Robert Barcia

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Robert Barcia, alias Hardy, alias Roger Girardot, né à Paris 14e le 22 juillet 1928, est un dirigeant politique français d'extrême gauche, co-fondateur de Lutte ouvrière.

Sommaire

[modifier] Historique

Robert Barcia est né à Paris dans un milieu ouvrier sympathisant avec les idées communistes. Il commence à militer en 1943 à l'âge de 15 ans, dans un groupe clandestin du parti communiste (distribution de la presse clandestine, lâchés de tracts dans des cinémas de la place Clichy, etc.) En septembre 1943 il est arrêté en possession de tracts et de journaux et incarcéré à la prison de la Santé. Libéré en février 1944 en compagnie d'une quinzaine de jeunes de moins de 18 ans il reprend contact avec les groupes résistants, rencontre Mathieu Bucholz, alias Pamp, militant trotskiste de la petite organisation Union communiste dirigé par David Korner, alias Barta. Mathieu Bucholz lui raconte le combat de Trotsky contre la bureaucratie soviétique, mais c'est son assassinat par des militants du Parti communiste français à la Libération qui gagne définitivement Robert Barcia aux idées trotskystes, selon lui seule façon de ne pas renoncer au marxisme, au communisme, à la conviction qu'il fallait remplacer la société capitaliste par une société plus communautaire.

Après la guerre, ce petit groupe gravite essentiellement autour de Renault où milite Pierre Bois. En 1947, Pierre Bois dirige la grève à Renault Billancourt et organise le comité de grève. Robert Barcia, tuberculeux, n’y joue aucun rôle. En 1948, il démissionne[1]par « lassitude ». Il a 20 ans, est fatigué et sans ressources et doit se débrouiller. En 1949, l’Union communiste connait une crise et cesse de fait d'exister, David Korner cessant alors toute activité politique. C’est un nouveau déclic pour Robert Barcia et avec Pierre Bois ils reconstituent un petit groupe. À cette époque il publie sous son nom, et en mentionnant son adresse exacte un petit bulletin. Cela lui vaut la visite de Pierre Frank, dirigeant trotskiste, qui tente de le rallier avec ses camarades. Le petit groupe finalement parvient à s’étoffer et donnera naissance, début 1956 à Voix ouvrière.

En 1968, Voix ouvrière est interdite après la révolte étudiante et devient Lutte ouvrière, Pierre Bois et Robert Barcia en sont avec d’autres, notamment avec le renfort d'Arlette Laguiller, les dirigeants réélus, chaque année.

[modifier] Activités professionnelles

En 1949, à l'âge de 21 ans, il devient visiteur médical. L’année suivante, cette activité n'étant pas compatible avec sa vie militante, il quitte rapidement cet emploi. Fin octobre 1950, il est hospitalisé pour une rechute de tuberculose, et va de sanatorium en postcure jusqu'en 1954. À partir de 1953 il redevient visiteur médical pour le laboratoire Ucépha. À l'époque, ce travail était "moins payé que celui d'un ouvrier qualifié". En 1966, il pense démissionner de son poste, après qu'un congé sollicité lui eut été refusé. Le hasard lui vaut d’être licencié juste au moment de déposer sa lettre de démission. Échangeant opportunément son courrier contre un chèque d’indemnité de licenciement, il s'installe grâce à ce « pactole » comme travailleur indépendant. Dès lors cette activité lui permet de consacrer davantage de temps à la construction du groupe "Voix ouvrière".

Il crée une école de formation médicale par correspondance pour préparer à la profession de visiteur médical, à laquelle il donne le nom d'OPPM, dans une ancienne boutique de 20m2 d'un quartier populaire d'Aubervilliers, mais doit continuer à travailler par ailleurs pour ne pas faire faillite. Il affirme que durant toute cette période, ses revenus sont bien inférieurs à ceux d'un ouvrier. Il conçoit un matériel de formation des visiteurs médicaux, qui se fait connaître des responsables de la formation des visiteurs des laboratoires pharmaceutiques.

En 1971 la société OPPM s'est développée et commence à devenir viable économiquement. Robert Barcia explique que pour ne pas posséder personnellement les futurs bénéfices de la société, ce qui serait contraire à son "éthique militante", les cinq salariés de l'entreprise s'associent pour former une SARL dont chacun possède un cinquième des parts. En 1980 afin de bénéficier de revenus réguliers, il devient salarié d'une petite société d'étude, l'EPMED, dont il accepte en 1990 de reprendre 20% des parts. Il prend sa retraite en 1993, sans que jamais ni l'OPPM, ni l'EPMED, qui n'ont que quelques salariés, n'aient jamais empoché de bénéfices. Jusqu'en 1998 il reste administrateur bénévole, puis revend ses parts.

Selon le livre[2] de François Koch, Barcia « serait actionnaire et dirigeant de plusieurs sociétés de services aux industriels du médicament depuis trente ans. Il aurait fondé à Paris, en 1968 et en 1971, l'Epmed (Études et publicité médico-pharmaceutiques) et l'OPPM (Organisation promotion prospection marketing), deux sociétés spécialisées dans la prestation de services et la formation de visiteurs médicaux, qui démarchent les médecins pour le compte d'un industriel. Barcia serait aussi l'un des cofondateurs de l'Association des directeurs de réseaux de visite médicale (Adrev), en 1973. En 1989, alors que la profession doit se doter d'un diplôme obligatoire, c'est à lui que les patrons de laboratoire auraient acheté un programme de formation médicale, par l'intermédiaire du Syndicat national de l'industrie pharmaceutique (SNIP) ». « Pendant toute cette période, Hardy, le pseudonyme de Robert Barcia » serait devenu « un interlocuteur du Syndicat national de l'industrie pharmaceutique, puissant lobby patronal, au point de se retrouver, après 1984, conseiller rétribué du syndicat ».

Selon ce détracteur, cette double vie ferait de Barcia un « collaborateur du patronat le jour et un trotskiste intransigeant le soir ». Les actionnaires et administrateurs de ces sociétés seraient également « des dirigeants de LO, comme François Duburg dont on découvre le vrai nom au registre du commerce, Maurice Schroedt ».

Le 22 novembre 2001, un jugement en appel de la 1e chambre, section B, de la Cour d'appel de Paris condamne François Koch pour diffamation envers Robert Barcia en raison de ces affirmations, confirmant le jugement précédent rendu le 5 mai 2000 par la 1e chambre du tribunal de Grande Instance de Paris. Ce jugement fait suite à une première condamnation en diffamation de ce journaliste envers les responsables de l'EPMED et de l'OPPM pour un article paru dans L'Express (filiale du groupe Havas, lui même partie du groupe Vivendi).

Le 5 mai 2000, le Nouvel Observateur est condamné pour diffamation envers Robert Barcia.

Le 6 octobre 2005, Gabriel Cohn-Bendit et le journal Libération sont condamnés pour diffamation publique envers Lutte Ouvrière par la cour d'appel de Paris à verser 3000 euros à titres de dommages-intérêts et frais de procédure pour avoir "laissé entendre que le parti Lutte Ouvrière bénéficie d'un financement illégal", ce qui amenait le lecteur de l’article "à soupçonner une connivence entre le parti politique et (des) sociétés, la rémunération d’emplois fictifs et un recel d’abus de bien sociaux", ce que la cour estime être une "imputation diffamatoire". La cour d'appel a refusé d'accorder l'excuse de la bonne foi aux inculpés comme ceux-ci l'avaient plaidé.

Un arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 mars 2005 condamne la chaîne Canal+ (filiale du trust Vivendi) et le journaliste Victor Robert pour avoir repris ces affirmations dans le cadre de l'émission Le vrai journal de Marc Tellenne (alias Karl Zéro).

[modifier] Citations

  • « Il nous reste à incarner une autre perspective, celle d'un parti représentant réellement les intérêts politiques de la classe ouvrière. Il nous reste à œuvrer pour que se construise un parti qui ne vise pas à s'intégrer dans l'ordre social actuel, fût-ce avec la prétention stupide de pouvoir le faire évoluer dans le bon sens, mais qui, au contraire, combatte pour la transformation radicale de la société. Un parti qui reste systématiquement dans le camp des exploités, des opprimés, sans abandonner ce camp pour quelque poste ministériel que ce soit.  »
  • « Je ne travaille pas de mes mains mais je prétends tout de même être un révolutionnaire prolétarien »
  • « L'aspect fondamental de notre activité continuera à être la défense du programme d'émancipation de la classe travailleuse, le programme communiste. Défendre ce programme avant tout dans la classe ouvrière car c'est d'elle, et d'elle seule, que dépend sa réalisation future. Le défendre en particulier auprès des travailleurs qui se sont retrouvés pendant longtemps dans ou autour du Parti communiste et qui sont découragés, désorientés et à qui il faut redonner confiance et montrer que le courant communiste n'a pas disparu et que l'avenir lui appartient »
  • « Pour former un jeune et le transformer, il faut quasiment vivre avec, sortir avec lui, aller au cinéma, discuter de tout. Il faut lui proposer de le voir tous les jours, il faut être son père, sa mère, son frère, sa sœur, etc., il faut être son milieu à soi tout seul, être celui ou celle avec qui le jeune est le plus lié. Il ne faut pas seulement aimer, il faut être aimé... pour que l'on puisse tenir notre propos révolutionnaire et le brûler à notre flamme »
  • « Nous n'interdisons pas à nos militants d'avoir des enfants, écrit-il. Ce choix leur appartient, mais avoir et élever des enfants empêchera de se qualifier réellement et de se consacrer à notre lutte  »
  • « Nous voulons faire connaître ces idées à une génération de jeunes, de jeunes travailleurs aussi bien que d'étudiants. Il faut non seulement leur montrer que le monde qui est le nôtre est, d'une façon ou d'une autre, invivable pour tout le monde, que les concentrations de richesses entre quelques mains pendant que la pauvreté se généralise, sont insupportables. Comme est insupportable l'idée que la recherche du profit de quelques-uns conduit la Terre vers une catastrophe écologique autant qu'économique.  »
  • « Il est possible de transformer la société et chacun, travailleur ou étudiant, peut y jouer son rôle. Il faut éviter qu'ils soient abusés par ceux qui présentent de vieilles idées réformistes sous des couleurs modernes. Qui cherchent à les tromper en présentant quelques réformettes, une taxe par-ci, un allègement de dette par-là, comme des idées pour l'avenir, alors que tout cela est non seulement inefficace mais cautionne encore et toujours l'idée que le capitalisme serait réformable. Eh bien non, le système capitaliste n'est pas réformable.  »
  • « Nous ne savons pas plus par quelle voie, à travers quelles expériences politiques collectives, un regain de combattivité conduira une partie du monde du travail vers les idées et le programme communiste. Ce que nous savons, c'est que les idées que nous défendons aujourd'hui, il n'y a que nous pour les défendre. Alors, nous continuerons à les défendre quel que soit le sens des vents dominants. Si j'ai servi un tant soit peu à la transmission de ces idées, ma vie n'aura pas été inutile. »

[modifier] Ouvrages

  • Robert Barcia, La Véritable Histoire de Lutte ouvrière. Entretiens avec Christophe Bourseiller, Denoël, coll. « Denoël impacts », 2003, 326 p. (ISBN 2207254224)

[modifier] Bibliographie

[modifier] Références

  1. Selon le journaliste Christophe Nick (« Dr Barcia et mister Hardy », L’Express, 8 octobre 1998), « une dispute obscure amène Robert Barcia à s'éloigner de David Korner qui l'exclut après la grève de 1947 chez Renault ». Selon Robert Barcia, il a lui même démissionné en 1948, par lassitude, ce qui est confirmé dans une Mise au point concernant l'histoire du mouvement trotskiste en France parue en 1972, un des derniers textes de David Korner. D’après Robert Barcia encore, les écrits des uns et des autres (qui plus est adversaires politiques) sur sa personne, tous sortis au moment ou Arlette Laguiller pointait haut dans les sondages sont plus à rapporter au contexte politique du moment qu’à un travail d’historiens sérieux.
  2. condamnation François Koch[1]
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