Skinhead

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Skinhead (des mots anglais skin {peau} et head {tête} : rasé) désigne à l'origine un jeune prolétaire britannique au crâne rasé.

Déjà pendant la Guerre Civile anglaise (1642-1649), les partisans du Parlement menés par Oliver Cromwell étaient appelés les têtes rondes par leurs ennemis en raison de leur coupe courte opposée à la longue chevelure des aristocrates partisans du roi Charles Ier Stuart. La ressemblance avec les skinheads s'arrête là car les partisans de Cromwell, même s'ils recrutaient beaucoup parmi les classes populaires, étaient avant tout des protestants puritains qui refusaient les prétentions absolutistes du roi et la possibilité d'un rétablissement du catholicisme en Angleterre.

Il y aurait également mention d'individus répondant à la définition et à l'appellation du skinhead dès le début du XXe siècle dans la presse du Royaume Uni. Le terme désignait de jeunes voyous issus des quartiers pauvres aux cheveux courts, l'équivalent des « Apaches de la zone » en France. Néanmoins, dans son acception moderne, skinhead s'applique à un mouvement de jeunesse né à la fin des années 1960 au Royaume Uni.

Dès le début, les skinheads antiracistes dénient aux skinheads d'extrême-droite le droit de s'appeler skinheads et les qualifient de boneheads (« crétins »). À l'inverse, les skinheads d'extrême-droite se considèrent comme les seuls vrais skinheads et nomment les skinheads antiracistes rouges.

Sommaire

[modifier] Des Mods aux Skinheads

Les skinheads sont issus de la vague modernist. Dans un premier temps il s'agit de jeunes Londoniens qui se passionnent pour le Modern jazz. Dans les années 1963-1964, cet underground élitiste est devenu une vague de fond de premier plan dans la culture des adolescents et devient un enjeu commercial. Les faits divers consacrent les batailles rangées entre Mods et Rockers comme un mal générationnel, notamment lors des bagarres de Brighton qui amèneront nombre des jeunes en mal de sensations fortes vers ce mouvement, quitte à le standardiser.

Après 1967 beaucoup de Mods se tournent vers le flower power et le psychédélisme. Certains préservent le style originel et radicalisent leur look : ce sont les hard mods, ou encore heavy mods. Ils portent le costume cintré et le chapeau pork-pie pour danser, mais des vêtements de sport ou de travail pour traîner dans la rue (polo Fred Perry, chaussures Doc Martens noires ou rouges). Ils prennent le contre-pied de la mode branchée de l'époque (telle la vague psychédélique ou le mouvement hippie) et affichent fièrement leurs origines ouvrières (working class). Ces hard mods se crispent sur l'identité modernist de la période 1962-1966 : musique noire américaine (Soul), luxe italien (Dolce Vita), style urbain et moderne, scooters Vespa ou Lambretta.

Comme ils vivent dans les même banlieues et quartiers ouvriers, les hard mods fréquentent les rude boys, ou rudies, jeunes immigrés antillais, surtout jamaïcains, dont le look est proche et avec qui ils partagent le goût pour la musique noire américaine (soul, rythm'n'blues) et jamaïcaine (ska et rocksteady). Vers 1968, les hard mods et les rudies se confondent pour devenir les skinheads.

Certains prétendent qu'ils se sont tondus les cheveux pour se distinguer des hippies. Ou encore parce que nombre d'entre eux travaillaient en usine, porter les cheveux courts relevait d'une norme pour éviter les incidents au contact des machines. Plus probablement, il s'agit d'un moyen pour échapper à la police montée lors des émeutes. Il s'agit aussi d'une coupe de cheveux traditionnelle au sein du monde ouvrier. Le look skinhead se standardise vite : cheveux courts (tondus ou coupés courts, mais rarement rasés à blanc à cette époque), favoris, polo style Fred Perry, chemise style Ben Sherman, bretelles, blue jean style Levis 501 coupé court ou pantalon ajusté type Sta Press (rejet des pattes d'éléphant), chaussures Dr. Martens, rangers ou baskets, blouson style bombers jacket, harrington ou encore donkey jacket (manteau de docker), écharpe de son club de football préféré...

Le blouson harrington, porté par les mods, puis les skinheads et enfin les punks, n'est pas une marque mais un type de veste légère en toile de coton unie doublée de tissus à carreaux écossais (tartan). Le nom vient du héros de la série télévisée américaine Peyton Place, très populaire au début des années 1960, Mr Harrington, qui portait ce vêtement. Le look skinhead est donc un mélange de sportswear, de vêtements de travail et de surplus militaires. Mais le costume ajusté, héritage moderniste, est encore porté pour danser ou frimer en soirée. Ces adolescents et ces jeunes adultes s'approprient, comme ceux d'aujourd'hui, certaines marques devenant emblématiques : Fred Perry, Lonsdale, Ben Sherman, Everlast, ou encore Adidas

[modifier] 1969, les Skinheads popularisent le reggae

En 1969, un véritable raz-de-marée skinhead envahit le Royaume Uni. Cette contre-culture devient soudain très à la mode et unit les jeunes des quartiers ouvriers, tant blancs que noirs. Les skinheads écoutent de la soul, du rythm'n'blues (des labels Stax, Motown ou encore Chess records), du mod's beat (soul-rock britannique des Who et autres Kinks ou Small Faces), mais surtout du ska, du rocksteady et du reggae avec des artistes noirs venus des Caraïbes tels Simaryp, Laurel Aitken, Desmond Dekker et même les Skatalites, les Upsetters, Jimmy Cliff ou Bob Marley, les Wailers... Le reggae et le rocksteady, bien plus que le ska presque passé de mode en 1969, apparaissent comme le son skinhead par excellence. Pour les puristes, on parle alors , de reggae one drop ou encore de early reggae, un terme sera d'ailleurs donné au début des années 80 pour qualifier le son des années 69-71 : le skinhead reggae. Dans la tradition modernistes, les skinheads aiment danser. Ils rivalisent de pas de danse compliqués pour frimer lors des discoes, l'équivalent des boums françaises. Les chansons parlent de leur vie quotidienne : émeutes, difficultés de la condition ouvrière, problèmes de tous les jours, contestation sociale, mais aussi sexe, danse et football. Les principales maisons de disques éditrices de ska et de skinhead reggae au Royaume Uni sont Trojan Records, Pama Recordset Torpedo Records. Le logo Trojan (un casque de guerrier troyen) a été repris par la suite pour désigner les skinheads originels (spirit of 69). Les filles sont appelées skinhead girls plutôt que birds ou birdies (terme péjoratif équivalent du français "nana" ou "gonzesse").

Les skinheads constituent à la fois une mode vestimentaire liée à des goûts musicaux, mais aussi une véritable contre-culture de jeunes avec ses comportements types (frime, violence, danse) et son argot. Celui-ci est largement influencé par l'accent jamaïcain : ainsi brother devient bovver. Aggro désigne la baston. Les leaders du mouvement sont les boss skinheads.

Ces gangs de jeunes ont parfois un comportement violent et les hooligans adoptent vite le style vestimentaire des skinheads. Certains avancent que les skinheads sont issu du hooliganisme. C'est à la fois vrai et faux : les jeunes Britanniques des classes moyennes et populaires se comportent souvent en hooligans dans les stades de football, mais le hooliganisme est plus ancien que le style skinhead (il date du début du XXe siècle) et les codes vestimentaires des hooligans varient beaucoup avec les modes (la plupart des hooligans actuels n'ont absolument pas le look skinhead). L'abus d'alcool et de drogues diverses (surtout les amphétamines pour pouvoir danser toute la nuit, le LSD étant plutôt une mode de hippies) n'arrange rien à l'image des skinheads. La presse tabloïd peut dès lors stigmatiser les skinheads, comme elle l'avait fait auparavant pour les mods ou les rockers. C'est la nouvelle menace.

L'Union Jack
L'Union Jack

L'usage fréquent des couleurs nationales (Union Jack pour l'ensemble des Britanniques ou Saint Georges Cross pour les Anglais) par les skinheads de cette époque est abusivement interprété comme un glissement vers le nationalisme. En fait les jeunes Britanniques font souvent preuve d'un patriotisme cocardier tel qu'on peut le rencontrer dans les tribunes des stades de football. Il n'est généralement fondé sur aucun nationalisme au sens strict. Les mods auparavant arboraient les couleurs nationales pour le côté "pop art " et les punks par la suite feront de même par désespoir social et ironie. Notons aussi que les Britanniques pavoisent beaucoup plus fréquemment que les Français. Cette fierté d'appartenir à la nation britannique est même un élément unificateur pour les jeunes Britanniques blancs et les Antillais noirs venus de la Jamaïque ou de Sainte-Lucie (états du Commonwealth, dont les habitants sont assimilés aux Britanniques puisque sujets de la même reine). Ceci peut aussi s'appliquer aux Pakistanais, eux aussi ressortissants du Commonwealth.

Mais il est vrai que les skinheads de cette époque font preuve de méfiance à l'encontre, non pas des Noirs, mais des jeunes Indiens et Pakistanais, dont le style vestimentaire et les goûts musicaux les rapprochent des hippies. Certains organisent de véritable ratonnades à leur encontre : le paki bashing. Ceux-ci réagissent et fondent des gangs de skinhead scalpers. Cette opposition entre skinheads noirs et blancs d'une part et jeunes indo-pakistanais de l'autre n'a cependant jamais été une généralité lors de la première vague skinhead. C'est plutôt une réalité circonscrite à certains quartiers de Londres et surtout à certains gangs. Les archives d'époque montrent d'ailleurs de nombreux skinheads au type asiatique.

Cette première vague skinhead est donc avant tout une mode, un style musical et vestimentaire largement méconnus hors du Royaume-Uni. Il n'y a pratiquement pas de skinheads à cette époque en Europe continentale ou en Amérique du Nord. Seuls certains adolescents émigrés à cette époque en famille en Australie et au Canada exporteront le style hors Grande Bretagne. Tout au plus la mode vestimentaire skinhead a-t-elle eu quelques échos en mai 68. De manière amusante, dans le film "Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil" (1970), l'acteur Jean Yanne porte pendant quelques séquences une tenue inspirée par la mode skinhead : jean serré à revers, blouson ajusté de la même étoffe, rangers, cheveux plaqués et favoris. Pour la plupart des journalistes britanniques les skinheads ne sont qu'une nouvelle sorte de voyous incontrôlables (à l'époque la France a ses blousons noirs). Le mouvement n'est pas politisé.

Vers 1970 la vague skinhead s'essouffle. De nouvelles modes apparaissent : le style glam rock pour les jeunes blancs et le mouvement rastafari pour les noirs. Les skinheads authentiques, qui rejettent l'image de violence gratuite de beaucoup de hooligans qui leur colle à la peau, adoptent le style suedehead (crâne de velours): le look devient plus recherché, à la manière des mods, les cheveux repoussent.

Le mouvement skinhead originel n'a donc une durée de vie que de quelques mois, nombre des Hardmods le laisseront tomber de dégout dès que celui sera identifié par le plus gros journal britannique comme une entité à part du mouvement Mod, le 3 septembre 1969.

[modifier] 1979, les Skinheads réapparaissent puis se politisent

Une paire de docs. On aperçoit la couture jaune distinctive autour de la semelle.
Une paire de docs. On aperçoit la couture jaune distinctive autour de la semelle.

Après 1971 l'esprit skinhead ne disparaît pas pour autant et survit à travers les suedeheads puis les smoothies (ces-derniers portent les cheveux assez longs). Les deux adoptent le style bootboy lorsqu'ils descendent dans la rue : blue jean retroussé, Doc Marten's montantes, bretelles... C'est le style vestimentaire arboré dans le film de Stanley Kubrick "Orange mécanique".Coïncidence troublante, les jeunes décrits dans le roman d'Anthony Burgess dont s'inspire le film arborent déja cet uniforme plus de dix ans avant. L'œuvre est violente mais le message est plus subtil qu'il n'y paraît : une critique des théories comportementalistes et une caricature des aspects les plus ridicules des sociétés modernes. À la suite ce film constituera une source d'inspiration pour de nombreux groupes skinheads, contribuant à forger l'image du jeune rebelle violent, incontrôlable mais cyniquement lucide.

Les mods eux aussi sont has-been mais restent nombreux, en particulier dans le nord de l'Angleterre où ils sont à l'origine d'un style musical particulier, influencé par la musique noire américaine des années 1960, la northern soul.

Les codes musicaux changent et chez les bootboys le reggae, le rocksteady et le ska sont vite supplantés par le glam rock (cf David Bowie ou The New York Dolls), le pub rock (cf Dr. Feelgood et Elvis Costello) puis le punk-rock (genre musical inventé aux États-Unis par les Stooges, les New York Dolls, encore eux, et les Ramones, nés en 1974 et célèbres dès 1976). Nombre des premiers punks britanniques (fin 1976-début 1977) ont le style bootboy, à commencer par les Clash (par ailleurs fans de reggae et de pub rock).

Profitant de l'explosion médiatique punk en 1977, les skinheads et même les mods réapparaissent et se mêlent aux punks. Ils sont alors peu nombreux, noyés dans la masse punk. Le film Quadrophenia (1979) et le groupe The Jam participent à la relance du courant modernist. L'hybridation des mods et des punks porte le nom de hard-mods (reprise d'un terme déjà utilisé à la fin des années 1960). Le groupe punk The Undertones, qui connaît un certain succès entre 1978 et 1981, présente de troublantes similitudes avec les Hard Mods des années 60.

Après 1979 cependant, le punk-rock n'a plus la faveur des médias de masse et le look punk se radicalise : les punks deviennent not dead (de l'expression « punk's not dead »). C'est l'époque où apparaissent blousons cloutés et crêtes colorées. Cependant beaucoup de punks de la première vague adoptent le style des skinheads, ce qui passe à la fois comme un retour aux sources et une radicalisation. Le mouvement skinhead connaît une nouvelle heure de médiatisation.

Ces nouveaux skinheads écoutent ou jouent du street punk et de la oi !, c’est-à-dire des formes violentes et radicales de punk-rock. Oi!, en argot cockney, est la contraction de l'apostrophe : Hey you !. On entend Oi! pour la première fois sur un morceau des Clash en 1977 (Career opportunities). Les groupes précurseurs sont Menace, Angelic Upstarts ou Sham 69, puis viennent Cockney Rejects, Business, Cock Sparrer, The 4 Skins, Last Resort, The Oppressed, Blitz...

Les Sham 69, groupe emblématique des skinheads (et toujours sur la route) n'ont jamais adopté un look skinhead radical (le chanteur porte les cheveux mi-longs, même s'il a lui même été skinhead dans son adolescence). Les vidéos de la fin des années 1970 montrent plutôt le look bootboy très fréquent à cette époque, ou plus exactement "herbert". Les membres de Blitz ou des Oppressed affichent quant à eux une apparence skinhead beaucoup plus standardisée (cheveux tondus, chaussures montantes, bretelles...). On a prétendu d'ailleurs que les bretelles sont là pour rappeler les origines prolétaires des skinheads. Les Exploited illustrent le look street-punk, fondamentalement différent de celui des skinheads : coupes iroquoises (crêtes), blousons de cuir cloutés, cartouchières et pantalons moulants s'écartent du look skinhead. On constate ici (sauf pour les cheveux) une osmose avec le style heavy metal très extravagant de l'époque. Mais les punks not dead portent aussi bretelles, jeans retroussés et chaussures montantes comme les skinheads. Les punks semblent préférer les rangers et les skinheads les Docs Martens coquées ou les paraboots (terme générique pour désigner les bottes de saut, la marque la plus connue étant Getta Grip). Les looks intermédiaires entre le punk et le skinhead sont désignés sous les termes bootboys, skunks ou encore herberts. Ces nuances paraissent futiles au néophyte. Mais il faut comprendre que chez les punks comme les skinheads l'apparence vestimentaire, la coupe de cheveux et l'allure en général ont une importance considérable. La plupart sont des adolescents ou de jeunes adultes qui cherchent à s'émanciper et sont donc très attentifs aux codes vestimentaires.

Cette époque connaît aussi un revival rocksteady, ska et skinhead reggae qui contribue à populariser le style skinhead avec des groupes comme Madness, The Specials, Bad Manners ou The Selecter de chez Two-Tone Records. Ces musiciens adoptent un style vestimentaire plutôt modernist ou hard mods, mais le public comme nombre de musiciens de ces groupes est largement skinhead. De nombreux artistes jamaïcains tombés dans l'oubli refont surface (par exemple le chanteur Laurel Aitken, godfather of ska music, ou le tromboniste Rico Rodriguez). Le ska, énergisé par les influences punk-rock, remporte les faveurs du public skinhead de l'époque.

Mais en 1979, contrairement à 1969, la très grande majorité des skinheads sont blancs. C'est aussi de cette époque que date l'habitude de se raser les cheveux et la musique Oi! de cette époque est souvent qualifiée de closed shave (rasée de près). Le slogan ACAB (all the cops are bastards, "tous les flics sont des bâtards") fait son apparition. Dès 1979 la mode skinhead dépasse le Royaume-Uni et touche l'Amérique du Nord et l'Europe de l’Ouest (en France la première compilation skin-punk Chaos sort en 1982). C'est une contre-culture particulièrement vivace dans les années 1980, même si elle n'attire pas la majorité des jeunes. En France, le street-punk des Camera silens ou deLa Souris Déglinguée attire un public skinhead. À New York les inventeurs de la musique punk-hardcore sont généralement des skinheads (Agnostic Front, Sick Of It All, Madball, MOD, ...), et revendiquent encore aujourd'hui leur appartenance ou tout au moins des liens avec le mouvement. Le terme de hard-core skinhead est assez répandu aux Etats-Unis. Ces skinheads évoluent dans une mouvance plus large : le punk-rock, le hardcore ou encore le rock alternatif.

Cette seconde époque skinhead est aussi marquée par la récupération politique du mouvement. C'est déjà l'extrème-droite qui cherche à récupérer le mouvement. À la fin des années 1970 l'extrême droite britannique (British National Party et National Front) s'implante parmi les jeunes punks et skinheads blancs issus généralement des classes sociales les plus défavorisées et en situation de marginalisation. Les provocations de quelques punks, comme Sid Vicious qui arborait souvent un t-shirt à croix gammée, ont fait penser à certains que les vrais rebelles étaient les nazis. Ian Stuart, chanteur du groupe punk Skrewdriver, est un exemple typique de cette dérive. Skrewdriver était un groupe street-punk parfaitement apolitique (comme l'immense majorité des groupes punks à cette époque), mais particulièrement provocateur, né en 1976. Après un split de courte durée Ian Stuart (qui jusque là cachait son engagement aupres du National Front depuis 75) reconstitue le groupe en 1979, mais sous une forme politisée ouvertement néonazie, puis il crée Blood and Honour au début des années 1980. C'est un mouvement nationaliste, raciste et en particulier antisémite. Ian Stuart ne cache plus sa fascination pour Hitler et ne tarde pas à apporter directement son soutien aux associations néonazies, aussi bien au Royaume Uni qu'en Allemagne. Il est suivi par une partie des skinheads et certains punks qui adoptent un comportement de plus en plus violent et basculent vers l'extrême droite. Beaucoup sont des hooligans fascinés par la violence sous toutes ses formes. Ils hurlent Sieg Heil! ou Heil Hitler dans les concerts et déclenchent de fréquentes rixes avec les autres skinheads ou les punks, sans parler des agressions envers les noirs ou les immigrés. Le paki bashing reprend.

Certains skinheads ou punks ont pu se rapprocher de l'extrême-droite pour prendre le contrepied des punks (not dead) de la période 1979-1982 : rejet de la saleté, du look "destroy" mal rasé, de la clochardisation, de l'anarchisme braillard, des drogues dures... respect des valeurs familiales, du travail, de la patrie, allure physique et vestimentaire saine et propre... C’est-à-dire le rejet de la marginalisation et l'attachement à des valeurs à la fois populaires et conservatrices. Idéologiquement ces premiers skinheads et punks nationalistes ratissent très large : rescapés du nazisme britannique des années trente qui servent de mentors, antisémites de tout poil, xénophobes échaudés par l'immigration, anticommunistes qui dénoncent les états soviétiques, hooligans violentissimes, punks et skinheads dépourvus de repères idéologiques qui aiment provoquer en arborant des insignes nazis (alors que leurs parents ont souvent combattu les nazis en 1939-45)...

Écœurés par cette récupération de leur contre-culture et fidèles à leurs racines métisses, les skinheads antiracistes se regroupent à partir de 1979-80 dans Skinheads Against the Nazis (S.A.N., impulsé et contrôlé par le Socialist Worker's Party, trotskiste), puis au sein des SHARP (SkinHeads Against Racial Prejudice, mouvement fondé à New York vers 1987 à partir de l'expérience depuis 1985 d'un groupe de skinheads et boot-boys de Cincinnati appelé Baldies Against Racism). La figure emblématique du mouvement SHARP est Roddy Moreno, leader du groupe gallois The Oppressed et importateur en 1988 du SHARP au Royaume-Uni. The Oppressed chantent Work together, référence marxiste implicite et hymne à la classe ouvrière. Mais avant que les "pare-feux" ne se mettent à fonctionner, l'image des skinheads, et même de certains groupes emblématiques de la scène, a eu à pâtir de la dérive vers le néonazisme d'une partie d'entre eux. Ainsi les Sham 69 sont désespérés que de nombreux skinheads d'extrème-droite fréquentent leurs concerts (la "SHAM Army", cohorte de fans du groupe, étant même gangrénée par ceux-ci). Son chanteur mythique Jimmy Pursey décide alors de remettre les pendules à l'heure en faisant jouer le groupe dans les festivals RAR (Rock Against Racism). Les Sham 69 adaptent le chant révolutionnaire chilien El pueblo unido jamas sera vencido (Le peuple uni ne sera jamais vaincu) en If the kids are united they will never be defeated (Si les jeunes sont unis, ils ne seront jamais battus). Ces groupes réaffirment leur fierté d'appartenir à la classe ouvrière et de partager ses valeurs : fraternité, solidarité, luttes sociales... A la même époque les Dead Kennedys (groupe punk californien) dénoncent la dérive des punks et skinheads nazis dans le morceau Nazi punks. Fuck off!.

Certains skinheads anti-racistes sont engagés au sein du Socialist Worker's Party, organisation marxiste révolutionnaire qui organise de grandes grèves à partir de 1980 en réaction à la politique libérale du gouvernement Thatcher (remise en cause d'acquis sociaux, restructurations doulouleuses dans l'industrie et les mines...). Ils sont appelés reds (rouges) par les nationalistes qui les accusent de vouloir faire basculer l'Occident dans la sphère soviétique. Certains sont effectivement trotskystes, donc communistes mais opposés à l'URSS. Mais la plupart des skinheads anti-racistes de cette époque au Royaume-Uni sont plutôt proches du travaillisme ou du syndicalisme réformiste. Ils ne constituent que des compagnons de route du Socialist Worker's Party. Les véritables redskins, impliqués dans la gauche révolutionnaire, constituent d'ailleurs à l'origine un mouvement distinct des skinheads. Ils gravitent autour du groupe de soul-rock The Redskins, animé par des permanents du SWP.

Les skinheads anti-racistes considèrent les nationalistes et les néonazis comme de faux skinheads et les appellent boneheads (littéralement "crânes d'os", en fait l'équivalent anglais de "crétin"). Ces deux termes, péjoratifs dans l'esprit de ceux qui les utilisent, ont toujours cours aujourd'hui.

[modifier] Les Skinheads aujourd'hui

Skinheads lors d'un concert
Skinheads lors d'un concert

Aujourd'hui la mouvance des skinheads est profondément divisée et hétéroclite. Le néophyte aura bien du mal à les départager, d'autant plus que les codes vestimentaires sont similaires malgré des tendances politiques très différentes. La culture skinhead est fondée sur un support musical. La lecture des chansons, l'imagerie des pochettes de disque, les labels de distribution, de production, les logos ou slogans affichés permettent souvent de localiser politiquement les artistes.

Les skinheads sont en fait à l'image de la société : leur sensibilité politique va de l'extrême droite à l'extrême gauche en passant par la gauche et la droite classique. Certains sont démocrates, alors que d'autres sont attirés par des discours radicaux qui prônent soit une dictature du prolétariat de type marxiste-léniniste, soit une dictature de type fasciste. Certains sont radicalement racistes, alors que d'autres rejettent en bloc tout racisme. Certains sont athées ou agnostiques, alors que d'autres sont croyants (chrétiens, païens, bouddhistes)...

Malgré cette diversité, il y a des points communs qui les rassemblent (presque) tous : ils sont généralement issus des classes sociales modestes ou moyennes, et sont fiers de leurs origines sociales. Enfin, les skinheads sont également très actifs dans la rédaction et la diffusion de fanzines dédiés à la musique, au football et à d'autres cultures (comme le tatouage ou le scooterisme par exemple).

[modifier] Les Skinheads non politisés

Ils sont présents partout en Europe, aux Amériques, en Australie, en Asie... En fait, ils sont présents partout dans le monde où il y a une scène skinhead. Ils constituent très vraisemblement la majorité silencieuse du monde skinhead. Ces derniers refusent toute récupération politique et rejètent toute aliénation à une idéologie politique ou syndicale. Toutefois, cela ne signifie pas que ces skinheads sont dépourvus de conscience politique. Bien au contraire. En réalité, ces derniers n'ont tout simplement pas envie de mélanger musique et culture skinhead avec politique. Pour eux, la politique est un poison et la scène skinhead doit revenir à ses racines des années 60, à savoir redevenir aussi apolitique que les scènes mod, psycho, scooterist ou rocker. Souvent patriotes, les skinheads non-politisés ne sont pas pour autant unis. Ceci s'explique par des sensibilités politiques hétéroclites et surtout par la culture des bandes inhérente au milieu skinhead.

A l'origine les skinheads apolitiques furent ceux qui refusèrent l'embrigadement par l'extrême-droite au début des années 1980 aux États-Unis. Le mouvement SHARP américain peut alors être considéré comme apolitique tout comme son "petit frêre" Anglais (malgré une présence certaine de skins militants issus d'un mouvement trotskyste, la Red Action, scission du Socialist Worker Party).


L'ultra-gauche a longtemps désigné les apolitiques comme des brutes pour qui ne comptaient que les "3B" (bière, baise, baston), voire comme des crypto-fascistes ou des spécialistes du retournement de veste. Il est vrai que certains skinheads français des années 1980 ont commencé par être apolitiques avant de devenir néonazis. Il y eut aussi des parcours inverses. Surtout les skinheads apolitiques apparaissent aujourd'hui comme échaudés par les extrémistes de tous bords. Mais la plupart s'affichent aussi comme antiracistes et non-nazis, ce qui est déjà une prise de position par la négative.

Le SHARP est à la frontière de l'apolitisme et de l'engagement idéologique. De manière là encore très paradoxale on pourrait définir les skinheads Sharp comme des "apolitiques de gauche" (l'expression est d'un journaliste québécois).

[modifier] Les Skinheads Against Racial Prejudice

Le mouvement S.H.A.R.P (Skinheads Against Racial Prejudice ou Skinheads contre les préjugés raciaux) désigne un mouvement de skinheads dits traditionnels se positionnant contre le racisme (contrairement aux boneheads).

Logo du SHARP Biélorusse
Logo du SHARP Biélorusse

Ce mouvement, né aux États-Unis en 1987 est, comme le mouvement skinhead originel, dénué d'affiliation politique précise. Les premiers skinheads SHARP sont fondamentalement antiracistes avec une forme de patriotisme américain sans ambiguïté : la fierté nationale n'est pas une fierté raciale. La bannière étoilée est d'ailleurs le fond du logo SHARP originel, puis lui fut préféré le casque de guerrier grec tiré du logo du label reggae Trojan.

Ce mouvement est né du souhait d'ancrer le mouvement dans l'antiracisme pour contrer la récupération qui en était faite par l'extrême-droite.

Les premières affiches du sharp représentent d'ailleurs une Dr. Martens en train de piétiner une croix gammée sur fond de drapeau américain. Les rapports entre redskins et skinheads SHARP ne sont d'ailleurs pas toujours au beau fixe. À cette époque, le modèle représenté par le bloc soviétique suscitait un rejet important dans la jeunesse occidentale, y compris chez ceux qui avaient une sensibilité de gauche. Si l'appartenance à la classe ouvrière les rapproche d'une vision socialiste de la société, les SHARP skins ne sont pas toujours des amateurs de faucilles et marteaux.

C'est le groupe britannique The Oppressed qui a fait le plus connaître le SHARP en Europe. Après un voyage à New York, Roddy Moreno, le chanteur de ce groupe de Oi! culte des années 80, avait rencontré les membres fondateurs Marcus et Jason, et ramené le concept dans son Cardiff natal

Le SHARP n'est pas un parti structuré, mais un sigle, un signe de reconnaissance pour les skinheads qui rejettent l'extrême-droite.

En France, le mouvement sharp se veut "populaire" et "antiraciste", mais surtout indépendant de tout partis ou syndicat. À Beauvais Sylvain T., skinhead depuis 1982 et éditeur du fanzine Hardtimes, est le premier Francais à développer le SHARP en 1989, aidé de Vincent V. l'ancien président du fan club des Béruriers noirs, lui-même éditeur du fanzine skinhead Un monstre est en moi.

Avec eux une bonne dizaine de skinheads radicalement antiraciste, très attachée à la culture skinhead telle qu'elle a vu le jour dans les années 60, parmi lesquels on trouve pour les acteurs les plus connus de la scène skinhead de cette époque : Flavien P., batteur de Herberts et éditeur du fanzine Kids on the Street et Philippe W., fondateur et batteur du groupe [AntiPatik[1] ] et éditeur du fanzine Zéra. Ce dernier, arrivé de Rouen à Beauvais début 1992, sera aussi connu pour avoir eu un passé nationaliste radical très controversé au milieu des années 80, mais aussi paradoxalement, pour avoir bien connu Marcus Pochelo, fondateur du SHARP à New-York City en 1987. Par le biais de son fanzine ZERA, il eut des contacts avec Bruce Kreitman, skinhead juif de Brooklyn comme lui, et Jason O'toole, chanteur du groupe New York hardcore Life's blood, tous deux membres actifs du noyau dur du SHARP N.Y.C-

En lien direct avec le S.H.A.R.P Beauvais, seule cellule française 100% skinhead anti-raciste affile au SHARP en cette fin d'année 80, on trouve une bande parisienne, composée de Trojan skin (skinhead reggae) et de skinheads traditionnels qui traîne, entre autres, dans le quartier de Jussieu, 5e arrondissement de Paris.

Un des plus anciens skinheads de cette bande Manu R., créera quasiment dans la même période que le SHARP Beauvais, l'ARASH (Anti Raciste ACtion SkinHead). Avec l'autorisation de l'Anti Racist Action mère aux États-Unis, Manu cherche alors à créer, sur Paris une réplique skinhead, sans concession à l'A.R.A américaine : de Anti-Racisme radical et sans compromis. Et ceci, clairement, bien avant le RASH qui apparaîtra sur Paris fin des années 1990, quand la plupart des bandes néo-nazis auront disparus. Cette premiere generation du SHARP en France si elle n'aura que peu d'échos et de reconnaissance aura tout de même permis de faire passer le message et de préparer le terrain pour une nouvelle génération Avec l'arrêt du SHARP Beauvais par Sylvain T.,la plupart des membres du SHARP France originel rejoigne l'ARASH, qui, lui aussi, disparaîtra avec la résurgence d'un SHARP-Paris-Banlieue au milieu des années 90. Là encore on retrouve des membres actifs de la scène skinhead entre autre Laurent et Arielle éditeur du fanzine skinhead Big 5, ainsi que la plupart des skinheads beauvaisiens et parisiens cités plus haut et une nouvelle génération tout aussi radicalement anti-fasciste. Entre-temps nombre de fanzines auront defendu en France l'idée qu'il existe une scene skin antiraciste citons notamment : Skalious Dog, Skactualites, Fantomas, RudeForce, Sang Mêlés, Batko et beaucoup d'autres y compris dans la pourtant frileuse scène alternative... Cette nouvelle generation de skins va aussi se manifester un peu partout en France vers les annees 93-94  : Toulouse avec une active section Sharp Occitania , Angers (autour du fanzine "Rudy's back"), Besançon, Bordeaux (Burdigala Boot Boys/Sharp 33) et Lyon. Le rapport au politique va d'ailleurs parfois etre sensiblement different entre ses diverses et parfois éphémères sections : le fanzine Résistance regroupe des membres du Sharp Occitania et des redskins de la première géneration qui, dans un meme numéro, sont capables d'avoir des analyses différentes ; ceux d'Angers allient traditionalisme culturel et engagement dans les groupes antifascistes locaux (SCALP/Reflex); enfin la prolifique scène Bordelaise est très fortement liée des 1991 à ses voisins du Pays Basque et s'affirme très fortement indépendantiste et anticentraliste tout en refusant son instrumentalisation par des organisations politiques. Là encore c'est l'action de terrain contre l'extreme droite skinhead qui prime sur les sectarismes politiques

Le SHARP est moins une organisation qu'un appel au ralliement de tous les skinheads qui refusent le racisme, l'antisémitisme et la récupération politique par l'extrème-droite au sein de leur mouvement. Le seul fait d'être skinhead étant pour eux un acte antiraciste de part les origines multi-ethniques de ce mouvement né dans le cœur et l'âme du ska jamaïcain. Le SHARP PARIS/FRANCE reste toujours actif par le biais de groupe comme HARDXTIMES- sur Paris qui prône un retour aux valeurs traditionnelles du mouvement skinhead dépourvu de toute afiliation politique mais avec un antiracisme toujours plus soutenu.

[modifier] Les Trojan

Parmi les branches de la mouvance skin qui n'ont pas forcément de coloration politique générale, on rencontre en particulier les Trojan skinheads ou skinheads traditionnels, perpétuateurs de l'esprit de 1969, fans de reggae, de soul, de rocksteady et de ska, ils circulent souvent en scooter comme les 'mods', ils ne mêlent pas forcément musique et politique. Ils affichent cependant un antiracisme sincère et revendiquent leur appartenance à la classe ouvrière. Ils sont, au sens historique, les fidèles continuateurs de la première vague skinhead.


Parmi les groupes de musique skinhead apolitiques, on peut citer The Last Resort, 4-Skins, Cock Sparrer, Warzone ou encore The Business.

[modifier] Les Skinheads politisés

Les skinheads politisés sont des militants politiques, syndicaux et/ou associatifs qui partagent soit une idéologie d'extrême gauche soit une idéogie d'extrême-droite. Leur volonté est de faire passer un message politique radical à travers leurs concerts ou à travers leurs différents fanzines et actions. En dehors de similitudes vestimentaires et musicales (musique oi!), les skinheads d'extrème-droite et d'extrème-gauche s'opposent, presque toujours à travers la violence.


[modifier] Les Skinheads d'extrême droite

[modifier] Les Nationalistes

Ces derniers sont proches des partis d'extrême droite traditionnels, comme le Front National ou le Mouvement National Républicain (MNR) en France. Ces skinheads ne sont pas nazis. Ils sont identitaires (défense de l'identité nationale, de la culture gréco-romaine (voire celto-germanique) et de l'héritage chrétien de l'Europe, et anti-gauchistes. Leur nationalisme parfois exacerbé peut les rapprocher de temps à autre du mouvement White Power (raciste et nazi); certains sont particulièrement opposés à l'islam et aux immigrés d'origine maghrébine (en France), pakistanaise (Royaume-Uni) ou encore turque (Allemagne). Les skinheads nationalistes, souvent attachés aux valeurs conservatrices, peuvent aussi mépriser les homosexuels. Le Groupe union défense (GUD, mouvement étudiant d'extrême droite en France) a un temps recruté parmi les jeunes autour de thèmes fédérateurs comme la défense de l'identité française, le refus de l'immigration ou la corruption des hommes politiques. Selon Fiammetta Venner[1], de nombreux Beurs ou individus d'origine immigrée composent le mouvement skinhead d'extrème-droite et leur engagement fait penser au symptôme d'une crise identitaire, comme si le fait d'être parmi les plus racistes faisait oublier leurs origines et était la forme ultime d'intégration.

Notons aussi que l'extrême-droite française est divisée et que les skinheads qui en sont proches de même. Beaucoup récusent le terme skinhead pour lui préférer celui de "jeune nationaliste". La fréquentation des sites et forums internet de cette mouvance nous apprend ainsi que certains sont profondément antisémites, ils condamnent l'existence même d'Israël et prennent fait et cause pour les Arabes et les islamistes. À l'inverse d'autres voient Israël comme l'avant-garde de l'Occident face au péril arabo-musulman et soutiennent alors le sionisme radical. Cet exemple nous montre des points de vue bien différents.

[modifier] Les White Power, néonazis et suprémacistes blancs
Skinhead nazi
Skinhead nazi

Ouvertement nazis, donc racistes. On parle aussi de boneheads (littéralement, crâne d'os), terme péjoratif utilisé par leurs opposants (tous les autres skinheads), ou de naziskins. Ils sont très actifs (et ont été assez répandus en France dans la période 1985-95, où ils representaient alors la majorité des skinheads) et regroupés dans diverses organisations telles Blood and Honour, Hammerskins ou Combat 18, un groupe terroriste organisé à partir du kop fasciste des Chelsea Headhunters. Les boneheads sont très visibles en Scandinavie, en Allemagne de l'Est (ex-RDA), dans certaines régions des États-Unis (où ils sont organisés en réseau avec d'autres organisations d'extrême droite comme le Ku Klux Klan), ainsi qu’en Europe de l’Est, notamment en Pologne, Serbie ou surtout Russie, pays qui compte le plus grand nombre de boneheads (où ils défraient souvent la chronique par leurs nombreuses agressions contre des immigrés ou Russes orientaux, allant couramment jusqu'au meurtre).

Le look se distingue un peu du look skinhead : il est franchement paramilitaire, les cheveux sont généralement rasés à blanc. Les insignes sont la croix gammée, les écussons de la LVF ou de la division Das Reich, la croix celtique, les galons de la Wehrmacht ou de la SS... La symbolique germanique, viking ou celte est souvent utilisée par les boneheads qui marquent ainsi leur rejet des valeurs judéo-chrétiennes et prônent un retour au paganisme indo-européen. L'usage de l'imagerie celte ou germanique est une récupération. Tous les mouvements qui se réclament du paganisme, du celtisme etc ne sont pas néonazis, ni même nationalistes. Les boneheads se reconnaissent grâce au sigle NS (national-socialiste, c'est-à-dire nazi), généralement accolé au nombre 88 (pour HH, huitième lettre de l'alphabet et initiales de "Heil Hitler"). La marque Lonsdale a longtemps été la préférée des néonazis car en ouvrant partiellement le blouson sur le t-shirt on peut lire NSDA, soit le début de NSDAP (sigle allemand du parti nazi). Cependant les propriétaires de la marque ont beaucoup communiqué sur le fait que le champion de boxe Lonsdale, à l'origine de la marque, a créé à Londres la première salle d'entrainement ouverte aux noirs. Les boneheads ont aujourd'hui leurs propres marques et sigles emblématiques.

Les boneheads se réclament aussi de la classe ouvrière. Dans les années 1980 beaucoup d'entre-eux se considéraient comme les fils spirituels des SA (Sections d'assaut, brigades de militants nazis des années 1930 en Allemagne). Ces SA tenaient un discours à la fois nationaliste, raciste mais aussi social et étaient issus du monde ouvrier et de la petite bourgeoisie. Ils réclamaient des mesures sociales avancées et la constitution d'une armée populaire. Leurs chefs furent exécutés et leurs organisations absorbées par les SS aux ordres d'Hitler lors de la "Nuit des longs couteaux" en 1934.

La musique des boneheads est le RAC : Rock Against Communism. La plupart des groupes rac sont diffusés de façon discrète, par la vente par correspondance, où lors des concerts. Beaucoup de "distros" (petites organisations indépendantes de distribution musicale) en France ou en Allemagne refusent de vendre des disques rac (soit par antifascisme, soit pour éviter les ennuis). Ceux qui acceptent, comme par exemple Bords de Scène à Paris, sont alors identifiés par les skinheads antifascistes comme des agents sournois de l'extrème-droite. Chez les skinheads le simple commerce n'est jamais neutre.

Parmi les groupes musicaux de boneheads, on peut citer : Les Allemands Landser, les Français Légion 88, Bunker 84, Chevrotine, Division Skinhead, les Australiens Fortress, les Polonais Konkwista 88, les Américains Bound For Glory ou encore les Suédois Pluton Svea. Le groupe de référence reste les Anglais de Skrewdriver (cf la première partie de l'article). La plupart de ces groupes incorporent des influences metal à leur musique qui reste quand même à base de oi!. Il existe, depuis quelques années, un rapprochement entre les skinheads white power et les milieux black metal païens, qui se réclament parfois eux aussi du national-socialisme, créant un style hybride qui commence à prendre une certaine ampleur, notamment en Europe de l’Est et aux États-Unis. Si l'on constate aussi une adhésion aux idées d'extrême-droite dans une partie minoritaire des scènes industrielle et dark folk, la mouvance gothique est loin d'adhérer massivement à l'extrême-droite. Il y a là encore une récupération partielle. Seul le RAC peut être considéré, par les idées qu'il véhicule, comme authentiquement d'extrème-droite. Cependant nationalistes et néonazis fréquentent aussi d'autres univers musicaux qui ne leur sont pas réservés (il serait absurde et anachronique de décréter que Beethoven et Wagner sont nazis sous prétexte qu'Hitler utilisait leur musique pour sa propagande).

Voir aussi : NSBM

[modifier] Les Skinheads d'extrême gauche

[modifier] Les Redskins

A l'origine,il s'agit d'un groupe de soul-rock britannique The Redskins (fin 70's/première moitié 80's), dont plusieurs membres appartenaient au Socialist Workers Party et en étaient des permanents. Le nom vient d'une bande de skins de Sheffield proche du minuscule British Communist Part. Le groupe, qui tient un discours révolutionnaire sur fond de musique soul mâtinée de punk-rock, passera la majorite de sa courte carrière à soutenir les luttes de résistance contre les dégâts sociaux et politiques du libéralisme de Thatcher. Notable signe d'independance et de radicalisme, ils refuseront de devenir animateurs du Red Wedge (le "coin rouge") avec d'autres groupes et artistes (Style Council, Billy Bragg, Bronski Beat/The Communards...) jugeant celui-ci trop proche du Parti Travailliste. Leurs incessantes tournées leur permettent d'être le point de rencontre où se regroupent et commencent plus ou moins à s'organiser pour reprendre la rue aux fascistes ou défendre les concerts d'authentiques skinheads "rouges", regroupés dans la Red Action Skinhead (fraction skinhead de la Red Action, un petit groupe politique trotskiste issu d'une scission du SWP sur la question de l'anti-fascisme dans la rue) ou issus de bandes à caractère particulier, comme celle des skinheads de Coventry. Enfin ils permettront de fédérer nombre de skins traditionnels déçus par le tournant raciste de la scène, d'ex-punks rejettant le folklore "punk's not dead", des etudiants en rupture de fac en amenant au grand public leurs themes de predilection : anti-apartheid, soutien aux mineurs en grève et antiracisme dans les quartiers populaires.

En France, portés par l'émergence de la scène dite du "rock alternatif" (Bérurier noir, Nuclear Device, Ludwig Von 88 (qui ont introduit "88" dans le nom de leur groupe ironiquement, Ludwig Von 88 est loin d'etre un groupe nazi), Babylon Fighters, LKDS, Laid Thénardier...) est popularisé par les luttes étudiantes de l'hiver 86 et leur combat dans la rue contre les skinheads d'extrème-droite, les premiers redskins affichaient un look empruntant autant aux skinheads qu'aux tribus "rock" en général (punks, mods, psychobillys...). Au reflux de la vague alternative, à partir de 1989, certains se sont ensuite rapprochés du style skinhead originel en conservant parfois quelques particularismes hérités de cette première vague redskin : bomber retourné côté doublure orange, lacets rouges, insignes et patches communistes divers... C'est dans le sud de la France a Toulouse , Marseille et Bordeaux que la jonction avec un mouvement skin plus traditionnel va s'operer encore plus avant. Mais tous les redskins ne se considèrent par pour autant comme skinheads. Si la majeure partie d'aujourd'hui peut être rattachée aux skinheads (musiques, style vestimentaire ou de vie...), il subsiste un courant qui n'en reste qu'à la marge ou, même, s'en éloigne parfois au niveau culturel (investis dans le rap...) et ne cultivant souvent avec les autres redskins qu'un lien social et politique.

[modifier] Les Red And Anarchist Skinheads
Logo du RASH
Logo du RASH

Fondé à New-York au tout-début des années 90, le RASH (Red and Anarchist Skinheads), surtout européen et, depuis quelques années, latino-américain, regroupe d'anciens redskins de la première vague et de nouveaux skinheads engagés à l'extrême gauche, parfois issus de la mouvance SHARP, le premier groupe Rash etant issu du SHARP new yorkais et de l'Anti Fascist Action. Ses membres considèrent leur appartenance au mouvement skinhead comme un complément de leur engagement militant, le skinhead devenant une forme d'idéal ouvriériste, mais l'inverse est parfois vrai : certains skinheads "sentimentalement" ou culturellement de gauche, mais sans engagement, deviennent militants par les fréquentations, la formation ou l'acquisition expérimentale au sein de bandes et groupes où sont présents des militants du RASH.

Le sigle Rash apparaitra tout d'abord au Havre puis Bordeaux autour des redacteurs du fanzine Shaven Republic (ou RASH est decliné en Red Action Skin Head), pour ensuite s'implanter a Paris. La plupart des skinheads RASH en France, gravitent autour de : l'Union Anarchiste, la Fédération Anarchiste, the Anarchist Black Cross, l'Organisation Communiste Libertaire, la Confédération nationale du Travail (anarcho-syndicaliste), la Ligue Communiste Révolutionnaire et différents groupuscules trotskistes ou guévaristes, voire, marginalement, post-maoïstes... Ce mouvement revendique un antiracisme viscéral et un antifascisme radical et joue parfois, selon les villes, la surenchère vis-à-vis du SHARP, tantôt considéré comme un allié, tantôt comme un concurrent (mais pas comme un ennemi). Les thèmes de la lutte des classe, de l'urgence révolutionnaire ou de l'internationalisme sont récurrents. Un slogan des skinheads Rash est : "Pas de guerre entre les races, pas de paix entre les classes".

Parmi la scène skinhead d'extrême gauche, on peut citer les italiens de Banda Bassotti, Erode, Los Fastidios ou les groupes indépendantistes catalans marxisants Opcio K-95 et Pilseners, les madrilènes de kaos Urbano, Guerilla Oi! ou Non Servium, les basques de Suburban Rebels ou Mossin Nagant, ou encore les groupes libertaires parisiens Brigada Flores Magon et Ya Basta ! ou les groupes marxistes bordelais Los Foiros et Redweiler.

Nombre de groupes, sans être d'ailleurs idéologiquement marqués, soutiennent certaines initiatives du réseau Rash, on peut citer : les Allemands de Stage Bottles, Les legendes britanniques Angelic Upstarts, le premier groupe Oi! Italien Nabat, ou encore The Oppressed...

A noter que certains skinheads Sharp, Rash et de nombreux redskins s'affichent aussi comme indépendantistes, voire nationalistes. Il existe deux nationalismes : un d'extrême-droite (primauté de la nation, valeur structurelle), auquel se rattachent skinheads nationalistes et néonazis, un autre de gauche (liberté pour la nation, espace historique et dialectique d'une communauté de destin), auquel se rattachent certains skinheads engagés à gauche, en particulier au sein de minorités qui luttent pour leur reconnaissance ou leur indépendance : Bretons, Basques, Catalans, Occitans... Dans ce dernier cas il s'agit d'une mouvance très minoritaire et qui arbore le slogan "Occitània Antifascista". Il n'y a donc pas d'équivoque.

[modifier] Autres identités skinheads

De manière plus anecdotique, il existe d'autres groupes skinheads.

[modifier] Les Skinheads chrétiens

Leur positionnement est ouvertement antiraciste et antinazi. Très présents en Amérique du Nord (Canada et États-Unis) où la scène punk-rock chrétienne est gigantesque, les skinheads chrétiens font de plus en plus parler d'eux en Europe. Ces derniers sont beaucoup plus présents dans les milieux hardcore ou ska/rocksteady que dans le milieu Oi!. Parmi les groupes skins chrétiens, on peut citer le groupe de ska/rocksteady américain The Israelites, le groupe de punk hardcore américain The Deal ou encore le groupe streetpunk américain aux sonorités écossaises Flatfoot 56.

[modifier] Les Gayskins

"Skinheads" homosexuels. La mode skinhead est ostensiblement arborées par certains homosexuels, appelés gayskins avec quelques fantaisies amusantes : polo rose fluo ou pantalon en latex moulant... Dans la pornographie homosexuelle masculine, le skinhead est un avatar du working class boy (jeune ouvrier). Les skinheads d'extrème-droite, généralement homophobes, récusent cette mouvance. Les autres ne les prennent guère au sérieux car les références skinheads des gayskins sont davantage vestimentaires que musicales. A noter qu'il existe néanmoins,dans la mouvance SHARP americaine (collectif Brotherhood) ou Rash (notamment en Allemagne), de véritables skins gays affirmés et revendiqués comme tels. Il existait aussi un groupuscule gay néonazi fondé par un roadie du groupe fasciste Skrewdriver : les Gay Aryan Skinheads, qui se réfèrent aux SA et aux moeurs "grecques antiques" de ces-derniers. Mais ces skinheads homosexuels nazis pratiquent beaucoup moins l'art du second degré que les autres gayskins et tentent surtout, à travers leurs contradictions, de faire exister une identité marginale en soi autant que dans leur propre espace socio-politique.

[modifier] Conclusion

Il faut retenir que les premiers skinheads sont apparus à la fin des années 1960 et qu'ils n'étaient en aucun cas politisés. Leur point commun était leur origine sociale modeste, leur amour de la musique noire et leur goût pour la bagarre. C'est avec l'apparition du punk-rock en 1977 et le chômage qui frappe de plein fouet l'Europe à la fin des années 1970, que le mouvement skinhead se scinde et qu'une partie des skinheads est séduite par les textes néonazis de la seconde formation du groupe britannique Skrewdriver.

[modifier] Bibliographie

  • Série photographique sur les mods, punks, skinheads : Tribes Of England - Our culture
  • Roman très autobiographique sur les hooligans : Football Factory, Éditions de l'olivier ISBN 2879294649 de John King

[modifier] Filmographie

[modifier] Liens internes


[modifier] Notes et références

  1. Fiammetta Venner ,Extrême France p.102, Grasset, 2006

[modifier] Liens externes