestants, puis de l'islam. Dans tous les pays où le christianisme n'était pas parvenu à s'imposer par la force ou l'évangélisation, les religions locales ont continué à se développer.

[modifier] Spiritualité non religieuse

Depuis la naissance de la philosophie, des hommes revendiquent leur spiritualité sans appartenir à aucune religion: ils expriment une victoire de l'humanisme (lequel ne relève pas exclusivement de l'athéisme)[1]. À partir de la seconde moitié du XXe siècle se développent des approches spirituelles non religieuses, parmi lesquelles une mouvance qui se fait appeler spiritualité laïque[2]. La spiritualité laïque se présente comme une vision universelle de l'intuition spirituelle propre à chaque être humain, intuition qui peut être définie comme un ressenti d'unité avec la totalité et une perception d'un état d'être transcendant la matière. La spiritualité laïque se dit non dogmatique, non sectaire et ouverte au débat et à l'élaboration progressive d'une société plus unie et partageant des valeurs communes.

En 2006, le philosophe André Comte-Sponville relance l'idée d'une spiritualité sans Dieu, dans son ouvrage L'Esprit de l'athéisme[3]. Mais, avant lui, un philosophe comme Vladimir Jankélévitch jetait, à la suite de Bergson, les bases d'une spiritualité humaine, c'est-à-dire de l'amour, sans pour autant se réclamer de l'athéisme.

Le bouddhisme se montre sensible à cette évolution du concept de spiritualité. Selon Matthieu Ricard, interprète français du 14e Dalaï Lama: « Très attaché à la notion de "spiritualité laïque"[4], le Dalaï-Lama déclare que "la religion est un choix personnel et que la moitié de l’humanité n’en pratique d'ailleurs aucune et qu'en revanche les valeurs d’amour, de tolérance, de compassion prônées par le bouddhisme concernent tous les humains, et cultiver ces valeurs n’a rien à voir avec le fait d’être croyant ou non"[5].

[modifier] Spiritualité et psychothérapie

Lors de l'apparition des premières psychothérapies (Freud, Jung), quelques psychanalystes en vinrent à conclure que certaines pathologies pouvaient ne pas trouver de résolution par l'analyse seule. Après avoir montré le rôle important de la société dans la névrose, l'analyse débouchait parfois sur des problèmes qualifiés de "spirituels". Certains psychanalystes, dont Jung, se tournèrent vers l'étude de pratiques issues de certaines religions traditionnelles afin de "guérir l'âme".

Dans les doctrines comme le soufisme, le taoisme, l'hindouisme ou le bouddhisme, l'être humain est considéré comme souffrant du déséquilibre de ses émotions, de ses fixations mentales, de ses "mémoires" et du manque d'harmonie entre l'intellect, le corps et la parole. La "guérison spirituelle" est généralement recherchée avec l'appui et l'encadrement d'un maître, d'un guide, dénommé lama, gourou ou cheykh selon les traditions. Au travers de la relation entre le disciple et le maître, ce dernier jouait parfois le rôle d'un thérapeute avant l'heure, proche du "patient" de la médecine moderne.

Cette approche spirituelle reste cependant limitée aujourd'hui aux régions du monde où la relation de maître à disciple est acceptée. Dans les pays occidentaux et particulièrement ceux où la laïcité est combative à l'égard du religieux, et où les institutions tendent à encadrer fortement les processus de soins et de thérapie, cette combinaison de la thérapie et de l'approche spirituelle (parfois appelée "psycho-spiritualité") demeure assez rare et est souvent jugée suspecte.

[modifier] Références

  1. Humanisme laïc et humanisme religieux
  2. Spiritualité Laique - Association Unisson
  3. L'Esprit de l'athéisme, Albin Michel, 2006. (ISBN 9782226172730)
  4. Interview de Mathieu Ricard
  5. (ibid.)

[modifier] Voir aussi